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Essai de définition universelle du dossier

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Marie-Anne Chabin

Archive 17

1, ave du Père-Lachaise F-75020 Paris

marie-anne.chabin@archive17.fr

RÉSUMÉ. Le dossier est souvent définit par son objet (dossier de subvention, dossier de patient, dossier de presse) sans que l’on s’appesantisse davantage sur ce que recouvre la notion de dossier, ce qu’elle sous-entend, à quoi elle fait référence. Ce numéro de Document numérique sur la numérisation de dossiers papier et la production de dossiers électroniques est une occasion d’essayer de définir ce qu’est un dossier et d’observer si le changement de support affecte le contenu du dossier.

ABSTRACT. What we call « dossier » in French (in English whether file or folder or record) is usually defined through the subject it refers to (financial file, medical record, clipping file…), and the meaning of the very word « dossier » is not further explained; the reason of using this word instead of another is not so clear.

This issue of Document numérique about electronic files/records, both digitalized paper documents and native electronic documents, seems an opportunity to precise what a « dossier » supposed to be and if changing the medium from paper to electronic means also changing structure and content.

MOTS-CLÉS : document, dossier, support, structure, identification, métadonnées, traçabilité, gestion électronique de documents.

KEYWORDS: document, file/record, medium, structure, identification, metadata, tracking, electronic data management.

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1. Introduction

Qu’est-ce qu’un dossier ? Il existe des dossiers sur tous les sujets (dossier juridique, dossier d’urbanisme, dossier médical, dossier de documentation…) mais que présuppose ou que sous-entend l’emploi du mot dossier ? Ce mot a-t-il le même sens dans l’environnement numérique que dans l’environnement papier ?

Le fait que la revue Document numérique consacre un numéro spécial aux

« dossiers numériques » peut surprendre au premier abord, car le monde du numérique est en général plutôt associé à la notion de données, tandis que le mot dossier évoque facilement la pile de chemises sur le bureau, des dossiers suspendus dans une armoire, ou encore des boîtes d’archives remplies au gré des affaires terminées.

Dans ces conditions, l’expression « dossiers numériques » se limite-t-elle à désigner le produit de la numérisation de ces dossiers papier, ou peut-elle aussi renvoyer à la création de dossiers numériques natifs ? Si oui, qu’est-ce qu’un dossier numérique natif, puisqu’en tout état de cause il n’alimentera ni une étagère d’armoire ni un carton d’archives ?

Les pages qui suivent tentent de circonscrire la notion de dossier, née au XVIe siècle dans un contexte lié à l’usage du papier, répandue au XXe siècle avec le développement de la bureaucratie et utilisée aujourd’hui dans l’environnement électronique : quel est le sens spécifique de ce mot ? A-t-il évolué au cours des siècles et des techniques de production de l’information ? A quoi s’oppose-t-il ? La notion de dossier est-elle vraiment pertinente dans l’environnement numérique ?

2. Questions terminologiques 2.1. Définition minimale

Qu’est-ce qu’un dossier ? Le mot vient de « dos » et évoque a priori quelque chose qui se trouve à l’arrière d’un corps dont il assure le maintien. Le dos de l’homme ou de l’animal est disposé autour de la colonne vertébrale. L’idée a été transposée aux objets quand, par exemple, on parle du « dos » d’un livre. Le mot dossier, dans son acception purement matérielle désigne également un élément qui permet de maintenir : le dossier du fauteuil.

Au sens figuré, le Petit Robert donne comme définition de dossier : « Ensemble des pièces relatives à une affaire et placées dans une chemise ». On voit ressortir deux éléments principaux : la notion d’« affaire » et la notion de « chemise ». Toutefois, on peut se demander si cette définition est suffisamment explicite. Recouvre-t-elle la réalité des appellations du langage courant ? « Dossier » a-t-il par ailleurs un sens plus technique ?

Prenons quelques exemples. Un dossier de personnel (gestion des ressources humaines) ou un dossier de patient (dossier médical) ne correspondent pas exactement

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à la définition : d’une part, il ne s’agit pas d’une affaire, il s’agit d’un individu ; d’autre part, les pièces de ce dossier peuvent se trouver dans plusieurs chemises, dans des armoires distinctes (armoires des équipes qui suivent la carrière, les congés, ou la formation), voire dans des bureaux ou des services distincts (service de rhumatologie et service de cardiologie).

Dans les siècles passés, une procédure judiciaire importante ou complexe pouvait donner lieu à un gros dossier qui toutefois tenait le plus souvent dans une grosse chemise. L’inflation paperassière et procédurale aidant, il n’est pas exceptionnel de voir aujourd’hui des dossiers judiciaires de plusieurs mètres d’épaisseur, voire plusieurs dizaines de mètres, lesquels ne tiennent évidemment pas dans une seule chemise.

On en conclut qu’il convient de modifier et/ou de préciser la définition minimale du dictionnaire pour y faire entrer tous les exemples de dossiers.

2.2. A quoi le mot « dossier » fait-il référence ?

La définition du dictionnaire énonce deux traits distinctifs du dossier résumées ci- dessus par deux mots : « affaire » et « chemise » qui se révèlent vite trop restrictifs. Ce sont peut-être les deux mots du résumé qui sont trop restrictifs car dans les exemples proposés (et dans bien d’autres), on a bien croisement de deux éléments : un élément de pertinence (« relatif à ») et un élément de localisation (« placé dans »).

