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DE FONTAINE AU QUÉBEC ET SYNTHÈSE DES DIFFÉRENTS MOYENS DE LUTTE CONTRE LES POISSONS INDÉSIRABLES

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CONTRÔLE DES POISSONS INDÉSIRABLES POUR LES PLANS D'EAU À OMBLE

DE FONTAINE AU QUÉBEC ET SYNTHÈSE DES DIFFÉRENTS MOYENS DE LUTTE CONTRE LES POISSONS INDÉSIRABLES

par

Serge Tremblay

Décembre 1988

Québec

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Direction de la gestion des espèces et des habitats Direction régionale du Saguenay/Lac Saint-Jean

CONTROLE DES POISSONS INDÉSIRABLES FOUR LES PLANS D'EAU A OMBLE DE FONTAINE AU QUÉBEC ET SYNTHESE DES DIFFÉRENTS MOYENS DE LUTTE

CONTRE LES POISSONS INDÉSIRABLES

par

Serge Tremblay

Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche Québec, décembre 1988

Rapport technique

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TREMBLAY, S. 1988. Contrôle des poissons indésirables pour les plans d'eau à Omble de fontaine au Québec et synthèse des différents moyens de lutte contre les poissons indésirables. Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche du Québec, Direction de la gestion des espèces et des habitats, Direction régionale du Saguenay/Lac Saint-Jean. 62 p.

Dépôt légal

Bibliothèque Nationale du Québec 4e trimestre 1988

ISBN 2-550-19324-5

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RESIDE

Ce document présente, dans un premier temps, les bases et l'utilisation d'un modèle prédictif concernant l'invasion d'un bassin versant par des espèces de poissons indésirables pour les plans d'eau à Omble de fontaine. L'efficacité et les normes d'application de huit piscicides majeurs, le sulfate de cuivre, la roténone, le toxaphène, l'endrine, le TFM, le bayluscide, le cyanure de sodium et l'antymicine A, y sont présentées. De ces produits, seul l'emploi de la roténone est permis au Québec. A cet égard, cette étude présente la démarche à suivre lors d'une opération d'élimination des poissons indésirables à l'aide de la roténone. Pour empêcher la réinfestation d'un plan d'eau restauré, en l'absence de seuils naturels, on doit procéder à la mise en place d'obstacles au déplacement tels que des seuils, des barrières et des digues; les avantages et les contraintes rencontrés lors de l'utilisa- tion de ce type d'ouvrage sont discutés. La réduction des populations indésirables par des prélèvements massifs est évaluée et s'avère intéressante si elle est pratiquée annuellement et sous certaines conditions. Le développement d'un piscicide sélectif est présentement problématique compte tenu des coûts associés à la recherche et au développement d'un tel produit. Cependant, le contrôle biologique des poissons indésirables devrait s'avérer un champ de recherche des plus prometteur, notamment pour la Barbotte brune. L'introduction de prédateurs stériles et de proies potentielles peuvent également constituer des avenues de recherche intéressantes. La stratégie d'exploitation des populations d'Omble de fontaine doit tenir compte du type d'association piscicole présente et ainsi viser une exploitation équilibrée telle qu'elle se pratique dans les réserves fauniques et les zees du Québec.

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TABLE DES MATIERES

RESUME i i i TABLE DES MATIERES v LISTE DES TABLEAUX vii LISTE DES FIGURES ix INTRODUCTION 1

»

1. SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES 3 2. DYNAMIQUE DES INTRODUCTIONS: PROGRESSION DE L'INVASION ET

MODELE DE PRÉDICTION 4 3. MOYENS CHIMIQUES D'ÉLIMINATION DES ESPECES

INDÉSIRABLES: LES PISCICIDES 9 3.1 Description des principaux piscicides majeurs:

efficacité et normes d'application 9 3.1.1 Sulfate de cuivre 9 3.1.2 Roténone 10 3.1.3 Toxaphène 12 3.1.4 Endrine 12 3.1.5 TFM 12 3.1.6 Bayluscide 13 3.1.7 Cyanure de sodium 14 3.1.8 Antymicine A 15 3.2 La roténone: un outi1 d'aménagement 18 3.2.1 Caractéristiques et choix du produit 18 3.2.2 Utilisation du produit 19 4. OBSTACLES AU DÉPLACEMENT: SEUILS, BARRIERES ET DIGUES 25

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5. RÉDUCTION DES POPULATIONS INDÉSIRABLES PAR DES PRELEVEMENTS

MASSIFS 32 6. AVENUES DE RECHERCHE 38 6.1 Développement d'un agent de contrôle sélectif 38 6.1.1 Produit chimique ou piscicide sélectif 38 6.1.2 Contrôle biologique des espèces indésirables .... 39 6.2 Réduction des poissons indésirables par l'introduction

de prédateurs stéri les 41 6.3 Accroissement des ressources alimentaires par

1'introduction d'une proie potentiel le 42 7. STRATÉGIE D'EXPLOITATION 44 OONCLUSION 49 REMERCIEMENTS 51 LISTE DES RÉFÉRENCES 53 ANNEXE 61

(8)

vn

LISTE DES TABLEAUX

Page Tableau 1 Agents de contrôle chimique de la faune aquatique

(tiré de Schnick et al. 1986) 16

Tableau 2 Caractéristiques de fraie de certaines espèces de

poissons indésirables de la province de Québec .. 33

Tableau 3 Relations rendement-pression sur les lacs à Omble de fontaine de la réserve faunique Papineau- Labelle selon les types d'associations de pois- sons et leur position dans le bassin hydrographi-

que (tiré de Dumont 1982) 46

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IX

LISTE DES FIGURES

Figure 1 Représentation schématique de l'expansion d'une espèce de poisson introduite (modifié de Bazzaz

1986) 5

Figure 2 Représentation théorique de la vitesse de propaga- tion d'une espèce de poisson introduite dans un

bassin versant 8

Figure 3 Grille horizontale et seuil conçus pour les petits tributaires à faible pente (tiré de Biais et aj.

1987) 26

Figure 4 Double digue de roches employée en Alberta pour empêcher la dévalaison en présence d'une pente

faible (tiré de Makowecki et aj. 1978) 28

Figure 5 Barrière à poissons aménagée à partir d'un ancien

barrage (tiré de Makowecki et al. 1978) 29

Figure 6 Barrière à poissons conçue pour les petits tribu-

taires à faible pente (tiré de Makowecki et al. 30 1978)

Figure 7 Rendements des lacs à Omble de fontaine des com- munautés de poissons rencontrées dans les réserves

fauniques Saint-Maurice et Mastigouche (L. Houde, 47 corrm. pers. 1987)

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INTRODUCTION

L'utilisation des poissons vivants comme appâts pour la pêche sportive était une pratique courante dans le passé (Anonyme 1956; Wilson 1958;

Tremblay 1987), de sorte qu'on peut facilement soupçonner que cette pratique soit responsable de la plupart des introductions de poissons indésirables dans les lacs à Omble de fontaine de la province de Qué- bec. En rejetant à l'eau, après leur pêche, les appâts vivants non utilisés, les pêcheurs ensemençaient non seulement le plan d'eau qu'ils venaient de pêcher mais aussi, par extension, l'ensemble du bassin de drainage.

Certains de ces "innofensifs" menés sont cependant les plus grands compétiteurs de l'Omble de fontaine (Tremblay 1987). A ce jour, des milliers de lacs en Amérique du Nord sont devenus inaptes à soutenir leur population d'Omble de fontaine à cause de la présence de compéti- teurs (Ryder et Johnson 1972). L'impact des espèces de poissons intro- duites doit être perçu carme une des plus sérieuses menaces au maintien des populations d'Omble de fontaine. De plus, si l'homme continue d'interférer sur le milieu oligotrophe au rythme actuel, les communau- tés de Salmonidés seront réduites à des niveaux insignifiants d'ici la fin du siècle (Ryder et Johnson 1972).

L'infestation et l'invasion des lacs à Omble de fontaine par les espè- ces compétitrices entraînent une diminution importante de leur produc- tivité en Omble. Il se produit une détérioration de la qualité de pêche occasionnant une désertion progressive par les pêcheurs du plan d'eau infesté. Les pertes financières sont réelles: celles-ci peuvent être des pertes directes engendrées par la baisse de la pratique de l'activité de pêche comme telle, ou indirectes par une dévaluation des immobilisations résultant d'une réduction des possibilités en loisir.

