MODIFICATIONS DE LA COMPOSITION EN ACIDES AMINÉS DE LA LUZERNE
DURANT L’ENSILAGE
ACTION PROTECTRICE COMPARÉE DE LA SOLUTION
AIV,
DU GLUCOSE, DU MÉLANGE AMIDON-MALT ET DE L’URÉE.
A. DEVUYST, W.VERVACK R. ARNOULD, M. VANBELLE, M.AUSLOOS A. MOREELS
Université de Louvain,
Centre de Recherches
zootechveiques
de l’Université,Lavenjoel (Belgique)
SOMMAIRE
Cent soixante et onze échantillons de luzerne ont été ensilés dans des bocaux en verre d’un litre et demi avec des doses variables de
glucose,
d’amidon malté, d’urée, et d’acides minéraux forts.On a suivi la
cinétique
de ladégradation
desprotéines (formation
d’NH3), des pertes en azote pro-téique
total et en 17acides
aminés.Les conclusions suivantes peuvent être
dégagées :
A. - Allure
générale de
ladégradation
desp y otéines (tabl. i)
i. Durée et intensité.
La
dégradation
desprotéines
évolue trèsrapidement ;
elle estpratiquement
terminéeaprès semaines.
Le pourcentage de l’azote total se retrouvant sous forme d’NH3 ne
représente qu’une
faible part de l’azote des acides aminés étudiés. Pour 15 p. 100 d’NNH 3/ N
total, on observe en réalité40 p. 100de pertes en
protéine
vraie totale et 40 p. IOOde pertes en azote des 17acides aminés dosés.2
. Évolution individuelle des acides aminés.
L’arginine
et l’histidinedisparaissent
presque totalement. La thréonine, latyrosine,
lalysine,
lesacides
aspartique
etglutamique,
la sérine et laproline disparaissent
pour 40p. 100.D’autres acides aminés sont moins vulnérables ; notamment, la
phénylalanine,
laglycine,
la valine, la méthionine et la leucine. On constate unléger gain
en isoleucine. Les seuls acides aminésqui
se forment enquantités importantes
dans les silos n’ont pasgrande importance
en alimentation : l’alanine double sa teneur et l’acidea-amino-butyrique apparaît
dansl’ensilage
sans avoir été décelé dans la luzerned’origine. (L’augmentation
des teneurs en ces deux acides aminés est un indice de l’intensification des fermentationsputrides.)
B. -
Dégradation
desprotéines
dans lesensilages
avec des acides minérauxforts
Dans les
ensilages
AIV, les destructions d’acides aminés sont 3 à 4fois moinsimportantes
que dans lesensilages
ordinaires(tabl. 2 ).
C. -
Effet
duglucose
et de l’amidon malté sur la destruction desprotéines
L’emploi
de glucose( 2
p.100 )
ou d’amidon malté(6
p. 100) amélioreégalement
le bilan des acides aminés mais de manièrebeaucoup
moinsimportante (tabl. 4 ).
D. -
Effet
de l’urée sur ladégradation
desprotéines (tabl. 4 )
L’azote de l’urée
(à
la dose de 2 p. i ooo d’urée dans laluzerne)
ne sert en aucunefaçon
à lasynthèse
deprotéines
bactériennes dansl’ensilage.
En présence d’urée, tous les acides aminés sontplus
fortement détruits(à l’exception
de l’alanine, de l’isoleucine et de l’acidea-amino-butyrique
dont les teneurs augmentent en présence d’urée mais dont la formation est un signe d’intensification des fermentations
putrides).
L’addition d’urée dans les
ensilages
augmente donc les pertesprotidiques pendant
la conser-vation.
INTRODUCTION
En
physiologie digestive
duruminant,
on accorde uneimportance
croissanteà la nature de la fraction azotée de la ration
qui
atteint le rumen(B I , A C KB uRN, I9 65).
Dans tous les
ensilages,
lesprotéines
dufourrage
subissent des modificationsplus
oumoins
profondes
selon que la conservation est bonne ou mauvaise(B ARN ETT, I954)!