Toutefois, la pertinence va plus loin qu’une affaire puisqu’il peut s’agir d’une personne, ou d’une activité précise dans le cadre de la conduite d’une affaire (établissement des pièces contractuelles dans une affaire de construction), ou d’une procédure (dont le sens est un peu plus circonscrit que le mot affaire).

Par ailleurs, la localisation du dossier n’est pas unique puisque le volume physique du papier oblige à le répartir dans plusieurs chemises facilement manipulables. Si le dossier est vraiment volumineux, c’est souvent que, en raison de l’importance de l’affaire, plusieurs acteurs sont intervenus dans sa production et que, de ce fait, chaque acteur organise sa partie du dossier (chaque équipe ou chaque service).

Le nombre des acteurs n’est pas seul en cause ; les supports et la forme physique jouent aussi leur rôle pour différencier la localisation puisque que le même document, selon son support et sa forme, sera physiquement placé avec les autres documents, ou éloignés d’eux. Ainsi pour un dossier d’urbanisme où les plans pourront être soit pliés et rangés dans la même chemise que les documents techniques ou contractuels, soit roulés dans des tubes et rangés dans un autre local. Du point de vue logique, il serait aberrant que cet élément factuel suffise à altérer l’entité du dossier auquel ces documents se rattachent.

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Il en ressort que le dossier, quoi qu’on fasse, s’appréhende nécessairement en deux dimensions indissociables : une dimension intellectuelle ou logique (incluant les dimensions syntaxique et sémantique), et une dimension matérielle ou physique.

2.3. A quoi le mot « dossier » s’oppose-t-il ?

Pour aller plus loin, on peut se demander ce qui différencie un dossier d’un autre document qui ne serait pas un dossier. Qu’est-ce que n’est pas un dossier ? Ou encore, qu’est-ce qu’un « non-dossier » ?

Les autres mots utilisés pour désigner des ensembles d’informations sont notamment les mots « document », « registre », « collection ». Quelles sont les relations de ces notions avec celle de dossier ?

Le « document » est un terme très générique défini comme l’association d’une information et d’un support. Les dossiers sont constitués de documents (souvent hétérogènes) et peuvent être considérés eux-mêmes comme des documents. Dans l’environnement papier, le document qui entre dans la composition d’un dossier est volontiers appelé « pièce » (voir la définition du Petit Robert ci-dessus). Toutes les pièces d’un dossier dont des documents mais tous les documents n’entrent pas systématiquement dans la composition logique d’un dossier, même s’ils peuvent être

« placé dans une chemise ». Par exemple, un rapport non relié, émis à une date précise et placé dans une chemise en raison du nombre important de ses pages ou pour lui donner une présentation plus agréable, ne pourra être qualifié de « dossier » que sur ce critère matériel.

La différence entre document et dossier est que le premier correspond à une date unique, à un acte unique et la chemise où il est rangé regroupe des pages ; alors que le second correspond à un laps de temps au cours duquel s’agglomèrent divers documents rangés dans la même chemise. Toutefois, il existe des dossiers qui, en dépit d’une date d’ouverture et d’une date de fermeture distinctes, se réduisent à une seule pièce, comme certains dossiers sans suite, mais la période du dossier est alors porteuse de sens. En d’autres termes, le document se suffit à lui-même ; il est considéré comme une entité autonome. Le dossier, lui, documente ce qui s’est produit sur une période donnée d’activité et s’appréhende comme un ensemble.

Dans l’environnement papier, le mot « registre » et le « dossier » ne sont pas confondus, en raison de leur présentation physique respective (reliure, chemise). Sur le fond, qui est le critère restant dans le cas d’une informatisation, on a, avec le registre, l’enregistrement de données selon un critère chronologique pour une catégorie d’informations ou d’événements (registre du courrier, registre des mariages) ; et, avec

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le dossier, le regroupement de toutes les informations relatives à un objet ou à un individu (dossier de carrière, dossier de projet)1.

La notion de « chrono » (chrono de courrier, chrono de contrats, etc.) se rattache à celle de registre : le regroupement est chronologique, lié à l’activité des bureaux et non au contenu des différents documents. Dans l’environnement papier, on produit d’ailleurs souvent certains documents en deux exemplaires : un pour le chrono, l’autre pour le dossier.

Ce facteur temporel est donc fondamental dans cette tentative terminologique : le document renvoie à la notion d’événement daté ou datable ; le chrono à une succession chronologique d’événements datés de même nature ; le dossier à un ensemble d’information regroupées entre deux bornes chronologiques.

L’idée de « collection » est a priori bien distincte de la notion de « dossier », mais elles ne s’opposent pas systématiquement car elles ne se situent pas sur le même plan.

« Collection » suggère de regrouper des documents de même nature selon un critère de contenu et/ou de forme (tracts syndicaux, prospectus publicitaires, cartes postales, chansons, etc.). Cette collecte peut éventuellement donner lieu à la constitution d’un dossier (par exemple, la correspondance et les factures relatives à la collection). Par ailleurs, des dossiers peuvent faire l’objet de collections (dossiers judiciaires ou médicaux représentant un corpus intéressant pour la recherche).

