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Oncologie : Article pp.100-107 du Vol.8 n°2 (2014)

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ARTICLE ORIGINAL /ORIGINAL ARTICLE DOSSIER

Comparaison des attentes de parents et grands-parents atteints de cancer à l ’ égard d ’ un groupe de soutien collectif comprenant des patients, leurs enfants et petits-enfants mineurs

Comparison between Parents and Grandparents with Cancer in Expectations of an Existing Collective Support Group for them and the Underage Grandchildren

V. Adam · R. Kitzmann · V. Harter · M. Rios · J. Raft

Reçu le 28 février 2014 ; accepté le 09 juin 2014

© Springer-Verlag France 2014

RésuméObjectif: Évaluer les attentes de parents et de grands- parents tous atteints d’un cancer vis-à-vis d’un groupe de sou- tien collectif avec leurs enfants et petits-enfants mineurs.

Méthode : L’étude a été réalisée au moyen d’un question- naire soumis à 116 patients.

Résultats: Les attentes et les besoins d’information ne diffè- rent pas fondamentalement suivant le degré de parenté. Il existe un défaut de connaissance des grands-parents malades sur l’existence du groupe de soutien.

Conclusion: Ces constats invitent à une meilleure informa- tion des sujets malades et de leur descendance quel que soit le degré de parenté.

Mots clésGroupe de soutien · Grand-parent · Enfant · Cancer

AbstractAim: Assessment of the difference between parents and grandparents with cancer in expectations of an existing support group for them and the grandchildren.

Procedure: A questionnaire was submitted to 116 adult patients.

Results: The expectations and needs of providing informa- tion about the support group to an underage child did not differ between sick parents and grandparents. But grandpa- rents seem to have a lack of knowledge about the existence of the support group.

Conclusion: These reports invite to a discussion about the necessity of providing better information to the sick subjects and their children.

KeywordsSupport group · Grandparent · Children · Cancer

Introduction

Le cancer est une maladie « familiale ». Il a des répercus- sions médicales sur le patient, mais également des répercus- sions psychiques sur les proches [1]. Souvent, par désir de protection, les adultes écartent les enfants des discussions concernant le cancer [2]. L’absence de dialogue et de compréhension peut conduire certains enfants à des troubles du comportement [3]—comme des troubles du sommeil, de l’alimentation, des apprentissages ou bien encore une délin- quance, une toxicomanie—et à des troubles relationnels tels que le retrait, l’agressivité ou des troubles de l’identification, comme la honte et le dégoût [4]. Le risque de souffrance psychique à long terme est accru, avec possibilité de déve- lopper une anxiété persistante, une réelle dépression ou des difficultés à s’occuper de ses propres enfants [1,5,6].

Une étude rétrospective réalisée chez des enfants finlandais a montré qu’il existait une augmentation significative des

V. Adam (*) · R. Kitzmann

Service interdisciplinaire de soins de support pour patients en oncologie, psycho-oncologie, Institut de cancérologie de Lorraine Alexis-Vautrin, 6, avenue

de Bourgogne, F-54511 Vandœuvre-lès-Nancy, France e-mail : v.adam@nancy.unicancer.fr

V. Harter

Département de statistiques médicales,

Institut de cancérologie de Lorraine Alexis-Vautrin, Nancy Université, 6, avenue de Bourgogne, F-54511 Vandœuvre-lès-Nancy, France M. Rios

Département d’oncologie médicale,

Institut de cancérologie de Lorraine Alexis-Vautrin, Nancy Université, 6, avenue de Bourgogne, F-54511 Vandœuvre-lès-Nancy, France J. Raft

Service danesthésie-réanimation,

Institut de cancérologie de Lorraine Alexis-Vautrin, Nancy Université, 6, avenue de Bourgogne, F-54511 Vandœuvre-lès-Nancy, France DOI 10.1007/s11839-014-0468-4

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séjours en centre psychiatrique chez des enfants ayant un proche atteint d’un cancer [1]. Le risque de souffrance psy- chique pour les enfants et la prise en charge deviennent ainsi un véritable problème de santé publique.

