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IRIBID.IJI. L'apparence, source autonome d'obligations, ou application du principe général de l'exécution de bonne foi. ill ~:

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(1)

JOIJRNU IRIBID.IJI

HEBDOMADAIRE JUDICIAIRE Edmond Picard

1881-1899 Léon Hennebicq

1900-1940

Charles Van Reepinghen 1944-1966 J:ean Dai 1966-1981

L'apparence, source autonome d'obligations, ou application du principe général

de l'exécution de bonne foi

A propos de rarrêt de la Cour de cassation du 20 juin 1988

(*)

Qui aurait pu imaginer que l'affaire Cuivre et Zinc, qui occupa il y a un peu plus de trois ans la une des chroniques économiques et sociales, allait conduire la Cour de cassation à trancher une des controverses les plus intéressantes qui subsiste en droit civil - à savoir le fondement de la théorie du mandat apparent et par là, celle de l'appa- rence.

Et pourtant, cette question allait se poser inci- demment dans le cadre d'une procédure en référé tendant à faire cesser une occupation d'usine. Il s'agissait de savoir si le secrétaire régional de la F.G.T.B. avait qualité pour se défendre comme mandataire ad !item des membres de ce· syndicat qui ne dispose pas, en principe, de la personnalité juridique.

La cour d'appel de Liègè avait répondu par l'affirmative (1).

Après avoir relevé que « le syndicat connu sous le sigle F.G.T.B. est dépourvu de personnalité juridique », constituant une association de fait

« qui ne peut donc être. juridiquement appréhen- dée que dans chacune des personnes physiques qui la compose », la cour avait en effet considéré qu'il était permis que soient désignés au sein de pareille association « un ou des mandataires ayant le pouvoir d'agir en son nom, mais sous la . responsabilité de chacune des personnes qui la composent ».

Elle avait dès lors recherché si M. Jacques De Greef, sécrétaire régional de la F.G.T.B. qui avait été assigné par les Usines à Cuivre et à Zinc de Liège, avait la qualité de mandataire des membres du syndicat. Or, aucun règlement écrit de l'asso- ciation he permettait, semble-t-il de vérifier si, et dans quelles conditions, pareil mandat lui avait été conféré.

La cour de Liège avait toutefois estimé qu'il résultait des correspondances versées aux débats, que M. De Greef était apparu aux yeux de l'administrateur:.délégué de Cuivre et Zinc

« comme l'interlocuteur manifestement mandaté par l'association pour suivre ce conflit jusqu'à son dénouement» et que les Usines à Cuivre et à Zinc de Liège étaient fondées à se prévaloir de cette apparence de mandat « cela tant pour les

(*) Cet arrêt est publié ci-après, p. 547.

(1) Liège, 12 nov. 1986, Jur. Liège, 1986, p. 705.

besoins de la négociation que pour . ceux de la défense d'intérêts au nom des membres (du syndi- cat) qui sont concernés par le présent procès ».

Aussi, fut-elle amenée à décider que l'action était recevable à l'encontre de M. De Greef,

« secrétaire régional de la F.G.T.B., ès qualités de mandataire ad !item des membres de ce syndi- cat».

Statqant sur le fondement de la demànde, elle avait dès lors fait défense au secrétaire régional qualitate qua« d'entraver de quelque façon que ce soit. .. l'accès paisible au magasin d'expédi- tion » de la société et avait enjoint « au syndicat F.G.T.B. en la personne de son mandataire»

d'organiser au sein des ouvriers affiliés à ce syndicat un vote sur la poursuite de·Ia grève.

A l'appui du pourvoi qu'il forma contre cette décision, M. De Greef fit valoir notamment : 1) que l'arrêt n'avait pu légalement conclure à

l'existence d'un mandat conventionnel de représentation eri justice à défaut d'avoir cons- taté dans le chef de tous les membres de

l'association l'intention de conférer pareil mandat;

2) que« l'arrêt ne pouvait déduire de la circons- tance que (le demandeur en cassation) appa- raissait comme l'intermédiaire manifestement mandaté par l'association pour suivre le con- flit jusqu'à son dénouement, que les membres de la F.G.T.B. auraient fautivement créé ou laissé créer une apparence de mandat pour leur représentation en justice à l'occasion de ce conflit, sans méconnaître la notion légale de faute».

Ce faisant, le demandeur en cassation invo- quait clairement la théorie traditionnelle du mandat apparent : à défaut de mandat conven- tionnel, le cocontractant d'une personne qui se présente comme mandataire ne peut agir contre le pseudo-mandant que s'il démontre que celui-ci a, par sa faute ou sa négligence, créé ou laissé se développer cette apparence trompeuse. Le moyen avait d'autant plus de chances de succès que dans un arrêt encore récent, la Cour de cassation avait réitéré son adhésion à cette conception classi- que (2).

(2) Cass., 30 mai 1979, Pas., 1979, I, 1123, 'obs.;

cons. aussi notamment, Cass., 13 janv. 1972, Pas., 1972, 1, 472.

EDITEURS:

MAISON FERD. LARCIER S.A.

Rue des Minimes, 39 1000 BRUXELLES

Par arrêt du 20 juin 1988, la Cour de cassation devait cependant le rejeter aux termes d'une décision de principe dénuée de toute ambiguïté qui marque un revirement de jurisprudence incontestable.

Après avoir relevé, à juste titre, que la cour d'appel de Liège n'avait pas fait appel à la notion de faute pour conclure à l'existence « d'un

· mandat apparent pour représenter en justice les membres de la F.G.T.B. concernés par le procès »,l'arrêt du 20 juin 1988 énonce en termes généraux:

« que le mandant peut être engagé sur le fondement d'un mandat apparent, non seulement dans le cas où il a fautivement créé fapparence, mais également en l'absence d'une faute suscepti- ble de lui être reprochée si la croyance du tiers à

·t'étendue des pouvoirs du mandataire est légi- time».

Or, suivant l'arrêt, la cour de Liège avait constaté que tel était bien le cas en l'espèce.

La Cour de cassation reproduisait ainsi presque textuellement la règle én_oncée par l'assemblée plénière civile de la Cour de cassation de France, dans son arrêt du 13 décembre 1962 (3) qui fl].lait consacrer l'apparence comme source autonome d'obligations : '

« Le mandant peut être engagé sur le fonde- ment d'un mandat apparent, même en l'absence de faute susceptible de lui être reprochée si la croyance du tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire est légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs ».

Après avoir rappelé rapidement l'évolution des conceptions en matière de mandat apparent, je consacrerai le surplus de cette note à quelques réflexions sur la théorie de l'apparence, son fondement et ses limites.

