ÉTUDE DE LA DIGESTION DES FOURRAGES
DANS LE RUMEN PAR LA MÉTHODE
DES SACHETS DE NYLON ;
LIAISONS AVEC LA VALEUR ALIMENTAIRE
C. DEMARQUILLY M. CHENOST
Jacqueline AUBRY, Danièle CHEVALIER Marie JAILLER Station de Recherches sur
l’Élevage
des Ruminants,Centre de Recherches de Glevmont-Fevvand, 63 - Saint- Genès-Champanelle
Institut national de la Recherche agvonomique
SOMMAIRE
La méthode des sachets de nylon permet de suivre la digestion des fourrages ou des organes des plantes fourragères dans le rumen. Celle-ci est pratiquement terminée au bout de 48 heures
de séjour dans le rumen. Nous appelons digestibilité iz, 24 ou 48 heures en sachets, le pourcen-
tage de matière sèche disparue des sachets après r2, 24ou 48 heures de séjour dans le rumen. La digestibilité 48 heures des fourrages est liée essentiellement à la digestibilité in vivo et permet donc
de la prévoir.
La digestibilité i2 ou 24 heures est liée à la fois à la digestibilité in vivo et à la nature bota-
nique du fourrage. La luzerne est digérée plus rapidement que les graminées et le Ray-grass
d’Italie plus rapidement que la Fétuque élevée.
La digestibilité 12heures permet de prévoir les quantités de fourrages verts ou d’ensilages ingérées ; la digestibilité 24 heures permet de prévoir les quantités de foin ingérées. Le produit
des deux digestibilité 12z (ou 24heures) et 48 heures permet de prévoir la quantité de matière orga-
nique digestible ingérée qui caractérise au mieux la valeur alimentaire des fourrages. La précision
de la prévision est en moyenne aussi bonne que celle obtenue à partir de la digestibilité in vivo
et est bien meilleure que celle obtenue à partir de la teneur en cellulose brute des fourrages.
INTRODUCTION
La valeur alimentaire d’un
fourrage dépend
de deux facteursd’égale impor-
tance : sa valeur
nutritive, plus spécialement
sa valeurénergétique
dont le meilleur critère est le coefficient dedigestibilité
de la matièreorganique,
et sonacceptabilité
ou
quantité
de matière sèche volontairementingérée
par un animal àqui
on offre cefourrage
à volonté.La mesure de la
digestibilité
desfourrages
et saprévision
ont faitl’objet
de trèsnombreux travaux tant en France
qu’à l’étranger.
On aproposé depuis
fortlong-
temps des méthodeschimiques
dont aucune ne donne entièrement satisfaction. De nombreux auteurs se sont donc orientésdepuis
une dizaine d’années vers les méthodesbiologiques
utilisant lejus
de rumen d’animaux fistulisés(cf.
revue <le] OH : N SOK, rg66)
car elles donnent une estimationplus précise
de ladigestibilité
que les méthodeschimiques
derapidité comparable.
Un
revanche,
on apendant
trèslongtemps négligé
de mesurer lesquantités ingérées
adlibitum,
et àplus
forte raison on ne s’est pas intéressé à lesprévoir.
Lesfacteurs de variation de
l’acceptabilité
desfourrages
sont donc mal connus. On alongtemps
attribué ces variations del’acceptabilité
desfourrages
verts à celles deleurs
qualités gustatives
pour l’animalqui
lesreçoit,
d’oit les nombreux essais de« palatabilité
» effectués(cf.
revue de1 V11 BS, I C) 55 ).
On sait maintenant que laquantité
des
fourrages
secsingérée
par le ruminant est avant tout liée à la distension des réser- voirsgastriques
et notamment du rumen(cf.
revue de I3_m,cm etC!!nn,mc, 19 (J 2 ),
et
qu’elle présente
enparticulier
une liaisonpositive
étroite avec ladigestibilité
dufourrage (Br,.!x2ER
etal., 19 6 1 ).
De même due CORIŒTT et al.( 19 0 3 ).
nous avonsretrouvé cette liaison pour les
fourrages
verts chez le mouton(D EJVlAW2UILLY , ig6 5 )
et chez la vache
(DE1BLBRQUlU.V, ig66).