Pour
apprécier
l’efficacité d’un traitement deconservation,
nous considérons avecZELTE
R et SALOMON
(ig5g)
que ledegré
deprotéolyse
est le critère leplus
valable.Cette
protéolyse peut
s’arrêter au stade d’amino-acides enpassant
par celui depoly- peptides
etpeptides,
mais ladégradation peut
mêmeporter
atteinte à l’amino-acide lui-mêmequi peut
être désaminé oudécarboxylé.
Dans cetteprotéolyse,
les enzymesd’origine végétale
interviennentprobablement
au début(GOUET
etF A T IANOF F, 19
6 4
)
et l’on s’efforceexpérimentalement
de réaliser desensilages
avec desfourrages bactériologiquement
stériles afin de déterminer lapart respective
des enzymesd’origine végétale
et bactérienne dans cesphénomènes (KEMSI,!, I95 6).
I,es connaissances actuelles concernant les modifications de la
répartition
desacides aminés au cours du processus fermentaire sont assez
fragmentaires. Or,
comme le
soulignent
Z!I,T!R et SALOMON( 1959 ),
l’établissement d’un bilan bio-chimique complet
en amino-acides s’avèreindispensable
pour l’étude de l’efficacitécomparée
des traitements deprotection.
Dans la
plupart
desétudes,
on a surtout relevé les modifications des teneurs enacides aminés libres de
l’ensilage. (B ARNETT ,
I954 ; MAYNONEetal., I9 6 3 ;
K!MBI,!,I956 ;
zF;LT!R etS ALOMON ,
I951! ; LANDIS,I g6o ;
BRADY,19 6 0
et19 65 ;
MAcPHER-SON et
V I O L A N TE, 19 66
a et19 66 b ;
GOUET etal., I9 65).
Certaines étudesrapportent
le bilancomplet
pourquelques
acides aminés(V IRTAN E N ,
I957 ; SCHARRER etRÂCKER, 1958
et I959 ;1,ANDIS, I960 ;
PLATIKANOW etS AND E W , ig6i).
Selon lesconditions de conservation
(pH,
taux de matièresèche, température...,)
l’azoteaminé de
l’ensilage peut
subir des modificationsprofondes, qui peuvent
affecterplus
ou moins sérieusement la valeurbiologique
desprotéines présentées
aux rumi-nants.
L’aspect quantitatif
de cette redistribution azotée n’est pas encore totale- ment élucidé(B RADY , ig65 ;
MACPHERSONetV IOLAN TE, 19 66 a).
Les recherches surles bilans
biochimiques complets
en amino-acides ont étéjusqu’ici
assez limitées.Nous avons
entrepris d’approfondir
cetaspect
de la modification des teneursen amino-acides durant la conservation des
ensilages
en étudiant son évolution dans letemps
et enessayant
dedégager
l’actionprotectrice
deplusieurs
traitements cou- rammentappliqués
enBelgique.
Nous avons étudié le taux de destruction ou de formation dans les silos de 17
acides aminés. Nous avons tenté de mettre ces variations en relation avec l’orien- tation des fermentations dans les
ensilages (fermentations lactique, acétique, buty- rique, putride...)
et leurs conditions(pH, présence
desucres...).
Pour
cela,
nous avons réalisé un total de 400silos de luzerne(microsilos
de labo-ratoire)
dans les conditions lesplus
variables. Nous y effectuons les bilans à destemps
de conservation variant de 24 heures àplusieurs
mois.Cette étude
porte
sur une série de y silos de luzerne surlesquels
nous avons :1
0 mesuré l’intensité de la
protéolyse,
le bilan des acides aminés et leur évolu- tion dans letemps ;
2
° étudié l’effet de conservants tels que le sucre, l’amidon
malté,
la solution AIV sur l’évolution de ladégradation
desprotéines ;
3
°
essayé
de savoir si l’azote de l’uréeajoutée peut
servir à lasynthèse
de pro- téines bactériennes et améliorer le bilan de la fractionaminée,
comme le trouventM
ODJA
-,iow
et al.(zg6o) ;
q.°
déterminé le meilleur moded’expression
despertes
azotées dans un silo(bilan
de l’azotetotal,
bilan de l’azoteprotéique
total ourapport
azoteammoniacal/
azote total
(N NH 3/ N total)).