L’amorce du dialogue familial autour de cette réalité peut être déclenché dans le cadre de groupes de soutien aux enfants de patients atteints de cancer, ouverts à leurs parents et grands-parents, comme celui que nous avons mis en place depuis six ans à l’Institut de cancérologie de Lorraine : les

« Mercredire » [7]. Il s’inspire du groupe mis en place à l’institut Gustave-Roussy (Centre de lutte contre le cancer, Villejuif), il y a une vingtaine d’années [8].

En France, l’âge moyen au diagnostic de cancer est de 67 ans pour l’homme et de 64 ans pour la femme [9]. Pour cette tranche d’âge, le patient est alors souvent un grand- parent. Des études sociologiques montrent que la relation entre grands-parents et petits-enfants a évolué vers une plus grande proximité durant ces dernières décennies [10–12]. Le décès d’un grand-parent peut accentuer l’angoisse de la mort pour un adolescent [13] : qu’en est-il alors de l’information délivrée à leur petit-enfant ?

L’objectif principal de ce travail est de connaître les aspi- rations des parents et des grands-parents malades en termes de besoin, d’attente et de modalités de fonctionnement d’un groupe de soutien.

Patients et méthodes

L’étude a été réalisée à partir d’un questionnaire « d’un jour », autorempli par les patients adultes soignés à l’Institut de can- cérologie de Lorraine (ICL). Il a été élaboré par les animateurs du groupe les « Mercredire », soumis à correction et valida-

tion par les membres de l’unité de psycho-oncologie du ser- vice interdisciplinaire de soins de support pour patients en oncologie de l’établissement (SISSPO) et a reçu l’aval du comité institutionnel des usagers de la santé. Le questionnaire (Annexe A) a été adressé à tous les patients hospitalisés dans l’établissement les 17 et 24 janvier 2012. Les réponses sont anonymes. La présentation du groupe de soutien ouvert aux enfants mineurs de patients atteints de cancer et à leurs parents et grands-parents (« Mercredire »), proposé dans l’établisse- ment, est faite en début de questionnaire (Tableaux 1–3).

Cette introduction à l’enquête explique brièvement les objec- tifs, les intervenants (psychologue, médecin et animateur art- thérapeute) et l’organisation en trois mercredis consécutifs.

Une session se compose de :

premier mercredi : groupe animé par une psychologue et un médecin réunissant enfants et parents ;

deuxième mercredi : les enfants avec la psychologue et la musicothérapeute autour de supports musicaux, contes, dessins…

troisième mercredi : les enfants et les parents avec la psy- chologue et le médecin pour reprendre ce qui a été dit.

Chaque rencontre se termine par un goûter pris en commun.

Habituellement, les patients sont informés de l’existence de ce groupe par l’intermédiaire d’un affichage ou d’une communication orale délivrée par les soignants. L’inscrip- tion au groupe est faite de façon volontaire [7], un engage- ment de participer aux trois mercredis consécutifs est obtenu oralement avec chaque famille.

Les 17 questions de l’enquête sont ouvertes et fermées.

Elles portent sur la connaissance de l’existence des « Mercre- dire » (questions [Q] 1, 2 et 4), le degré de parenté avec un

Tableau 1 Connaissance de lexistence des « Mercredire » Q1Q2 : Avez-vous entendu

parler des Mercredire ?

« Parents malades » (n= 21)

« Grands-parents malades » (n= 30)

« Patients sans enfant mineur » (n= 65)

p-valuea

Numéro de répartition No1 No2 No3 No1 vs

No3

No1 vs No2

Oui 81 % (n= 17/21) 37 % (n= 11/30) 55 % (n= 36/65) 0,07 0,004

Non 19 % (n= 4/21) 60 % (n= 18/30) 43 % (n= 28/65)

Ne se prononce pas 0 % (n= 0/21) 3 % (n= 1/30) 2 % (n= 1/65) Si oui, par quel

biais ?

(choix multiples)

Information orale

76 % (n= 13/17) 36 % (n= 4/11) 11 % (n= 4/36) 0,01 0,05 Information

écrite

82 % (n= 14/17) 100 % (n= 11/11) 92 % (n= 33/36) NS NS Autres 6 % (n= 1/17) 9 % (n= 1/11) 14 % (n= 5/36) NS NS Q1 : question 1 ; Q2 : question 2 ; NS : non significatif.

aTest non paramétrique de Fisher, lesp-valuessupérieures à 0,15 ne sont pas présentées.