Nous avonscependant
montré que la liaison entre laquantité
de matière sècheingérée
et ladigestibilité
n’était vraiment étroitequ’à
l’intérieur du mêmecycle
devégétation
de la mêmeespèce.
Il en résulte que desfourrages
de mêmedigestibilité
mais defamilles, d’espèces
ou decycles végétatifs
différents
peuvent
êtreingérés
enquantité
trèsdifférente ;
enparticulier,
lesLégumi-
neuses sont
ingérées
enplus grande quantité
que les Graminées et les repousses enplus grande quantité
que lespremiers cycles végétatifs.
Dans les mêmesconditions,
au
contraire,
lesquantités
de cellulosebrute digestible ingérées
sont sensiblement les mêmes. Pourexpliquer
cefait,
nous avionssupposé
que c’étaitplus
la vitesse dedigestion
que ladigestibilité
desfourrages qui
était le facteur essentiel de leur accep- tabilité. Nous ne faisions en fait quereprendre l’hypothèse
émise par CRAMPTON(ig5!).
DorrE!’Ex et al.( 19 6 0 )
ont d’ailleurs mis en évidence une liaison entre la quan- tité de matière sècheingérée
et laquantité
de cellulosedégradée après
untemps
court
( 12 heures)
de fermentation iii vitro.Depuis plusieurs
années nouspoursuivons
à la Station de Recherches sur1’I%le-
vage des Ruminants l’étude
systématique
de la mesure et de laprévision
de la valeuralimentaire des
fourrages
verts et conservés. Dans le cadre de cette étude nous avonsétudié s’il était
possible
d’utiliser la méthode des sachets denylon proposée
par VAN
KEUREN et HEINEMANN
(rg62),
méthodequi
est dérivée de celle despoches
desoie de
Q um
et al.(rg 3 8),
pour :- d’une
part,
suivre ladigestion
desfourrages
ou des organesvégétatifs
deplantes fourragères
dans le rumen ;- d’autre
part,
relier lesquantités digérées
dans les sachetsaprès
différentstemps
deséjour
dans le rumen à ladigestibilité
et àl’acceptabilité
desfourrages.
MATÉRIEL
ETMÉTHODES
Fouvvages
Nous avons utilisé 6z fourrages verts, 58 foins et y ensilages. Ces fourrages ont été choisis de familles botaniques, d’espèces et de cycles végétatifs différents, parmi ceux dont nous avons
étudié de r965à 1967la digestibilité et l’acceptabilité sur des moutons suivant les méthodes que
nous avons précédemment décrites (DL:MARQUILLY et JARRIGE, r96¢; 1)EMAI<QUILLY, rg65).
Nous avons d’abord étudié la cinétique de la digestion des feuilles et des tiges de deux luzernes et de trois graminées dont l’évolution avec l’âge <lc la digestibilité et de l’acceptabilité était mesu-
rée sur des moutons. Les feuilles et les tiges de ces plantcs ont été séparées, séchées à l’étuve à 8
0
&dquo;C, puis très grossièrement broyées dans un Cutex. Nous avons ainsi étudié :
- en i96¢ (essai i) des feuilles et des tiges de Luzerne prélevées toutes les deux semaines
au cours du 1er cycle végétatif (t prélèvements) et au début et à la fin des 2!, 3! et 4cycles végé-
tatifs ;
- en 1965 (essai 2) des feuilles et des tiges de Luzerne, de Ray-grass d’Italie, de Fétuque
élevée et de Dactyle, prélevées toutes les deux semaines au cours du 1&dquo;1’ cycle végétatif.
Nous avons ensuite mesuré l’importance de la digestion au bout de 12-24-48 et 72 heures des
20 échantillons de plante entière correspondant aux feuilles et aux tiges étudiées dans l’essai 2, et (le 34foins (essai 3) pour étudier qu’elles étaient les durées de la digestion qui permettaient de prévoir au mieux la digcstibilité et l’acceptabilité de ces fourrages. Ces durées ayant été détermi- nées nous avons alors mesuré t’importance de la digestion au bout de i2 ou 24 heures et 48 heures
de ¢3fourrages verts, 20foins et 17ensilages (essai 4) pour la relier à la valeur alimentaire de ces
fourrages. Tous les fourrages étudiés dans les essais 3 et étaient des échantillons représentatifs
des fourrages offerts pendant les périodes de mesure de la digestibilité et de la quantité ingérée.