MATÉRIEL
ETMÉTHODES
Condition de
l’expérience
Le meilleur matériel pour étudier la
dégradation
des protéines est la luzerne car elle contient de fortes teneurs enprotéine
et sa conservation est rendue difficile par manque de sucres fermentes- cibles.Afin d’obtenir des conditions
d’ensilage
et de conservation variables, nous avonsajouté
à certainsensilages
desproduits
de conservation :W
du
glucose (à
la dose maximum de 2p. ioo) ;2
0 de l’amidon malté
(mélange composé
de 5parties
d’amidon et d’unepartie
de malt moulu ; J le malt étant destiné à transformer l’amidon englucides disponibles
pour les fermentslactiques).
Nous avons
employé
cemélange
à des taux trois foissupérieurs
à ceux duglucose
car nousavions observé lors d’essais antérieurs
(D EVUYST
et al., 1966 a) que le rendement de l’amidon malté(taux
de transformation en acidelactique
par les bactéries del’ensilage)
est trois fois moins bon que celui du sucre( 33
p. 100 au lieu de 95-100p. ioo) ;3
0 des acides minéraux forts
(système AIV)
au taux de x5équivalents-grammes
d’acides parroo
kg
de luzerne. Cesensilages
AIV servent de témoins pourindiquer l’optimum
de réussitequ’il
estpossible
d’atteindre dans les conditions del’expérience ;
¢! de l’urée à la dose maximum de 2p. 100.
Nous avons
déjà
montré(D EVUYST
et al., 1966 b) que l’urée, à des taux semblables,n’apporte
pas
grande
modification à la réussite desensilages.
Nous vérifions ici son action sur la dégradationdes
protéines.
Nous nous proposons, entre autres, de contrôler si elle peut servir de matériau de base à unesynthèse protéique
bactérienne dansl’ensilage.
Schéma
expérimental
Nous avons réalisé notre
expérience
sur une série de 171 microsilos de luzerne. Ces microsilos sont des bocaux à stériliser deménage
de un litre et demi. Nous lesremplissons jusqu’au
bord aumoyen de 1 250 g de luzerne
(broyée
par une ensileuse lacéreuse Lundell) et nous les fermons par leur couvercle de verre pressé par unepince
sur unjoint
de caoutchouc(équipement
normal du bocal àstériliser),
(DEVUYST et al., i964). Ces 171 silos sontrépartis
en 9séries de 10 silos pour étudier des durées croissantes de conservation et suivre l’évolution des fermentations. Les temps de conser- vations sont de z, 4, !, m, 20, 47, 77, 120et 166jours.
Dans
chaque
série de 19bocaux, nous avons introduit :La
figure
i schématise larépartition
des conservants danschaque
série de i9silos.Méthodes
d’analyse
- Les acides gras volatils ont été dosés par distillation fractionnée (méthode de LEPPER- F
LIEG ,
1937 ).
- L’azote
protéique
total est déterminé par la méthode de Stutzer(méthode
officiellebelge
par
précipitation
àl’hydroxyde
de cuivre, filtration et détermination de l’azote surfiltre).
- L’azote total est déterminé par la méthode
Kjeldahl.
- L’azote soluble s’obtient par différence entre les deux
dosages précédents.
- Les acides aminés sont déterminés par la méthode de MOOREet STEIN
(MooxE
et al., 1958)sur colonne d’amberlite IR 120,
chromatographie grade,
type 3,après
unehydrolyse
par HCI 6 N,à ébullition, sous
réfrigérant
à reflux,pendant
22 heures. Comme source de chaleur, nous utilisonsdes Infrabath.
