VARIATION DE LA COMPOSITION EN ACIDES AMINÉS
DU SANG PORTE AU COURS DE LA DIGESTION CHEZ LE PORC.
R. PION, G. FAUCONNEAU, A. RÉRAT
J. d’ANGELO, Madeleine FORIGNON Jeanine WAGNER I aboratoire des Métabolismes et Station de Recherches sur
l’Élevage
des PorcsCentre national de Recherches
zootechniques, Jouy-en-Josas (Seine-et-Oise)
SOMMAIRE
Huit
porcelets
de 25kg
porteurs de fistules de la veine portereçoivent
des repas constitués :d’amidon,
associé,ou
non à différentesprotéines (arachide,
farine dehareng),
oud’orge.
Desprélè-
vements de sang porte sont effectués
pendant
huit heuresaprès
les repas. Les acides aminés du sang total sont dosésaprès séparation
parchromatographie
surpapier.
Chez les animaux àjeun,
les pro-portions
des divers acides aminés sont relativement constantes, bien que l’aminoacidémieglobale
varie avec les
sujets. Après
les repas, l’aminoacidémie est augmentéependant
huit heures environ,le maximum a été observé entre deux et trois heures. Les variations de chacun des acides aminés
indispensables
sontcaractéristiques
de laprotéine ingérée
et lesaugmentations
peuvent souvent être reliées à lacomposition
desprotéines ingérées.
!---.
INTRODUCTION
Les acides aminés libres sont relativement peu abondants dans le sang des
mammifères,
200 à 400mg/litre
dans le sang de porc(PION
etal., z 9 6 3 ),
bienqu’ils
constituent la
principale
forme detransport
descomposés
azotés vers les lieux d’uti- lisation :glande
mammaire(B ARRY , ig6i), muscle,
foie. En outre, les acides aminésprésents
dans ces différents organes nereprésentent qu’une
faibleproportion
deceux
qui s’y
trouvent sous forme deprotéines : I/200e
àIII
oooe suivant les acides aminés(Prorr
etal., rg6 3 ).
Dans ces
conditions,
la réservemétabolique
des acides aminés libres est trèslimitée ;
aussi lessynthèses protéiques
nécessaires à la constitution de nouveauxtissus
(croissance)
et au renouvellement des tissus existants(entretien)
doivent-ellesse faire essentiellement à
partir
des acides aminésindispensables provenant
de l’ ali- mentation.Comme la
synthèse
d’uneprotéine
donnée nécessite laprésence
simultanée detous les acides aminés
qui
laconstituent,
l’utilisation de ces derniersdépendra
de lavitesse relative à
laquelle
les divers acides aminés seront mis à ladisposition
des diffé-rents tissus.
Or,
les acides aminés alimentaires sont fournis à l’animalprincipalement
sous forme de
protéines qui
sonthydrolysées
dans le tubedigestif.
I,esproduits
decette
hydrolyse
traversent laparoi
intestinale et sonttransportés
vers les différents organes. Selon DAWSON et PORTER( I g6 2 ),
chez le rat, cetransport
s’effectue en ma-jeure partie
sous forme d’acides aminés libres par la veineporte, qui
draine vers lefoie le sang
provenant
de l’intestin. Lesquantités transportées peuvent
êtreimpor-
tantes,
malgré
la faiblesse de la teneur du sang en acides aminéslibres,
card’après
nos
premières observations,
le débitsanguin porte
semble très élevé( 0 , 5
à Ilitre/
minute chez un porc de 30
kg).
La vitesse àlaquelle
les différents acides aminés pro- venant d’un aliment donnéapparaissent
dans la veineporte
doit donc conditionner leur utilisation. Cette vitessedépend :
de leurcinétique
de libération dans la lumière del’intestin,
de larapidité
de leurabsorption
par la muqueuse de cet organe, des métabolisations éventuelles subies à ce niveau :synthèse protéique,
transaminations.Les acides aminés
apparaissant
dans le sangporte peuvent également
avoir uneorigine endogène (desquamations
de laparoi intestinale,
sucsdigestifs).
Le
dosage
des acides aminés dans le sangporte
à un instant donné ne fourniten
principe qu’une
estimationimparfaite
desapports
dus au tubedigestif,
car lesconcentrations
dépendent également
de lacomposition
du sang artérielqui irrigue
l’intestin
(variable
en fonction de l’utilisation par lestissus)
et des modificationspossibles
de débit du sangporte
au cours de ladigestion.