2.4. Un éclairage extérieur : l’équivalent anglais de « dossier »

Pour alimenter cette réflexion, il est curieux de voir comment le mot dossier, ou les expressions françaises comprenant le mot « dossier » sont traduites dans les langues étrangères. L’exemple de l’anglais est à la fois simple et instructif.

Le grand dictionnaire terminologique est « un ouvrage de référence unique rassemblant un fonds terminologique d’envergure de 3 millions de termes français et anglais dans 200 domaines d’activité » élaboré au Canada [DIC 01].

Nous avons dépouillé l’article « dossier » de ce dictionnaire. Bien évidemment, la traduction n’est pas unique. Trois termes principaux interviennent dans les équivalents anglais des expressions françaises qui comprennent le mot « dossier ». Ce sont : folder, file et records. « Folder » a une connotation plus matérielle et l’origine du mot évoque la pliure de la chemise. Le mot « file » insiste sur le classement et la notion de fichier, non seulement sur le rangement matériel, mais aussi, parce que les deux sont liés, sur la nature du dossier qui le rattache à une série qu’il est nécessaire de classer rigoureusement. Enfin, le mot « records », au pluriel, souligne la notion d’ensemble

1. Les archives nationales de l’Ancien régime sont ainsi organisées en deux grands ensembles : les registres d’une part où sont consignés les événements ou les actes au fil de l’eau, et les pièces qui procèdent du traitement des affaires de l’autre (placées à l’époque dans des cartons ou layettes).

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organique, le rattachement à une procédure, à des règles pour la constitution du dossier.

Voici quelques exemples d’expressions et de leur traduction anglaise :

dossier suspendu hanging folder

dossier de travail working papers, job folder

dossier nominatif name file

dossier de crédit credit file

dossier d’une affaire case file

dossier ouvert, dossier clos : active file, closed file

dossier d’exploitation (informatique) program run sheets des enregistrements (transport aérien) transport check-in record

dossier de principe procedural record dossier informatisé computer record

dossier commercial business case

dossier medical: medical record

dossier d’instruction trial record

dossier scolaire academic record

La terminologie anglo-saxonne reprend les trois acceptions courantes du mot

« dossier » : individualisation matérielle de documents (folder), ensemble physico- logique (file) et ensemble d’informations produites et réunies de manière logique sans préjuger de leur forme matérielle (record).

La première acception, strictement matérielle, ne se prête guère à des développements mais les deux autres méritent d’être approfondies.

3. Critères de catégorisation des dossiers

On peut donc considérer le dossier comme une enveloppe, matérielle ou virtuelle, qui reçoit des informations (données, documents) liées par une unité de contenu pendant une période donnée. Lorsque cette période n’est pas close, le dossier est réputé « ouvert » et susceptible d’être encore alimenté.

Pour aller plus loin et tenter de catégoriser toutes les entités qui répondent à la définition ci-dessus du mot dossier, nous avons retenu trois points à examiner plus à fond : l’événement déclencheur du dossier, sa finalité et son mode d’alimentation, c’est-à-dire les règles, s’il y en a, suivant lesquelles les documents viennent prendre

« place » dans le dossier.

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3.1. L’événement déclencheur

Qu’est-ce qui fait que l’on ouvre un dossier ? Quel est l’événement qui va déterminer le début de la période au cours de laquelle les informations vont alimenter le dossier ?

Si l’on observe différents types de dossiers, dans l’administration ou en entreprise, on remarque deux grands cas de figure :

1. les dossiers que l’on créé dès qu’une personne ou un objet est visé par une procédure dans le cadre d’une activité quelconque, dossiers où l’on « versera » de manière organique toutes les pièces qui documente l’application de la procédure. La procédure peut être externe, réglementaire ou judiciaire (contrôle fiscal, permis de construire, versement du RMI, gestion d’un agent, soins donnés à un malade) ou interne (selon l’organisation des équipes de travail et les étapes de validation établis par la hiérarchie) ; la procédure peut s’appliquer de manière récurrente (recrutement de personnel) ou occasionnelle (contentieux dans une PME qui n’a pas de service juridique) ;

2. les dossiers qui sont initiés en dehors d’une procédure définie mais qui documentent une activité d’étude et de documentation, par exemple : analyse de la possibilité d’une nouvelle implantation d’un siège social, prospection d’un nouveau marché, projet de création d’un nouveau produit, dossier de presse thématique.

Dans le premier cas, l’événement déclencheur est la lettre de demande de l’intéressé (demande d’une subvention, lettre de plainte) ou le document de l’organisme en charge de la procédure (décision d’une inspection, compte rendu de démarche commerciale, arrêté de recrutement d’un collaborateur). Dans ce cas, on connaît à l’avance la nature des documents qui constitueront le dossier, par exemple : copie de la décision, imprimé n° 112, pièces justificatives, avis de la commission technique, etc.

Dans le second cas, l’événement déclencheur est la lettre de mission du chargé d’étude, la décision d’un comité (consignée dans un compte rendu), ou simplement l’initiative d’un chercheur dans le cadre de ses attributions de recherche. Dans ce cas, en revanche, on ne connaît pas à l’avance les pièces du dossier car le déroulement de l’opération n’est pas nécessairement normalisé et reste de la responsabilité de l’auteur du dossier.