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enfant mineur (Q3), le besoin et les attentes envers ce groupe (Q5 à 11), les modalités d’organisation (Q12 à 14), le souhait d’une participation ultérieure (Q15 et 16). Enfin, la dernière question (Q17) donne la possibilité aux participants d’émet- tre des remarques, de faire des suggestions et des proposi- tions d’amélioration.

L’analyse des données de l’enquête est descriptive et comparative selon le degré de parenté. Les variables catégo- rielles ont été comparées par l’utilisation d’un test non para- métrique de Fisher. Le seuil de risque retenu pour qualifier une association significative est fixé à inférieur à 0,05. Les résultats sont présentés sous forme de pourcentage pour les Tableau 2 Les attentes (questions 5 à 11).

« Parents malades » (n= 21) « Grands-parents malades » (n= 30)

p-valuea

Q5 : Pensez-vous avoir besoin dun tel temps déchanges ? NS

Oui 38 % (n= 8) 17 % (n= 5)

Non 57 % (n= 12) 63 % (n= 19)

Sans réponse 5 % (n= 1) 20 % (n= 6)

Q6 : Pensez-vous que ce groupe puisse répondre à vos attentes ? 0,06

Oui 52 % (n= 11) 17 % (n= 5)

Non 43 % (n= 9) 53 % (n= 16)

Sans réponse 5 % (n= 1) 30 % (n= 9)

Q7 : Si oui, en quoi ?(réponse simple) NS

Expliquer, comprendre, rassurer, parler 45 % (n= 5/11) 80 % (n= 4/5)

Gérer la maladie 9 % (n= 1/11) 0 % (n= 0/5)

Faire parler lenfant et en rencontrer dautres

9 % (n= 1/11) 0 % (n= 0/5)

Sans réponse 36 % (n= 4/11) 20 % (n= 1/5)

Q8 : Si non, pourquoi ?(réponses multiples) NS

Distance géographique 11 % (n= 1/9) 31 % (n= 5/16)

Gestion familiale déjà faite 44 % (n= 4/9) 25 % (n= 4/16)

Jeune âge de lenfant 11 % (n= 1/9) 19 % (n= 3/16)

Difficulté de parler de la maladie 0 % (n= 0/9) 13 % (n= 2/16)

Manque de temps 0 % (n= 0/9) 6 % (n= 1/16)

Pas dattente signalée 11 % (n= 1/9) 0 % (n= 0/16)

Suivi psychologique en dehors de lhôpital 11 % (n= 1/9) 0 % (n= 0/16)

Sans réponse 33 % (n= 3/9) 25 % (n= 4/16)

Q9 : Auriez-vous des craintes à y participer ? 0,1

Oui 14 % (n= 3) 0 % (n= 0)

Non 62 % (n= 13) 57 % (n= 17)

Sans réponse 24 % (n= 5) 43 % (n= 13)

Q10 : Dans votre parcours thérapeutique, à quel moment jugez-vous pertinent dy participer ? (réponse simple)

NS

Début de traitement 43 % (n= 9) 13 % (n= 4)

En cours de traitement 0 % (n= 0) 7 % (n= 2)

Échec de traitement 5 % (n= 1) 3 % (n= 1)

Lorsque la communication intrafamiliale devient difficile

5 % (n= 1) 3 % (n= 1)

Sans réponse 47 % (n= 10) 73 % (n= 22)

Q11 : Le fait de rencontrer dautres familles dans la même situation que vous, est-il ? NS

Important/souhaité 48 % (n= 10) 33 % (n= 10)

Peu important/non souhaité 29 % (n= 6) 23 % (n= 17)

Sans réponse 24 % (n= 5) 43 % (n= 13)

NS : non significatif.

anon paramétrique de Fisher, lesp-valuessupérieures à 0,15 ne sont pas présentées.

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variables qualitatives. L’analyse statistique des données a été faite avec le logiciel R version 2.15.3 (2013) [R Foundation for Statistical Computing, Vienna, Austria].