Ceci
peut expliquer
que de nombreux auteurs(DENT
etSCHILLING,
Ig49; DENTONet
!’ LV!HJ!M,
1954; WHEELER etMORGAN, 1958; G U GGE NH E IM ,
HAI,É!VY et FRIED- MANN,
I g6 0 ;
GOLDBERG etGuGGËNHEIM, Ig62;
I)AWSONet PORTER,19 62 ;
DAWSONet Hor,DSwoRTH,
19 6 2 ,
PERAINOetHARPER, I g6 3 ),
n’aient pu, chez le chien et chez le rat, établir unparallélisme rigoureux
entre lescompositions
en acides aminés desprotéines ingérées
et celles du sangporte. Cependant,
lesapports
d’acides libres dans le sangporte
sont le résultat final de ladigestion
desprotéines
alimentaires et l’étude des variations de leurs concentrations dans le sangporte constitue, compte
tenu des restrictions énoncées
ci-dessus, (composition
du sangartériel, débit)
unmoyen d’évaluer ces
apports.
Nous
avions,
dans une communicationprécédente (PION
etal., 19 6 3 ) exposé
les variations de la
composition
en acides aminés du sangporte
chez leporcelet après quelques
résultatsexpérimentaux.
Cesexpériences
ont étécomplétées,
etnous avons
regroupé
dans ce mémoire les résultats obtenus au cours d’une trentaine de repasexpérimentaux.
MATÉRIEL
ETMÉTHODES
Huit
porcelets
de 20à 25kg,
porteurs de fistules permanentes de la veine porte(A RSAC
et RÉRAT,19
6 2
) reçoivent
une ration de base dont lacomposition
centésimale était la suivante(en poids) :
farine de
hareng
deNorvège
... 21,6 amidon...65,4
cellulose ... 5 huile d’arachide ... 5 minéraux et vitamines... 3
Des repas
expérimentaux
decomposition
variable sont donnés le matin(tabl. i). Il s’agit soit
de la ration de base dans
laquelle
varient lesproportions
d’amidon et de farine dehareng,
soit d’ami- don seul(repas
sansazote)
soitd’orge,
soit d’amidon et d’arachide. Dans tous les cas, ces aliments sont associés à unmélange
minéral etvitaminique équilibré.
Les animaux sont àjeun depuis
aumoins
quinze
heures.Les
prélèvements
de sang porte (io ml environ) sont efCectués au début du repas (tempszéro),
et à des temps variables
après
celui-ci(trois
aumaximum).
Le sang,prélevé
à laseringue,
sans créerde forte
dépression
dans la canule, estmélangé
immédiatement avec environ fois son volume d’étha-nol à 95° froid (― 5°C environ). La
quantité
prélevée est mesurée par pesée. Les échantillons sont conservés à - 15°.Les acides aminés libres et amides du sang total sont
séparés
par 4extractions successives par 8 volumes d’éthanol 84p. 100(v/v).
Les extraits désalifiés suréchangeur
de cations sont dosés parchromatographie quantitative
surpapier
(FAUCONNEAU et al.,19 6 4 ).
Les résidus d’extraction alcoo-lique
sont séchés sous vide(6!°C),
etpesés.
Les acides aminés des aliments sont dosés
après hydrolyse
acide par la méthode de 142ooxE,S P ACK M
ANN et STEIN
( 195 8),
(1&dquo;ION, de BELSUNCE, FAUCONNEAU,19 6 3 ).
Le choix de ces méthodessera discuté
plus
loin.RÉSULTATS
Pour éviter l’interférence
possible d’une
dilution éventuelle au cours de la di-gestion (absorption
del’eau)
ou au cours duprélèvement (rinçage
de lacanule),
nous avons
rapporté
les teneurs en acides aminés libres du sangporte
à la matière sèche du résidu d’extraction(pratiquement égale
à la matière sèche du sang corres-pondar-t).
I. -
Composition
dit sangporte
des animaux àjeun
Nous avons
rapporté
pourchaque
animal(tabl. 2 )
la somme des acides aminés dosés(en
mg d’acide aminé par g de matière sèche durésidu)
et lesproportions
enpoids
des divers acides aminés dans cette somme(en
p.zoo).
Nous avonségalement
fait
figurer
dans ce tableau la sommeglutamine -
acideglutamique,
pour tenircompte
despossibilités
de transformationréciproque
de ces deuxcomposés.