(3) Cass. fr. (ass. plén. civ.), 13 déc. 1962, Dai/., 1963, jur., p. 277 et la note J. Calais-Auloy; voy. plus récemment en France, Cass. fr. 11 mars 1986, J.C.P., 1986, IV, 145; Aix-en-Provence, 25 sept. 1984, J.C.P., 1985, IV, 215; Toulouse, 4 janv. 1984, J.C.P., 1985·, IV, 85; Cass. fr. corn., 30 nov. 1983, J.C.P., 1984, IV, 46; Cass. fr. corn., 15 mars 1984, J.C.P., 1984, IV, 162; Cass. fr. corn., 20 avril 1982, J.C.P., 1982, IV, 230; Cass. fr. civ., 6 juill. 1982; J.C.P., 1982, IV, 332;

Cass. fr. civ., 4 mai 1982, J.C.P., 1982, IV, 247; Cass.

fr. civ., 6janv.1982,Dal/., 1982, I.R., 190; Cass. fr. civ., 24 mars 1981, J.C.P., 1982, Il, 19746 et la noteR. Le Guidee; cons. aussi, Bastia, 20 déc. 1985, Dai/., ·1987, jur., 363, note J. Manéger, ainsi que les réf. citées par L. Simont, J. De Gavre et P. A. Foriers, « Les contrats spéciaux (examen de jurisprudence : 1976 à 1980) », R.C.J.B., 1986, n° 232, p. 392 et par P. A. Foriers,

« Les contrats commerciaux (chronique de jurispru- dence : 1970-1980) », Rev. dr. comm. b., 1983, n° 10, p. 143.

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(2)

1. - DE LA RESPONSABILITE CIVILE A L'APPARENCE,

SOURCE AUTONOME DE DROITS ET D'OBLIGATIONS

Le Code civil, pas plus que le droit romain ou l'ancien droit, ne comporte de théorie générale de l'apparence (4).

A. - L'évolution des idées

Cette observation ne signifie évidemment pas que l'apparence soit totalement ·absente. Plu- sieurs dispositions du Code civil, qui trouvent appui sur des règles traditionnelles, attribuent des effets juridiques à des situations apparentes : l'article 1240 valide le paiement fait de bonne foi au possesseur de la créance; l''article 1321 permet aux tiers en cas de simulation de s'en tenir à l'acte apparent; les articles 2005 et 2008 en matière de mandat, enfin, protègent les tiers cocontractant d'un mandataire dont le mandat a pris fin (5). Il s'agit cependant chaque fois de dispositions parti- culières.

L'adage error communis facit jus dégagé par les glossateurs au départ de la lex Barbarius Philippus (6) - l'esclave, qui se- faisant passer pour citoyen romain, avait été nommé prêteur - constituait certes un principe de l'ancien droit (7). La règle, aux contours incertains, était cependant essentiellement appliquée au cas de fonctionnaires ou d'officiers publics régulière- ment nommés aux yeux de tous, mais dont il apparaissait par la suite qu'ils n'avaient pas ou qu'ils n'avaient plus cette qualité ou encore que leur nomination était entâchée de nullité.

L'adage, comme la lex Barbarius Philippus, avait donc essentiellement pour objet de protéger les administrés en refusant l'annulation des ~etes

accomplis par ce fonctionnaire ou cet officier public apparents. Et c'est encore dans un cas de ce genre que le Conseil d'Etat de France fit application du principe dans son avis du 2 juillet 1807 (8), qui avait valeur de loi dans son disposi- tif (9). Il s'agissait en l'espèce d'apprécier la validité d'extraits des registres d'état civil qui n'avaient pas été signés par l'officier d'état civil compétent, mais bien par des secrétaires de mairie.

Le Conseil considéra « que de tous temps et dans toutes les législations, l'erreur commune et la bonne foi ont suffi pour couvrir dans les actes et même dans les jugements des -irrégularités que les parties n'avaient pu ni prévoir, ni em- pêcher » (9bis). La référence à l'erreur des parties à l'acte ou au jugement et non à l'erreur d'une des parties montre que l'on vise bien une erreur ( 4) Cons. notamment, Jean Calais-Auloy, Essai sur la notion d'apparence en droit commercial, L.G.D.J., Paris, 1961, n°s 1 et s.

(5) Dans le domaine des biens, les règles relatives à la publicité foncière et l'article 2279 du Code civil se rattachent également par certains aspects au concept d'apparence.

(6) Dig., I, 14, De ojjicio praetorum, 3.

(7) Pour une étude, notamment historique de cet adage, cons: M. Rouast, Les grands adages coutumiers dans le droit des obligations, cours de droit civil appro- fondi (diplôme d'études supérieures droit privé, examen B, 1953-1954), pp. 186 et s.

(8) Recueil de la législation -générale en vigueur en Belgique, t. I, 482.

(9) Sur la valeur en droit positif belge des avis du Conseil d'Etat de France rendus sous le régime français, cons. les conclusions de M. le procureur général Dumon, avant Cass., 2 oct. 1980, Pas., 1981, I, 125.

(9bis) Souligné par le soussigné.

portant sur la qualité d'un tiers instrumentant.

Contrairement à ce que certains auteurs ont pu écrire (10), le Conseil d'Etat de France ne s'est donc pas prononcé en termes généraux (11).

Si la règle error communis facit jus constituait donc un principe de l'ancien droit et si elle a survécu au Code civil, elle n'en demeure pas moins historiquement une règle spéciale. La meil- leure doctrine belge lui reconnaît d'ailleurs encore ce caractère en droit positif. Elle affirme à cet égard que« sa portée est limitée à l'hypothèse de dépassements de pouvoirs par des autorités admi- nistratives de facto » (12).

Au surplus, dût-on même y voir une règle générale - quod non - à mon avis (13), cette règle ne suffirait pas à rendre compte de la théorie de l'apparence, qui, dans sa conception actuelle, a un champ d'application beaucoup plus lar- ge (14) :celle-ci n'exige pas une erreur commune, mais une simple erreur légitime (15).

(10) Voy. notamment, Rouast, op. cit., p. 190.

(11) En ce sens, P. Van Ommeslaghe, «L'apparence comme source autonome d'obligations et le droit belge», Rev. dr. internat. et dr. comp., 1983, pp. 144 et s., spéc. p. 147; De Page, t. 1, 3e éd., n° 45.

(12) P. Van Ommeslaghe, op. cit., Rev. dr. internat.

et dr. comp., 1983, p. 159; voy. aussi, pp. 147 et s.; De Page, t. 1, 3e éd., n° 45; comp. Cass., 29 mai 1947, Pas., 1947, 1, 216 et la note R.H. et Cass., 7 nov. 1940, Pas., 1, 283 et les conclusions de M. l'avocat général Gesché; voy. en revanche en sens contraire semble-t-il, S. David Constant, « Error co mm unis facit jus : adage subversif? »,Liber amicorum Frédéricq Dumon, t. 1, pp. 107 et s. En France, par contre, l'adage est acutelle- ment interprété de manière plus large, cons. H.