La réalité n’est pas toujours binaire dans la mesure où l’application d’une procédure peut donner lieu à des initiatives à certaines étapes du dossier, conduisant à l’ajout au dossier de types de documents non prévus au départ. Inversement, un dossier d’étude qui ne relève pas d’une procédure type dans sa globalité peut être soumis à des règles pour certaines phases de sa constitution.

Toutefois, la prise en compte de l’événement déclencheur du dossier n’est pas neutre dans les opérations de traitement automatique auquel il pourra être soumis, et dans la gestion du cycle de vie du dossier, c’est-à-dire de son élimination à terme.

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3.2. La finalité

A quoi servent les dossiers ? S’ils sont constitués, c’est a priori qu’ils ont une utilité. La question est de savoir à qui ils sont utiles et pourquoi.

Là encore, en observant un panel de dossiers, il ressort deux grandes finalités à l’existence d’un dossier :

1. la traçabilité de l’activité que documente le dossier, c’est-à-dire, la justification de la façon dont les choses se sont déroulées : qui a fait quoi dans le déroulement de la constitution du dossier ; si toutes les étapes de la procédure ont été respectées et si on peut le prouver en cas de contestation. Ces informations sont contenues dans la forme des pièces, dans leurs identifiants, dans les dates de création des documents et des données qui composent le dossier ;

2. la connaissance du sujet que vise le dossier, c’est-à-dire la relation des faits ou la description des situations, l’expression de la volonté, l’exposé des idées. Ces informations figurent dans le texte (ou l’image ou le son) de chacune des pièces du dossier.

Ces deux finalités sont pratiquement présentes dans tous les types de dossiers, mais dans des proportions et avec des priorités diverses. Là aussi, pour l’amélioration de la production de l’information et pour la gestion des dossiers, il est utile de bien cerner la finalité pour le ou les utilisateurs et de voir à quel moment cette finalité se manifeste.

Certains dossiers sont surtout consultés pendant leur phase de constitution et beaucoup moins après leur clôture. C’est le cas des dossiers qui servent à gérer une personne ou un objet : dossier d’agent, dossier de patient, dossier d’entretien d’une machine. A l’inverse, les dossiers qui présentent une forte valeur ajoutée historique pourront être consultés régulièrement après une période de latence pouvant aller jusqu’à plusieurs décennies.

D’autres servent à préparer une décision : le dossier est constitué selon les critères définis, pendant une période généralement courte, et n’est vraiment consulté que lorsqu’il est complet car il faut que la constitution du dossier soit achevée pour que la décision puisse être prise valablement ; après quoi, la décision constitue la pièce de clôture du dossier (permis de construire, candidature à l’université, préparation du budget) ou donne lieu à la création d’un nouveau dossier (dossier d’entretien d’un immeuble faisant suite au dossier d’acquisition).

Dans le cas des dossiers constitués par une démarche documentaire pour éclairer un choix (dossier de veille concurrentielle, dossier d’étude d’implantation d’un établissement, dossier de projet d’exposition ou de stage), la notion de traçabilité est faible par rapport à la valeur de connaissance. En revanche, ce type de dossier peut garder un intérêt de référence après que l’événement déclencheur de sa création est périmé. C’est également le cas des dossiers de travail personnel qui ont une finalité de connaissance pour leur auteur.

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3.3. Mode d’alimentation et composition du dossier

Dès lors qu’un dossier est constitué d’un nombre conséquent de pièces distinctes (dix, vingt, cent ou plus) se pose le problème de leur agencement dans le dossier et de leur classement, dans le but, toujours le même, de retrouver le plus efficacement possible l’information susceptible d’être recherchée.

On peut toujours empiler les documents dans l’ordre d’arrivée réelle dans

« l’enveloppe » mais il s’avère vite préférable d’organiser des cases pour y affecter l’information suivant sa pertinence.

Il n’existe pas de modèle standard pour l’agencement des documents au sein d’un dossier. Des centaines de modèles sont possibles. La meilleure solution dépend de la prise en compte globale de plusieurs facteurs : ordre d’arrivée des documents, relation organique des documents entre eux, auteurs des documents, forme et support des documents, valeur propre en termes de traçabilité et de connaissance, traitement spécifique qui doit être fait de chaque document. De sorte que le modèle d’organisation n’est pas nécessairement le même pour un dossier papier et un dossier électronique.

Le cas le plus simple est celui d’un dossier dont tous les documents sont produits par le même auteur, dans un ordre chronologique qui suit l’ordre logique, avec le même outil, par exemple un dossier de réunion technique comprenant : des notes pour préparer la réunion, un compte rendu de préréunion, copie de la convocation, le compte rendu de la réunion proprement dite et des notes sur ce compte rendu, le tout saisi sur Word et imprimé.