Nousavons calculé l’écart
type
de la moyenne des valeurs obtenues pourchaque animal,
toutes les fois que le nombre d’échantillons était suffisant. Pour les différents ani-
maux à
jeun,
lesproportions
de laplupart
des acides aminés libres sont relativementvoisines,
alors que la concentration en acides aminés libres totaux du sang varie dusimple
au double. Pour un animaldonné,
àjeun,
l’aminoacidémie est relativement constante au cours despériodes expérimentales étudiées,
mais elleaugmente
dans desproportions importantes ( 200
p.100 )
si l’animal cesse deprendre
dupoids.
I,es acides aminés
figurant
dans le tableau 2représentent
environ8 5
p. 100 du total des acidesaminés ;
en outre, il faut noter laprésence
depetites quantités
d’acideaminobutyrique,
decystine
oucystéine,
deméthionine,
et dequantités
notablesd’asparagine,
deproline,
d’histidine etd’arginine, qui
ne sont pas dosées par la mé- thoded’analyse
utilisée.II. -
Évolution
au couvs de latligeslioit
Pour
chaque
acideaminé,
nous avonsexprimé
les résultats enproportion
de sateneur dans le sang à
jeun.
Nous avons, pour les raisonsindiquées précédemment,
étudié
également
l’évolution de la sommeglutamine ―
acideglutamique.
Nous avons
regoupé
etexprimé graphiquement (figures
i à5 )
les résultats obtenus pour les repas suivants :amidon seul
(repas
sansazote) ...
150 à 40o g farine depoisson
et amidon( 1 6
p. 100de
M.A.)
... 30o g farine depoisson
et amidon( 1 6
p. 100de
M.A.)
... qoo g orge( 13
p. 100 de1VLA.)
... 300 à 500 g tourteau d’arachide et amidon( 1 6p.
100de
M.A.)
... 400 gNous allons examiner successivement les résultats obtenus
après ingestion
dechaque type
de repas,compte
tenu du fait que certains résultats ontdéjà
étépubliés
(ProN
etal., zg63).
Amidon seul.
Pour la
majorité
des acides aminés nonindispensables,
leurs concentrations dans le sangporte augmentent pendant
untemps plus
ou moinslong ;
la teneur enalanine se maintient à
près
de 150 p. 100 de celle du sang àjeun pendant
lapériode
étudiée(de
o à 6 heuresaprès
lerepas).
Les autres acides aminés nonindispensables augmentent
dans desproportions plus
faibles. Les variations des teneurs des acides aminésindispensables
étudiées sontgénéralement
faibles ounulles, exception
faite de lalysine
dont la teneuraugmente
assez fortement peuaprès
le repas, pour retomber ensuite à une valeur
proche
de celle observée dans le sangà j jeun.
Amidon et
farine
depoisson.
Les courbes obtenues pour les deux
quantités ingérées (diffèrant
de 25 p.100 )
sont extrêmement voisines
(dans
leursparties
ascendantes etdescendantes),
aumoins dans le cas des acides aminés
indispensables
etsemi-indispensables.
Lesaugmentations
de tous les acides aminésindispensables
et dequelques
autres,sont très
importantes (-;-
200 p.100 ), comparées
à celles observéesaprès ingestion
des repas sans azote
(+
20 p.100 ).
Orge.
Les
augmentations
observées pour les divers acides aminésindispensables (+
20 à -+- 30 p.ioo)
sontbeaucoup plus
faibles que dans le cas de la farine depois-
son, et les courbes obtenues sont
généralement
très voisines de celles observéesaprès ingestion
du repas sans azote. Seule latyrosine
sembleaugmenter
defaçon
notable.Les
augmentations
obtenues sontparticulièrement
faibles dans le cas de lalysine (+
15 p.100 )
et de la thréonine(+
25 p.100 ),
acides aminésprésents
en trèspetites quantités
dansl’orge.
Les teneurs sont même au bout d’un certaintemps
inférieures à celles du sang àjeun (―
20 p.zoo).
Avachide.
Les valeurs observées peu
après
le repas sont très élevées pour tous les acidesaminés,
et le restentpendant
lapériode
étudiée(o
à 7heures),
sauf en cequi
concerne la
lysine
et la thréonine dont les teneurs diminuentrapidement.
La teneuren thréonine en
particulier
est nettement inférieure à celle du sang àjeun,
7 heuresaprès
le repas.L’augmentation
de la teneur en ornithine estparticulièrement impor-
tante.
III. - Relatio;a avee
l’apport
alimentairePour
chaque point expérimental, l’augrnentation
parrapport
au sang àjeun (teneur
observée aupoint
considéré moins teneur dans le sang àjeun)
a été divisée par laquantité
de l’acide aminéingéré
au cours du repas. Parconvention,
la valeur zéroa été attribuée au
résultat,
toutes les fois que la teneur aupoint
considéré était infé- rieure à celle du sang àjeun.