La contamination des populations d'Omble de fontaine a été constatée dans presque tout le sud du Québec. Toutefois, il appert que l'envahissement de certains réseaux hydrographiques (ex.: bassin de la

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la rivière Petit-Saguenay dans la région de Charlevoix) caractérisés par' leurs populations allopatriques d'Omble de fontaine soit en pleine expansion et prenne des proportions considérables, voire inquiétantes pour le maintien de ce patrimoine faunique unique.

S'il est possible, en construisant des digues et des dénivellations

artificielles (seuils), de circonscrire et d'empêcher la progression

d'une espèce récemmement introduite et en pleine phase d'expansion,

que pouvons-nous faire sur les territoires à Omble de fontaine déjà

infestés? Est-il possible d'espérer que nous puissions un jour décou-

vrir un ou des outils qui nous permettraient de récupérer les popula-

tions d'Omble de fontaine que nous avons perdues? A cet égard, quelles

sont les avenues de recherche les plus prometteuses? Enfin, en atten-

dant, parmi les moyens de contrôle des espèces de poissons indésirables

existants, quelles sont les limites et les conditions d'application des

méthodes les plus efficaces?

(14)

1. SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES

Afin d'obtenir une information complète et à jour sur la littérature existante sur ce sujet, nous avons effectué une recherche bibliographi- que par ordinateur. Nous avons consulté les banques de données offertes par le système "Dialog", soit Aquaculture, Aquatic Sciences

and Fisheries Abstracts et Biosis couvrant les années 1969 à août 1987.

Les mots-clés utilisés étaient : "white sucker", Catostomus commersoni,

"catfish", "bullhead"r Ictalurus nebulosus, "rotenone", "piscicide",

"pathogen", "rehabilitation", "fish", "eradication", "species control",

"biological control", "mechanical reduction", "introduced species".

Une recherche similaire fut réalisée dans les écrits du ministère du

Loisir, de la Chasse et de la Pêche, traitant du contrôle des espèces

de poissons indésirables ou nuisibles et de la stratégie d'exploitation

de l'Omble de fontaine en présence de ces espèces de poissons.

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MODELE DE PRÉDICTION

Pour qu'un milieu ou un habitat soit envahi et colonisé par une espèce de poisson introduite, il faut selon la théorie de la stochastique démographique (Roughgarden 1986) que les éléments suivants soient rencontrés: ce sont, d'une part, un habitat minimal et, d'autre part, un propagule d'infestation de taille minimale. La taille minimale du propagule d'infestation correspond au nombre minimum d'individus requis pour garantir l'implantation et la prolifération d'une population introduite. Si cette limite n'est pas atteinte, la population se dirige inexorablement vers l'extinction. Cette taille minimale de garantie d'implantation est évaluée en plusieurs circonstances à un nombre d'individus variant entre 10 et 20. Les données concernant la détermination de la taille de l'habitat minimal existent mais ne sont pas suffisamment quantitatives pour tester les modèles de l'habitat minimal (Roughgarden 1986). On peut toutefois présumer qu'un plan d'eau d'une superficie de quelques hectares avec des conditions abioti- ques et biotiques non limitantes s'avère adéquat pour l'implantation d'une espèce de poisson jugée indésirable. Si on ajoute à cet habitat potentiel une vingtaine d'individus, nous avons les éléments favorisant une future invasion.

La figure 1 décrit l'invasion d'une espèce de poisson introduite dans

un nouvel habitat. La première étape de la colonisation d'un réseau

hydrographique consiste en l'introduction volontaire ou non d'un propa-

gule d'une espèce. Les introductions peuvent apparaître dans un site

ou dans plusieurs, à un temps donné. Quelques-unes de ces introduc-

tions agiront comme des sources à partir desquelles les envahisseurs se

propageront dans le nouvel habitat (Bazzaz 1986). Suite à l'établisse-

ment de la population, il y aura croissance et expansion de celle-ci.

(16)

INTRODUCTION ETABLISSEMENT

IMMIGRANTS PRE-ADAPTES

CROISSANCE DE LA POPULATION

EXPANSION

COLONISATEURS ENVAHISSEURS

DOMINANCE

DEPLACEMENT

AJUSTEMENT GENETIQUE

Figure 1. Représentation schématique de l'expansion d'une espèce de poisson introduite (modifié de Bassaz 1986).

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des caractéristiques morphologiques qui leur confèrent un avantage compétitif sur l'Omble de fontaine (Magnan et Fitzgerald 1984; Tremblay 1987). Ainsi, l'espèce de poisson introduite devient souvent dominante et oblige l'Omble de fontaine autochtone

1

à un déplacement de sa niche écologique.

La vitesse de prolifération et la direction que prendra la population introduite dépend d'un grand nombre de facteurs extrinsèques et intrin- sèques à celle-ci (Bazzaz 1986). Le premier principe de l'expansion des espèces de poissons introduites est que la racine carrée de la surface occupée par l'espèce augmente de façon linéaire en fonction du temps (Roughgarden 1986); ce modèle se traduit par une croissance exponentielle de la population dans un plan d'eau. La population est insérée à un point du plan, puis à mesure que les organismes se disper- sent de leur lieu de naissance, il y a expansion de la population. La croissance exponentielle se poursuit dans chaque milieu que la popula- tion colonise. La prolifération d'une population dans un habitat linéaire comme un corridor (rivière, bassin versant, vallée) ou le long d'un littoral réagit linéairement en fonction du temps. Donc, ce résultat semble être à la base de fréquentes observations où, lors de l'envahissement d'une région donnée par une nouvelle espèce de poisson, on note que la ligne de front de l'invasion progresse à une vitesse constante dans un habitat adéquat.

Prenant en considération ces éléments, nous avons simulé l'envahisse- ment d'un bassin versant. Par exemple, prenons un lac de 10 hectares contenant une population bien établie de Meunier noir ou de Ouitouche.

Ce lac est situé à l'aval d'un important bassin versant caractérisé par

une population allopatrique d'Omble de fontaine. Cette population de

Meunier noir ou de Ouitouche ne peut accéder à la section amont du

1 C'est une population dont les individus originent de parents qui

sont nés et ont vécu dans un plan d'eau naturel, et qui sont eux-

mêmes le résultat de la reproduction naturelle, sans apport de pois-

son de pisciculture.

(18)

réseau hydrographique à cause de la présence de barrages artificiels ou naturels. Avec les années, les petits barrages se détériorent à un point tel qu'ils finissent par permettre le libre passage vers l'amont.

La figure 2 montre l'expansion de cette population de poissons indésirables. Le temps zéro correspond au début de la migration vers l'amont puis celle-ci s'échelonne sur vingt-cinq années. La courbe présentée a été calculée d'après la théorie selon laquelle la racine carrée de la surface envahie augmente linéairement avec le temps. On notera que la surface envahie augmente exponentiellement avec les années. Si ces poissons indésirables viennent en contact avec des sous-bassins ou qu'ils soient tout simplement introduits de main d'homme à d'autres secteurs, il y aura une dissémination généralisée à l'ensemble du territoire dans un temps relativement court. Les plans d'eau d'une superficie inférieure à 10 hectares seront envahis très rapidement. Si l'invasion ne peut être enrayée dans les premières années, les interventions de restauration seront d'ordre ponctuel et

limitées aux plans d'eau situés en amont et aux lacs de tête.

Ce type de courbe pourrait être employé afin de circonscrire l'expan-

sion d'espèces de poissons indésirables. En terme d'aménagement, on

pourrait calculer la superficie des lacs et cours d'eau déjà envahis

puis extrapoler pour les années subséquentes l'avancement du front

d'infestation. Il faut noter que ce modèle demande à être développé

puis validé sur le terrain. Cette courbe permettrait de prévoir la

mise en place de structures physiques infranchissables (seuils) en

amont du front d'infestation tel que déterminé par la courbe quelques

années avant l'arrivée des premiers propagules de migration. Égale-

ment, à cause du phénomène de dévalaison des poissons, on peut présumer

que l'invasion sera plus rapide si l'introduction provient des lacs de

tête du bassin versant. De plus, cette courbe pourrait permettre

d'évaluer la probabilité de présence d'espèces de poissons indésirables

dans un plan d'eau donné et d'entreprendre les interventions néces-

saires car les engins de pêche expérimentaux ne permettent pas toujours

de déceler les poissons constituant le propagule d'infestation.