L’hydrolysat
est porté à un volume connu, dont unepartie aliquote
est concentréedans un
évaporateur
rotatif deGraigg
pour éliminer l’acidechlorhydrique.
Onreprend
ensuite parun tampon à
pH
z,z et on amène à un volume tel que i ml contienne entre i,5et 2mg d’azote total.Afin de ne pas avoir de pertes en acides aminés, nous ne séchons pas les échantillons
d’ensilage, l’hydrolyse
est faite sur matière fraîchehomogénéisée.
Cette méthoded’hydrolyse
ne porte pas atteinte aux acides aminés libres ainsi que l’ont démontré de nombreux auteurs(D US T IN
et al.,1953
; ADRIAN, I963 ; ROACH, i966 ; DEVUYST et al., i968).
RÉSULTATS
Pour chacun des 171
ensilages,
nous avons mesuré :- le
pH,
- les
teneurs en acidesbutyrique, acétique
etlactique (en
p. ioo de la matièrefraîche),
.- les teneurs en matière azotée totale
(N
X6, 25 )
et enprotéine
vraie totale(Azote
Stutzer x6, 25 )
en p. 100 de la matièrefraîche,
- la teneur en
NH 3
et lerapport
Azoteammoniacal/Azote
total(N NH,/
N total en p.
100 ),
- les teneurs en 17 acides aminés
exprimées
en grammes d’acides aminés par100 grammes de matière azotée totale.
Pour les
ensilages
contenant del’urée,
les teneurs en acides aminés sontexpri-
mées en p. 100 de la matière azotée totale en excluant l’azote
provenant
de l’uréeajoutée
à la mise en silo.Les résultats sont résumés dans les tableaux i et 2.
Dans le tableau r,
figurent
les résultats desensilages
témoinsn’ayant
reçu aucun conservant(chaque
valeurreprésente
la moyenne des résultats de deuxensilages).
Dans le tableau 2, nous donnons les résultats
correspondants
pour lesensilages
AIV
(chaque
donnéereprésentant
unensilage).
Les résultats de
l’analyse
de variance sontrapportés
dans le tableau 3(les
ensi-lages
AIV ne sont pasintégrés
àl’analyse).
Dans cette
analyse
nous étudions l’effet de 4 causes de variations :la la durée de conservation
(8 degrés
deliberté) ;
2
0 l’effet de la dose d’urée
(o
p. 100, i p. ioo ; et 2p.zoo) ;
§3
0 l’effet de la dose de
glucose ; 4!
l’effet de la dose d’amidon malté.Dans le tableau 4, nous donnons la
composition
moyenne desensilages
conservésau moins 20
jours,
en fonction du traitement.DISCUSSION
I. - ORIENTATION GÉNÉRALE DES FERMENTATIONS
Il est évident que la
dégradation
desprotéines
ne se déroule pas de la mêmefaçon
enprésence
d’une fermentationlactique
ou d’une fermentationbutyrique, qui
modifient considérablement les conditions de milieu. En outre, on ne
peut
pas, par l’étude d’un seulensilage, prétendre
connaître lagénéralité
duphénomène. Aussi,
avons-nous cru utile de bien définir la réussite de nos
ensilages
avant d’étudier ladégradation
de leursprotéines.
Pourjuger
de laréussite,
nousdisposons
dupH
et des teneurs en acidesbutyrique, acétique
etlactique
en p. 100 de la matière fraîche.A.
- Le !H
Dans un
ensilage
sansurée,
unpH
acide est l’indice d’une meilleure fermentation favorisant la conservation dufourrage.
Mais lepH
n’est pas un indice de réussiteen
présence
d’urée dont la réaction comme celle deNH, qu’elle peut engendrer,
estalcaline.