Ce moded’expression (fig.
6 et7 )
met en évidenceune
augmentation
trèsimportante
des teneurs englycine
et surtout en alanine sansrelation avec
l’apport alimentaire, particulièrement
dans le cas de l’arachide et dans celui del’orge,
tandis que lesaugmentations
obtenues pour l’acideaspartique
et lasomme
glutamine
+ acideglutamique
sont très faibles. Les courbes observées pour la somme leucine -j- isoleucine -+-phénylalanine
et pour la valine sont d’allures trèsvoisines,
s’élevant fortement dans le cas del’arachide, moyennement
dans le cas de la farine depoisson,
faiblement dans le cas del’orge.
Pour lalysine
et lathréonine,
les
augmentations
sont notables et forment une courbe assezrégulière
dans le casde la farine de
poisson,
tandisqu’elles
sont trèsfaibles,
sauf peu detemps après
lerepas, dans le cas de
l’orge.
Ces deux acides aminésaugmentent
notablement peu detemps après ingestion
d’un repasd’arachide,
pour diminuer ensuitefortement,
sur-tout en ce
qui
concerne lalysine.
Les modifications de
composition
du sang de la veineporte
ont étéégalement
reliées aux
apports
alimentaires selon une autre méthode decomparaison,
afin detrouver un mode
d’expression applicable
auxaugmentations
observées à deslaps
detemps différents, après ingestion
de repascomposés
d’un alimentprotéique
donné etd’amidon
(en proportion variable).
Pourchaque point expérimental,
lapart
relativede
chaque
acide aminé(en
p.100 )
dansl’augmentation
totale de l’aminoacidémieporte
observée a étécalculée ;
les moyennes des valeurs ainsi obtenues(et
leurs écarts-types)
ont été rassemblées dans le tableau 3 ainsi que lacomposition
des diversaliments
protéiques utilisés, exprimés
de la même manière.Il y a un
parallélisme
très net entre lacomposition
de l’azote aminésupplé-
mentaire trouvé à l’état libre dans le sang
porte après ingestion
dechaque
aliment.et la
composition
de cet aliment dans le cas de laplupart
des acides aminés indis-pensables
etsemi-indispensables.
Toutefois,
les teneurs du sangporte
enleucine, isoleucine, phénylalanine,
com-parées
à lacomposition
del’aliment,
sont faibles dans le cas del’ingestion d’orge,
tandis que les déficits en thréonine et en
lysine
del’orge
et de l’arachide semblentlégèrement exagérés
dans le sangporte correspondant.
I,es valeurs obtenues pour l’acide
aspartique
sont extrêmement faiblescomparées
aux teneurs des différents
aliments,
tandis que les différences de teneur en acideglu- tamique
-E-glutamine
des trois aliments étudiés ne semblent pas se refléter dans lacomposition
du sangporte.
I,es valeurs obtenues pour la
glycine
et l’alanine du sangporte
sont extrêmementélevées,
et sansrapport
avec leurs teneurs dans les différentsaliments,
sauf dans uncas : celui de
l’alanine, après ingestion
de repas constitués de farine depoisson
seule.Outre cette forte diminution relative de
l’alanine,
l’absence d’amidon dans la rationsemble entraîner une faible diminution des valeurs obtenues pour les diacides et leurs
amides,
etl’augmentation passive
dupourcentage
des acides aminésindispensables
et
semi-indispensables.
Lepourcentage d’augmentation
est le même dans le cas de laglycine,
que la rationcomporte
ou non del’amidon,
alors que la ration laplus
faible en
protéines (orge)
semble entraîner uneaugmentation
de celle-ci.DISCUSSION
Les
dosages
des acides aminés et amides ont été effectués sur l’azote non pro-téique
du sang total et non sur celui duplasma
pourplusieurs
raisons : cette méthodepermet
de fixer leséchantillons&dquo;par
l’éthanol froid immédiatementaprès
leprélè-
vement, et d’éviter leséchanges qui risquent
de seproduire
entreplasma
etglobules
au cours de leur
séparation
parcentrifugation.
Il est d’ailleurs vraisemblable que deséchanges
entreplasma
et cellulessanguines
seproduisent déjà
chezl’animal,
et que les acides aminés libresprovenant
de ladigestion
sonttransportés
par ces deux frac-tions,
comme l’ont montré DAWSON et PORTER( 19 6 2 )
chez le rat ; ils ont en effetconstaté que la teneur en acides aminés libres
marqués
au 14C variaitparallèlement
dans le
plasma
et dans les cellulessanguines
de rats ayant absorbé un repas de chlo- rellesmarquées
au 14C.Nous avons dû utiliser pour le
dosage
des acides aminés libres du sangporte,
une méthodechromatographique
surpapier.