Les cas plus complexes cumulent des critères d’organisation tels que : – documents créés en interne et documents reçus de l’extérieur ;

– documents papier, film, électroniques (impression ou non des documents générés électroniquement, documents mixtes, etc.) [CHA 00b] [PON 00] ;

– documents texte type A4, A3, et documents figurés (plans, photographies), objets (maquette, modèle) ou multimédia ;

– documents validés et documents non validés (brouillon, version rejetée ou document ne nécessitant pas de validation) ;

– question(s) et réponse(s), par exemple une demande d’avis avec sa liste de destinataires et l’ensemble des réponses reçues ;

– documents de travail (textes de référence, plan de classement du dossier, copies de documents extérieurs) et documents entrant stricto sensu dans la composition du dossier (c’est-à-dire relatifs à la personne ou à l’objet du dossier) ;

– document principal (document « maître ») et documents annexes (pièces justificatives indissociables du document principal et pièces jointes non obligatoires) ;

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– documents originaux quant à l’information qu’ils contiennent et documents qui, même s’ils sont authentiques, ne comportent pas d’information de contenu nouvelle (par exemple une facture) ;

– documents de base et leur récapitulatif ;

– documents de preuve et documents non probants (distinguo qui ne recouvre pas systématiquement les catégories précédentes) ;

– copie de documents probants reçus pour information et documents probants propres au dossier ;

– documents à vocation unique dans l’organisme ou l’entreprise et documents à vocation multiple (c’est-à-dire utilisés ou partagés par d’autres services) ;

– et ainsi de suite, selon les cas particuliers.

Un dossier a toujours un minimum de colonne vertébrale, constituée des documents « repères » qui correspondent aux étapes principales de la procédure ou à la structure de la démarche documentaire. A ces « repères » peuvent se rattacher plusieurs grappes : documents préparatoires, documents associés, documents complémentaires. Aux documents « repères » comme aux documents qui leurs sont liés, on peut attribuer des indices de valeur, permettant de gérer l’accès à l’information et la durée de conservation du dossier et de ses composantes.

L’expérience montre que si on a besoin de coter ou d’indexer les documents d’un dossier, pour mieux le feuilleter ou mieux y naviguer, il est plus efficace de s’appuyer sur cette analyse archivistique du dossier.

4. La valeur intrinsèque du dossier

Son rôle de traçabilité d’un processus et de regroupement d’informations donne à l’unité documentaire qu’est le dossier une valeur informationnelle qui lui est propre et qui en fait une entité supérieure à la somme de ses composants. Le dossier est porteur d’une information particulière qui n’est pas exprimée en clair et qui se déduit de l’observation : c’est d’une part une « méta-information » sur l’événement documenté, d’autre part des indices sur la manière de travailler de l’auteur du dossier.

4.1. Méta-information

Depuis la date d’ouverture du dossier (par suite de l’événement déclencheur) jusqu’à sa clôture (en raison de la fin de la procédure, de la décision de clôture, de la disparition de la personne ou d’un transfert de l’activité à une autre instance), le dossier est sensé recevoir systématiquement toute l’information liée au traitement de l’affaire (au sens large du terme).

La présence ou l’absence d’une lettre dans un dossier constitue un élément d’information qui peut se révéler capital pour la compréhension des événements ou de

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l’activité qui a produit ledit dossier [CHA 95] : présence d’un document qui, de par sa nature, n’aurait pas dû se trouver là (par exemple un courrier préparé mais jamais envoyé, un mot d’une personne qui n’est pas sensée être intervenue dans le dossier, etc.) ; absence d’une pièce qu’on s’attendrait pourtant à trouver là, soit qu’elle n’ait jamais existé, soit qu’elle ait été supprimée ou déplacée ; présence d’un accusé de réception ; absence d’un document externe que son auteur soutien pourtant avoir reçu, etc.

Que le dossier soit physiquement éclaté, pour des raisons de volume ou de format, ne change rien à la réalité de cette méta-information. En revanche, si l’on vient à démembrer la conservation physique d’un dossier en perdant le lien qui unit organiquement et logiquement l’ensemble de ses pièces, on risque de perdre du même coup l’information qui naît de leur cohérence.

Il arrive que des informations de traçabilité (qui participent de cette méta- information) soient inscrites sur la chemise, ainsi que divers commentaires de l’auteur du dossier ; il arrive aussi que ces informations soient perdues lors d’une réfection du conditionnement des liasses, lors de leur microfilmage ou lors de leur numérisation.

4.2. Valeur de témoignage

Le besoin de connaissance de l’utilisateur porte quelquefois sur les habitudes de travail des producteurs de dossiers, au-delà de l’examen des faits et du contenu de telle ou telle affaire. C’est bien l’apparence et le mode de constitution du dossier qui peut témoigner de cette réalité. Ce n’est pas seulement la présence ou l’absence des documents qui sont porteuses de sens, mais leur agencement, leur classement, leur organisation.

Il existe deux catégories d’utilisateurs qui s’intéressent davantage au fonctionnement des bureaux qu’à la nature des affaires traitées : ce sont, en interne de l’entreprise ou de l’administration, les responsables de la qualité et les auditeurs des processus de travail ; ce sont ensuite les utilisateurs externes que sont les sociologues ou historiens du monde du travail.

Il est en effet intéressant de constater qu’une même activité, conduite avec les mêmes procédures par X entités parallèles, donne lieu à des dossiers sensiblement voire carrément différents. Par exemple : la création d’un dossier client dans les neuf agences d’une même entreprise produit des dossiers étonnamment différents, non seulement au niveau de l’apparence ou du conditionnement, mais surtout au plan des critères de classement des informations, de l’attributions des identifiants, de la nature des pièces requises dans le dossier. Autre exemple : la gestion d’un dossier d’étranger dans les cent préfectures de France, avec la même réglementation, donne lieu à des profils de dossiers très nuancés quant à l’organisation des pièces dans le dossier.