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10 15 ANNEES

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Figure 2. Représentation théorique de la vitesse de propagation d'une espèce de poisson introduite dans un bassin versant.

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3. MOYENS CHIMIQUES D'ÉLIMINATION DES ESPECES INDÉSIRABLES:

LES PISCICIDES

Les piseicides peuvent être classés de façon générale en piscicides mineurs et majeurs. Bien que T o n puisse trouver dans Cumming (1975) une vingtaine de références se rapportant aux piscicides mineurs, la présentation qui suit se limite essentiellement aux piscicides majeurs les plus connus. Nous traiterons ensuite plus en détail du piscicide qui actuellement est le plus utilisé au Québec: la roténone.

3.1 Description des principaux piscicides majeurs: efficacité et normes d'application

3.1.1 Sulfate de cuivre

Le sulfate de cuivre a été probablement le premier produit utilisé pour contrôler des espèces de poissons indésirables aux États-Unis (Titcomb 1914). Son effet ne se limite pas qu'aux poissons puisqu'il s'avère aussi mortel pour le phytoplancton et de nombreux invertébrés.

Smith (1935, 1940) recommande une concentration de 2 mg/1 afin d'ob- tenir un empoisonnement efficace.

On peut appliquer le sulfate de cuivre de façon sélective pour cir- conscrire son effet à des zones cibles. Allison (1964) parvenait, par exemple, à limiter la croissance d'une population de Crapet arlequin ("bluegill") dans un étang de l'Ohio par l'application de cristaux de sulfate de cuivre directement sur les nids de crapets. Ce traitement tuait les œ u f s en développement et empêchait toute nouvelle ponte.

Dans une perspective d'utilisation de ce produit, on pourrait envisager son application dans certaines zones de fraie d'espèces de poissons indésirables déjà connues ou qui peuvent être relativement bien identi- fiées; généralement, le taux de survie est assez faible de sorte qu'un empoisonnement bien synchronisé avec la reproduction devrait affecter sensiblement la structure des populations en cause.

(21)

Allison (1964) considère ce traitement comme sécuritaire et peu dispen- dieux. Toutefois, Beyerle et Williams (1967) ont été incapables d'éli- miner suffisamment d'oeufs et d'alevins de crapets pour affecter significativement la population. En terme de coûts, ces derniers rapportent qu'il a fallu quatre hommes durant une période de trois mois pour réussir l'empoisonnement d'un petit lac du Michigan traité exclu- sivement au sulfate de cuivre. De plus, ils concluaient que ce type de traitement n'était pas pratique compte tenu du succès partiel de cette méthode.

Le sulfate de cuivre ne devrait donc être utilisé que sur les sites de fraie et en période de reproduction dans une perspective de contrôle partiel.

3.1.2 Roténone

La roténone est un produit naturel provenant de racines de six genres de légumineuses soit Derris sp., Munduela sp., Spathoiogus sp., Tephrosia sp., Lonchocarpuis sp. et Milletia sp.. Ce produit entraîne la suffocation des poissons suite à une vaso-constriction des capil- laires sanguins au niveau de la circulation branchiale; de ce fait le passage des globules rouges transporteurs d'oxygène se trouve bloqué

(Biais 1988).

La roténone s'avère le piscicide le plus employé à ce jour dans l'amé- nagement piscicole (dimming 1975). Celle-ci a été utilisée à des fins de réhabilitation de populations de poissons pour la première fois en 1934 aux États-Unis et en 1942 au Québec (Cumming 1975; Prévost 1960).

Le premier traitement partiel consistait en l'empoisonnement total du

"Utah chub" retrouvé en eau peu profonde sans toutefois affecter l'Omble de fontaine confiné à la zone pélagique (Greenbank 1941).

Généralement, une solution de 0,5 à 1,0 mg/1 d'une préparation commer- ciale de roténone (5%) est jugée suffisante pour éliminer plusieurs espèces de poissons. Son action est près de trois fois plus rapide en eau acide (pH 6,5) qu'en eau alcaline (pH 8,2) pour le Mené jaune

(22)

11

(Notemigonus crysoieucas). Enfin, une augmentation de la température de l'eau de sept degrés celsius (15 à 22°C) diminuait de moitié le temps nécessaire à l'élimination du Carassin (Carassius auratus)

(Leonard 1939).

Les éliminations complètes sont communes dans les eaux acides à des concentrations de roténone comprises entre 0,25 et 0,50 mg/1 (Zilliox et Pfeiffer 1960). Toutefois, les eaux alcalines requièrent fréquem- ment plus de 1,0 mg/1 pour effectuer un empoisonnement total (Clemens et Martin 1953). Cumming (1975) signale que les Barbottes sont très résistantes à la roténone et nécessitent généralement plus de 1,0 mg/1 de roténone pour une dose mortelle. En ce qui concerne la Barbotte brune son mode de vie benthique la rend difficile à éliminer par des moyens chimiques étant donné qu'elle s'enfouit dans la vase du fond pour échapper aux situations adverses (Scott et Crossman 1974). Selon les données du U.S. Fish Control Laboratory (Cumming 1975), la toxicité de la roténone pour le Meunier noir augmente sign if icativement lorsque

la température de l'eau est élevée (17°C) et lorsque le pH est bas (6,5). Cependant, la Barbotte noire (Ictalurus mêlas) et le Carassin sont de cinq à sept fois plus résistants que la Truite arc-en-ciel (Salmo gairdneri) à des conditions similaires. On peut présumer que la Barbotte brune est aussi résistante à la roténone que la Barbotte noire, donc les concentrations utilisées par Vaménagiste pour l'élimi- nation de cette espèce devraient être d'autant plus élevées. La dose maximale recommandée pour éliminer les Ictaluridés est de 4,0 mg/1

(Bourgeois 1987). Bien que la roténone soit généralement non toxique pour les mammifères et les oiseaux, celle-ci est mortelle pour le zooplancton et d'autres invertébrés aquatiques, mais ses effets sont généralement à court terme (Davies et Shelton 1982). La toxicité de la roténone semble variable.

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3.1.3 Toxaphène

Le toxaphène est un hydrocarbure chloré. Ce piscicide a une toxicité supérieure à la roténone (Cumming 1975). Au Québec, ce produit a été utilisé pour la première fois en 1956 (Prévost 1960).

Hempnill (1954) a été le premier à utiliser le toxaphène sur le terrain. Il a éliminé la Carpe de deux lacs en Arizona à partir d'une concentration de 0,1 mg/1. Prévost (1960) parvenait à éliminer la Barbotte brune à une concentration de 2 yu.g/1. Toutefois, on a observé lors de son utilisation que ce produit était toxique pour les amphibiens, les reptiles, les oiseaux, les chiens et les invertébrés (Gebhards 1960). Le toxaphène est très persistant dans l'environne- ment. Dans un plan d'eau du Colorado, le milieu était encore toxique cinq mois après l'application du toxaphène derrière et aj. 1966). Son utilisation est déconseillée.

3.1.4 Endrine

L'endrine est également un hydrocarbure chloré considéré comme l'un des piscicides les plus puissants jamais conçu (Cumming 1975). Il a été utilisé au Québec dès 1958 (Prévost 1960). Il semblerait que la Barbotte brune puisse être empoisonnée à une concentration de 0,5 /*g/l (Prévost 1960). Cependant, ce produit est très persistant dans l'envi- ronnement. Le lac Rond à Sainte-Adèle a été empoisonné à l'endrine en 1960 et, d'après Fournier (1975), ce produit serait demeuré dans le milieu pendant plusieurs années. L'utilisation de ce piscicide est

interdite malgré son efficacité certaine.

3.1.5 TFM (3-trifluorométhyl-4-nitrophéno1)

Plusieurs milliers de composés chimiques ont été analysés afin d'obte- nir un piscicide sélectif contre la Lamproie marine des Grands Lacs. A la fin des années cinquante, l'expérimentation confirmait l'utilité du TFM comme lampricide sélectif (Applegate et aj. 1961). Le principal

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13

stade visé par le traitement était le stade larvaire fluviatile. Pour être efficace, on recommande des concentrations de 1 à 17 /*g/l de TFM en conditions naturelles. La température a peu d'effet sur sa toxi- cité. Toutefois, lorsque la température de l'eau est près du point de congélation, le temps de contact doit être augmenté.