Résultats

Effectifs de l’enquête

Le taux de réponse à notre enquête est de 47 %, correspondant à un total de 122 patients adultes sur 260 questionnaires dis- tribués. Six patients ont été exclus de l’analyse : trois patients hospitalisés avaient déjà participé aux « Mercredire », et trois patients n’avaient pas précisé leurs liens de parenté. Les 116 patients restants sont répartis en trois groupes (Fig. 1) :

« parents malades » (n= 21, soit 18 %) ;

« grands-parents malades» (n= 30, soit 26 %) ;

« patients sans enfant mineur » (n= 65, soit 56 %).

Information de l’existence du groupe de soutien Les moyens de communication sont rassemblés en trois enti- tés (Tableau 1) :

information orale (par le médecin référent, par les soi- gnants, par les proches et par l’espace Rencontre Informa- tion) ;

information écrite (affiches et bulletins d’inscription) ;

autres moyens de communication.

L’existence des « Mercredire » est plus souvent connue par les parents (81 %) que par les grands-parents malades (37 %) (p< 0,004).

L’information orale est plus souvent donnée aux parents (76 %) qu’aux grands-parents malades (36 %) (p< 0,05) et qu’aux patients sans enfant mineur (11 %) (p < 0,01) (Tableau 1). L’information écrite est apportée de façon équi- valente entre les patients (Tableau 1), le plus souvent par l’intermédiaire des affiches (88 %). La télévision interne de la structure hospitalière est un autre moyen de communica- tion. Les patients sans enfant mineur (n= 65) ont été exclus de l’analyse des résultats, car leur statut constituait un critère de non-inclusion.

Attentes selon le degré de parenté

Il n’y a pas de différence en fonction du degré de parenté sur le besoin et les attentes (Q5 à 11) (Tableau 2), l’appréhension des modalités de fonctionnement (Q12 à 14) (Tableau 3) et la participation éventuelle (Q15) (Tableau 3).

Lorsque l’on regroupe parents et grands-parents malades, 70 % d’entre eux (n = 31/44) ne ressentent pas le besoin d’accès à ce groupe d’échange (Q5).

Cinquante-neuf pour cent (n= 24/41) des patients estiment que ce groupe ne peut pas répondre à leurs attentes (Q6), et 85 % (n= 33/39) ne souhaitent pas y participer (Q15), même s’ils n’ont pas de crainte (Q9) pour 91 % d’entre eux (n= 30/33). Notre faible effectif et le type de questionnaire utilisé ne permettent pas d’établir de différences statistiquement Tableau 3 Appréhension de lorganisation (questions 12 à 14) et participation éventuelle aux « Mercredire » (questions 15).

« Parents malades » (n= 21) « Grands-parents malades » (n= 30) p-valuea

Q12 : Les horaires vous semblent-ils appropriés ? NS

Oui 48 % (n= 10) 37 % (n= 11)

Non 29 % (n= 6) 7 % (n= 2)

Sans réponse 24 % (n= 5) 57 % (n= 17)

Q13 : Le jour vous semble-t-il approprié ? NS

Oui 52 % (n= 11) 37 % (n= 11)

Non 33 % (n= 7) 7 % (n= 2)

Sans réponse 14 % (n= 3) 57 % (n= 17)

Q14 : La durée vous semble-t-elle appropriée ? NS

Oui 62 % (n= 13) 33 % (n= 10)

Non 19 % (n= 4) 3 % (n= 1)

Sans réponse 19 % (n= 4) 63 % (n= 19)

Q15 : Envisagez-vous de participer à ce groupe ? NS

Oui 14 % (n= 3) 10 % (n= 3)

Non 71 % (n= 15) 60 % (n= 18)

Sans réponse 14 % (n= 3) 30 % (n= 9)

NS : non significatif.

aTest non paramétrique de Fisher, lesp-valuessupérieures à 0,15 ne sont pas présentées.