L’utilisation de la méthodechromatogra- phique
suréchangeur
d’ions deMooRE,
SYAChwAw et STEiN(1958), (avec
collec-teur de
fraction), adaptée
auxliquides biologiques, exige
le fractionnement à 300puis
à5 o o C
sur une colonne de i5o cm pour les acides aminés acides etneutres,
à 30°
puis 5 o o C
sur une colonne de 5o cm pour les acides aminésbasiques.
Cetteméthode
trop longue (un
échantillon parsemaine)
pourpermettre
de doser un assezgrand
nombre d’échantillons nécessite deplus
desprises
de sangplus importantes.
La
précision
de la méthode que nous avons utilisée est évidemmentplus faible,
maisles variations observées sont très
importantes
et n’ont aucune commune mesure avec les erreursexpérimentales.
Lacomparaison,
surquelques échantillons,
des résul-tats obtenus par
chromatographie
surpapier
et parchromatographie
sur colonnemontre un bon accord entre les deux méthodes pour tous les
composés figurant
dansles tableaux de
résultats,
à condition que les concentrations dechaque composé, présentes
sur lepapier
se trouvent entre certaines limites(FAUCONNEAU
etal., 19 6 4 ).
Le
principal
inconvénient de cette méthode est de ne pas doser un certain nombre d’acides aminésindispensables
ousemi-indispensables : histidine, arginine,
acidesaminés soufrés.
En outre, la
leucine, l’isoleucine,
laphénylalanine
ne sontgénéralement
passépa- rées,
et il estimpossible
de déterminer les variations de concentration de chacun de cescomposés,
dont les teneurs n’évoluent pas forcément d’une manièreparallèle.
De
plus,
comme le facteur de coloration de laphénylalanine
estbeaucoup plus
faibleque ceux des autres
composés,
le facteur moyen utilisérisque
d’être entachéd’erreurs,
si les
proportions
de ces troiscomposés
dans la somme varientbeaucoup.
Les
protéines
de la ration de base utilisée étaient desprotéines
depoisson,
ce
qui peut
avoir deuxconséquences :
1
° La
composition
du sang àjeun
estprobablement
liée à cerégime.
Différentsauteurs ont en effet montré chez diverses
espèces
animales que lacomposition
enacides aminés du
plasma
était liée aurégime
alimentaire. C’est enparticulier,
laconclusion de PUCHAI, et al.
( I g 6 2 ) qui
ont étudié lacomposition
en acides aminés libres duplasma
de porcs soumis à différentsrégimes. Toutefois,
il est difficile de comparer les résultats obtenus par ces auteurs et lesnôtres,
car leursdosages
ont étéeffectués sur le
plasma
d’animauxqui
n’étaient pas soumis à unjeûne préalable,
l’heure du
prélèvement
et l’heure du repas n’étant pasprécisées.
2
° Il est
possible
que des animaux accoutumés à unrégime
à base de farine depoisson
nedigèrent
pas( 1 )
les autres aliments(orge, arachide)
à la même vitesse que des animaux habitués à consommer del’orge
ou de l’arachide.Toutefois,
sil’orge
semble être
digérée
trèslentement,
il n’en est pas de même del’arachide, digérée
au moins aussi vite que la farine de
poisson.
Nous avons dû utiliser
plusieurs
modesd’expression
pour étudier l’évolution de l’aminoacidémieporte
au cours de ladigestion,
car aucun d’eux ne rend entièrementcompte
desphénomènes
observés. Unparticulier,
chacun de ces modesd’expression
accorde une
place prépondérante
soit à la teneur de l’acide aminé considéré dans le sang àjeun,
soit à sa teneur dansl’aliment ;
dans lepremier
cas,l’augmentation
observée sera artificiellement élevée si la teneur dans le sang à
jeun
de l’acide aminé considéré est faible. Dans ledeuxième, l’importance
relative del’augmentation
ob-servée par
rapport
à la teneur normale du sang àjeun
n’est pas mise en évidence.Quoi- qu’il
ensoit,
l’examen simultané des résultatsexprimés
deI)lusietirs - ilianières permet
de mettre en lumière un certain nombre de faits :
- Le maximum de concentration de la
plupart
des acides aminés dans le sangporte apparaît
entre 2 heures et 3 heuresaprès l’ingestion
d’un repasexpérimental
constitué d’amidon associé à de l’arachide ou de la farine de
hareng ;
mais lespoints expérimentaux
ont rarementpermis
de mesurerl’importance
du maximum.- La consommation de
quantités
différentes( 300
ou 40og)
de l’alimentcomposé
d’amidon et de farine de
poisson ( 1 6
p. 100 deM.A.)
entraîne des variations simi- laires de l’aminoacidémieporte.