Ils avaient été séchés pendant 24 heures à l’étuve à 8o«C avant d’être finement broyés dans un broyeur muni d’une grille à maille de o,8 mm de diamètre. Les valeurs moyennes et extrêmes de la
d igestibilitë
et de l’acceptabilité des échantillons utilisés lors des différents essais sont présentéesdans le tableau r.
Technique des sachets de nylon
Environ 3 g de matière sèche de fourrage broyé sont pesés et introduits dans un sachet de tissu de nylon à mailles fines ( ! 501-’-)’ Ce sachet, qui mesure environ i5cm X 7cm, est fabriqué
sans couture mais avec des soudures à chaud. Une fois l’échantillon introduit, le dernier côté est fermé par deux soudures parallèles entre lesquelles on fixe un oeillet permettant de suspendre le
sachet. Les sachets sont mis 24 heures à l’étuve avant d’être pesés. Ils sont alors attachés par un fil de nylon à un anneau de plomb de i kg enrobé de matière plastique qui est déposé dans le sac
ventral du rumen d’une vache porteuse d’une large canule du rumen. Nous avons introduit au
maximum 40 sachets à la fois et utilisé 3 sachets par fourrage et par temps de séjour. Les sachets ontété retirés du rumen après respectivement 24, 48 et 72 heures dans l’essai i et iz, 24, 48 et
72
heures dans les essais 2et 3, iz ou 24et 48 heures dans l’essai 4. Dès leur sortie du rumen ils sont abondamment lavés puis séjournent 48 heures dans une solution acide de pepsine identique
à celle utilisée par TiLLLY et TEKKY (1963). Ils sont alors de nouveau lavés, séchés et pesés. Le pourcentage de matière sèche disparu est appelé digestibilité 12, 24, 48 ou 72 heures en sachets.
Dans les essais i et 2chaque échantillon de fourrage a été étudié simultanément sur deux vaches qui recevaient 4 repas (6 h, 9h, 14 h et r8 h) de luzerne verte fauchée chaque matin. A partir de l’essai 3 nous n’avons utilisé qu’une seule vache recevant un bon foin de luzerne en deux repas par jour, à 6 et 18 heures. Les sachets ont été, dans chaque essai, déposés dans le rumen à
9 heures. Au cours de l’essai 3 nous nous sommes progressivement aperçus qu’il était nécessaire
d’incorporer dans chaque série un foin standard et cela pour deux raisons ; d’une part, l’activité cellulolytique du jus de rumen peut éventuellement varier un peu d’un jour à l’autre, même quand
la vache reçoit toujours le même foin; ces variations d’activité cellulolytique ont une influence parfois non négligeable sur les valeurs obtenues à iz heures. D’autre part, les valeurs obtenues pour des fourrages broyés finement (et c’est le cas pour les essais 3 et 4) peuvent dépendre dans
une certaine mesure du tissu de nylon employé. Or, il est très difficile de retrouver un tissu ayant
exactement les mêmes caractéristiques d’un achat à l’autre.
Dans l’essai 4 les valeurs obtenues à chaque série ont donc été réajustées en les multipliant
par le rapport :
RÉSULTATS
Adaj!tation
de la méthodeNous avons d’abord étudié si les valeurs obtenues
dépendaient
de l’animal utilisé etquel
était le nombre de sachets nécessaire pour obtenir uneprécision
satis-faisante. Pour cela nous avons mesuré la
digestion
24,4 8
et 72 heures dans le rumen de 2vaches,
dupapier-filtre
et de 4 échantillons de feuilles et detiges
deluzerne, prélevés
à intervalles de 2 semaines au cours dupremier cycle
devégétation.
Il y a eu 4 séries de mesures, une parprélèvement, chaque
échantillon étant étudié entriple (
3
g de matièresèche)
pourchaque temps
deséjour
dans le rumen et pourchaque
vache. A leur sortie du rumen, les sachets ont été lavés
soigneusement
àl’eau,
séchéspuis pesés.