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5. Subdivisions, inclusions, relations

Le dossier, documentation résultant du croisement d’une activité (procédure, démarche documentaire) et d’un objet (personne, immeuble, machine, etc.), est d’abord physiquement organisé par la personne qui le constitue, qu’il fasse ou non par la suite l’objet d’un autre classement, d’un autre conditionnement ou d’un changement de support.

Le dossier peut être subdivisé, rattaché à une entité plus large ou liés à d’autres documents ou d’autres dossiers.

5.1. Les sous-dossiers

Lorsqu’un dossier s’épaissit par l’accumulation de documents au fur et à mesure de la poursuite de l’activité, le bon sens suggère qu’on le subdivise en sous-ensembles fonctionnels, soit par un tri et classement du dossier a posteriori (opération ressentie à juste titre comme fastidieuse), soit par une ventilation des documents dans des sous- dossiers au moment de leur versement au dossier.

La composition et l’intitulé des sous-dossiers sont parfois élaborés au plus haut niveau, par exemple cette circulaire du ministère de la Culture des années 1970 prescrivant l’organisation interne des dossiers de personnels des Directions régionales des affaires culturelles (DRAC) en sous-chemises de couleur, portant les lettres A, B, C, etc. pour les différents aspects de la gestion des agents (carrière, congés, distinctions honorifiques, etc.). Plus souvent, même dans l’administration ou les grandes entreprises, l’organisation du dossier est laissée à l’initiative des services, et plus souvent encore à l’initiative des équipes de terrain, d’où la grande disparité que l’on peut constater. Tout le monde s’en accommode, jusqu’au jour de l’informatisation ou les difficultés de partage et d’accès à l’information en l’absence de normalisation du dossier se font jour.

Dans le cas d’un dossier de personnel, l’organisation du dossier reflète la décomposition de l’activité elle-même et produit des sous-dossiers parallèles, alimentés par des agents différents (gestion de la carrière, suivi de la formation, accidents du travail…) puis, le cas échéant, par des services différents, au point que, matériellement, on n’a plus un dossier avec ses sous-dossiers mais plusieurs dossiers, pouvant eux-mêmes se subdiviser à leur tour, de manière si compartimentée qu’on en vient à regretter le temps du dossier commun.

Pour d’autres activités, l’organisation interne du dossier est plus chronologique, chaque étape de la conduite de l’affaire donnant lieu à des catégories de documents différentes. Par exemple, les dossiers d’un bureau d’études peuvent atteindre facilement atteindre un mètre linéaire en regroupant : les pièces contractuelles (juridiques), les documents techniques attachés au contrat, les documents de chantier et la correspondance pour chaque phase d’exécution de l’affaire.

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5.2. Le rattachement à une série

Pour une personne qui « subit » une procédure (adhésion à telle association, demande de subvention pour tel projet, contrôle fiscal), le dossier qui en résulte reste atypique ou entre dans une catégorie plus large (suivi des relations avec les partenaires, demandes de subventions en général, relations avec l’administration).

Pour la personne qui gère la procédure en revanche, les dossiers sont aussi nombreux que les affaires, les objets ou la population concernée par cette procédure : allocataires, clients, agences, établissements, bâtiments, sites, cours d’eau, colloques, stages, projets, etc. Chaque « population » génère un classement particulier.

On constate que dans la plupart des entreprises ou organismes, au moins 80 % des dossiers appartiennent à une série ou aux ramifications logiques d’une série liée à une activité identifiée, même si ce lien est quelquefois masqué par la place prépondérante donnée dans l’intitulé du dossier au thème ou à l’objet traité au détriment l’activité générique qui le produit, par exemple des dossiers de précontentieux dispersés et signalés simplement par le nom de l’affaire et qui donne l’impression d’être autant de dossiers isolés.

La valeur d’une série de dossiers, c’est-à-dire la responsabilité qui s’y attache et les exigences de sa gestion archivistique (accès, stockage, élimination) ne peut-être déterminée qu’au travers de l’activité précise qui produit ces dossiers. Quel est le rôle exact de tel agent ou de telle équipe vis-à-vis de telle affaire ou de telle personne par le biais de tel dossier ? Gérer entièrement, gérer une partie, servir de courroie de transmission vers un autre service qui sera le véritable « producteur » du dossier ?

L’environnement papier et l’éloignement géographique entre deux services conduisent à dupliquer de nombreux documents pour information et à constituer des séries parallèles de dossiers qui sont de faux doubles. Par exemple, la filiale d’une entreprise a un service du personnel chargé de gérer directement les congés et de transmettre toutes les autres pièces à la DRH du siège, laquelle lui adresse copie des documents centraux intéressant ses agents. L’information existe de manière à peu près identique dans les deux cas, mais il ne s’agit pas du tout des mêmes dossiers sur le plan de la responsabilité et de la conservation. C’est par exemple ce type d’analyse qu’induit une démarche de Records management [ISO 01].

