Sommes de Jacobi
(Sous forme d’exercices)
Soit A un groupe ab´ elien fini. Soient f et g deux applications (ensemblistes) de A dans C ; le produit de convolution de f et g est l’application de A dans C , not´ ee f ∗ g, d´ efinie de la fa¸con suivante :
(f ∗ g)(z) = X
x+y=z
f (x) g(y) ,
la somme au second membre ´ etant index´ ee par le sous-ensemble de A × A form´ e des couples (x, y) avec x + y = z.
1) On note (comme ` a l’ordinaire) C
Ale C -espace vectoriel des applications de A dans C . Montrer que l’application bilin´ eaire C
A× C
A→ C
A, (f, g) 7→ f ∗g fait de C
Aune C -alg` ebre commutative. Montrer en particulier que l’´ el´ ement neutre de la loi ∗ est “la masse de Dirac en z´ ero”, c’est-` a-dire l’application, not´ ee δ, d´ efinie par :
δ(x) =
( 1 pour x = 0 0 pour x 6= 0 .
2) Soit K un corps fini ` a q ´ el´ ements. On prend maintenant pour A le groupe additif de K.
On appelle caract` ere multiplicatif de K un homomorphisme de groupes de K
×dans C
×. Le produit de deux caract` eres multiplicatifs χ
1et χ
2, not´ e χ
1χ
2, est le caract` ere multiplicatif d´ efini par (χ
1χ
2)(x) = χ
1(x)χ
2(x). On note u le caract` ere multiplicatif trivial (d´ efini par u(x) = 1 pour tout x dans K
×). Il est clair que l’ensemble des caract` eres multiplicatifs de K muni du produit introduit ci-dessus est un groupe dont l’´ el´ ement neutre est u ; l’inverse de χ est not´ e χ
−1.
Soit χ un caract` ere multiplicatif de K , on note χ e l’application de K dans C obtenue en prolongeant χ par z´ ero, en clair :
χ(x) = e
( χ(x) pour x 6= 0
0 pour x = 0 .
1 2
J(χ
1, χ
2) = X
x1+x2=1
χ f1(x
1) χ f2(x
2) ,
(x
2) ,
la somme au second membre ´ etant index´ ee par le sous-ensemble de K × K form´ e des couples (x
1, x
2) avec x
1+ x
2= 1 (J(χ
1, χ
2) s’appelle une somme de Jacobi ).
2.1) Soient χ
1et χ
2deux caract` eres multiplicatifs de K avec χ
1χ
26= u.
Montrer que l’on a :
χ f1 ∗ χ f2 = J(χ
1, χ
2) χ ]
1χ
2 .
= J(χ
1, χ
2) χ ]
1χ
2.
2.2) Soit χ un caract` ere multiplicatif de K avec χ 6= u . Montrer que l’on a : χ e ∗ χ g−1 = χ(−1) (qδ − 1) ,
le symbole 1 dans l’expression qδ − 1 au second membre d´ esignant l’applica- tion constante sur K de valeur 1.
2.3) Soient χ
1et χ
2deux caract` eres multiplicatifs de K avec χ
16= u, χ
26= u et χ
1χ
26= u. D´ eduire des deux formules pr´ ec´ edentes que l’on a :
|J(χ
1, χ
2)|
2= q .
[Utiliser l’associativit´ e et la commutativit´ e du produit de convolution et observer que l’on a l’´ egalit´ e (qδ − 1) ∗ (qδ − 1) = q (qδ − 1).]
3) Soit p un nombre premier diff´ erent de 2. On prend maintenant pour K le corps F
p. On note le caract` ere de Legendre, c’est-` a-dire le caract` ere multiplicatif de F
pd´ efini par
(x) =
( +1 si x est un carr´ e dans Fp
−1 si x n
0est pas un carr´ e dans F
p.
3.1) Montrer que les conditions suivantes sont ´ equivalentes : (i) p ≡ 1 (mod 4) ;
(ii) −1 est un carr´ e dans F
p;
(iii) il existe un caract` ere multiplicatif χ de F
pavec χ
2= .
Si la congruence p ≡ 1 (mod 4) est satisfaite alors combien y a-t-il de ca- ract` eres multiplicatifs χ de F
pv´ erifiant χ
2= ?
On suppose p ≡ 1 (mod 4) dans le reste de la question 3. Soit χ un caract` ere multiplicatif de F
pavec χ
2= . On pose
J(χ, χ) = a
p+ ıb
pavec a
pet b
pr´ eels.
3.2) Montrer que a
pet b
psont des entiers et que l’on a : p = a
2p+ b
2p.
3.3) Montrer que a
pest impair et b
ppair.
[Observer que l’on a J(χ, χ) = χ(
12)
2+ 2 S avec S dans Z [ı].]
3.4) Montrer que a
pest ind´ ependant du choix de χ.
3.5) Soit Γ le sous-ensemble de F
p× F
pform´ e des ´ el´ ements (x, y) v´ erifiant x
2+ y
2= 1. Montrer que l’on a :
2a
p= (2) X
(x,y)∈Γ
e (x) .
[Observer que l’on a J(χ, χ) = P
x∈Fp
χ e (x(1 − x)) et 4x(1 − x) = 1 − (2x − 1)
2.]
3.6) Soit ρ un racine carr´ ee de −1 dans F
p. Montrer que l’application (en- sembliste)
F
×p→ F
p× F
p, z 7→ ( 1 2 (z + 1
z ) , 1
2ρ (z − 1 z ) ) induit une bijection de F
×psur Γ. En d´ eduire que l’on a :
2a
p= X
z∈F×p
e (z + 1 z ) .
3.7) Montrer que la formule pr´ ec´ edente implique la congruence 2a
p≡ −C
p−1 4 p−1
2
(mod p) .