La méthode des sachets de
nylon permet
de suivre ladigestion
desfourrages
ou du
papier
filtre dans le rumen(fig. r). Cependant,
pour les substrats sedégradant rapidement (feuilles),
la valeur 72 heures de ladigestibilité
estplus
faible que la valeur4 8
heures. Cela nous semblait résulter du fait que les sachets étaient d’autantplus
difficiles à laverqu’ils
avaientséjourné plus longtemps
dans le rumen. Lessachets
ayant
étéconservés,
nous les avonsrepris
pour les soumettre à unedigestion
pepsique
en les laissant tremper4 8
heures dans une solution acide depepsine
main-tenue à
40 °,
paranalogie
avec cequi
se fait dans la méthode dedigestibilité
in vitrode TW!,!y et al.
(ig6o).
Ce traitementaugmente
lesdigestibilités
24,4 8
et 72 heuresen moyenne de 2,5-3
points,
3-4points
et7 -8 points respectivement. L’augmentation
est
indépendante
du substrat considéré(fourrage
oupapier-filtre),
cequi permet
depenser que le traitement
agit
surtout enpermettant
unlavage
correct des sachets.Il élimine la diminution
apparente
de ladigestibilité
d’un substrat dont ladigestion
est terminée
(fig. i).
Nous l’avonsadopté systématiquement
pour les études ulté-rieures,
et les sachetsaprès
avoir été lavés à leur sortie du rumenséjournent 4 8
heuresdans une solution acide de
pepsine
avant d’être séchés etpesés.
Les valeurs obtenues diffèrent très peu entre les deux vaches
(fig. i) :
en moyenne pour les 4 séries de 0,15point
pour lesfeuilles,
1,45point
pour lestiges,
1,0point
pour le
papier-filtre.
Ces différences ne sont passignificatives
maispeuvent
le devenirpour une série
donnée ;
c’est ainsi que, lors de la 3esérie de mesures elles ont atteint 3,o
points
en moyenne ; elles étaient d’autantplus
faibles que letemps
deséjour
dans le rumen était
important : 6, 5 points
à 24heures,
1,0point
à4 8
heureset o,2
point
à 72 heures pour les substrats luzerne. Il est doncindispensable
de faireles mesures simultanément sur deux vaches ou de
placer
desfourrages
standardsdans
chaque
série.Une étude
statistique
des résultats des 4 séries de mesureindique que le
nombrede sachets nécessaires pour avoir une
précision
d’estimation de 1,2 et 3 p. 100 estrespectivement
le suivant :8, 2
et 1sachets pour lesfeuilles,
14,4et 2sachets pour lestiges.
Pour les mesures ultérieures nous avons donc
adopté
3 sachets partemps
deséjour
pour les substratsfourrages,
et abandonné le substratpapier-filtre
à cause dela variabilité des
résultats ;
il faudrait 10sachets pour obtenir uneprécision
de 5 p. 100au
temps
deséjour 4 8
heures.Cinétique
de ladigestion
da7zs le rumen desfeuilles,
des
tiges
et desplantes
entièresLes résultats des mesures effectuées sur les 4
cycles
de Luzerne en19 6 4 ,
et surles
premiers cycles
deRay-grass d’Italie,
deFétuque élevée,
deDactyle
et de Luzerneen
rg6 5
sontprésentés
dans lesfigures
2et 3.La
digestion
des feuilles de luzerne estpratiquement
terminée au bout de24
heures de
séjour
dans le rumen, et les valeurs obtenues à4 8
ou 72 heures sont voisines de 92-93p. 100,quels
que soientl’âge
de laplante
et le numéro ducycle
devégétation.
Enrevanche,
ladigestion
des limbes degraminées
estplus
lente et elledemeure
importante
entre 24 heures et4 8
heures deséjour (temps
au boutduquel
la
digestion
est alors presqueterminée),
notamment pour laFétuque
élevée. Sonimportance dépend
du stade devégétation
de laplante ;
aussi les valeurs obtenuesaprès 4 8
heures deséjour
dans le rumen sont élevées au début du1er cycle (8 2 , 5
à g2,55 suivant lesespèces) puis
elles diminuent assezrégulièrement
avecl’âge
d’environo, y
, 0,20 et 0,30
point
parjour, respectivement
pour leRay-grass,
laFétuque
et le
Dactyle.