Mazeaud, « La maxime error communis facit jus », Rev. trim. dr. civ., 1924, pp. 929 et s., Rouast, op. cit., pp. 186 et s.

Dans un arrêt du 1er octobre 1976, Pas., 1977, 1, 133, la Cour de cassation belge semble s'être orientée, mais avec prudence, dans le sens d'une extension du champ d'application de l'adage, voy. noté 13 ci~dessous.

(13) Comp. Cass., 7 nov. 1940, Pas., 1940, 1, 283 et les conclusions de M. l'avocat général Gesché qui énonce : « que cette-maxime qu'aucun texte légal ne consacre de manière générale et qui,· d'ailleurs, est en opposition avec les principes fondamentaux du droit civil, doit nécessairement, si tant est qu'elle puisse être appliquée à des cas de l'espèce, ne l'être qu'avec la plus grande circonspection et dans des circonstances tout à fait exceptionnelles ... ».

Cons. cependant plus récemment, Cass., 1er oct. 1976, Pas., 1977, 1, 133. Ce dernier arrêt concernait un prétendu bail (en réalité une convention d'o~cupation précaire) consentie par la S.N.C.B. à un agriculteur sur l'assiette d'une voie ferrée--désaffectée. La S.N.C.B., se prévalant d'une clause contractuelle, avait mis fin au bail moyennant préavis de trois mois. Le fermier avait opposé les règles impératives relatives à la durée du bail à ferme. Le juge de fond avait accueilli la défense du fermier estimant, en ordre principal, que la voie ne · relevait plus du domaine public et pouvait donc faire l'objet d'un bail, en l'espèce en bail à ferme. A titre subsidiaire, pour l'hypothèse où elle aurait relevé du domaine public, il avait retenu d'une part une cu/pa in éontrahendo dans le chef de la S.N.C.B. et, d'autre part, l'application de. l'adage error communis facit jus.

Après avoir écarté la thèse de la désaffectation du domaine public et celle de la cu/pa in contrahendo, la Cour suprême devait décider à cet égard« que l'adage error cummunis, jacit jus, sur base duquel le premier défendeur pouvait se fier à la convention de bail » conclue avec la demanderesse, ne serait applicable en l'espèce que si la convention conclue constituait réelle- ment une convention de bail. Cet arrêt semble donc admettre l'adage dans une conception élargie tout en refusant de l'appliquer, ce qui enlève évidemment à sa force. Il échet, par ailleurs, d'observer que l'adage était opposé à une société publique.

(14) Rouast, op. cit., p. 199.

(15) Sur cette distinction, voy. plus loin.

Ce sont les nécessités croissantes . de la sécu- rité des transactions, déjà soulignées par Pothier (16), qui amenèrent la jurisprudence et la doctrine à développer l'idée d'apparence notam- ment en matière de mandat. A défaut de disposi- tion générale de nature légale ou coutumière, la validation des actes accomplis par le pseudo- mandataire a été naturellement rattachée à la théorie de la responsabilité civile. Il est reproché du« mandant »d'avoir créé ou laissé se dévelop- per fautivement une apparence trompeuse. Ayant par sa faute induit le tiers cocontractant du pseudo-mandataire en erreur, il doit être tenu des actes de ce dernier comme s'il y avait eu mandat, ce à titre de réparation en nature des consé- quences de ses agissements culpeux (17).

Le recours à l'article 1382 du Code civil a cependant rapidement conduit les tribunaux à étirer artificiellement la notion de faute en abou- tissant à considérer que toute personne qui laisse une apparence se développer commet - ipso facto- une faute (18).

L'arrêt de la Cour de cassation déjà cité du 30 mai 1979 témoigne de cette tendance (19). Il considère, en effet, que la décision attaquée avait implicitement constaté l'existence d'une faute en relevant que « la demanderesse a été à 1' origirie du mandat du sieur W ... , mandat apparent à l'égard du tiers » (20).

Pareil étirement de la notion de faute est évidemment contestable. Il aboutit en réalité à confondre la faute et le dommage qui en résulte (21). Or, il est constant que le simple fait de causer un dommage même par une activité délibérée ne constitue pas une faute (22). -

Dans un autre ordre d'idée, sur un plan plus conceptuel, on a fait observer que l'article 1382 du Code civil ne permettait pas de rendre compte d'autres hypothèses dans lesquelles la jurispru- dence avait attribué des effets à une situation apparente. Tel est le cas, par exemple, de la jurisprudence française relative à l'héritier appa- rent (22bis).

(16) Pothier, Traité de la puissance du mari, 28.

(17) Sur la théorie traditionnelle à base de faute : De Page, t. V, 3e éd., n° 448, de Harven, «Etude sur la notion d'apparence en droit privé», Rev. dr. belge, 1938, pp. 91 et s.; cons. aussi, Planiol et Ripert, t. X, 1500; Cass., 30 mai 1979, Pas., 1979, 1, 1123; Cass., 13 janv. 1972, Pas., 1972, 1, 492; comp. L. Vincent,

«La théorie de l'apparence», Trav. conf. U.L.B., 1957, nos 13 et s.

(18) Cette thèse a été défendue par L. Vincent, op.

eit., nos 13 et s.

(19) Pas., 1979, 1, 1123.

(20) Sur cet arrêt, voy. P. A. Foriers, « Les contrats commerciaux (chronique de jurisprudence : 1970- 1980) », Rev. dr. comm. belge, 1983, pp. 145 et s.; L.

Sirilont, J. De Gavre et P. A. Foriers, « Les contrats spéciaux (examen de jurisprudence : 1976 à 1980) », R.C.J.B., 1986, 232, pp. 397 et s.

(21) Outre les références visées à la note précédente, cons. X. Dieux, « Le contrat instrument et objet de dirigisme », Les obligations contractuelles, Jeune bar- reau, Bruxelles, 1984, pp. 319 et 320; P. Van Omme- slaghe, op. cit., Rev. dr. internat. et dr. comp., 1983, p. 150.

(22) Cass., 4 oct. 1973, Pas., 1974, 1, 124.

(22bis) Sur cette jurisprudence, voy. Marty et Ray- naud, Droit civil - Les successions et les libéralités, par P. Raynaud, Sirey, Paris, 1983, 196; F. Derrida et J. Mestre, V0 «Apparence», Encycl. Dalloz, Rép. dr.

civ., 2e éd., spéc. nos 57,70 et s., 81, 113 et 125.

En Belgique, par contre, cons. notamment, De Page, t. IX, 2e éd., n° 825.

(3)

L'attrait des théories générales a, dès lors, conduit la doctrine à élaborer une théorie auto- nome de l'apparence dégagée des contingences de l'article 1382, au départ des quelques dispositions éparses du Code civil évoquées ci-dessus et des solutions jurisprudentielles données à certains problèmes particuliers (23).