Nous nous contenterons donc
d’analyser rapidement
lespH
des seulsensilages
non traités à l’urée
(tabl. 5).
a)
LepH
est stabledepuis
lepremier jour
et n’évoluepratiquement plus
aucours du
temps.
b)
Sans conservant, lepH
est de 4,70-5,00, cequi indique
une assez mauvaiseallure des fermentations.
c)
Avec 2p. 100deglucose
ou 6 p. ioo d’amidonmalté, le pH approche
de 4,00, valeurbeaucoup plus
favorable(ces
conservants ont donc un effet favorable assezmarqué).
d)
LepH
desensilages AIV,
est très acide : 3,00-3,50.Nous avons des
pH
allant de 5,00(mauvais)
à q,oo(bons)
et même 3,00(pour
les
AIV).
Cette gamme étendue despH
nouspermet
d’étudier ladégradation
desprotéines
dans des conditions suffisamment variables.B. - La teneur en acide
acétique
La teneur en acide
acétique
n’a que peu de valeur pourrenseigner
sur la réussite desensilages
car elle n’est pas en relation étroite avec le bilan desprincipes
nutritifs.Nous noterons
cependant
que cette teneur est assez élevée dans nosensilages, puis-
que
après quelques semaines,
elle s’établit aux environs de r,5o p. 100dans lesensilages
sans conservant, mais seulement à
0 ,8 0 - 0 , 00
dans lesensilages
à 2 p. ioo deglucose
ou 6 p. 100d’amidon malté
(tabl. q).
C. - La teneur en acide
butyrique
Nos
ensilages
ne contiennentpratiquement
pas d’acidebutyrique quelles
que soient les doses de conservant(tabl. 4 ).
Ce seraitparfait
s’iln’y
avait pas laprésence parallèle
dequantités
assezimportantes
d’acideacétique.
D. - La teneur en acide
lactique
La teneur en acide
lactique
est,d’ordinaire,
un excellent indice de la conserva-tion des
ensilages. Aussi,
il nous a paru intéressant d’en fairel’analyse
de variance(tabl. 3 ).
Pour l’ensemble des 162silos(AIV
noncompris)
la teneur en acidelactique
est, en moyenne de 2,r2 p. Ioo de la matière fraîche. Elle s’établit très tôt à sa valeur définitive et l’onpeut
direqu’elle
reste stableaprès
20jours (tabl. r).
Nosensilages
sont
donc,
dansl’ensemble,
assez riches en acidelactique.
Ce sont surtout lesensilages
aux fortes doses de conservant
(en particulier
ceux à l’amidonmalté) (tabl. 4 ) qui
contiennent le
plus
d’acidelactique ( 4
p.100 ).
D’après
lepH
et les teneurs en acides grasvolatils,
:10Sensilages
sont donc engénéral
bien réussis.Dans
l’ensemble,
la teneur en acidelactique
est bonne et celle en acidebuty- rique
est nulle. La teneur en acideacétique
estpeut-être
un peutrop
élevée mais cela n’aguère
designification
aupoint
de vue de la réussite del’ensilage (conserva-
tion des
principes nutritifs).
Les
ensilages
avec conservant(glucose
ou amidonmalté)
sont mieux réussis que les témoins. Lesensilages
avec urée ne semblent pas bien différents des autres.Ils ne
paraissent
pas moins bien réussis(tabl. q).
II. -
F,TUD!
DE LA DÉGRADATION DES PROTÉINES A. - La teneur en matière azotée totale(tabl. 6)
Dans le tableau
6,
nousdonnons,
pour tous lesensilages
sansurée,
la teneur en matière azotée totale(N
X6, 25 ).
On remarquera que cette teneur ne se modifie pasau cours du
temps.
I,e
poids
total deproduit
désilé n’étant modifié que defaçon insignifiante
aucours du
temps (au
maximum 3 à 4 p. 100pourquelques
raressilos),
nous pouvonstirer deux conclusions
importantes :
1
° la
perte
en matière azotée totale est nulle. Lespertes
enprotéine
vraiene
représentent qu’un
remaniement de larépartition
des fractionsazotées ;
2
0 l’évolution des teneurs en acides aminés au cours de la
conservation, expri-
mée en p. IOO de la matière azotée
totale,
nousrenseigne automatiquement
sur leurbilan
pondéral
absolu.Tous les résultats concernant l’évolution des différentes formes de
l’azote, peuvent
donc être considérés comme l’état de leur bilanpondéral.