Cela laisse supposer que lesquantités qui quittent rapidement
l’estomac pour l’intestin sont voisines dans les deux cas. Ces faits sonten accord avec les observations de GUPTAet al.
( 195 8)
sur le rat et de RÉRATet Lou-GNON
( 19 6 3 )
chez le porc.- La
part
des acides aminésindispensables d’origine digestive endogène qui atteignent
la veineporte
semblefaible,
mêmeprès
de 6 heuresaprès
le repas.- Les
protéines
del’orge
semblent êtredigérées plus
lentement que celles dupoisson
ou de l’arachide. Eneffet,
lespetites augmentations
de l’aminoacidémie, observées dans le cas del’orge,
nepeuvent
pass’expliquer
par le fait que le tauxprotéique
étaitplus faible,
car la différence observée auraitdisparu lorsque
l’on diviseles variations de concentrations dans le sang
porte
par lesquantités ingérées.
- La métabolisation dans la
paroi
intestinale est mise en évidence par certains résultats : lesquantités
d’acideaspartique,
deglutamine
et d’acideglutamique qui apparaissent
dans le sangporte
sont très faibles encomparaison
de cellesqui
sontapportées
parl’aliment,
tandis que les teneurs englycine
et en alanineaugmentent
( 1
) Nous entendons par digestion, l’ensemble des phénomènes physiologiques qui conduisent de l’inges-
tion à l’apparition des acides aminés dans le sang porte.
fortetnent en
comparaison
del’apport
alimentaire en ces deux acides aminés. Ces faits sont en accord avec les observations faites in vitro chez lechien,
le chat et lelapin
par NEAMEet WiSEMAX(1957-1958).
Ces auteurs ont mis en évidence des transa- minations dans laparoi
intestinale. I,esquantités
d’acideaspartique
et d’acideglu- tamique
mis enprésence
de la muqueuse intestinale n’étaient pas recouvrées entiè- rement de l’autre côté de laparoi intestinale,
tandisqu’il apparaissait
de l’alanine.P
ERAIKO et HARi’HR
(zg62) ont également
constaté chez le rat quel’ingestion
deglutamine
ou d’acideglutamique
entraînait uneaugmentation
des teneurs du sangporte
non seulement en acideglutamique
et englutamine,
mais aussi en alanine. Demême,
la forteaugmentation
de la concentration en ornithine du sangporte,
observéeaprès ingestion
de tourteau d’arachidepeut
être due à la teneur élevée de cet ali-ment en
arginine (F’mcH et Hi R n, 19 6 0 ). I,’alanine n’augmente
quebeaucoup plus
faiblement
après ingestion
de farine depoisson
seule. Il estpossible
que certainsproduits
dedégradation
de l’amidon soient nécessaires à la formation de l’alanine dans laparoi
du tubedigestif.
-
L’allure
des courbes obtenues pour les différents acides aminésindispensables
met bien en évidence les facteurs limitants des aliments
protéiques
utilisés : dans le cas de la farine depoisson,
dont le seul facteur limitant est constitué par les acides aminéssoufrés,
les teneurs du sangporte augmentent
nettement etpendant
untemps
assezlong
pour les divers acides aminésindispensables
dosés.Après ingestion d’arachide,
très pauvre enlysine
et enthréonine,
lesphénomènes
sont différents. Les teneurs
augmentent
nettement pour les différents acides aminésindispensables, peu de temps après
le repas. Mais les concentrations enlysine
et enthréonine diminuent
rapidement
etpeuvent
même atteindre des valeurs inférieures à celles observées dans le sang àjeun.
Cela estprobablement
dû au fait que la teneur du sangporte
à un moment donnépeut
être considérée comme la somme de cequi
était
présent
dans le sang artériel et de cequi provient
du tubedigestif.
Laprésence
dans le sang des autres acides aminés doit entraîner l’utilisation par les tissus d’une
quantité importante
des acides aminés lesplus
limitants et le sangqui
vientirriguer
l’intestin est
appauvri
en ces éléments.L’apport
alimentairepeut
très bien dans cecas n’être pas suffisant pour ramener la teneur de l’acide aminé considéré à la valeur
qu’elle
avait dans le sang àjeun.