En France, la Cour de cassation consacrera cet . effort de systématisation dès 1962 à propos du mandat apparent (24). En Belgique, la jurispru- dence sera plus réticente (25), tout en aboutissant en pratique à des solutions comparables aux solutions françaises suite à l'étirement de la notion de faute que l'on yient de dénoncer.

Plusieurs décisions des juridictions de fond cons- tituent cependant le signe avant coureur (26) de l'arrêt de la Cour de cassation du 20 juin 1988 qui se rallie finalement à la jurisprudence fran- çaise (27).

B. -Les conditions techniques de la théorie de l'apparence 1. -Le système classique - L'apparence-faute.

Dans le système traditionnel, à base de respon- sabilité civile, l'application de la théorie de l'ap- parence requiert la réunion de quatre éléments :

(23) En Belgique, voy. notamment, P. Van Ommesla- ghe, op. cit., Rev. dr. internat. et dr, camp., 1983, pp. 144 et s. et réf. cit.; J. David-Constant, op. cit., Liber amicorum Frédéric Dumon, pp. 107 et s.; X.

Dieux, op. cit., Les obligations contractuelTes, pp. 315 et s.; comp. W. Van Gerven, Beginselen van Belgisch privaatrecht, t. I, « Algemeen deel », nos 78 et s.; J.

Ronse, Wisselbrief en orderbriefje, t. I, n° 239;

J. Ronse, K. Van Hulle, J.-M. Nelissen Grade et B. van Bruystegem, « Vennootschappen -» (overzicht van de rechtspraak : 1968-1977), T.P.R., 1978, n° 76, pp. 743 et s.; J. Ronse, J.-M. Nelissen Grade, K. Van Hulle, J.

Lievens et H. Laga, « Vennootschappen » (overzicht van de rechtspraak: 1978-1985), T.P.R., 1988, n° 67, pp. 917 et 918. En France, voy. récemment, J. Ghestin, Traité de droit civil, t. I, 2e éd., « Introduction générale», par J. Ghestin et G. Goubeaux, n° 781; F.

Derrida et J. Mestre, V0 « Apparence, précité », spéc.

. nos 20 et s.; cons. aussi, Calais-Auloy, op. cit., spéc.

nos 5 et s. et réf. cit.

(24) Cass. fr., ass. plén. civ., 13 déc.1962, cité à la note 3, pour des applications plus récentes, consultez les références citées à la note 3.-

(25) Voy. notamment, Mons, 12 nov. 1986, Pas., 1987; II, 16 (faute dans la collation des pouvoirs du mandataire); Bruxelles, 17 févr. 1982, J.T., 1982, p. 513; Cass., 3 mai 1979, Pas., 1979, I, 123, déjà cité;

Corr. Bruxelles, 6 mars 1979, R.G.A.R., 1980, n° 10182; C.T. Bruxelles, 23 août 1977, J.T.T., 1978, p. 72, obs. P. Wihlem; Cass., 13 janv. 1972, Pas., 1972, 1, 472, déjà cité; J.P. Liège, 3e cant., 29 oct. 1971, Jur.

Liège, 1971-1972, p. 152; Comm. Bruxelles, 6 janv.

1969, J.C.B., 1969, p. 19 _et Comm. Bruxelles, 7 sept.

1968, J.C.B., 1969, p. 16.

(26) Voy. notamment, Comm. Liège, 23 janv. 1986, Rev. dr. comm. b., 1987, p. 384, Ôbs. Cl. Parmentier;

Comm. Bruxelles, 18 nov. 1981, J.T., 1982, p. 46;

comp. Comm. Verviers, 24 avril 1969, J.C.B., 1970,, p. 182; Comm. Verviers, 7 mars 1968; Jur. Liège, 1968-1969, p. 61; J.P. Liège, 15 janv. 1982, R.G.A.R., 1984, n° 10833, note P. Legrand et F. Ernault; J.P.

Herentals, 9 févr. 1982, R. W., 1984-1985, 899, réformé par Civ. Turnhout, 10 mars 1983, R. W., 1984-J985, 896; C.T. Anvers, 20 janv. 1986, R. W., 1986-1987, 1277; Anvers, 21 mars 1984, R. W., 1984-1985, 1653;

Ci v. Bruxelles, 5 août 1986, Rev. rég. dr., 1988, p. 20, note Jadoul.

(27) Après l'arrêt de la Cour de cassation du 20 juin 1988, voy. Bruxelles, 14 déc. 1988, J.L.M.B., 1989, p. 261.

Un élément matériel, la situation appa- rente qui, par hypothèse ne correspond pas à Iii situation réelle. « Il faut », écri- vent Ghestin et Goubeaux à cet égard,

« une réalité visible que l'observateur con- sidérera comme révélatrice de la situation de droit » (28).

Un élément psychologique, la croyance erronée du tiers dans la concordance de la situation apparente avec la situation réelle. Le tiers doit non seulement être de bonne foi en ce sens qu'il doit ignorer la vérité, son igno- rance doit en outre être légitime, compte tenu des circonstances de la cause. En d'autres termes, son erreur ne peut être fautive, donc inexcusable. En matière de mandat apparent.

il faudra que, compte tenu des circonstances - notamment de la qualité et de la profession des parties, de la nature de l'opération et des usages - le tiers cocontractant du pseudo- mandataire n'ait pas dû procéder à un examen des pouvoirs de ce dernier (29). Si l'erreur du tiers doit donc être légitime, on admet généra- lement aujourd'hui qu'elle ne doit pas être nécessairement commune (30), c'est-à-dire invincible, car commise par la masse (31).

C'est en cela que la théorie de l'apparence est plus large que l'adage error communis facit jus même compris extensivement.

Un préjudice, dans le chef du tiers si on n'accordait pas effet à la situation apparente.

Cette condition, certaine dans le cadre de la conception classique fondée sur l'article 1382, est rarement évoquée, sans doute parce qu'elle est le plus souvent remplie en pratique.

(28) J. Ghestin, op. cit., t. I, 2e éd. Introduction générale, par J. Ghestin et G. Goubeaux, n° 794.

(29) Ou, à tout le moins, à un examen approfondi de ces pouvoirs. Il faut, à cet égard, que l'on ne puisse lui reprocher une négligence, F. Derrida et J. Mestre, v0

« Apparence », précité, nos 87 et s.; Ghestin, op. cit., t. 1, 2e éd., par Ghestin et Goubeaux, n° 796 et réf. cit.