La
digestion
destiges
de Luzerne estplus
lente que celle des feuilles. Elle n’estpratiquement achevée,
comme celle destiges
degratninées d’ailleurs, qu’après 4
8
heures deséjour
dans le rumen. Ladigestibilité 4 8
heures destiges
de Luzerne esttoujours
nettement inférieure à celle desfeuilles,
et elle diminue avecl’âge
de laplante.
La diminution est variable suivant le numéro ducycle
devégétation :
0,63,
0,95, 0,34 et 0,17point
parjour respectivement
aux ier, 2e, 3eet4 e cycles.
Ladigestibilité 4 8
heures destiges
degraminées peut
être aussi élevée que celle des limbes au début dupremier cycle
devégétation,
mais elle diminuebeaucoup plus
vite avec
1’âge : respectivement
o,33, 0,47 et o,75point
parjour,
pour leRay-grass,
la
Fétuque
et leDactyle.
Les
digestibilités
12,24 , 4 8
et 72 heures de laplante
entière vont donc diminueravec
l’âge
de laplante (fig. 3 ),
d’unepart
parce que laproportion
de feuilles diminueau bénéfice de la
proportion
detiges,
d’autrepart
parce que lesdigestibilités
propres des limbes et destiges
diminuent.Il est intéressant de constater que des
fourrages
de mêmedigestibilité
in vivoont des
digestibilité 4 8
ou 72 heurespratiquement identiques (ces
valeurs doivent donc être en liaison étroite avec ladigestibilité
in vivo desfourrages),
mais desdiges-
tibilités 12ou 24heures très différentes
(fig. 4 ).
La Luzerne estdigérée plus
vite quele
Ray-grass
d’Italie et ce dernierplus
vite que leDactyle
et laFétuque
élevée.Cependant
ladigestibilité
12 heures nepeut
servir à estimer la vitesse dedigestion
des
fourrages
que si ceux-ci ont la mêmedigestibilité 4 8
heures. En effet elledépend
à la fois de la
plante
considérée et de ladigestibilité 4 8
heures(fig. 5 )
c’est-à-dire de ladigestibilité
in vivo. Aussi proposons-nousd’appeler
vitesse dedigestion
lerapport digestibilité
12 heures -r < &dquo; i j i .1digestibilité 12 heures
X 100. Les valeurs moyennes et extrêmes obtenues au débutdigestibilité q8
heureset à la fin du
premier cycle
devégétation
sontprésentées
dans le tableau 2. Elles confirment que la Luzerne estdigérée plus rapidement
que lesgraminées
et leRay-
grass italien
plus rapidement
que leDactyle
et laFétuque
élevée. Elles montrenten outre que la vitesse de
digestion
des feuilles estplus
élevée que celle destiges
saufpour la
Fétuque
élevée etqu’elle
diminuebeaucoup
moins vite avecl’âge
de laplante.
Ces différences de vitesse de
digestion
entre organes pour uneplante
donnée sontdues en
partie
au fait que ladigestibilité 4 8
heures des feuilles estplus
élevée etdiminue
beaucoup
moins vite que ladigestibilité 4 8
heures destiges.
Relations avec la valeur alimentaire des
fourrages
Dans une
première étape
nous avons cherché à déterminer la durée( 12 ,
24 ou4
8 heures)
de ladigestion qui permettait
deprévoir
au mieux ladigestibilité
etl’acceptabilité
desfourrages
mesurées sur des moutons. Cette étude a été faite avec 20 échantillons defourrages
verts(dont
15 sont ceux dont nous avions mesuré lacinétique
de ladigestion
des feuilles et destiges)
et 34 échantillons de foins : z8 foins degraminées ( 7 Fétuque élevée,
4Ray-grass d’Italie,
2Dactyle,
5prairies
perma-nentes)
et 16 foins de luzerne.La
prévision
de ladigestibilité
in vivo desfourrages
verts s’améliore avec la durée de ladigestion
en sachets et celle de laquantité ingérée
devient moins bonne(tabl. 3 ).