B. - Le
rapport
Azoteammoniacal/Azote
total(N NH 3/ N total)
Le
rapport
NNH 3/ N
total n’a aucunesignification
pour lesensilages
additionnés d’uréepuisque
l’azoteuréique
influence la mesure à la fois de l’azote total et de l’azote ammoniacal. Par contre, cerapport présente
une trèsgrande importance
pour l’évolution despertes
deprotéine
vraie dans lesensilages
sans urée.D’après
lesrapports
NNH 3/ N
total desensilages
sansurée,
nous remarquons(tabl. 7 )
que :la les
rapports
évoluentjusqu’à
3 semaines pourdépasser
la valeur de i5 p. 100en fin de conservation dans les
ensilages
sans conservant. Cette valeur élevée de 15à 18 p. 100 est loin d’être satisfaisante car elle est l’indice d’une
dégradation
des pro-téines
trop intense;
2
0 la
dégradation
ammoniacale tombe à ro-m p. IOO avec les conservants sucrésou
amylacés ;
valeurcorrespondant
à un indice de bonneconservation ;
30 dans les
ensilages AIV,
ladégradation
ammoniacale estpratiquement
nulle(de
l’ordre de 3 p.100 ).
Cette gamme assez étendue de
rapports
NNH,IN
totalpermet
d’étudier l’évo- lution de lacomposition
en acides aminés dans des conditions suffisamment variables.C. - La teneur en
protéine
vraie totale(Stutzer)
Les tableaux 1, 2
et 4 rapportent
l’évolution de la teneur enprotéine
vraie totaleen p. 100de la matière fraîche de
l’ensilage.
Compte
tenu de la remarque formuléeplus haut,
ces teneurspeuvent
être inter-prétées
comme le bilanpondéral
de laprotéine
vraie totale desensilages.
Le tableau 3 donne
l’analyse
de variance de ces résultats.W La teneur en
protéine
vraie totale diminue considérablement au cours dutemps.
Elle se stabilisepratiquement après
3à ¢ semaines.
2
° Cette teneur,
qui
était de2 , 7 6
p. 100 avantensilage, tombe, après
166jours
à
1 ,6 1
p. ioo dans lesensilages
sans conservant. La chute est donc trèsimportante puisqu’elle
atteint 4o p. 100.3
0 Dans les
ensilages AIV,
la teneur enprotéine
vraie totale ne descend pas endessous de 2,30-2,20 p. 100. La diminution est donc 2 fois
plus
faible : 20 p. 100 au lieu de 40 p. ioo dans lesensilages
ordinaires.:l!
Pour les 3 doses d’urée nous n’observons aucune différencesignificative
entreles teneurs en
protéine
vraie totale(tabl. 4 ) :
On ne
peut
donc en aucunefaçon espérer
unesynthèse
deprotéines
dans lesensilages
àpartir
de l’azote de l’urée(du
moins unesynthèse
suffisammentimpor-
tante pour avoir une
signification nutritionnelle).
Nous constatons donc que :
- la diminution en
protéine
vraie totale atteint 40 p. 100sauf dans lesensilages AIV,
où laperte
n’est que de 20 p. 100 ;- l’urée ne donne lieu à aucune
synthèse protéique
au sein del’ensilage ;
- la
perte
enprotéine
vraie totale est le double de celle calculéed’après
l’am-moniaque
apparu. L’azote desprotéines
détruites ne se retrouve que pour moitiésous forme
d’ammoniaque.
D. - Le bilan des acides aminés
Dans les tableaux 1, 2 et 4, nous donnons la
composition
en acides aminés desensilages
pour diverses durées de conservation et pour divers conservants.L’évolution
au cours de la conservation des teneurs en acides aminés des ensi-lages n’ayant
pas reçu de conservant et lepourcentage
d’azote total retrouvé dans les 17 acides aminésfigurent
au tableau z.i.