(30) Cons. P. Van Ommeslaghe, op. cit., Rev. dr.

internat. et dr. camp., 1983, p. 156; Ghestin, op. cit., t. I, 2e éd. par Ghestin et Goubeaux, nos 785 et 796 qui souligne que. la jurisprudence r9;ient au moins une erreur légitime, parfois une erreur commune; comp. par contre, F. Derrida et J. Mestre, v0 «Apparence», précitée, n° 31 qui rattachent la théorie de l'apparence à la règle error communis facit jus, et nos 59 et s. qui montrent à juste titre que selon les circonstances, la jurisprudence française est divisée entre l'erreur com- mune et l'erreur légitime.

(31) Sur la notion d'erreur commune, voy. Ghestin, t. 1, 2e éd. par Ghestin et Goubeaux, n° 783; cons.

aussi, Cass., 7 nov. 1940, Pas., 1940, I, 283, précité.

Maison F. LARCIER, s.a.

VIENT DE PARAÎTRE

Tiré à part du RÉPERTOIRE NOTARIAL

LES TESTAMENTS

FORMULAIRE COMMENTÉ par Jean-François TAYMANS

Notaire à Bruxelles

TESTAMENTEN

MODELLEN MET AANTEKENINGEN

NEDERLANDSE VERSIE OPGESTELD DOOR Luc DEHOUCK

Notaris te Oostende

Un volume in-4°, 1989, 128 pages en 2 colonnes 2.279 F (franco, t.v.a. incluse)

Remarquons à cet égard qu'en matière de mandat apparent, le tiers a, en principe, toujours, intérêt à agir contre le mandant, même si le pseudo-mandataire est solvable. Il ne pourra, en effet, normalement demander à ce dernier que des dommages-intérêts (art.

1997, C. civ.) (32).

La question du préjudice se pose cependant de manière aiguë en matière de simulation. Si l'article 1321 du Code civil ne constitue qu'une application pure et simple de la théorie de l'apparence, le tiers qui ne subi aucun préjudice ensuite de cette simulation ne sau- rait se prévaloir de l'acte apparent (33): Déci- der le contraire conduit à conférer à l'article 1321 le caractère de pénalité ci-vile (34), ce qui est contestable, dès lors que la simula- tion n'est pas illicite (34bis).

Une faute en relation causale avec le préju- dice, la faute consistant dans le fait d'avoir créé ou laissé se développer une apparence trompeuse. La faute est à la fois l'élément générateur de responsabilité et l'élément d'imputabilité. L'apparence ne peut être imputée au véritable titulaire du droit qui n'y a pris aucune part. Ce n'est que s'il a con- tribué - fautivement - à créer l'apparence . qu'il pourra être tenu.

2. - Le système moderne.

Dans la conception moderne de l'apparence, source autonome d'obligations, c'est ~ette der- nière condition qui disparaît ne laissant plus subsister que l'élément matériel de l'apparence et l'erreur légitime (35) ou, dans certains cas, sui- vant la jurisprudence française, l'erreur com- mune (36). Conditions auxquelles il convient d'ajouter, à mon avis, le préjudice (37). L'appa- rence est, en effet, une protection accordée aux tiers dans l'intérêt de la sécurité juridique. Elle a pour objet de prévenir ou de réparer un préjudice et non d'octroyer des avantages au détriment du titulaire véritable du droit (38). On concevrait

(32) De Page, t. V, 3e éd., nos 444 et 450.

(33) Cons. M. Van Quickenborne, «Le fondement de l'inopposabilité des contrelettres », R.C.J.B., 1975, pp. 260 et s., spéc. nos 9 et s., pp. 266 et s. et n° 21, p. 276; A. Weill, Les obligations, Dalloz, Paris, 1971, n° 575; comp. Dagot, La simulation en droit privé, n° 156; Ghestin, v0 «Simulation», Encycl. Dalloz, Rép. dr. civ., 2e éd., n° 56; Beudant, t. XII, n° 980;

Baudry-Lacantinerie, Obligations, t. IV, n° 2416, ces derniers auteurs n'exigeant dans le chef du tiers que la preuve d'un intérêt légitime.

(34) Telle est la voie dans laquelle la Cour de cassa- tion semble .s'être orientée, cons. Cass., 21 juin 1974, Pas., 1974, I, 1089, R.C.J.B., 1975, p. 256 et la note M.

Van Quickenborne; P. Van Ommeslaghe, «Les obliga- tions (examen de jurisprudence : 1974 à 1982) », R.C.J.B., 1986, n° 50, p. 127.

(34bis) Sur ce dernier point constant, voy. De Page, t. II, 3e éd., n° 623.

(35) Cons. notamment, P. Van Ommeslaghe, op.

cit., rev. dr. internat. et dr. camp., 1983, pp. 152 et s~;

Ghestin, t. I, 2e éd. par Ghestin et Goubeaux,. nos 793 et s.

(36) Lorsque le système de l'erreur légitime apparaît compte tenu des circonstances trop inéquitable, voy.

Ghestin, t. I, 2e éd., par Ghestin et Goubeaux, n° 802, pp. 785 et 796; F. Derrida et J. Mestre, v0 « Appa- rence », cité, nos 59 et s. ·

(37) Comp. dans un sens analogue, Ghestin, t. 1, 2e éd., par Ghestin et Goubeaux, nos 59 et s.

(38) C'est la même idée qui conduit à limiter les effets de l'apparence aux actes à titre onéreux. Ghestin et Goubeaux écrivent à cet égard : « Dans le conflit qui oppose le tiers au véritable titulaire du droit, le premier

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(4)

d'ailleurs difficilement que l'apparence non fau- tive puisse aboutir à octroyer plus de droits que les règles de la responsabilité civile.

Une fois ces conditions réunies, le tiers verra ses droits validés de manière telle que sa situation soit la même que si l'apparence correspondait à la réalité.

I I . -DE LA JUSTIFICATION DE LA THEORIE DE L'APPARENCE, SOURCE AUTONOME D'OBLIGATIONS,

A LA RECHERCHE D'UN CRITERE D'IMPUTABILITE

ET D'UNE REDEFINITION A. - La justification de l'apparence,

source autonome d'obligations 1. - « Sécurité dynamique » et « sécurité stati-

que».

Dès lors que l'apparence est conçue comme une source véritablement autonome d'obligations, il est vain-a priori-d'en rechercher le fonde- ment juridique (39). Sans doute peut-elle être induite de certaines dispositions légales particuliè- res, mais il serait présomptueux de la rattacher à une consécration implicite du législateur. Sur un plan purement logique, rien n'empêche d'ailleurs de soutenir la thèse que si le législateur a éprouvé le besoin dans certains domaines particuliers de donner effet à des situations apparentes, c'est précisément parce qu'il n'existait aucun principe général et qu'il fallait donc un texte de loi pour venir en aide aux tiers de bonne foi dans ces cas spéciaux particulièrement dignes d'intérêt.