Ladigestibilité
in vivopeut
êtreprévue
defaçon
très satisfaisante àpartir
de la
digestibilité 4 8
heures(r
=0 ,8 95 )
et laquantité ingérée
àpartir
de ladiges-
tibilité 12 heures
( y
=0 , 944 ) (tabl.
3,fig. 6).
Iln’y
a aucunavantage
à considérer ladigestibilité
de la matière sèche insoluble dans l’eau(qui
est un critèreapproché
des constituants membranaires du
fourrage) plutôt
que ladigestibilité
de la matière sèche(tabl. 3).
La
digestibilité
in vivo desfoins,
notamment ceux degraminées, peut
être estimée defaçon
très satisfaisante àpartir
de ladigestibilité
en sachets à4 8
heures(tabl. q).
Le coefficient de corrélation obtenu pour les foins de
légumineuses
n’est passignifi- catif,
mais celas’explique
par le fait que lesdigestibilités
in vivo de ces foins étaient très peu variables :58,z !
2,5.Quand
on considère l’ensemble desfoins,
ce sont lesdigestibilités
à 12 ou 24 heuresqui permettent
la meilleure estimation des quan- titésingérées ;
les droites derégression
sont d’ailleurspratiquement
confondues pour lesgraminées
et leslégumineuses.
Compte
tenu de cesrésultats,
nous avons alors mesuré ladigestibilité
en sachetsde 42
fourrages
verts, 24 foins et 17ensilages qui
sont venuss’ajouter
aux 20fourrages
verts et aux 34 foins
déjà
étudiés. Pour ces nouveaux échantillons nous nous sommescependant
limités auxtemps
deséjour
suivants dans le rumen : 12 et4 8
heures pourles
fourrages
verts et lesensilages,
z2, 2q. et4 8
heures pour les foins car nous voulions pour ces derniers choisir définitivement entre les valeurs 12 et 24 heures pour laprévision
de laquantité ingérée.
Les résultats obtenus
(tabl. 5 )
confirment que ladigestibilité
in vivopeut
êtreprévue
defaçon
très satisfaisante àpartir
de ladigestibilité 4 8
heures ensachets ;
le coefficient de corrélation estégal
à0 ,8 73
pour les6 3 fourrages
verts, à 0,922 pour les 17ensilages
et à 0,734pour les 54foins. Ces valeurs sont du même ordre que celle( 0 , 79
)
obtenue par YANG et al.( 19 6 2 )
entre ladigestibilité
in vivo de la matière sèche et ladigestibilité
44 ou 54 heures de la matière sèche en sachets de 13fourrages ;
elles auraient vraisemblablement encore été
plus élevées,
tout au moins pour lesfourrages
verts et lesfoins,
si nous avions pucorriger
les résultats des essais i à 3 à l’aide d’un témoin comme ce fut le cas pour lesensilages.
Laprécision
de laprévision
est encore améliorée si on
sépare
lesgraminées
deslégumineuses
et lespremiers cycles
des repousses. Elle estsupérieure
à celle obtenue àpartir
de ladigestibilité
in vitro de TILLE; et al.
( 19 6 0 ) (C H E NOS T,
résultats nonpubliés).
La
digestibilité
12 heures en sachetspermet
deprévoir
correctement les quan- tités defourrages
vertsingérés (r
=0 ,8 19 ,
n =6 3 ).
Ellepermet
aussi deprévoir,
mais de
façon beaucoup
moinsprécise,
lesquantités d’ensilage (r
=0 , 701 )
ou defoin
(r
=0 , 734 ) ingérées.
Ces résultats montrent d’ailleurs que ladigestibilité
24
heures en sachets
permet
uneprévision
de laquantité
de foiningérée significati-
vement meilleure
(r
=0 , 7 8 9 )
que ladigestibilité
12 heures(r
=0 , 734 ).
Ces liaisons auraient aussi été vraisemblablement meilleures si tous les résultats avaient pu êtrecorrigés
à l’aide du même témoin.Quoiqu’il
en soit ladigestibilité
en sachetspermet
deprévoir
laquantité ingérée
de
façon plus précise
que ne le fait ladigestibilité
in vivo(tabl. 5 ).
La
quantité
de matièreorganique digestible ingérée
caractérise au mieux lavaleur alimentaire d’un
fourrage.