L'intérêt que nous portons au TFM dans cette synthèse s'explique par le fait que ce lampricide agit sur d'autres espèces de poissons.

Ainsi, aux concentrations habituelles, ce produit affecte les espèces suivantes: VUmbre de vase, le Meunier noir, la Barbotte brune, la Barbotte des rapides, VOmisco, le Fouille-roche, les Dorés jaune et noir et les Chabots sp. (Cumming 1975).

De plus, le TFM n'est pas considéré comme étant persistant dans l'environnement. Kempe (1973) a observé que le TFM disparaissait des eaux dans une période de deux à quatre semaines.

Ce produit pourrait s'avérer une avenue intéressante à expérimenter dans nos eaux pour déterminer son efficacité à seconder la roténone

lors des opérations d'empoisonnement.

3.1.6 BayIuseide

En 1963, on a innové dans le contrôle de la Lamproie marine en ajoutant un synergiste au TFM, le BayIuseide (Bayer 73) lequel est considéré comme étant un molluscide. Ce produit n'est pas sélectif et est près de 43 f o i s plus toxique pour les larves de lamproie que le TFM.

Marking e t Hogan (1967) ont testé le Bayluscide chez 18 espèces de poissons. I l s ont déterminé que c e l u i - c i é t a i t sensible au pH mais pouvait être employé en tant que piscicide non sélectif. Le Bayluscide est enregistré comme un larvicide à lamproies dans une formulation granulée à 5%.

(25)

3.1.7 Cyanure de sodium

La première utilisation en Amérique de cyanure de sodium à des fins d'aménagement date de 1958 (Cumming 1975). Au Québec, le cyanure a été utilisé comme piscicide au début des années soixante-dix (Leduc et al.

1973).

Des études en laboratoire et sur le terrain ont montré que ce sel soluble et économique était efficace contre une variété de poissons, à de basses concentrations (0,5-1,5 mg/1). Un pH élevé et de basses températures diminuent sa toxicité. Cumming (1975) signale que le cyanure n'avait aucun effet notable sur les amphibiens, les reptiles et les insectes aquatiques. Cependant, Leduc et a j . (1973) ont observé une mortalité très importante de larves d'éphémères, de corixidés et de notonectidés suite à l'empoisonnement de plans d'eau au cyanure. La désintoxication d'un lac traité au cyanure de sodium s'effectue à l'intérieur de cinquante jours. Le temps nécessaire à sa neutralisa- tion est fonction de la taille du lac. Ce produit serait beaucoup moins onéreux (0,75$ vs 6,00$/1233,5 m

3

) que la roténone pour le traitement d'un même volume (Leduc et a j . 1973). Ces derniers ont traité un étang et cinq petits lacs avec du cyanure de sodium. Ils ont obtenu des résultats très satisfaisants, à l'exception d'un plan d'eau où ils suspectent un mauvais calcul du volume d'eau à traiter.

La Barbotte brune est l'espèce la plus résistante au cyanure de sodium.

On doit prendre certaines précautions et mesures de protection person- nelle lorqu'on utilise ce produit (Leduc et al. 1973). L'empoisonne- ment d'un lac de huit hectares avec des briquettes de cyanure a néces- sité la participation de 10 personnes équipées de deux chaloupes moto- risées, sur une durée de 8 heures. Elles ont arrosé de roténone la zone littorale et ont appliqué du cyanure dans les tributaires en petites quantités. Malgré les faibles coûts qu'implique l'emploi du cyanure, on est à même de se poser de sérieuses interrogations sur son

impact environnemental.

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15 3.1.8 Antimycine A

L'antymicine A est un piscicide commercialisé sous le nom de Fintrol (tableau 1 ) . Son utilisation est très importante en aménagement aquatique (Cumming 1975; Davies et Shelton 1982). Ce piscicide est produit par la bactérie Streptomyces sp. Derse et Strong (1963) ont signalé l'extrême toxicité de Vantymicine comme piscicide; une con- centration de 1 jU.g/1, leur a permis d'empoisonner le Carassin. Ces mêmes auteurs ont noté que l'antymicine A devenait inactive dans une période d'un à sept jours en laboratoire. Une série d'expériences réalisées par le U.S. Fish Control Laboratory montre que l'action de l'antymicine diminue en fonction des éléments suivants: eau très alcaline, tempérarure élevée, soleil et activité métabolique des organismes aquatiques (Cunmrcing 1975; Davies et Shelton 1982). Marking et Dawson (1972) concluaient que l'antymicine A avait une activité biologique de cinq à huit jours dans une eau acide, et de quelques heures en présence d'un pH supérieur à 8,5.

La susceptibilité à l'antymicine A varie beaucoup selon les différentes espèces de poissons. Par exemple, une concentration de 1 ^g/1 est suf- fisante pour tuer la Truite arc-en-ciel comparativement à une concen- tration de 200 ^,g/l pour la Barbotte noire. En général, les poissons à écailles sont plus sensibles que les Ictaluridés à la présence de l'antymicine A. Une concentration de 15 jitg/1 élimine complètement tous les Cyprinidés (ex.: Ouitouche), les Catostomidés (ex.: Meunier noir), les Percidés (ex.: Perchaude) et les Centrarchidés (ex.: Crapet-solei1) (Gilderhus et al. 1969).

Leduc et a j . (1973) considèrent que l'antymicine A est inefficace pour empoisonner la Barbotte. De plus, ils signalent que son coût à l'achat est près du double de celui de la roténone. L'antymicine A n'aurait pas d'effet visible sur les amphibiens, les reptiles, les oiseaux aquatiques et les insectes (Gilderhus et aj. 1969). Schnick et a j . (1986) recommandent que les humains et les animaux ne consomnent pas les poissons et l'eau traités au Fintrol. Ils recommandent aussi de ne

(27)

Tableau 1. Agents de contrôle chimique de la faune aquatique (tiré de Schnick et aj. 1986).

Produit Fabricant Utilisation

Bay"Iuseide 5 %, larvicide granulé à lamproie marine

(Bayer 73)

Mobay Chemical Corp., Kansas City, Missouri

détermination des populations de lamproie 112,5 kg/ha

Bayluscide- TFM, poudre, 'larvicide à lamproie marine

(Bayer 73, TFM)

idem lampricide

Bayluscide 70 X, poudre (Bayer 73)

idem lampricide

Chem Fish Regular (roténone)

Tifa Limited, piscicide-

Millington, New Jersey 0,5- 10 ppm de roténone à 5 X

Chem Fish Special OF (rotônone)

idem idem

Chem Fish Synergized (roténone)

idem idem

Fi ntrol-Concentrate (antymicine)

Aquabiotics Corp., Northbrook, Illinois

piscicide généraliste- 1 - 10 ppb

Noxfish Fish Toxicant (roténone)

Penick Corp., Lynhurst, New Jersey

piscicide-

0 , 1 - 5 ppm de roténone

Nusyn-Noxfish Fish Toxicant (roténone)

idem piscicide-

0,2 - 10 ppm de roténone à 2,5 X

Pro- Noxfish Fish Toxicant, liquide (roténone)

idem piscicide-

30 ppm de rotônone à 2,5 X

Powdered Cube Root (roténone)

idem piscicide-

0,5 kg de roténone à 5 X /m'3

Préntox Prenfish Toxicant (roténone)

Prentiss drug and Chemical Co., Inc., New York, New York

piscicide-

0 , 1 - 5 ppm de roténone à 5 X

Prentox Roténone Fish Toxicant (roténone)

idem idem

(28)

Tableau 1. (suite)

17

Produit Fabricant Utilisation

Prentox Synprenfish Toxicant (rotênone)

idem piscicide-

0,2 - 10 ppm de roténone à 2,5 S5

5 % Rotenone-Fish Toxicant Powder (roténone)

Tifa Limited,

Millington, New Jersey

piscicide-

0,5 kg/m3 de roténone à 5%

Roténone Solution FK-11 (roténone)

Fairfield American Corp., Newark, New Jersey

piscicide-

0 , 5 - 1 ppm de roténone à 2,5 %

Sea Lamprey Larvicide Lampricide (TFM)

Hoechst Aktien geseilschaft, Frankfurt-anMain, Germany

lampricide-

1 - 1 0 ppm, selon la qualité de l'eau

Security Fish-Tox-5 (roténone)

Woolfolk Chemical Works, Inc., Fort Valley, Georgia

piscicide-

0 , 5 - 1 ppm de roténone à 5

Security Powdered Cube (roténone)

idem piscicide-

0,5- 1,1 kg/m3

TFM Bar (TFM)

Bell Laboratories, Inc. , Madison, Wisconsin

lampricide-

1 barre / 0,007 m3 / s, 1 ppm pour 8 heures à 18 C ou 0,8 ppm pour 10 heures à 12 C

Unico Roténone Spray Powder (roténone)

Universal Cooperatives, Inc., Minneapolis, Minnesota

piscicide-

0,1- 5 ppm de roténone à 5 %

(29)

pas utiliser V e a u traitée pour l'irrigation des cultures tant que des alevins ne pourront y survivre plus de 48 heures.