Nous nous bornerons donc à constater que la théorie moderne de l'apparence, source auto- nome d'obligations, constitue une création de la jurisprudence et de la doctrine et qu'elle trouve sa force dans l'adhésion ~es juges (40).

S'il est vain de rechercher le fondement juridi- que de cette théorie, on peut en revanche s'inter- roger sur ses ~ustifications.

Pourquoi en d'autres termes, préférer le tiers qui a de bonne foi traité sur base d'une situation apparente au titulaire véritable du droit qui, par hypothèse, n'a commis aucune faute et,qui peut être, à la limite,· totalement étranger à l'appa- ne l'emporte que si l'acte qu'il a passé avec le titulaire apparent est un acte onéreux. Eviter une déception à celui qui a cru bénéficier d'un avantage gratuit en justifie pas le sacrifice de la personne qui en subirait involontairement un dommage. La sécurité des relations juridiques n'exige pas plus que la protection des tiers qui luttent pour conserver ce dont ils ont acquittés le prix » (op. cit., n° 800).

(39) Au sens technique du terme, c'est-à-dire la règle légale ou règle de droit positif qui la sous-tendrait.

L. Cornélis souligne à cet égard, à juste titre, que cette théorie ne repose sur aucun principe de droit positif. L.

Cornélis, Beginselen van het Belgische buitencontrac- tuele aansprakelijkheidrecht, Maklu, Anvers et Ced- Samson, Bruxelles, 1989, n° 79.

(40) Sur la force de la doctrine et de la jurisprudence, cons. P. Foriers, « Les relatiçms entre les sources écrites et non écrites du droit », La pensée juridique de Paul Foriers, pp. 675 et s., spéc. pp. 683 et s. et pp. 690 et s.; sur le rôle créateur du juge, cons. notamment, L.

Simont et P. A. Foriers, « Les réactions de la doctrine au pouvoir créateur du juge en droit économique belge », Rapport belge aux Journées Capitant de Flo- rence, mai 1980, Travaux de l'Association Capitant, t. XXXI, 1980, pp. 221 et s. et réf. cit.; W. Van Gerven, op. cit., t. 1, « Algemeen deel », n° 14 et réf.

renee ? Pourquoi la sécurité de ce tiers a-t-elle plus de poids que la sécurité du titulaire vérita- ble ? Pourquoi en matière de mandat apparent préférer le tiers cocontractant au pseudo- mandant ? Leurs intérêts ne sont-ils pas égale- ment respectables et dans ce cas ne doit-on pas préférer le droit à l'apparence de droit comme Laurent le soutenait avec vigueur ? (41).

L'on répond généralement à ces questions en observant que la théorie de l'apparence a pour

· but d'assurer la sécurité des transactions, la sécurité des affaires et du commerce (42). L'on doit préférer, enseigne-t-on, la« sécurité dynami- que » (43) du tiers qui agit en contractant, à la

« sécurité statique » (44) de la « fortune as- sise » (45) du sujet de droit purement passif (46).

Cette dernière, écrit-on, « dsque d'engendrer l'immobilisme et peut paraître à certains égards socialement moins utile » (47).

Un parallèle est souvent fait à cet égard entre le développement de la théorie de l'apparence et la renaissance du formalisme en droit commercial qui conduit à l'abstraction notamment en matière de titres négociables (48). Calais-Auloy va même plus loin en voyant dans le formalisme et l'abs- traction cambiaires une application de la théorie de l'apparence, le tiers porteur n'ayant qu'à se préoccuper des mentions apparentes de son titre et non des opérations sous-jacentes qui ont été à l'origine de sa création (49) (49bis).

« Sécurité dynamique » opposée à « sécurité statique », le choix entre ces deux concepts relève d'une option politique ou philosophique et échappe au domaine de la pure technique juri- dique.

2. -Le risque de l'apparence: limite à l'obliga- tion du titulaire réel ?

Lorsque le titulaire du droit a, par son activité et même sans faute, contribué à créer une appa- rence de droit, il n'est pas choquant, si l'on veut privilégier la« sécurité dynamique »des affaires, qu'il puisse être tenu par cette apparence. Si un commerçant charge un représentant de distribuer ses produits dans une région déterminée, il prend le risque d'un dépassement de pouvoirs. Fré-

(41) Laurent, t. XIII, n°281.

(42) Voy. par exemple, J. Calais-Auloy, op. cit., n° 3; 1 Ghestin, t. 1, 2e éd., par Ghestin et Goubeaux, n° 781; F. Derrida et J. Mestres, V0 «Apparence», précité, n° 3; comp. W. Van Gerven, op. cit., t. 1,

« Algemeen deel », n° 83 qui rattache subsidiairement la théorie au principe de la sécurité juridique ..

(43) Demogue, Traité des obligations, t. 1, n° 279 et Les notions fondamentales du droit privé, p. 72;

Ghestin, t. 1, 2e éd., par Ghestin et Goubeaux, n° 781.

(44) Ibidem.

(45) J. Calais-Auloy, op. cit., n° 12.

(46) Sur toute cette question, voy. les références citées à la note 42.

(47) Ghestin, t. 1, 2e éd., par Ghestin et Goubeaux, n° 781.

(48) Voy. notamment, Ghestin, t. 1, 2e éd., par Ghestin et Goubeaux, n° 775, J. Calais-Auloy, op. cit., n° 3.

(49) J. Calais-Auloy, op. cit., spéc. nos 267 et s.;

cons. également, F. Derrida et J. Mestre, v0 « Appa- rence », précité, n° 14.

(49bis) Cette conception est contestable, sauf à éten- dre de manière excessive le concept d'apparence; sur le fondement de la règle de l'inopposabilité des excep- tions, cons. Van Ryn et Heenen, t. III, 2e éd., n° 119;

comp. Ronse, Wisselbrief en orderbriefje, t. Il, n° 1352; R. Rabiot, Les effets de commerce, Sirey, Paris, 1975, n° 289.

quemment d'ailleurs, les dépassements de pou- voirs résultent d'un soucis du représentant de bien faire. En pratique, les mandataires prennent sur eux d'agir en dehors de leurs pouvoirs bien plus souvent dans l'intérêt de leur mandant dont ils escomptent la ·ratification que dans une intention frauduleuse ou malicieuse. Les statistiques que l'on peut établir à ce propos sur base des recueils de jurisprudence sont trompeuses : par défini- tion, il s'agit de cas pathologiques.

L'acceptation du risque, ou la prise en charge objective du risque par le développement d'une activité susceptible de donner naissance à des apparences trompeuses (50), constitue à cet égard un élément d'imputabilité qui remplace la faute dans la théorie classique : est tenu par la situation apparente celui qui a contribué à la créer, même si en l'espèce on ne peut lui faire aucun repro- che (51).