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significatives pour certaines questions, mais certains résultats restent intéressants : ainsi, 38 % des parents pensent avoir besoin d’un temps d’échanges versus 17 % des grands- parents malades, et 52 % des parents pensent que ce groupe pourrait correspondre à leurs attentes versus 17 % des grands- parents. L’analyse des réponses ouvertes permet de relever un besoin d’explications, de compréhension, de réassurance et de parole pour 82 % des répondants (Q7). Les arguments ainsi avancés en Q8 par les grands-parents sont principale- ment que l’information donnée à leurs petits-enfants est déjà donnée dans la majorité des cas par les parents eux-mêmes (32 %). La parole autour du cancer est déjà établie au sein de la famille. Par ailleurs, un frein avancé fréquemment par les répondants est la distance géographique (24 %). Il est en effet parfois difficile aux familles de se déplacer pour bénéficier de soins de support. Les grands-parents rapportent aussi des constellations familiales éclatées sur le territoire, augmentant la difficulté de se rassembler en un lieu pour parler ensemble du cancer. Les autres raisons invoquées sont un âge d’enfant inférieur à deux ans ressenti comme un frein (16 %), des difficultés de parler de la maladie, par manque de temps, par un suivi psychologique en dehors de l’hôpital, par une fin de traitement et par la fatigue (Q8).

À travers la question Q9, nous souhaitions savoir si le faible effectif des familles accueillies ne résultait pas égale- ment d’une crainte à participer : angoisse de mettre des mots ? de poser des questions ? d’entendre des réponses ? de rencontrer d’autres familles ? un « psy » ? un médecin ?… Les contingences organisationnelles résument l’essentiel des

craintes à participer au groupe, mais il est aussi difficile dans un questionnaire de nommer et de retracer de façon brève ses angoisses.

La question ouverte portant sur les raisons de l’absence de participation (Q16) comportait trop d’hétérogénéité dans les réponses pour pouvoir être exploitée. Les parents et grands- parents expriment une préférence pour participer au groupe en début de traitement dans 68 % des cas (Q10).

La question sur la possibilité de rencontrer d’autres famil- les (Q11) a été regroupée en deux classes : « souhaité et important » et « non souhaité, peu important ». Quarante- sept pour cent des patients trouvent important ou souhaitable de rencontrer d’autres familles (Q11).

L’organisation présentée ne semble pas être un frein. Les patients trouvent les horaires, le jour et la durée appropriés (Q12 à Q14) dans respectivement 72, 71 et 82 % des cas. La question ouverte sur les remarques, suggestions et propositions éventuelles (Q17) n’a fait l’objet que de quatre réponses. Trois patients expriment leur accord avec la démarche, et un parent souhaite la rendre obligatoire en début de prise en charge.

Discussion

Cette enquête montre qu’il existe un défaut de connaissance du grand-parent malade sur l’existence du groupe au sein de l’établissement. Cela explique la grande disparité quant aux patients participant aux « Mercredire » : une majorité de parents (90 %) pour une minorité de grands-parents (10 %) Fig. 1 Flow chart

(6)

[7]. Cette méconnaissance semble liée essentiellement à une information orale du soignant plus directement orientée vers le parent (76 %) que vers le grand-parent malade (36 %) ; cette différence n’existe pas pour l’information écrite. Dès lors que le patient est jeune avec des enfants en bas âge, nous émettons l’hypothèse qu’il semble procéder pour le soignant comme une sorte de « fascination » ou pour le moins une identification projective dans cette réalité « parentalité– maladie » qui les pousse à donner cette information plus systématiquement aux parents qu’aux grands-parents mala- des. Cela serait alors une sorte de réponse « pare-excitative » à l’angoisse suscitée par la situation.

Une majorité des patients ne souhaite pas participer au groupe de soutien. Ils supposent que cela ne répond pas à leurs attentes, sans que l’organisation présentée ne soit une contrainte pour autant.