Évolution
au cours de la conservation.D’après
les résultats del’analyse
de variance(tabl. 3 )
des teneurs de 162 ensi-lages (les ensilages
AIV n’étant pas intervenus dansl’analyse),
on voit que laplupart
des teneurs en acides aminés évoluent au cours de la conservation et sont influencées par les conservants.
RaPidité
de Ladégvadation.
La destruction des acides aminés est très
rapide.
Elle estdéjà pratiquement
terminée
après
20jours.
Leschangements
intervenantencore après
3 semaines sont àpeine perceptibles. (C’est
pour cette raisonqu’au
tableau 4, nous groupons tous lesensilages
ouverts àpartir
duvingtième jour,
afin de faciliter l’étude desconservants.) Importance
de La destruction.La destruction est très
importante.
Avantensilage
l’azote des acides aminésreprésente plus
de74 ,6 3
p. 100 de l’azote total.Après ensilage,
cettepart
de l’azote total descend à 40-45 p. 100. La destruction des acides aminés atteint en moyenne 45 p. 100et est du même ordre degrandeur
que laperte
enprotéine
vraie totale.L’apparition d’NH 3
dans uneproportion
de15 -18
p. 100de l’azote total ne ren-seigne
que pour une faiblepart
sur la destruction des acides aminés.ÉvoLution
individuelle des acides aminés.Si la
plupart
des acides aminés sont détruits dansl’ensilage
enproportions
consi-dérables,
il existecependant
des différences individuelles assezimportantes.
-
L’arginine disparaît
presque totalement.- L’histidine
disparaît
pour6 0 - 70
p. 100.- D’autres acides aminés très
importants
en alimentation comme lathréonine,
latyrosine,
lalysine disparaissent
pour 50 p. 100.- La fraction d’acides aminés non
indispensables
estégalement
trèsattaquée.
Les acides
glutamique
etaspartique perdent plus
de 50 p. ioo tandis que la sérine et laproline perdent
40 p. 100.- D’autres acides aminés sont moins vulnérables. C’est le cas de la
phénylala- nine,
de laglycine,
de lavaline,
de laméthionine,
et de la leucine.- On obtient un
gain
enisoleucine,
mais il est de très faibleamplitude.
- Les deux seuls acides aminés
qui
sont formés enproportion importante
n’ontpas
grande signification
en alimentation. Ce sont l’alaninequi
double sa teneur etl’acide
a-amino-butyrique qui apparaît
dansl’ensilage
sans avoir été décelé dans laluzerne.
Le bilan est donc autrement
plus négatif
que ne le laisse supposer la formationd’ammoniaque.
Etpourtant,
il nes’agit
pas de très mauvaisensilages,
mais d’ensi-lages
de réussite moyenne comme on en rencontre enmajorité
dans lapratique.
2
. Destruction des
protéines
dans lesensilages
!11TJ(tabl. 2 ).
Nous avons
déjà signalé
que la formationd’ammoniaque
étaitpratiquement
nulle dans les
ensilages
AIV(N NH 3/ N
total de l’ordre de 3,5o p. 100 au lieu de 15- 18 p. 100dans les autres
ensilages),
et que laperte
enprotéine
vraie totale était deux foisplus
faible dans lesensilages
AIV.Il en est de même au
point
de vue de la conservation des acides aminés. Le pour-centage
de l’azote total retrouvé dans les acidesaminés,
au lieu de tomber à 45p. ioocomme dans les
ensilages ordinaires,
reste dans lesensilages
AIV aux environs de6 0 p. IOO.
Pour ne
prendre
que deuxexemples, l’arginine qui disparaît
totalement dans les autresensilages
nerégresse
que de 30 p. 100 dans lesensilages AIV ;
l’alanine dont le taux double dans les mauvaisensilages n’augmente
pas dans lesensilages
AIV.
En somme, dans les
ensilages
AIV lespertes n’atteignent
pas le tiers de cequ’elles
sont dans les autres
ensilages.
