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La courbure
Erwan Penchèvre
30 mars 2015
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▶ On connaît maintenant l’effet d’un champ gravitationnel sur la matière et sur les lois de l’électrodynamique.
▶ Comment la matière crée-t-elle un champ gravitationnel ? Autrement dit : comment la matière influence-t-elle la structure métrique de l’espace-temps ?
Analogie :
les équations de Maxwell, équations différentielles décrivant le champ électromagnétiqueFαβ en fonction deJα.
Quelles sont les équations différentielles reliant la structure de l’espace-temps au tenseur énergie-impulsionTαβ de la matière ?
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Plan
Définition du tenseur de courbure Unicité du tenseur de courbure
Transport parallèle d’un vecteur le long d’une boucle Gravitation ou coordonnées curvilignes ?
Commutateur de deux dérivées covariantes Propriétés algébriques du tenseur de courbure Identités de Bianchi
Définition du tenseur de courbure 5 / 31
Le tenseur de courbure
Problème
On cherche un tenseur qui soit lié à la structure de l’espace-temps.
Il doit dépendre de gµν et de ses dérivées.
Remarque
Tout tenseur ne dépendant que degµν et de ses dérivées premières ne dépend, en fait, que de gµν.
Démonstration
Dans un référentiel localement inertiel, ∂gµν
∂xλ = 0...
Pour construire de nouveaux tenseurs, il faut regarder les dérivées secondes degµν (ou bien les dérivées premières deΓµνλ ).
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Définition du tenseur de courbure 6 / 31
Γµνλ = ∂xλ
∂x′τ
∂x′ρ
∂xµ
∂x′σ
∂xν Γρσ′τ + ∂xλ
∂x′τ
∂2x′τ
∂xµ∂xν On isole ∂2x′τ
∂xµ∂xν :
∂2x′τ
∂xµ∂xν =∂x′τ
∂xλΓµνλ −∂x′ρ
∂xµ
∂x′σ
∂xνΓρσ′τ On dérive par rapport à xκ :
∂3x′τ
∂xκ∂xµ∂xν = Γµνλ (∂x′τ
∂xηΓκλη −∂x′ρ
∂xκ
∂x′σ
∂xλΓρσ′τ )
−Γρσ′τ∂x′ρ
∂xµ (∂x′σ
∂xηΓκην−∂x′η
∂xκ
∂x′ξ
∂xνΓηξ′σ )
−Γρσ′τ∂x′σ
∂xν
(∂x′ρ
∂xηΓκµη −∂x′η
∂xκ
∂x′ξ
∂xµΓηξ′ρ )
+∂x′τ
∂xλ
∂Γµνλ
∂xκ −∂x′ρ
∂xµ
∂x′σ
∂xν
∂x′η
∂xκ
∂Γρσ′τ
∂x′η
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Définition du tenseur de courbure 7 / 31
Commutativité des dérivées partielles :
∂3x′τ
∂xκ∂xµ∂xν − ∂3x′τ
∂xν∂xµ∂xκ = 0
⇐⇒ ∂x′τ
∂xλ
(∂Γµνλ
∂xκ −∂Γµκλ
∂xν + Γµνη Γκηλ −Γµκη Γνηλ )
−∂x′ρ
∂xµ
∂x′σ
∂xν
∂x′η
∂xκ
(∂Γρσ′τ
∂x′η −∂Γρη′τ
∂x′σ −Γλσ′τΓηρ′λ+ Γλη′τΓσρ′λ )
= 0
⇐⇒ ∂x′τ
∂xλRλµνκ−∂x′ρ
∂xµ
∂x′σ
∂xν
∂x′η
∂xκR′τρση = 0
⇐⇒ R′τρση = ∂x′τ
∂xλ
∂xµ
∂x′ρ
∂xν
∂x′σ
∂xκ
∂x′ηRλµνκ
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Définition du tenseur de courbure 8 / 31
Définition
le tenseur de courbure de Riemann-Christoffel :
Rλµνκ= ∂Γµνλ
∂xκ −∂Γµκλ
∂xν + Γµνη Γκηλ −Γµκη Γνηλ
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Unicité du tenseur de courbure 10 / 31
Unicité du tenseur de courbure
Proposition
Rλµνκ est l’unique tenseur constructible à partir de gµν et de ses dérivées premières et secondes, et linéaire en les dérivées secondes.
Démonstration Soit un tel tenseur.
Γµνλ = 0 ⇒ ∂gµν
∂xλ = 0 ⇒ le tenseur est fonction linéaire des dérivées secondes.
Étudions donc la forme que doit avoir ce tenseur dans un référentiel oùΓµνλ = 0, en un point donné.
Il doit être fonction linéaire des ∂Γµνλ
∂xκ .