Il reste que 38 % des parents, et 17 % des grands-parents ressentent le besoin d’un temps d’échanges structuré. Le sou- tien à la parole, à leur parole, peut s’avérer étayant pour cer- tains. Face à la difficulté de dire son cancer à son enfant, et par là même de réentendre la nouvelle « cancer », nous émettons l’hypothèse que notre dispositif de soutien opère tel un appui : quand dire fragilise et réactive la crainte de paraître un parent défaillant, les professionnels animateurs du groupe incarnent un support dans un lieu contenant et sécurisant, où le cancer, la mort et les autres angoisses vont pouvoir être nommés, s’exprimer et s’éprouver. Il a été clairement établi que l’absence de dialogue et de compréhension peut conduire les enfants à des troubles du comportement [3] et des troubles relationnels [4]. Les grands-parents se sentent probablement moins concernés par le groupe, car comme ils ont pu l’écrire dans les questionnaires, beaucoup laissent la question de l’annonce d’une vérité les concernant aux parents eux- mêmes. Parler, et a fortiori de la maladie, n’est pas si aisé pour ces aînés (13 %) éduqués dans d’autres valeurs que commu- nicationnelles. Or, on retrouve dans la littérature que la mort brutale d’un grand-parent (souvent la première expérience de perte familiale) peut avoir des conséquences importantes pour l’enfant, notamment durant l’adolescence [13]. Il faudrait pro- bablement élargir les outils facilitant la discussion pour répon- dre aux attentes de chacun : lecture, contes, vidéo, art, jeux, accès à des ressources d’information…[11].

Contrairement au lien parent–enfant, la relation grand- parent–petit-enfant n’a pas de normes explicites. Les notions de transmission, d’éducation et d’information sont plus clairement établies et communément admises dans la paren- talité. Une revue de la littérature sur la relation grands- parents et petits-enfants au XXIe siècle montre que malgré une grande diversité, les relations entre les générations contemporaines retrouvent un modèle durable d’attachement lié aux échanges [12]. Elles permettent de mettre du lien, du sens entre ce passé dont les aînés peuvent répondre, ce pré- sent et cet avenir incarné par les petits-enfants. Les grands-

parents représentent alors un point d’ancrage dans un milieu familial quelquefois chaotique. Ils permettent de se sentir appartenir à une lignée [12]. L’absence de contact peut rom- pre les relations intergénérationnelles. Cela évoque la théorie de l’attachement de Bowlby [14], selon laquelle le maintien de la proximité par rapport à des figures d’adultes protec- teurs représente le mécanisme principal dans la régulation du sentiment de sécurité. Le désir des grands-parents d’in- former et de dire la vérité sur leur maladie à leurs petits- enfants ne diffère pas de celui des parents et participe sans doute à renforcer les notions d’attachement et de lien. Il y a dans la grand-parentalité actuelle des responsabilités juridi- ques, morales et éducatives [10]. Mais au-delà, il y a dans l’acte de parole à l’enfant, le maintien d’un attachement sécure à l’adulte qui lui permet de développer ou de renouer avec ses capacités d’exploration et de gestion de ses émo- tions, et d’autonomisation.

Par ailleurs, 47 % des patients trouvent important ou sou- haitable le fait de rencontrer d’autres familles. Il est vrai que ce groupe a été idéalement construit afin que plusieurs famil- les s’y retrouvent et puissent partager cette expérience à la fois individuelle et collective. Un de nos postulats est que ce partage aide les enfants à élaborer leur souffrance et permet une identification à ces « petits compagnons de galère » [7].

Enfin, cette enquête confirme une préférence sur la parti- cipation en début de traitement, comme le montrait l’évalua- tion rétrospective portant sur les quatre premières années du groupe [7].

Conclusion

Les attentes et les besoins d’information d’un patient malade du cancer vis-à-vis de son enfant ou petit-enfant ne diffèrent pas selon son degré de parenté. Il existe un défaut d’infor- mation du grand-parent sur l’existence d’un groupe de sou- tien ouvert aux parents, grands-parents malades, à leurs enfants et à leurs petits-enfants au sein de l’établissement.

Cette méconnaissance est liée à un défaut d’information orale par les soignants. Il apparaît souhaitable de généraliser l’information quant à l’existence de ce groupe de soutien à d’autres schémas familiaux, car l’enfant reste vulnérable par rapport à la maladie d’un proche, quel que soit le lien qui les unit. Il serait également intéressant de multiplier les supports d’échanges et de communication autour de la maladie, des traitements et de la mort. Au travers de cette enquête, il nous apparaît que la question de la « vérité cancer » à un enfant n’a pas de sexe, d’âge ou de génération.

RemerciementsLes auteurs remercient les patients qui ont accepté de répondre à cette enquête.

Conflit d’intérêt : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt.

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Annexe A. Le questionnaire

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Références

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Références

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