Lorsqu'en revanche, le titulaire du droit est totalement étranger à l'apparence, la situation est bien plus délicate. Comment, en effet, concevoir en équité que cette personne totalement étrangère à l'apparence se voie sacrifier au nom de l'intérêt de la sécurité dynamique. Est-il admissible que le signataire apparent d'un effet de commerce soit tenu à l'égard du tiers porteur si sa signature est l'œuvre d'un faussaire (52). Dois-je être tenu parce que des commerçants peu scrupuleux intro- duisent mon nom dans la raison sociale de leur société en nom collectif, alors que je n'ai stricte- ment aucun rapport avec eux ? Ces exemples repris à Calais-Auloy (53), mettent évidemment mal à l'aise, précisément parce que l'apparence n'est pas imputable au titulaire véritable du droit.

Il n'y a pas contribué, il n'en a pas pris le risque.

Devant ce problème, la belle unanimité de la doctrine se fissure.

Si certains auteurs paraissent ne pas exiger d'élément d'imputabilité à la mise en œuvre de l'apparence (54), une partie importante de la doctrine paraît hésiter.

Pour Calais-Auloy, dont on ne saurait sus- pecter l'attachement à la théorie de l'apparence non fautive qu'il a largement. contribué à déve- lopper, le titulaire du droit qui est totalement étranger à l'apparence est exclu du« risque d'ap- parence » et partant ne saurait être tenu sur cette base (55).

Commentant, en 1963, l'arrêt de l'assemblée plénière civile de la Cour de cassation de France du 13 décembre 1962, le professeur Cornu écrivait dans un sens analogue :

« Une dernière précision, en dehors de ce litige :l'apparence ne doit obliger le mandant que s'il la crée ou tolère. En ce sens, elle doit lui être imputable (mais non à faute, ce qui serait re- tomber dans la conception délictuelle) » (56).

(50) Comp. dans un sens analogue, Jean Calais- Aulais, op. cit., nos 11 et s. et les réf. cit.; J. Ronse, op.

cit., t. 1, n° 239.

(51) Comp. G. Cornu, observations Rev. trim. dr.

civ., 1963, p. 574, in fine.

(52) En matière de lettre de .change, la question est réglée par l'article 7 de la loi uniforme, cons. Van Ryn et Heenen, t. III, 2e éd., n° 406.

(53) Calais-Auloy, op. cit., n° 13.

(54) F. Derrida et J. Mestre, V0 «Apparence»

précité, nos 34 et s.; P. Van Ommeslaghe, op. cit., Rev.

dr. internat. et dr. camp., 1983, précité.

(55) Op. cit., n° 13, comp. J. Ronse, op. cit., t. 1, n° 239.

(56) G. Cornu, observations, Rev. trim. dr. civ., 1963, p. 574, in fine.

(5)

V an Gerven défendra la même idée dans la partie générale de ses Principes (57).

Sans adopter Une solution aussi radicale, Ghes- tin et Goubeau.X laissent transparaître un incon- fort certain :

« Lorsque le véritable titulaire du droit est totalement étranger à la création de cette situation (apparente), il est plus difficile de lui faire sup- porter les conséquences de l'apparence que s'il a lui-même contribué par son fait (sinon par sa faute) à faire naître la croyance erronée. Sans pour autant se replacer dans l'orbite de la responsabilité civile, il faut bien admettre que celui qui crée lui-même ou tolère l'apparence court de son propre chef un risque qui atténue la résistance de l'impératif de "sécurité statique" en faée des besoins de "sécurité dynamique" » (58).

Ils semblent dès lors, dans ce cas, préconiser le recours à la notion d'erreur çommune ou invinci- ble plutôt qu'à la simple erreur légitime.

, Restriction donc au jeu normal de l'apparence et même, d'une certaine manière, exclusion au profit d'une résurgence de l'adage error commu- · nisjacitjus. Recherche en tout cas d'une limite à une règle qui privilégierait de manière abusive la sécurité dynamique par rapport à la sécurité du titulaire du droit.

B. -Imputabilité de l'apparence- Proposition d'un fondement juridique

et d'une redéfinition de la théorie de l'apparence 1. - Nécessité d'un élément d'imputabilité.

Appliquer mécaniquement la théorie de l'appa- rence dès lors qu'est constatée la réunion des éléments matériels, psychologique et de préjudice, décrits ci-dessus aboutit effectivement à des situa- tions choquantes lorsque le titulaire du droit est étranger à la situation apparente.

Privilégier la sécurité dynamique à ce point n'aboutit-il pas à· porter atteinte à la sécurité juridique en général qui ne saurait admettre que le titulaire d'un droit s'en voie systématiquement privé lorsqu'il entre en conflit avec l'intérêt des tiers ? Le bon sens doit conduire à trouver. un équilibre.

A mon avis l'équité fait obstacle à ce que pour éviter un préjudice à un tiers, victime d'une apparence, l'on impose une charge au véritable titulaire du droit à qui cette apparence n'est nullement imputable (59).

On observera, à cet égard, que l'adage error communis jacit jus dans sa conception stricte de la lex Barbarius Philippus n'aboutit nullement à cette inéquité. Les deux parties à une convention passée devant un officier public qui se révèle par la suite ne pas avoir régulièrement été investi de ses pouvoirs ont objectivement intérêt à ce que leur contrat soit validé. Personne n'est préjudicié lorsque des extraits de registres d'état civil, par ailleurs parfaitement conformes, sont délivrés par un fonctionnaire qui n'a pas, dans la réalité des choses, ce pouvoir. Envisagée globalement et objectivement, l'annulation des actes du prêteur Barbarius Philippus n'eût été que cause de diffi- cultés et de confusion pour l'ensemble de ceux qui avaient été soumis à sa juridiction.

(57) W. Van Gerven, op. cit., t. I, n°s 83 et 85.

(58) Ghestin, t. l, 2e éd., par J. Ghestin et Gou- beaux, n° 785, in fine.

(59) Cons. en ce sens, W. Van Gerven, op. cit., t. l, Algemeen deel, nos 83 et 85.

L'adage error communisjacitjus ainsi compris ne cause finalement de préjudice qu'à la « loi » conçue comme une abstraction (60).

Une législation aussi protectrice de la sécurité des tiers que constitue la loi uniforme sur la lettre de change ne va pas jusqu'à engager le pseudo- signataire dont la signature a été imitée par un faussaire. Elle n'engage pas automatiquement le pseudo-mandant pour lequel un signataire a agi sans pouvoir. Elle institue au contraire dans ce cas une sanction spécifique : le pseudo-man- dataire est personnellement tenu sur le plan cambiaire. On voit donc que la sécurité du com- merce n'implique pas UJ,l mépris systématique des droits légitimes au profit des apparences.