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Unicité du tenseur de courbure 11 / 31
Soit x′ un autre référentiel tel qu’on ait aussiΓρσ′τ = 0.
Γµνλ = ∂xλ
∂x′τ
∂x′ρ
∂xµ
∂x′σ
∂xν Γρσ′τ + ∂xλ
∂x′τ
∂2x′τ
∂xµ∂xν
donc tous les référentiels x′ tels que Γρσ′τ = 0 s’obtiennent à partir du référentiel xavec les changements de coordonnéesx→x′ tels que :
∂2xτ
∂xµ∂xν = 0 Les dérivées troisièmes ∂3x′τ
∂xκ∂xµ∂xν peuvent prendre des valeurs arbitraires au point en question.
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Unicité du tenseur de courbure 12 / 31
Pour un tel référentiel, l’expression des dérivées troisièmes vue plus haut montre que :
∂Γρσ′τ
∂x′η = ∂xµ
∂x′ρ
∂xν
∂x′σ
∂xκ
∂x′η
∂x′τ
∂xλ
∂Γµνλ
∂xκ − ∂xµ
∂x′ρ
∂xν
∂x′σ
∂xκ
∂x′η
∂3x′τ
∂xκ∂xµ∂xν Pour construire un tenseur, il faut choisir une combinaison linéaire des ∂Γµνλ
∂xκ pour laquelle les termes rouges se compensent et disparaissent.
On n’a pas le choix !
Tλµνκ= ∂Γµνλ
∂xκ −∂Γµκλ
∂xν
Dans un référentiel oùΓµνλ = 0 on a doncTλµνκ =Rλµνκ. Équation entre tenseurs⇒ elle est vraie dans tout référentiel.
Unicité du tenseur de courbure 13 / 31
Remarque
On peut certes construire d’autres tenseurs par combinaison linéaire des Rλµνκ :
▶ letenseur de RicciRµκ=Rλµλκ
▶ lescalaire de courbureR=gµκRµκ
Transport parallèle d’un vecteur le long d’une boucle 15 / 31
Transport parallèle d’un vecteur le long d’une boucle
Comment mesurer les effets de la courbure de l’espace-temps ? Analogie :
quand on transporte parallèlement un vecteur le long d’une boucle sur une surface courbe, on ne retrouve pas toujours la valeur initiale après un circuit complet.
Équation dutransport parallèled’un vecteurSµ: dSµ
dτ = Γµνλ dxν dτ Sλ
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Transport parallèle d’un vecteur le long d’une boucle 16 / 31
∆Sµ ∆Sµ=∑
N
∆NSµ
le long d’une boucle infinitésimale, ∆Sµ=. . .?
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Transport parallèle d’un vecteur le long d’une boucle 17 / 31
À l’ordre 1 en xµ−Xµ, au point X=x(τ0) :
Sµ(τ) =Sµ(τ0) + Γµνλ (X)(xν(τ)−Xν)Sλ(τ0) +. . .
Γµνλ (x) = Γµνλ (X) + (xρ−Xρ)∂Γµνλ
∂xρ (X) +. . . d’où :
Sµ(τ) =Sµ(τ0) +
∫ τ
τ0
dSµ dτ dτ
=Sµ(τ0) +∫τ τ0
(
Γµνλ(X) + (xρ(τ)−Xρ)∂Γ
µνλ
∂xρ(X)) (
Sλ(τ0) + Γµρσ(X)(xρ(τ)−Xρ)Sσ(τ0))dxν
dτ dτ
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Transport parallèle d’un vecteur le long d’une boucle 18 / 31
Le long d’une boucle, si xµ(τ1) =xµ(τ0),
∫ τ1
τ0
dxν dτ dτ = 0
∆Sµ=Sµ(τ1)−Sµ(τ0)
=
(∂Γµνσ
∂xρ (X) + Γµνλ (X)Γλρσ(X) )
Sσ(τ0)
∫ τ1
τ0
xρdxν dτ dτ Intégration par parties :
∫ τ1
τ0
xρdxν dτ dτ =
∫ τ1
τ0
d
dτ(xρxν)dτ−
∫ τ1
τ0
xνdxρ dτ dτ
=−
∫ τ1
τ0
xνdxρ dτ dτ
.
Transport parallèle d’un vecteur le long d’une boucle 19 / 31
d’où
∆Sµ=
(∂Γµνσ
∂xρ + Γµνλ Γλρσ )
Sσ(τ0)×1 2
(∫ τ1
τ0
xρdxν dτ dτ −
∫ τ1
τ0
xνdxρ dτ dτ
)
= 1 2
(∂Γµνσ
∂xρ −∂Γµρσ
∂xν + Γµνλ Γλρσ −ΓµρλΓλνσ )
| {z }
Rσµνρ
Sσ(τ0)
∫
xρdxν dτ dτ
donc le long d’une surface oùRσµνρ= 0, on a∆Sµ= 0
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Transport parallèle d’un vecteur le long d’une boucle 20 / 31
Corollaire 1
Dans une région de l’espace-temps où Rσµνρ= 0, la valeur d’un vecteur transporté parallèlement est indépendante du chemin suivi.