Le Fintrol est employé en tant que piscicide non spécifique à une concentration de 1-10 /ig'/l. Il existe plusieurs formulations de Fintrol qui se distinguent selon la profondeur à laquelle il y a libé- ration des particules d'antymicine A. Tout comme pour la roténone, le permanganate de potassium permet de neutraliser l'antymicine A.

L'antymicine est interdite au Québec. Ce produit aurait un potentiel cancérigène (J. Paré, conrn. pers. 1987)1.

3.2 La roténone: un outil d'aménagement

La majorité des piscicides décrits précédemment ne peuvent être em- ployés de nos jours, principalement à cause de leur accumulation bio- logique dans l'environnement ou des risques de cancer qu'ils représen- tent. Les travaux de Sousa et a j . (1987) mentionnent que la roténone n'est pas cancérigène pour les mammifères et les humains. La roténone s'avère être le seul pesticide dont l'utilisation réglementée est permise. Donc, celle-ci constitue la seule solution chimique de lutte aux espèces de poissons indésirables de nos eaux à Cmble de fontaine.

3.2.1 Caractéristiques et choix du produit

La roténone est commercialisée sous diverses étiquettes et préparations (tableau 1 ) . Au Québec, on emploie généralement les marques Noxfish à 2,5 et 5 % de roténone (Biais et al. 1987; Bourgeois 1987; S. Georges, comm.pers. 1987) et le Chem Fish Roténone à 5 % de roténone (Anonyme 1983). En Alberta, on a employé trois types de roténone ayant des caractéristiques intéressantes pour nos milieux, soit le Chem Fish Regular, le Chem fish Special OF et le Chem Fish Synergized. Le Chem

1 Ministère de l'Environnement du Québec.

(30)

19

Fish Regular est composé d'une emulsion de roténone à 5 %. Il est recommandé dans les plans d'eau de faible superficie où il n'y a pas de thermocline. Ce produit peut aussi être utilisé en vue du contrôle partiel de lacs de grande superficie possédant une thermocline; il est alors efficace en surface et dans la zone littorale. Le Chem Fish Special OF est une formulation à 5 % de roténone conçue spécifiquement pour les plans d'eau profonds et froids. Il se disperse rapidement dans les axes horizontal et vertical. Cette caractéristique permet un empoisonnement complet et rapide du lac. Le manufacturier indique que son produit s'avère efficace pour les applications printanière et automnale. Le Chem Fish Synergized contient 2,5 % de roténone et 2,5 % d'un synergiste. Cette combinaison rend le produit équivalent à Vémulsion à 5 %. On le recomnande comme substitut au Chem Fish Regu- lar à cause de son coût moindre et de son action comparable. Ce pro- duit est recommandé par le fabricant pour empoisonner les lacs et étangs de faible superficie où il n'existe pas de thermocline. Etant donné que la majorité des produits disponibles sur le marché peuvent présenter, à divers degrés, des caractéristiques comparables (tableau 1 ) , le coût à l'achat est souvent déterminant dans le choix du pesticide.

3.2.2 Utilisation du produit

Le Service de la Faune de VAlberta a déterminé qu'une concentration de 1,5 mg/1 de roténone é t a i t sufffisante pour éliminer le Grand Bro- chet (Esox l u c i u s ) , l e Meunier n o i r , l e Mené de lac (Couesius plumbeus) et l'Épinoche à cinq épines (Culea inconstans) (Makowecki et a j . 1978).

Citons le cas du lac Eagle (14 ha) en Alberta, où l'empoisonnement à la roténone é t a i t devenu nécessaire. En e f f e t , ce lac avait été ensemencé 13 f o i s avec de la Truite arc-en-ciel entre 1953 et 1974 avec une moyenne de 22 000 alevins par ensemencement (1570/ha), et la qualité de la pêche sportive ne cessait de se détériorer à cause de la présence du Meunier noir. Suite à l'empoisonnement réalisé en 1975, on

(31)

a dénombré 9200 meuniers noirs, 300 menés de lac, 200 épinoches et 15 truites arc-en-ciel (Makowecki et Kraft 1978).

Le Southeastern Fish Control Laboratory du U.S Fish & Wildlife Service a utilisé le Pro-Noxfish à 2,5 % pour étudier l'effet de la roténone avec synergiste sur la faune invertébrée (Burress 1982).

Pour éliminer la Barbotte brune dans un tronçon de la rivière Ouiat- chouane, le Service de l'aménagement et de l'exploitation de la faune (SAEF) du Saguenay/Lac St-Jean a employé une concentration de 5 mg/1 de Noxfish à 5 % (feau: 18°C). L'empoisonnement a été total (Bourgeois 1987). Le SAEF de l'Estrie a éliminé la Perchaude de l'étang Baldwin avec le Chem Fish Roténone 5 % à une concentration de 0,5 mg/1. Dans la réserve faunique Rouge-Matawin, on a utilisé une concentration de 3 mg/1 de NoxFish (55&) pour éliminer la Ouitouche et le Meunier noir dans trois plans d'eau (Biais et al. 1987).

La superficie des lacs habituellement traités varie de trois à 20 hec- tares. Au-delà de cette superficie, les coûts d'empoisonnement et d'achat du piscicide deviennent trop importants.

L'utilisation de roténone liquide est recommandée parce qu'elle pose moins de problème de dissolution que la roténone en poudre. La faible solubilité de la roténone en poudre serait en partie responsable de plusieurs échecs constatés suite à des réhabilitations (M. Lemieux, comm.pers. 1987).

Chacune des régions du Québec a développé sa propre expertise en matière d'empoisonnement à la roténone. Nous présentons ici les étapes à suivre lors de la réalisation d'une opération d'empoisonnement.

L'intervention sera envisagée, d'une part, si le lac offre un potentiel intéressant en rendement d'Omble de fontaine et si d'autre part, il n'y a pas de facteur limitant autre que la présence d'espèces de poissons

indésirables.

(32)

21

La décision étant prise, et avant de procéder à l'empoisonnement, Vaménagiste doit obtenir du ministère de l'Environnement du Québec le

"certificat d'autorisation pour l'utilisation de pesticides dans un milieu aquatique", conformément à la directive n°17 de ce Ministère en vertu de l'article 22 de la Loi sur la qualité de l'environnement

(L.R.Q., c. Q-2).

Au départ, pour s'assurer que les plans d'eau que T o n désire restaurer ne soient pas réinfestés par l'amont, ils doivent être situés à la tête des eaux du réseau hydrographique ou à la limite amont de l'aire de distribution de l'espèce à éliminer. Avant de procéder à l'empoisonne- ment, on doit bien connaître la distribution des espèces présentes dans le secteur visé. L'empoisonnement du plan d'eau est généralement précédé d'une diagnose écologique du plan d'eau, comportant un inven- taire de 1 'ichtyofaune et la détermination des conditions physico- chimiques. La carte bathymétrique permettra de quantifier le volume d'eau et ainsi déterminer la quantité de piscicide nécessaire à l'empoisonnement de toutes les espèces de poissons visées. Des exemples de calcul sont donnés à l'annexe 1. Certains vont effectuer à l'hiver la mesure du pH et de l'oxygène dissous afin de déterminer les risques de "winterkill".

D'après Biais (comm. pers. 1988), l'abaissement du niveau du lac est obligatoire avant d'envisager son empoisonnement. Il existe trois façons d'abaisser le niveau d'eau, soit:

1) enlever les chaussées de castor à l'émissaire;

2) creuser un canal;

3) pomper l'eau.