5.3. Les documents liés

Au cours de sa constitution ou de son exploitation, le dossier doit être mis en relation avec d’autres sources d’information, d’autres entités documentaires qui comportent des données voisines et/ou qui procèdent d’une activité très proche. On peut en citer au moins quatre catégories :

– le dossier générique de la procédure ou de la définition du projet, ainsi que le dossier de synthèse ou les statistiques ;

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– les registres ou bases de données d’enregistrement qui comportent une sorte de fiche d’identité de chaque dossier (élaborée en amont, au cours ou en aval de la constitution du dossier proprement dit) et qui pointe sur le dossier correspondant ;

– les séries de dossiers parallèles visant la même « population » pour une autre activité ou une autre étape de la même activité confiée à une équipe distincte (équipe chargée de la sécurité des bâtiments distincte de l’équipe chargée de l’entretien ; équipe chargée de la communication des expositions distinctes de l’équipe chargée de l’organisation, etc.) ;

– des séries d’actes, tels que chronos de décisions, de contrats, de comptes rendus, de jugements qui, pour des raisons diverses, sont classés à part, sans qu’une copie soit nécessairement jointe au dossier. Ces séries présentent, sous cette forme de collection, une valeur ajoutée d’information, un intérêt pratique de consultation, voire une facilité pour la gestion de la conservation. Mais ceci ne doit pas faire oublier que chaque élément du chrono est également partie constituante d’un dossier.

Dans l’environnement électronique, les technologies XML offrent aujourd’hui des possibilités sans précédents pour maîtriser ces liens et donc pour organiser l’exploitation documentaire des documents liés. Il est dès lors intéressant, à la lumière des possibilités technologiques, de repenser et de préciser l’architecture du dossier.

6. Les contraintes du dossier

Le dossier apparaît comme une entité mouvante, dans son fond comme dans sa forme. Ce qui permet de l’appréhender comme unité documentaire et archivistique (comme support d’information et comme « record »), c’est la définition de l’activité qui le génère. Il est impossible de caractériser un dossier sans prendre en compte son auteur et le but qu’il poursuit au travers de ce dossier.

Une fois le contour du dossier délimité, il faut gérer conjointement les contraintes de structuration et les contraintes d’identification de l’unité en cause.

6.1. Contraintes de structuration

Avec l’inflation du dossier, le volume d’information et de documents est maîtrisé soit par une organisation stricte des pièces dans le dossier selon un schéma type avec des codes convenus, soit par une démultiplication de l’activité et la ramification du dossier en plusieurs dossiers.

L’accès rapide à l’information recherchée requiert davantage qu’une organisation logique des pièces dans le dossier. Deux voies se complètent pour la maîtrise de l’information dans un dossier : d’une part l’indexation des contenus à l’aide de mots- clés et de thésaurus dont les exemples sont nombreux ; d’autre part, la structuration des informations par rapport au contexte de création de l’information. Pour des

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archivistes, cette structuration se réfère largement à la forme diplomatique des documents, c’est-à-dire à la portée du document (document de décision, lettre confidentielle, note interne, notification) ou à la zone du document dans lequel se situe l’information (en-tête, référence, corps du texte, citation, mention marginale, post- scriptum, annexes, etc.) [CHA 00a].

La modélisation de la structure du dossier est indispensable dans un environnement électronique mais elle n’est pas toujours possible a priori dans le détail. La difficulté est de modéliser le maximum de ce qui peut l’être sans interdire, par excès de structuration, la création d’une information qui n’entrerait pas systématiquement dans une case prédéfinie [CHA 99]. Il apparaît indispensable de fournir à l’auteur un

« espace semi-privatif » où il puisse noter les informations marginales qui l’aident à travailler sans rien enlever à la rigueur de la constitution du dossier ni à l’accès à l’information.

6.2. Contraintes d’identification

La forme et la présentation matérielle sont insuffisantes pour définir le dossier dans sa dimension de « record », c’est-à-dire de trace d’une activité qui implique une responsabilité de son auteur vis-à-vis de l’action accomplie et vis-à-vis des documents qui supportent cette activité.

Dès que sa forme n’est plus tangible et simple, c’est-à-dire dès que l’on sort du cas de la chemise de carton qui regroupe la totalité des documents relatifs à l’affaire sans ambiguïté possible avec d’autres documents existants par ailleurs, il devient urgent de donner à l’ensemble des informations qui constituent le dossier un identifiant unique et stable. Cet identifiant sera, pour l’utilisateur à la recherche de traçabilité ou de connaissance, le garant de l’exhaustivité des informations recueillies lors d’une requête sur le contenu d’un dossier ou, du moins, il permettra de relativiser ces informations par rapport à son contexte de création. Le lien créé par cet identifiant unique entre toutes les données qui procèdent de la même activité correspond à l’attribution naguère d’une cote à toutes les pièces d’un dossier papier (par exemple une liasse de procédure judiciaire).

La nécessité d’un identifiant unique pour la gestion des responsabilités et du cycle de vie des documents est soulignée dans la norme ISO 15489 sur le Records management [ISO 01].

En autorisant le partage des documents et l’accès à distance, l’environnement électronique rend possible le concept de dossier unique partagé entre tous les intervenants, auteurs et utilisateurs des documents relatifs à un même objet, à une même affaire ou à une même personne, quelle que soit la nature des activités ou des opérations vis-à-vis de cette affaire, cet objet ou cette personne. L’avantage en termes d’accès à l’information est évident, mais il ne faudrait pas prendre le risque de perdre la traçabilité des opérations effectuées par les différents responsables impliqués.