Cela confirme doncpleinement
l’excellent compor- tement desensilages
AIV que l’on connaissaitdéjà
par l’étude des acides gras vola- tils ou del’ammoniaque.
3
.
Effet
duglucose
et de l’amidon malté sur ladégradation
desprotéines (tabl. 4 ).
Une
augmentation
de la dose deglucose
ou d’amidon modifie les teneurs en cer-tains acides aminés.
Il a
déjà
été dit que l’addition de sucre ou d’amidon malté freine laproduction
de
NH 3
etpermet
une meilleure conservation de laprotéine
vraie totale. Les données dutableau 4 montrent
que le p. IOO de l’azote retrouvé dans les 17 acides aminés estégalement
amélioré par le sucre et l’amidon malté.La destruction des acides aminés est donc freinée. Cela se remarque en
particu-
lier pour certains acides aminés comme les acides
aspartique
etglutamique,
la thréo-nine,
lasérine,
laproline,
laglycine,
latyrosine, l’histidine,
lalysine.
4
. Effet
de l’urée suv La destruction desprotéines (tabl. 4 ).
Pour les m acides aminés dont la teneur diminue en cours de
conservation,
l’emploi
de 2 p. 1000 d’urée aggrave lespertes (cette aggravation
est hautementsignificative,
tabl.3 ).
Pour les 3 acides aminés dont la teneur
augmente
au cours dutemps (alanine,
isoleucine et acide
«-amino-butyrique),
l’urée accentue cetteaugmentation
de ma-nière hautement
significative.
L’augmentation
est d’autantplus importante
que les fermentationsputrides
sont
plus prononcées ;
alors que dans lesensilages
AIV dont laqualité
estexcellente,
leur formation estbeaucoup
moinsimportante.
L’accentuation de leur formation en
présence
d’uréetémoigne
donc d’une inten- sification des fermentations nuisibles.Pour l’ensemble des acides
aminés,
l’effetglobal
de l’urée est d’ailleurs défici- taire : lepourcentage
de l’azote retrouvé dans les acides aminés diminuesignificati-
vement de 45 p. IOO sans urée à 43 p. 100avec urée.
On doit donc en conclure que l’azote de l’urée ne sert pas à la
synthèse
de pro- téinesbactériennes, puisqu’en présence
d’urée tous les acides aminés de la luzerne sontplus
intensément détruits(à l’exception
del’alanine,
de l’acide«-amino-buty- rique
et del’isoleucine),
et que l’addition d’urée aggrave lespertes protidiques.
Reçu pour
publication
enjuin
1968.REMERCIEMENTS
Cette
publication
a été renduepossible
grâce aux subsides de l’I. R. S. I. A.(Institut
pour l’en- couragement de la RechercheScientifique
dans l’Industrie et l’Agriculture),auquel
les auteursexpriment
leur plus vive gratitude.SUMMARY
CHANGES IN AMINO ACID COMPOSITION OF LUCERNE DURING ENSILING.
COMPARATIVE PROTECTIVE EFFECTS O1! AIV SOLU’1’ION, OF GLUCOSE, OF A MIXTURE OF STARCH AND MALT AND OF UREA
A
series of 171
samples
of lucerne were ensiled in glassjars
of 1.5 litres with differentproportions
of
glucose,
malted starch, urea of strong mineral acids. The kinetics ofdegradation
ofprotein (forma-
tion of NH,), losses of total protein nitrogen and 17 amino acids were followed.
The
following
conclusions could be drawn :a)
General tendencies in thedegvadatiort of jwotein (table
I)I
. Duvatiovt and
intensily.
Degradation
ofproteins develops
veryrapidly ;
it ispractically
finishedafter 3 weeks.
The percentage of total
nitrogen
recovered as NI]3 representsonly
a small part of thenitrogen
of the amino acids studied. For r5 per cent total NbI3N there was in fact 40 per cent loss of total
true protein and 40 per cent loss of
nitrogen
from the amino acids estimated.2
.