Il me semble donc que si la théorie moderne de l'apparence constitue un élément importa~t de la sécurité de la vie en société, elle doit nécessaire- ment être tempérée par un élément d'imputabi- lité. A cet égard, il faut que le titulaire du droit soit à l'origine de l'apparence, donc d'une cer- taine manière qu'il en ait pris le risque.

2. - De l'élément imputabilité à la recherche d'un fondement juridique à la théorie de l'apparence.

Laisser se développer, et même donner nais- sance à une situation apparente ne correspondant pas à la réalité, ne constitue pas nécessairement une faute : c'est en cela notamment que la simula- tion est en principe licite. C'est là que se trouve la faiblesse de la conception traditionnelle de l'ap- parence fondée sur l'article 1382 du Code civil : sauf à étendre de manière contestable la notion de faute, le tiers victime de l'apparence se trouvera souvent en difficulté de prouver cet élément constitutif de responsabilité.

La question se pose dès lors de savoir s'il n'y a pas lieu de renverser le problème. S'il est norma- lement licite de donner naissance à des situations qui ne correspondent pas à la réalité, est-illicite une fois ces situations créées de tromper les tiers en en refusant les conséquences ? L'auteur de l'apparence peut-il sans commettre de faute, ne pas en accepter les conséquences à l'égard des tiers de bonne foi ?

Une réponse négative à cette question s'impose à l'évidence. La bonne foi qui doit présider aux relations juridiques y fait obstacle.

N'est-ce pas dès lors, le principe général de l'exécution de bonne foi qui sous-tend la théorie de l'apparence. Cette thèse brillamment défendue par Van Gerven (61) permet de réaliser le néces- saire équilibre entre les exigences de la sécurité des tiers et de celle des droits acquis. ~Ile permet, au surplus, d'intégrer la théorie de l'apparence dans notre système juridique sans qu'il soit besoin de recourir à des concepts autonomes ou sui gene- ris : l'on revient aux règles de la responsabilité quasi délictuelle (62) ou, le cas échéant, con- tractuelle (63). Elle permet enfin d'affiner les conditions d'application de la théorie en reintro- duisant un élément d'imputabilité - le manque- ment au devoir de bonne foi - et en mettant en lumière la nécessité d'un préjudice et d'un lien de causalité entre ce préjudice et le manquement à la (60) Comp. Demogue, Traité des obligations, t. I, 276.

(61) W. Van Gerven, op. cit., t. I, Algemeen deel, 83. Voy. dans un sens contraire, L. Cornélis, op. cit., nos 77 et s.

(62) Comp. L. Cornélis, op. cit., n° 79.

(63) Lorsque l'apparence trompeuse est créée par une partie à un contrat au préjudice de l'autre partie.

bonne foi - donc la faute génératrice de res- ponsabilité.

Sans doute l'article 1134, alinéa 3, du Code civil est-il propre au domaine contractuel.

L'obligation d'agir de bonne foi me paraît cependant dépasser les domaines contractuels et précontractuels. Il s'agit d'une règle de bon comportement qui s'impose à tous. P. Van Ommeslaghe a montré à cet égard qu'il s'agissait d'un véritable principe général de droit (64). La généralité de la règle trouve d'ailleurs son fonde- ment dans la présomption de bonne foi qui n'a de sens que s'il existe parallèlement une obligation de se comporter de la sorte.

Conçu de cette manière, le principe de la bonne foi peut justifier tant la théorie de l'abus des droits (65) que la théorie de la « rechts- verwerking » récemment apparue en droit bel- ge (66) (67).

Or, la parenté de cette dernière théorie avec la théorie de l'apparence a. déjà été soulignée (68).

Le titulaire d'un droit qui adopte ouvertement une attitude inconciliable avec son droit peut s'en voir déchu en vertu de la théorie de la « rechts- verwerking » - en l'absence même de toute renonciation, donc de toute intention de renoncer. Qui ne voit que ce sujet de droit a créé une apparence trompeuse et que la déchéance qu'il encourt est la réparation en nature du préjudice que le tiers qui a traité sur base de cette apparence subirait si celle-ci n'était pas mainte'- nue?

(64) P. Van Ommeslaghe, «L'exécution de bonne foi, principe général de droit », Rev. gén. dr. civ. b., 1987, pp. 101 et s. Sur le principe de la bonne foi, consultez également, F. Baert, « De goede trouw bij de uitvoering van overeenkomsten », R. W., 1956-1957, 489-516; A. ,De Bersaques, «L'abus de droit en matière contractuelle», R.C.J.B., 1969, pp. 500-533; W. De Bondt, « Redelijkheid en billijkheid in het contracten- recht », T.P.R., 1984, pp. 95-125; W. Rauws, «Mis- bruik van contractuele rechten », Rev. dr. comm. b., 1984, pp. 244-263; W. Van Gerven en A. Dewaele,

« Goede trouw en getrouw beeld », Liber amicorum Jan Ronse, 103 e.v.; J.-L. Fagnart, «L'exécution de bonne foi des conventions -Un principe en expansion », R.C.J.B., 1986, pp. 285-316; Dirix, « Over de beper- kende werking van de goede trouw », Rev. dr. comm.

b., 1988, pp. 660 et s.

(65) En matière contractuelle, la Cour de cassation a d'ailleurs expressément rattaché l'abus de droit à l'arti- cle 1134, alinéa 3, du Code civil; voy. Cass., 19 sept.

1983, Pas., 1984, I, 55; Cass., 18 juin 1987, Pas., 1,987, I, 1295.

(66) Sur la théorie de la « rechtsverwerking », voy.

notamment, P. Van Ommeslaghe, « Rechtsverwerking en afstand van recht », T.P.R., 1980, pp. 735 et s. et

« Les obligations (examen de jurisprudence : 1974- 19~2) », R.C.J.B., 1988, 230, p. 142; M. Fontaine,

« Portée et limite de la convention-loi », Les obliga- tions contractuelles, Jeune barreau, Bruxelles, 1984, spéc. pp. 181 et s.; Dirickx et Van Oevelen, « Kroniek- Verbintenissenrecht (1978-1980) », R. W., 1980-1981, spéc. n° 33, col. 2441; Kruithof, « Verbintenissen (overzicht van de rechtspraak : 1974-1980) », T.P.R., 1983, 104, p. 607; Ronse et J. Lievens, «De door- braakproblematiek - Les limites de la personnalité juri- dique distincte »,Droits et devoirs des sociétés mères et de leurs filiales, Kluwer, Anvers, spéc., n° 32, pp. 167

et s. ~

(67) Pour un rapprochement entre la« rechtsverwer- king » et le principe général de la bonne foi, voy. P.

Van Ommeslaghe, op. cit., Rev. gén. dr. civ. b., 1987, p. 107, 14.

(68) P. Van Ommeslaghe, op. cit., T.P.R., 1980, pp. 780 et s., nos 29 et s.

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