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La gestion d’un bâtiment communal implique plusieurs services de la mairie comme un dossier de patient à l’hôpital peut impliquer plusieurs services si le malade a été traité pour plusieurs pathologies. Chaque service a besoin de gérer « son dossier », avec les critères de classement et d’élimination qui sont liés à son activité ; ce même service a besoin, de temps en temps ou souvent selon les situations, d’accéder à l’information contenue dans le « dossier des autres » services. Au niveau de l’institution toute entière, le dossier unique serait donc une sorte d’« association de dossiers », avec des droits et des devoirs quant à la création, à la gestion et à l’accès (ou à la restriction d’accès) ; les métadonnées ad hoc permettraient de singulariser la part de chaque producteur (chaque responsable) dans la constitution de ce « super- dossier ».

Pour l’utilisateur qui s’intéresse à telle affaire, tel objet ou telle personne, l ‘idéal serait de disposer à l’aide d’une seule requête de l’ensemble des informations relatives à sa recherche, non seulement au sein d’une institution, mais aussi dans tous les organismes que leur activité a conduit à constituer un dossier sur l’affaire, l’objet ou la personne en cause. Ce serait une seule « enveloppe » comportant, par exemple pour un bâtiment communal classé parmi les monuments historiques : les documents des services municipaux, mais aussi ceux de l’administration des Monuments historiques, ceux des collectivités qui subventionnent, etc. Pour un patient, il s’agirait de toutes les données de son suivi médical chez ses médecins, dans tous les hôpitaux ou cliniques où il a séjourné, en France et à l’étranger.

Cette « enveloppe » ne répond plus à la définition de dossier telle qu’elle a été exposée plus haut, dans la mesure où la responsabilité de cette entité d’information n’est pas facilement identifiable. On pourrait plutôt parler d’une « fédération de dossiers ». Ou, si on voulait considérer cet ensemble d’information comme un dossier unique, ce serait comme fruit de l’activité de l’organisme en charge de fédérer les données des dossiers d’autres organismes, car il capitaliserait les informations aussi bien qu’il tracerait l’activité de l’organisme fédérateur.

7. Conclusion : l’apport de la notion de dossier à la gestion électronique de l’information

Au terme de cette réflexion, il apparaît que le mot dossier, si on veut lui donner une définition qui le distingue des autres entités documentaires, renvoie aujourd’hui essentiellement à un ensemble logique de documents et de données produit au cours d’une activité (caractérisée par un verbe d’action : gérer, accorder, fabriquer, enquêter, étudier, soigner, vendre, etc.) et visant une affaire, un objet ou une personne.

Il se trouve que pendant de longues décennies, il y a eu dans la très grande majorité des cas identité entre le dossier logique – organique ou documentaire – et le dossier physique (aspect éponyme). Puis, l’inflation documentaire et la déréglementation des méthodes de travail anciennes ont introduit des distorsions entre les deux facettes du dossier, et rendu la notion plus complexe.

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Dans l’environnement électronique, l’utilisation du mot dossier s’est inspirée des emplois existants. Outre le nom de la « boîte » proposée par les logiciels pour y ranger ses documents électroniques, l’expression « dossier électronique » recouvre aujourd’hui deux réalités : les dossiers papier numérisés et les dossiers créés électroniquement. Pour les premiers, il s’agit surtout d’un changement de support et d’une facilitation d’accès qui ne remettent pas en cause la structure initiale de l’information. Pour les seconds, la technologie permettant de s’affranchir des contraintes formelles de l’environnement papier, on est amené à repenser le dossier, à recomposer l’agencement des données pour harmoniser au mieux le besoin d’information et les outils qui la produisent, la transmettent et la conservent.

Quels que soient sa forme et son support, la notion de dossier s’avère intimement liée aux deux exigences professionnelles que sont la traçabilité de l’activité et la responsabilité de l’information (accès et conservation).

On peut dire pour conclure que le dossier est une entité documentaire à géométrie variable mais dont la géométrie initiale et ses variations ne sont pas le fruit du hasard.

Elles s’expliquent par trois éléments qui sont :

1. les règles observables préalables à la création du dossier (procédures et responsabilités, objectif, objet, délai),

2. les outils de production de l’information (papier, électronique ou autre),

3. l’organisation du travail (organisation des équipes et habitudes des

« rédacteurs »).

Ces trois composantes semblent devoir être prises en compte pour la modélisation d’un dossier électronique natif.

8. Bibliographie

[CHA 95] Chabin M.A., « La communication des archives : l’information, le document, le dossier », dans La Revue administrative, n° 286, sept. 1995.

[CHA 99] Charlet J., Daigne M., Leroux V., « Ingénierie des patrimoines informationnels de l’établissement de santé », dans Document numérique, vol. 3, n° 3-4/1999, Gestion des documents et gestion des connaissances, p. 81-99.

[CHA 00a] Chabin M.A., Le management de l’archive, Hermès, 2000, 246 p.

[CHA 00b] Chabin M.A., « Archivage des dossiers mixtes, papier et électronique », Documentation, 29 mars 2000.

[DIC 01] http://www.granddictionnaire.com/ [visité le 15 janvier 2002].

[ISO°01] ISO (TC46/SC11), ISO 15489-1 sur le Records management : ISO 15489-1 (norme) et ISO 15489-2 (guide pratique), 2001.

[PON 00] Pont R., « CAF de l’Ain : chaîne complète de traitement des dossiers », Documentation, 29 mars 2000.

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