Ellepeut
êtreprévue
defaçon
très satisfaisante àpartir
duproduit digestibilité
12heures(ou
24heures pour lesfoins)
Xdigestibilité 4
8 heures ;
le coefficient de corrélation estrespectivement égal
à0 ,8 94 , 0,814
et o,793 pour les6 3 fourrages
verts, les 17ensilages
et les 54foins. C’est à notre connaissance la meilleure relationproposée jusqu’ici ;
ellepermet
uneprévision
bienplus précise
que la cellulose
brute,
du même ordre que celle obtenue àpartir
de ladigestibilité
in vivo
(tabl. 5 ).
Leséquations
des droites derégression
liant la valeur nutritive etalimentaire des
fourrages
auxdigestibilités
en sachets sont données dans le tableau 6.DISCUSSION
La
technique
des sachets denylon permet
de suivre lacinétique
de ladigestion
des
fourrages
dans le rumen et de mettre en évidence des différences entrefourrages.
Les causes des différences de vitesse de
digestion
doivent être recherchées dans les teneurs différentes en constituants solubles dans l’eau dont ladigestion
est trèsrapide
et dans les différences de
caractéristiques physico-chimiques
des membranesvégé- tales ;
enparticulier,
les luzernes sontdigérées plus rapidement
que lesgraminées,
d’une
part
parcequ’elles
sontplus
riches en constituants solubles dansl’eau,
d’autrepart
parcequ’elles
sontplus
pauvres en membranesdigestibles qui
sont par ailleursdégradées plus rapidement
que celles desgraminées.
Il est normal que la
digestibilité
obtenue en sachetsaprès
destemps
deséjour
assez
longs
dans le rumen(égaux
ousupérieurs
à4 8 heures)
soit en liaison étroiteavec la
digestibilité
in vivo. Eneffet,
les constituants membranairesdigestibles
sontpresque totalement
digérés
dans le rumen( 90
à 95 p. 100d’après
BRucE etat., 19 66
et
JouRx!’r,
résultats nonpubliés)
et leurdigestion
est lente. C’est d’ailleurspourquoi
le
temps
deséjour
moyen desfourrages
dans le tubedigestif
du mouton estpratique-
ment
toujours supérieur
à 40 heures et est leplus
souventcompris
entre 45et 70 heures(DE MARQ
umv,
résultats nonpubliés).
Ladigestion
des constituants membranairesdigestibles,
doitdonc,
pour lamajorité
desfourrages,
êtrepratiquement
achevée aubout de
4 8
heures deséjour
dans le rumen. On sait en outre que les constituants solubles dans l’eau ont unedigestibilité
vraie voisine de 100 p. 100 etqu’ils
sonttrès
rapidement digérés
dans le rumen. Cequi
reste dans le sachetaprès 4 8
ou 72 heuresde
séjour
dans le rumen doit doncreprésenter
assez fidèlement(mais
un peu parexcès)
la fraction
indigestible
vraie dufourrage
et par là être liée étroitement à ladigestibilité
in vivo. D’autres auteurs ont d’ailleurs trouvé eux aussi une relation entre la
diges-
tibilité i!a vivo des
fourrages
et ladigestibilité
44ou 54heures de la matière sèche en sachets(YexG et c!l., 19 6 2 )
ou entre ladigestibilité
in vivo de la cellulose vraie et ladigestibilité 42 , 4 8
ou 72 heures de la cellulose vraie(LusK et at., 19 6 2 ;
HOPS07,! etal., 1963).
En
revanche,
il n’est pas étonnant que laquantité ingérée
soit liée surtout à ladigestibilité
en sachetsaprès
untemps
deséjour
court dans le rumen. Eneffet,
cequi
encombre le rumen
après
le repas ce n’est pas seulement la fractionindigestible (qui dépend
de ladigestibilité
dufourrage),
mais aussi la fractiondigestible
en cours dedigestion puisque
cettedigestion
doit avoir lieu dans le rumen, pour que la fractionindigestible
soit libérée et réduite enparticules
suffisamment fines pourquitter
lerumen. Il est donc normal que la
quantité
defourrage ingérée dépende
étroitementde la
digestibilité
12heures,
c’est-à-dire non seulement de ladigestibilité
dufourrage,
mais aussi de sa vitesse de
digestion.