Ces faits sont en accord avec les observations faites par divers auteurs sur la
composition
en acides aminés libres du sangpériphérique
en fonction durégime (LO
N GE NE C K E
R
etH AUSE ,
1959, HILL et OI,sEx,ig6 3 ).
Ces résultats sont en contra- diction avec les conclusions de NASSET etnl., 19 6 3 :
l’homéostasie serait réalisée auniveau du contenu intestinal
grâce
aumélange
desprotéines d’origine endogène
etexogène,
cequi permettrait l’absorption
d’unmélange
decomposition
relativementindépendant
desprotéines ingérées.
Ces auteurs n’ont pas trouvé de modification des concentrations enlysine
et entryptophane
du sangporte
de chiensayant
reçuun repas de zéine deux heures
auparavant ;
il fautsignaler
que les concentrations dequelques
acides aminésindispensables (leucine
enparticulier)
ontaugmenté ;
par
ailleurs,
NASSETetal.,
n’ont pas effectué decinétique après
le repas.Dans les conditions
expérimentales utilisées, l’orge
semble êtredigérée
beau-coup
plus
lentement que lepoisson
etl’arachide,
sans que l’onpuisse
savoir si cettedifférence est liée au transit
digestif
ou à d’autres facteurs. Les carences en un ouplusieurs
acides aminésindispensables
entraînent uneaugmentation
très forte desteneurs des autres acides aminés
(cas
del’arachide), qui
nepeuvent
être utilisés au fur et à mesure de leur arrivée dans le sang ; une ration constituée deprotéines
mieuxéquilibrées (farine
dehareng)
entraîne des élévations de teneursgénéralement plus faibles,
même si sadigestion
estrapide.
CONCLUSION
Les résultats obtenus
permettent
depréciser
certainesétapes
de l’utilisation deprotéines
alimentaires étudiées :- les différents acides aminés dans le sang
porte augmentent
enproportion
variable avec le
régime ;
cesaugmentations
ne reflètent pas l’homéostasie relative des divers acides aminés libres trouvés par NASSET etal.,
1955, dans les contenus intestinaux de chiens recevant desprotéines
dequalités variables ;
- la
part
des acides aminésindispensables d’origine endogène
semble êtrefaible,
àl’exception peut-être
de lalysine
dans lespremières phases
de ladigestion ;
- les métabolisations dans la
paroi
ne semblentjouer
un rôleimportant
que pourquelques
acides aminés nonindispensables,
et pourl’arginine (semi-indispensable) ;
- il existe un
parallélisme
étroit entre lacomposition
desprotéines ingérées
en acides aminés
indispensables
et lacomposition
de l’azote aminésupplémentaire
trouvé à l’état libre dans le sang
porte après ingestion
de cet aliment.La
composition
du sangporte
à un instant donnédépend
donc essentiellement de lacomposition
desprotéines alimentaires,
des vitesses de libération etd’absorption
de leurs acides aminés constitutifs et de leur utilisation par
l’organisme.
La méthodebasée sur
l’analyse
du sang efférent de l’intestin est donc bienadaptée
à l’étudeglo-
bale de la
digestion
desprotéines
et enparticulier,
ellepeut permettre
depréciser :
- le rôle exact de la
digestion
dans la diminution de la valeur nutritive des pro- téines ayant subi des traitementsindustriels ;
- l’utilisation des acides aminés libres associés à diverses
protéines
pour assurer leursupplémentation.
Reçu pour
publimtion
enseptembre z 9 6 4 .
REMERCIEMENTS
Ce travail a été réalisé en
partie
grâce au contrat de laDélégation
générale à la recherchescientifique
et technique n° 61 FR i64.SUMMARY
VARIATIONS IN THE AIIINO-ACID COMPOSITION OF TIIE PORTAL BLOOD DURING DIGESTION IN TIIE PIG
Eight
voungpigs
of 25kg bearing
permanent fistulas in theportal
vein received a balanced dietcontaining
starch andherring
meal. Variousexperimental
meals( 300
to 400g)
of thefollowing compositions
weregiven
in themorning :
starch mixed with various
proteins : groundnut
-herring
meal ;barley ;
starch.
Samples
ofportal
blood( 10 ml)
were takenduring
aperiod
of 8 hours afteringestion
of themeal.
The free amino-acids and amines of the whole blood were extracted with 8¢ p. 100 ethanol and then estimated after
separation
by two-dimensional paperchromatography.