Cet abaissement permet:

1) de réduire la quantité de piscicide nécessaire, d'où une réduc- tion des coûts;

2) de confiner le piscicide à une superficie réduite (cuvette);

(33)

3) d'éviter l'empoisonnement des eaux à l'aval par l'obstruction de l'émissaire lors de la journée où T o n procède à l'empoi- sonnement;

4) d'identifier tous les affluents du lac;

5) d'exonder les herbiers et la zone littorale;

6) de faciliter la construction d'un barrage de retenue des eaux et d'un seuil;

7) d'aménager des frayères;

8) à l'occasion, de nettoyer les rives ou le fond du lac (déchets domestiques);

9) de faciliter les opérations d'empoisonnement.

L'empoisonnement oblige la construction et à la mise en place de struc- tures physiques (seuils) qui empêchent les espèces de poissons indési- rables de ré infester le plan d'eau. La section 4 de ce rapport pré- sente quelques-unes de ces structures.

Après avoir abaissé le niveau du lac et juste avant de commencer son empoisonnement, on referme son exutoire pour empêcher les pertes du produit vers l'aval et permettre au plan d'eau de reprendre son niveau normal. L'empoisonnement comme tel s'effectue simultanément dans les tributaires et dans le lac lui-même.

A l'aide d'un réservoir à eau avec gicleur contenant le piscicide à la concentration adéquate, on arrose les mares d'eau isolées ainsi que les tributaires sur toute leur longueur.

L'empoisonnement du lac nécessite un équipement plus élaboré: générale- ment, on relie deux chaloupes de 4 m ensemble à l'aide de panneaux de contre-plaqué, qui vont servir de plate-forme de travail. On retrouve habituellement sur cette plate-forme une ou deux pompes à eau fonc- tionnant à l'essence, un baril (200 1) vide équipé d'un tuyau perforé (diffuseur) ou d'un boyau ayant une fonction similaire à une lance d'incendie et un baril contenant le piscicide liquide.

(34)

23

A l'aide d'un diffuseur lesté, on procède à l'épandage de la solution sous la thermocline, si elle est présente, puis on complète par l'arrosage des surfaces où, compte tenu de 1'isothermie, le mélange sera complet. Certains vont même arroser la zone riveraine du lac.

L'épandage doit s'effectuer en premier lieu dans les tributaires. Puis on empoisonne la zone littorale en se dirigeant vers le centre du lac, ainsi on empêchera les poissons de trouver refuge dans la zone litto- rale et les tributaires.

En Alberta, afin d'empoisonner les tributaires importants, on place à la tête du tributaire un baril d'épandage à débit contrôlé ("drip barrel", conçu par S.B. Pennick & Co., Jersey City, N.J., U.S.A.) con- tenant la roténone. L'épandage dans les ruisseaux secondaires est réalisé comme au Québec, à l'aide de pompes manuelles.

On doit absolument éviter l'ensemencement d'alevins au cours des deux premiers mois qui suivent l'empoisonnement car la ressource alimentaire disponible aux alevins a été fortement affectée par la roténone (J.P.

Biais, comm. pers. 1988). Celui-ci recommande d'empoisonner le lac au début de septembre. Le déversement d'alevins (stade recommandé) sera effectué obligatoirement en juin de l'année suivante, après avoir rétabli les niveaux trophiques de la chaîne alimentaire.

Pour accélérer le rétablissement des populations zooplanctoniques détruites par l'empoisonnement, populations qui servent de nourriture de base aux jeunes ombles de fontaine, certains vont ensemencer du zooplancton dans le lac traité, un à deux mois avant l'ensemencement d'Omble de fontaine (Biais et al. 1987). Un échantillonnage simple et rapide de zooplancton peut être réalisé à l'aide d'un filet de type

"Bungo" modifié. Sur un cadre rigide (0,5 m hauteur, 1,0 m largeur, 1,5 m longueur), on fixe ce filet artisanal à zooplancton constitué d'un tissu quelconque (ex.: jute). Cet engin de capture est par la suite arrimé perpendiculairement à une chaloupe, et un simple transect de 250 m au centre du lac effectué en fin d'après-midi peut donner

(35)

plusieurs litres de Holopedium gibberum. Si, de plus, on effectue des traits verticaux à l'aide d'un filet Wisconsin classique, on obtiendra une biomasse et une diversité spécifique des plus souhaitable.

Il est recommandé d'ensemencer un taux de 1 500 alevins d'Omble de fontaine par hectare dans un plan d'eau où il n'y a pas ou pratiquement pas de compétition interspécifique (Archambault et ai. 1988).

Des ensemencements réalisés dans le passé laissent supposer qu'une importante quantité d'alevins favorise l'établissement d'une bonne population. A titre d'exemple, en juin 1985, on a introduit 62 000 alevins d'Omble de fontaine de lignée hybride intraspécifique dans le lac Trap (Biais et al. 1985). A l'automne 1986, il y a eu reproduction naturelle (1 an +) puisque le 30 mai 1987, Biais (comm. pers. 1988) a observé dans la zone littorale une cinquantaine d'alevins sur une distance de 4 mètres.

L'empoisonnement total d'un plan d'eau s'avère une méthode très effi- cace pour éliminer les espèces de poissons indésirables dans les plans d'eau à Omble de fontaine et restaurer la biocénose originale. Il permet donc d'améliorer la productivité des plans d'eau en Omble de fontaine, ce qui se traduit par une pêche de meilleure qualité.

(36)

25

4. OBSTACLES AU DS'LACBCNT: SEUILS, BARRIERES ET DIGUES

Des obstacles doivent être construits ou aménagés, soit pour protéger un territoire à Omble contre une invasion possible soit, dans le cas qui nous préoccupe, pour empêcher la réinfestation d'un plan d'eau que nous avons restauré ou empoisonné. S'il y a absence de seuil naturel (chute) pour empêcher que le plan d'eau restauré ne soit réinfesté par l'aval, il faudra aménager sur son émissaire un obstacle infranchis- sable (figure 3 ) . On peut créer cet obstacle en construisant un seuil, un barrage, ou en accentuant les dénivelés déjà existants (creusage ou dynamitage de chutes, cascades ou rapides déjà existants). Paquet (1983) présente différents types de seuils utilisés en aménagement des cours d'eau. Lavoie (1986) et Dumas (1986) discutent des objectifs que

l'on doit viser lors de la mise en place d'un seuil.

Sur les cours d'eau dont la dénivellation rencontrée est inférieure à 1 m, Prévost (comm. pers. 1987) recommande l'utilisation d'une grille horizontale (figure 3 ) . On émet actuellement des doutes sur l'effi- cacité de ce type d'installation. Il semble que le grillage puisse se colmater lors de la chute des feuilles, transformant celui-ci en une sorte de tremplin vers l'amont. De plus, Biais (comm. pers. 1987) aurait observé des menés qui tentaient de franchir ce type de seuil.

En période de fortes crues, la possibilité d'une réinfestation du secteur amont devient plus forte. Biais (comm. pers. 1988) recommande de ne pas effectuer l'empoisonnement du plan d'eau si l'on a des doutes concernant l'efficacité du seuil.

Pour éviter ce genre de difficultés, on cherche souvent à restaurer des plans d'eau dont l'émissaire présente déjà une bonne pente ou de bonnes possibilités d'aménagement. Pour créer la dénivellation désirée sur ces cours d'eau, on construit le plus souvent un seuil (Biais et al. 1985, 1987). Ces seuils sont formés généralement de roches, de bois, de pruche traitée ou d'arbres situés à proximité du site. La pruche aurait une meilleure résistance que le bois non traité (J.

Boivin, comm. pers. 1987).

(37)

Figure 3. Grille horizontale et seuil conçus pour les petits tributaires à faible pente (tiré de Biais et aj. 1987).

*••*•

(38)

27

Bien que la capacité de nage ou la capacité de saut puisse varier d'une espèce à l'autre, il est généralement admis qu'une hauteur de chute nette de 2 m, sans bassin de repos au bas de celle-ci, constitue un obstacle infranchissable pour la plupart des espèces de poissons com- pétitrices de l'Omble de fontaine (J.P. Biais, comm. pers. 1987).

En Alberta, certaines barrières à poissons ("fish barrier") se compo- sent essentiellement de roches et de gravier. Nous présentons ici les trois types de barrières employées lors de l'empoisonnement du lac Carson en 1975 (Makowecki et al. 1978). Ce lac de 353 hectares possède un émissaire et plusieurs tributaires, dont l'un origine d'un lac de tête infesté d'espèces de poissons indésirables.