[Utiliser le fait que l’image dans Z /p de l’entier e (t) est ´ egale ` a t
p−12pour tout t dans Z /p.]
C
n2nest pair. On a donc aussi : a
p≡ − 1
2 C
p−1 4 p−1
2
(mod p) .
Soit r
p: Z → Z /p la surjection canonique et s
p: Z /p → Z l’unique section de r
p(dire que s
pest une section de r
psignifie que la compos´ ee r
p◦s
pest l’identit´ e de Z /p) v´ erifiant −
p−12≤ s
p(x) <
p−12pour tout x dans Z /p. Montrer que l’on a la formule “explicite” :
a
p= (s
p◦ r
p)( − 1 2 C
p−1 4 p−1
2
) .
[Observer que l’on a l’in´ egalit´ e |a
p| < √ p.]
3.9) Soit C le sous-ensemble de F
p× F
pform´ e des ´ el´ ements (x, y) v´ erifiant x
4+ y
2= 1.
On note π : C → Γ l’application (x, y) 7→ (x
2, y). Montrer que l’on a, pour tout point (x, y) de Γ :
card( π
−1((x, y ))) = 1 + e (x) ,
la notation card( ) d´ esignant le cardinal d’un ensemble fini. En d´ eduire l’´ egalit´ e :
card(C) = p − 1 + 2 (2) a
pet l’in´ egalit´ e :
|card(C) − (p − 1)| < 2 √ p .
[Montrer que l’avant-derni` ere ´ egalit´ e entraˆıne card (C) = card (Γ) + 2 (2)a
pet utiliser la premi` ere partie de la question 3.6.]
4) Soit p un nombre premier diff´ erent de 2 et 3.
4.1) Montrer que les conditions suivantes sont ´ equivalentes : (i) p ≡ 1 (mod 3) ;
(ii) il existe un caract` ere multiplicatif χ de F
pavec χ
3= u et χ 6= u.
Si la congruence p ≡ 1 (mod 3) est satisfaite alors combien y a-t-il de ca- ract` eres multiplicatifs χ de F
pv´ erifiant χ
3= u et χ 6= u ?
On suppose p ≡ 1 (mod 3) dans le reste de la question 4. Soit χ un caract` ere multiplicatif de F
pavec χ
3= u et χ 6= u. On pose
J(χ, χ) = a
p+ b
p
avec a
pet b
pr´ eels (la notation d´ esigne, comme ` a l’ordinaire, la racine cubique de l’unit´ e exp(
2ıπ3) dans C ).
4.2) Montrer que a
pet b
psont des entiers et que l’on a : p = a
2p− a
pb
p+ b
2p.
4.3) Montrer que l’on a :
χ e ∗ χ e ∗ χ e = J(χ, χ) (pδ − 1) . En d´ eduire la formule :
J(χ, χ) = − X
x+y+z=1
χ(x) e χ(y) e χ(z) e
et les congruences :
a
p≡ −1 (mod 3) , b
p≡ 0 (mod 3) .
[Observer que l’on a P
x+y+z=1
χ(x) e χ(y) e χ(z) = e χ (
13)
3+ 3 S avec S dans Z [].]
4.4) On pose A
p= 2 a
p− b
pet B
p=
13b
p; A
pet B
psont donc deux entiers relatifs avec 4p = A
2p+ 27 B
p2et A
p≡ 1 (mod 3).
Montrer que A
pest ind´ ependant du choix de χ.
Montrer que 4p s’´ ecrit de fa¸con unique A
2+ 27 B
2avec A et B deux entiers naturels.
[Utiliser le fait que l’anneau Z [] est principal pour montrer que si a, b, a
0, b
0sont des
´
el´ ements de Z avec p = a
2− ab + b
2et p = a
02− a
0b
0+ b
02alors il existe un ´ el´ ement u de Z []
×tel que l’on a a
0+ b
0 = u (a + b ) ou a
0+ b
0 = u (a + b
2).]
En d´ eduire que l’on a : A
p=
( +A pour A ≡ +1 (mod 3)
−A pour A ≡ −1 (mod 3) .
4.5) Soit t un ´ el´ ement de Z /p. Montrer que χ(t) + e χ(t) e est un entier dont l’image dans Z /p est ´ egale ` a t
p−13+ t
2p−13.
En d´ eduire la congruence suivante : A
p≡ −C
p−1 3
2p−13
(mod p) .
[Observer que l’on a A
p= P
x∈Fp
χ e (x(1 − x)) + χ e (x(1 − x))
2.]
4.6) Montrer que l’on a la formule “explicite” : A
p= (s
p◦ r
p)( −C
p−1 3
2p−13
) .
4.7) Soient k un ´ el´ ement non nul de F
pet D
kle sous-ensemble de F
p× F
pform´ e des ´ el´ ements (x, y) v´ erifiant k x
3+ y
2= 1.
On note π : D
k→ F
pl’application (x, y) 7→ y. Montrer que l’on a, pour tout point y de F
p:
card( π
−1(y)) = 1 + χ( e 1 − y
2k ) + χ( e 1 − y
2k )
2
.
En d´ eduire l’´ egalit´ e :
card(D
k) = p + 2 < ( χ(2k)
−1J(χ, χ))
(la notation <( ) d´ esigne la partie r´ eelle d’un nombre complexe) et l’in´ egalit´ e :
|card(D
k) − p| < 2 √ p .
4.8) Soit l un ´ el´ ement non nul de F
p; on pose d
p(l) = 2 < (χ(l)
−1J(χ, χ)) (d
p(l) est donc un entier ind´ ependant du choix de χ). Montrer que l’on a la formule “explicite” :
d
p(l) = (s
p◦ r
p)( −C
p−1 3
2p−13