Corollaire 2
Dans une région de l’espace-temps où Rσµνρ= 0, à partir d’un vecteur défini en un point X donné,
on peut, par transport parallèle, définir un champSµ(x) vérifiant : DSµ
Dτ = 0,
le long de n’importe quelle trajectoire partant du point X.
Alors, en tout point :
Sµ;ν = 0
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Gravitation ou coordonnées curvilignes ? 22 / 31
Gravitation ou coordonnées curvilignes ?
Soit un espace-temps muni d’une métriquegµν̸=ηµν. Comment savoir s’il y a vraiment un champ gravitationnel ? (peut-être existe-t-il un changement de coordonnéesx→x′ tel quegµν′ =ηµν globalement...)
Exemple
(r, θ, ϕ,t)
grr= 1, gθθ =r2, gϕϕ=r2sin2θ, gtt =−1
Gravitation ou coordonnées curvilignes ? 23 / 31
Théorème
Il existe un changement de coordonnéesx→x′ tel que gµν′ =ηµν si et seulement si Rλµνκ= 0partout.
Démonstration
(gµν′ =ηµν)⇒(Rλµνκ= 0) : évident.
(Rλµνκ= 0)⇒(gµν′ =ηµν)?
Soit un point X. Il existe un référentiel localement inertiel en X: ηαβ =gµν(X)dαµdβν
On définit quatre vecteurs covariants D0µ,D1µ,D2µ,D3µ comme solutions des équations différentielles suivantes :
∂Dαµ
∂xν −Γµνλ Dαλ= 0 Dαµ(X) =dαµ
Gravitation ou coordonnées curvilignes ? 24 / 31
Ces solutions vérifient
∂Dαµ
∂xν −∂Dαν
∂xµ = 0,
donc chaqueDα est le gradient d’un scalaire (Poincaré) :
∂ξα
∂xµ =Dαµ. On vérifie qu’on a alors, partout :
ηαβ =gµνDαµDβν car(gµνDαµDβν);ρ= 0.
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Commutateur de deux dérivées covariantes 26 / 31
Commutateur de deux dérivées covariantes
La dérivée covariante Vµ;ν est un tenseur covariant en µet enν.
On peut donc définir une dérivée covariante secondeVµ;ν;κ :
Vµ;ν;κ= ∂Vµ;ν
∂xκ −Γνκλ Vµ;λ−Γµκλ Vλ;ν
Exercice
Montrer que Vµ;ν;κ−Vµ;κ;ν =−VσRσµνκ et que Vλ;ν;κ−Vλ;κ;ν =VσRλσνκ.
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Propriétés algébriques du tenseur de courbure 28 / 31
Propriétés algébriques de R
λµνκRλµνκ=gλσRσµνκ=gλσ
(∂Γµνσ
∂xκ −∂Γµκσ
∂xν + Γµνη Γκησ −Γµκη Γνησ )
Dans les termes en rouge, écrivons lesΓµνσ en fonction de gµν et de ses dérivées, puis écrivons toutes les dérivées premières degµν en fonction desΓµνσ . Après simplification, on obtient :
Rλµνκ=1 2
( ∂2gλν
∂xκ∂xµ − ∂2gµν
∂xκ∂xλ − ∂2gλκ
∂xν∂xµ + ∂2gµκ
∂xν∂xλ )
+gησ(Γνλη Γµκσ −Γκλη Γµνσ )
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Propriétés algébriques du tenseur de courbure 29 / 31
Proposition
▶ Rλµνκ=Rνκλµ
▶ Rλµνκ=−Rµλνκ =−Rλµκν =Rµλκν
▶ Rλµνκ+Rλκµν+Rλνκµ= 0
Corollaire
▶ Le tenseur de RicciRµκ=gλνRλµνκ est symétrique.
▶ ελµνκRλµνκ= 0.
Remarque
En utilisant la proposition, on voit qu’il n’y a, au signe près, qu’une seule manière de contracter deux indices de Rλµνκ : il y a
unicité du tenseur de Ricci.
De même pour le scalaire de courbure R=gλνgµκRλµνκ.
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Identités de Bianchi 31 / 31
Identités de Bianchi
Proposition
▶ Rλµνκ;η+Rλµην;κ+Rλµκη;ν = 0
▶
(
Rµν−1 2gµνR
)
;µ
= 0
Démonstration exercice