La figure 4 présente la barrière construite à l'émissaire de ce lac de tête. Cette barrière consiste en une double digue de gravier qui a pour fonction d'empêcher la dévalaison des espèces indésirables vers le lac réhabilité. Une membrane de géotextile qui peut être nettoyée périodiquement est placée sur le côté amont de la première digue.

La seconde barrière a été construite à l'émissaire du lac restauré (figure 5 ) . Cette structure vise à empêcher le mouvement des poissons indésirables vers l'amont. Elle est construite à même un petit barrage déjà existant. Des gabions remplis de roches ont été placés entre les structures du barrage afin d'obtenir une barrière filtrante au déver- soir avec une membrane géotextile placée sur le côté amont des gabions.

Enfin, la troisième barrière a été installée sur un petit tributaire du

lac afin d'empêcher les déplacements vers l'amont des Salmonidés en-

semencés (figure 6 ) . Cette structure est simple: les eaux sont canali-

sées dans un tuyau puis déversées du côté aval sur un marche-pied de

gabions poreux. On peut éventuellement ajouter un grillage vertical

amovible en amont de la structure.

(39)

courant

20.11 m.

ECHELLE NIL

courant

.6m

Figure 4. Double digue de roches employée en Alberta pour empêcher la dévalaison en présence d'une pente faible ( t i r é de Makowecki é t a l . 1978).

(40)

29

gabions 7 - 15 cm

courant

ECHELLE NIL VUE EN PLAN

ùs'W.s?^/

v fa- l-U

VUE EN ELEVATION

Figure 5. Barrière à poissons aménagée à p a r t i r d'un ancien barrage ( t i r é de Makowecki et a l . 1978).

(41)

GABIONS REMPLIS DE CAILLOUX 7 - 2 0 cm

GRAVIER CONCASSE 2 cm LIT DU COURS D'EAU

Figure 6. Barrière à poissons conçue pour les petits tributaires à faible pente ( t i r é de Makowecki et a j . 1978).

(42)

31

L'utilisation de barrières filtrantes s'avère une solution de rechange intéressante dans les cas où T o n observe une très faible dénivellation entre deux plans d'eau. Cette technique pourrait remplacer le seuil ou le grillage horizontal lorsque le milieu se prête mal à leur construc- tion. Cependant, le coût de construction semble relativement élevé étant donné que le coût moyen d'une barrière est d'environ 6 000 $

(Makowecki et aj. 1978).

(43)

5. RÉDUCTION DES POPULATIONS INDÉSIRABLES PAR DES PRÉLÈVEMENTS MASSIFS Une autre façon de contrôler les espèces indésirables consiste en la capture massive d'individus.

Une espèce qui possède des caractéristiques morphologiques lui confé- rant un avantage certain sur une autre espèce, en terme d'utilisation des ressources alimentaires disponibles, devrait supplanter cette dernière. Cette efficacité différentielle se visualise généralement en considérant le niveau de production des espèces en cause. Tremblay (1987) décrit ce type de relation entre l'Omble de fontaine et le Meunier noir. Magnan (1988) indique que la présence du Meunier noir dans un plan d'eau à Omble de fontaine réduit de près de la moitié la production en Omble de fontaine. Une réduction importante de la biomasse de l'espèce indésirable permettrait de diminuer la pression écologique découlant d'une relation interspécifique défavorable à

l'Omble de fontaine.

Selon Hanson et a j . (1983) les prélèvements massifs de Barbotte noire présentent certains avantages par rapport à l'empoisonnement: 1) la méthode est moins coûteuse; 2) on peut assurer un meilleur contrôle sur les tailles et le nombre des espèces enlevées; 3) la mortalité connue des espèces non visées que T o n désire protéger est faible; 4) une pêche intéressante s'avère disponible dans un laps de temps plus court que celui habituellement requis suite à des traitements chimiques; 5) le prélèvement massif peut se faire sans assistance technique et 6) les bénéfices découlant d'une réduction mécanique peuvent être à long terme dans la mesure où celle-ci est appliquée de façon rigoureuse.

Un des moyens les plus rentables en fonction des efforts investis, consiste en la pêche intensive d'adultes à l'aide de cages-trappes ou de filets-trappes. Pour optimiser les rendements de capture, on recom- mande d'effectuer les pêches principalement au cours de la période de reproduction des espèces de poissons indésirables dont on vise à réduire les effectifs (tableau 2 ) .

(44)

33

Tableau 2. Caractéristiques de fraie de certaines espèces de poissons indésirables de la province de Québec.

Espèce Période t eau Milieu Substrat

Meunier noir 15 avril- 20 juin i 10 C ruisseau et littoral de lac (Catostomus commersoni)

sable, gravier, roche

3 Ouitouche 15 mai- 15 juin (Semotilus corporal is)

^ 12°C eau rapide gravier et roche

1 Mulet à cornes 15 mai- 15 juin ^ 12 C cours d'eau tranquille (Semotilus atromaculatus)

gravier

c Mené à nageoires rouges

(Notropis cornutus)

fin mai- 20 juin 15-18 C eau rapide- littoral de lac gravier, haut-fond graveleux

5 Barbotte brune a

(Ictalurus nebulosus)

juin-juillet t- 21 C zone lenthique, anse, baie, vase, sable, embouchure de ruisseau végétation

6 Perchaude

(Perça flavescens)

15 avril- 15 mai 9-12,2 C haut-fond, tributaire végétation, sable et gravier

a La Barbotte brune est la seule espèce à assurer des so^ns parentaux aux oeufs et aux larves.

1-6 Indice relatif de compétition représentant dans un ordre croissant l'impact sur l'omble de fontaine.

(45)

Johnson (1977) a enlevé près de 85 % de la biomasse estimée (34 kg/ha) de meuniers noirs adultes d'un lac du Minnesota (245 ha), à l'aide de pêches effectuées sur une période de 12 jours lors de la période de reproduction. La réduction mécanique s'est poursuivie à chaque prin- temps subséquent, afin d'éliminer le plus d'adultes possible. Bien que le nombre de jeunes meuniers noirs augmentait d'environ 17 fois, l'indice de capture des meuniers adultes demeurait de beaucoup infé- rieur à ce qu'il était au début de la réduction. Également, il y a eu une augmentation de la consommation d'éphémères par la Perchaude, qui sert de proie au Doré, puis le taux de croissance et la taille de la population de Doré ont augmenté. L'augmentation du nombre de juvéniles démontre qu'il est indispensable de pratiquer la réduction mécanique annuellement pour contrôler l'impact du Meunier noir sur les espèces sportives. Si ce n'est pas le cas, la population de Meunier noir augmentera en proportion du nombre de juvéniles présents. Ainsi, l'effet bénéfique escompté sera plutôt néfaste à moyen terme pour les populations de poissons sportifs.

Hanson et a j . (1983) ont réduit mécaniquement une population de Bar- botte noire à l'aide de 5 filets-trappes du 30 mars au 15 avril (eau libre), et de 10 filets du 16 avril au 6 mai et du 10 au 19 mai. Les filets étaient disposés perpendiculairement à la zone littorale et distancés de 209 m. Les filets étaient relevés à tous les 1,8 jour.

Le meilleur taux de capture a été enregistré avant la période de repro- duction à une température de l'eau de 10°C en surface. La productivité en Barbotte noire a été très affectée par ce moyen de contrôle puisque la population a diminué de plus de 80 % de ce qu'elle était, passant de 272 individus/ha en 1977 à 30 et 57 individus/ha en 1979 et 1980 res- pectivement. Le comportement reproducteur de la Barbotte brune est semblable à celui de la Barbotte noire avec qui elle peut s'hybrider (Scott et Crossman 1974). Cette étude montre que par des prélèvements massifs, il est possible de réduire significativement et de maintenir à des niveaux de densité faible les populations de Barbotte brune.

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Rutledge et Barron (1972) ont résumé 76 études traitant de la réduction des populations. Ils notent que le succès obtenu dépend généralement de l'intensité et de la persistance des pêches. La fécondité des espèces de poissons indésirables peut mettre en échec nos efforts s'ils ne sont pas soutenus ou s'ils sont interrompus. Naturellement, les efforts de prélèvement doivent être optimisés durant la période majeure de reproduction et poursuivis dans les années suivantes, sinon les efforts investis se transformeront en une pure perte de temps.