Demême,
il est normal que laquantité ingérée dépende plus
étroitement de ladigestibilité
en sachets de la matière sèche que de ladigestibilité
de la matière sèche non extractible à l’eau. En effetquand
on relie laquantité ingérée
à ladigestibilité
de la matière sèche non extractible àl’eau,
ou à ladigestibilité
des constituants membranaires ou de la cellulose vraie onnéglige
unfacteur très
important
de laquantité ingérée qui
est la teneur en constituants solubles dans l’eau car ils sontdigérés rapidement
et ont unpouvoir
d’encombrement trèsfugace.
Enparticulier
si la vitesse dedigestion
et par làl’acceptabilité
des luzernes estsupérieure
à celle desgraminées
de mêmedigestibilité
ce n’est pas seulement parce que les membranes de luzerne sontdigérées plus rapidement
que celles desgraminées
c’est aussi et surtout parce que les luzernes sontplus
riches en constituants solubles dans l’eau. Au cours d’uncycle
de croissance d’une mêmeplante,
la teneur en constituants solubles dansl’eau,
ladigestibilité
in vivo et, par là ladigestibilité
12
heures,
évoluent dans le même sens ; tout se passe alors comme si laquantité ingérée
nedépendait
que de la seuledigestibilité
comme l’ontproposé
BLAXTER et al.( 10 6 1
).
Mais il n’en estplus
de mêmelorsqu’on
considère desfourrages d’espèces
ou decycles
différents. Ilspourront
donc à mêmedigestibilité
êtreingérés
enquantités
différentes s’ils sont
digérés
à des vitesses différentes.L’intérêt essentiel de la méthode des sachets est
qu’elle permet
suivant letemps
deséjour
des sachets dans le rumen, deprévoir
soit laquantité ingérée
soit ladigesti- bilité, permettant
donc deprévoir
les 2facteurs de la valeur alimentaire desfourrages.
Elle
peut
donc rendre degrands services,
ne serait-cequ’aux
sélectionneursqui
nedisposent
pasjusqu’ici
de méthodesd’appréciation rapide
del’acceptabilité
desfourrages.
C’est ainsi que nous avons montré parexemple,
que la mauvaiseaccepta-
bilité de laFétuque
élevée étudiée était due à ladigestion
lente de ses feuilles. Celaexplique
vraisemblablementpourquoi
GILLET( 19 66)
a observé une liaison entre laflexibilité des feuilles et
l’acceptabilité
desfétuques
élevées. L’inconvénientmajeur
de la
technique
dessachets,
comme d’ailleurs de latechnique
des fermentations invitro,
est de nécessiter laprésence
d’animaux fistulisés. Elle seprête
malheureusement moins bien au travail en série que latechnique
dedigestibilité
in vitro. Elle a cepen- dant le mérite de resterplus proche
des conditions de ladigestion
in vivo et, donc depermettre
de mieux estimer la vitesse et l’intensité de ladigestion
dans le rumen.Comme toutes les méthodes
biologiques
elle a aussi l’inconvénient d’être moins repro- ductiblequ’une
méthodechimique.
Il sera donc nécessaired’incorporer
danschaque
série des témoins et cela d’autant
plus
que les résultats obtenus avec desfourrages
finement
broyés dépendent
de laqualité
du tissu denylon employé.
Il est d’ailleursvraisemblable que les liaisons que nous avons obtenues auraient été
plus
étroitessi,
dès ledébut,
nous avionsincorporé
de tels témoins danschaque série,
pourcorriger
nos résultats.
Les inconvénients
majeurs
destechniques
utilisant comme inoculum dujus
de rumen
peuvent
êtresupprimés
enpartie
enremplaçant
celui-ci par unepréparation cellulasique fongique (j ARR iGE
etTHm!rrD, 10 6 0 ).
Ladigestion cellulasique permet
deprévoir
ladigestibilité
desfourrages
avec uneprécision
très satisfaisante. Il serait intéressant d’étudier si ellepermet
aussi deprévoir
la vitesse dedigestion
desfourrages
et par
là,
laquantité ingérée.
Reçu pour publication en octobre 1969.