In
fasting
animals(cf.
table i i) there was less variation between individuals in theproportions
of the different amino-acids than in the total amino-acid content ; for a
given
animal, the total amino-acid content is stable-and increasesonly
on cessation ofgrowth.
After
ingestion
ofnitrogenous
meals, the total amino-acid content risesmarkedly ;
the concen-trations in the
portal
blood(compared
with the blood of thefasting animal)
of various amino-acids show considerable increases (up to 200p. 100), reaching a maximum after 2to 3 hours, after whichthey
decreaseprogressively ;
the level of the blood offasting
animals is reachedonly
after 8 hours.The relative curves for the different
indispensable
amino-acids are characteristic of the different pro- teinsingested (fig. 1 - 5 ).
After
ingestion
ofprotein-free
meals the concentrations of theindispensable
amino-acids showonly
veryslight
increases.For each of the amino-acids
analysed
the increases were related to the amountsingested (fig.
6and
7 ). Glycine
and alanine concentrations increased much more than could beexpected
from theinputs :
on the contrary,aspartic-acid
andglutamine
-f-glutamic-acid
concentrations increased very little.At all
experimental points,
whatever the time that hadelapsed
after each meal, the relative part of each amino-acid in the total increase of aminoacidemia was calculated(table 3 ),
and com-pared
to thecomposition
of theingested proteins.
Modifications in the concentrations of each amino- acid in theportal
blood were more often than notparallel
to thecorresponding
content in theingested proteins.
The results are discussed in relation to the
imperfections
of the method of estimation(leucine,
isoleucine and
phenylalanine
notseparated) :
- the amount of
indispensable
amino-acids of endogenousorigin
is low(protein-free diet) ;
- metabolism in the wall is
important
for somedispensable
orsemi-indispensable
amino-acids :
large
amounts ofglutamic-acid
and ofglutamine
inbarley
cause increases in alanine andglycine. Arginine,
present inlarge quantities
ingroundnut, causes large
increases in ornithine ;- the kinetics of the increase of the various
indispensable
amino-acids reveals the limi-ting
factors for eachprotein.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
A
RSAC M., RrttnT A., 1962. Technique de fistulation de la veine porte chez le Porc. Ann. Biol. anim.
Bioch. BiOPhYs-, 2, 335-343·
B
ARRY R. J. C. in Korr S. K. and CowtE A. T. Milk : The 1I1a1l1111ary gland, ils secretion, 1961 Vol. I.
Acad. Press. Inc. New York. London.
D
AWSON R., HOLDSWORTH E. S., 1962. An investigation into protein digestion with 14C labelled protein.
I. The general pattern of 14C incorporation in body tissues and fluids of the rat up to 3h. after feeding.
Brit. J. Nutr., 16, 13-25. DAW
S
ON R., PORTER J. W. G., i96z. An investigation into protein digestion with 14C labelled protein. II.
The transport of 14C labelled nitrogenous compounc’s in the rat and cat. Brit. J. Nuli,., 16, 27-38.
DENT C. E., SCHILLING J. A., 1949. Studies on the absorption of proteins : the amino acid pattern in the
portal blood. Biochem. J., 44, 318-333.
D
ENTON A. E., ELVEI!]EY! C. A., 1954. Availability of amino acids in vivo. J. Biol. Chem., 208, 449-454. FAUCONNEAU G., PION R. L’analyse des acides aminés libres et amides des tissus animaux et végétaux
par chromatographie quantitative sur papier. A paraître dans les Ann. Biol. anim. Bioch. Biophys.
F
INCH L. R., Htxn F. J. R., 1960. The uptake of aminoacids by isolated segments of rat intestine. I.
A survey of factors affecting the measurement of uptake. Biochim. Biophys. Acta., 43, 268-277. GO
LDBERG A., GuccENaEtM K., 1962. The digestive release of aminoacids and their concentrations in the portal plasma of rats after protein feeding. Biochem. J., 83, 129-135.
GU
GGENIIEUI K., HALEVY S., FRIEmIANN N., 1960. Levels of lysine and methionine in portal blood of
rats following protein feeding. Arch. Biochem Biophys., 91, 6-io.
G
UPTA J. P.,
D AKROURY
A. 11T., HARPER A. E., 1958. Observations on protein digestion in vivo. I. Rate of disappearance of ingested protein from the gastrointestinal tract. J. Nutrition, 69, 447-456.Httt, D. C., OLSEN E. M., 1963. Effects of starvation and a non protein diet on blood plasma aminoacids,
and observations on the detection of aminoacids limiting growth of chicks purified diets. J. Nutrition, 79, 303-310-