Les retraits massifs ou l'enlèvement d'une partie importante de la biomasse produit un vide biologique dans le plan d'eau. Ce vacuum est habituellement comblé par l'espèce la plus prolifique, souvent celle-là même que T o n cherche justement à éliminer (Dumont 1981). Conséquem- ment au vide créé par la réduction de populations d'espèces de poissons indésirables, on doit effectuer des ensemencements d'Omble de fontaine le plus tôt possible afin, d'une part, d'utiliser la ressource ben- thique qui est abondante de mai à juin et d'autre part, de combler ce vide biologique par l'Omble de fontaine. Cet ensemencement devrait limiter la prolifération et l'action néfaste des espèces indésirables à moyen terme.

Le succès d'une opération de réduction de populations de poissons indé- sirables semble aussi lié en partie à la superficie du plan d'eau.

Par exemple, une réduction effectuée sur les frayères d'un lac de 658 ha de la région de Montréal a permis d'éliminer 225 600 poissons indé- sirables, soit une biomasse de plus de 26 465 kg (J.P. Biais, comm.

pers. 1987). A la suite de cette opération, 10 000 à 20 000 fretins (10-15 cm) d'Omble de fontaine ont été ensemencés.

En 1986, le SAEF de Montréal commençait un projet quinquennal de cap- ture d'espèces de poissons indésirables au lac Cinq Doigts de la réserve Rouge-Matawin. Le Meunier noir et la Oui touche ont été cap- turés et éliminés sur les frayères à l'aide de roténone. Ainsi, Vuti-

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lisation de 350 ml de roténone a permis d'éliminer dans un tributaire près de 35 000 meuniers noirs en juin 1987. Le vide créé a été comblé avec des fretins d'Omble de fontaine âgés de 1 an +, de lignée indigène ensemencés à l'automne. En 1987, les rendements (1 000 kg/ha) associés à une augmentation de la pression de pêche étaient plus élevés compara- tivement à ceux observés avant les prélèvements (500-600 kg/ha). Il est à noter que T o n consacre seulement une journée pour empoisonner les tributaires durant le pic de montaison des espèces de poissons indésirables et effectuer l'échantillonnage des captures (J.P. Biais, comm. pers. 1988).

A la suite de la capture de poissons indésirables sur cinq lacs d'une superficie moyenne de 238 hectares, Thomassin (1981) considère les prélèvements massifs sur les plans d'eau de plus de 50 ha comme étant inutiles et innapropriés. Le lac Jumeau (48 ha) de la réserve de Portneuf a fait l'objet d'un contrôle des cyprins de 1977 à 1980. A chaque année, la biomasse moyenne des cyprins était réduite de près de 170 kg. Le rendement en Omble de fontaine est passé de 1,24 kg/ha à 2,58 kg/ha en 1980 (Thomassin 1981).

La majorité des biologistes et techniciens rencontrés considèrent que ce type de contrôle, demandé par les associations de pêcheurs ou les pourvoyeurs, ne donne que de pauvres résultats quoique peu de données soient disponibles à ce sujet. Les résultats mitigés de ce type d'intervention au Québec ne sont pas nécessairement le reflet de la valeur réelle de la réduction mécanique.

De ce qui précède, il appert que les prélèvements massifs d'espèces de poissons indésirables peuvent donner de bons résultats ou permettre de rééquilibrer la situation de l'Omble si les conditions suivantes sont bien remplies:

1) le lac devrait posséder des zones de reproduction pour les espèces indésirables bien définies et propices à l'utilisation des cages;

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2) le lac devrait offrir un potentiel de production intéressant pour l'Omble de fontaine, et la baisse de rendement observé en Omble de fontaine devrait être la conséquence évidente de la présence d'espèces de poissons indésirables et non de facteurs physiques

limitants;

3) des ressources humaines et matérielles suffisantes devraient être prévues annuellement pour poursuivre cette intervention à moyen et à long terme, et pour en faire le suivi et l'évaluation;

4) la réduction de populations d'espèces de poissons indésirables doit être accompagnée d'ensemencements massifs d'Omble de fontaine afin de combler le vide biologique créé par l'enlèvement des espèces de poissons indésirables.

De plus, on doit identifier précisément les zones d'interventions privilégiées que sont les émissaires et les tributaires et limiter le contrôle à la seule période de reproduction des espèces de poissons indésirables dont on vise à diminuer la production. Pour le contrôle de la Barbotte, il serait préférable d'effectuer les captures avant la période de reproduction, car son comportement implique la construction d'un nid surveillé par les géniteurs limitant considérablement ses déplacements à ce moment.

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6. AVENUES DE RECHERCHE

Ce volet traite principalement des avenues de recherche les plus prometteuses dans le contrôle des espèces de poissons indésirables ou dans la restauration des habitats à Omble de fontaine.

6.1 Développement d'un agent de contrôle sélectif

Les principales familles d'espèces de poissons indésirables pour les plans d'eau à Omble de fontaine sont les Cyprinidés, les Catostomidés et les Ictaluridés (tableau 2 ) . Le meilleur moyen de contrôle de ces espèces devrait être hautement spécifique tout en ayant le moins d'effet possible sur l'environnement. La découverte d'un produit miracle qui éliminerait par exemple le Meunier noir, sans toutefois entraîner d'effet toxique sur l'Omble de fontaine, constituerait un outil d'aménagement fortement souhaité. Malheureusement, ce produit miracle n'existe pas présentement.

Cependant, les exemples suivants démontrent que la recherche effectue certaines percées actuellement dans les domaines des luttes chimiques et biologiques sélectives. D'après Schnick et aj. (1986), la création de nouveaux agents de contrôle sélectif s'avère nécessaire.

6.1.1 Produit chimique ou piscicide sélectif

La squoxine est un piscicide sélectif qui a été développé et enregistré par les chercheurs de l'Université de TIdaho afin de neutraliser la prédation de la Sauvagesse du Nord ("squawfish"), Ptvchochei lus orego- nensis, sur les juvéniles de Salmonidés (Cunning 1975). Ce produit est de trois à cent fois plus toxique pour la Sauvagesse que pour les quatre espèces de Salmonidés testées. Lorsque la squoxine est appli- quée à une concentration de 0,1 mg/1, elle élimine non seulement la Sauvagesse mais aussi quelques cyprins sans pourtant affecter les saumons et les truites. Le produit est considéré comme non toxique pour les canards, les moutons et le zooplancton. La squoxine est

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sélective mais non répulsive pour la Sauvagesse dans les ruisseaux à truite et s'avère non persistante dans l'environnement. Ce pesticide n'est pas enregistré en tant que piscicide (Currming 1975).

Dans la possibilité où la squoxine serait disponible, ce produit pré- sente des caractéristiques telles qu'il laisse miroiter une possibilité d'application de ce piscicide pour le contrôle des Cyprinidés, comme la Ouitouche et le Mulet à cornes, sans affecter l'Omble de fontaine.

On fonde beaucoup d'espoir sur le développement d'un catostomicide, soit un piscicide spécifique au Meunier noir. Leif L. Marking (comm.

pers. 1987)' spécifie que l'utilisation limitée de piscicides sélectifs n'est pas économiquement possible à cause des coûts engendrés par le développement et l'enregistrement de ce produit. Le coût d'enregistre- ment d'un piscicide aux États-Unis peut excéder 10 millions de dollars, et l'industrie privée n'est pas très disposée à supporter le développe- ment d'un piscicide ayant une faible valeur commerciale. Il serait donc actuellement utopique d'espérer que la recherche et le développe- ment d'un nouveau piscicide sélectif ou à usage spécifique puisse se faire par l'industrie privée.

6.1.2 Contrôle biologique des espèces indésirables

Le contrôle biologique des espèces indésirables, notarmient la Barbotte brune, présente des possibilités très prometteuses pour l'avenir.

Aux États-Unis, on a découvert une bactérie, Edwardsielia ictaluri, qui cause la septicémie entérique chez les cultures de Barbue de rivière (Ictalurus punctatus). Depuis sa découverte en 1977, cet organisme a entraîné des pertes de plusieurs millions de dollars et s'avère être la principale cause de mortalité dans cette industrie. En

1 U.S. Fish & Wild. Serv. National Fisheries Research Center.

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