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Pression artérielle : la mesure importe plus que tout

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4 | La Lettre du Cardiologue • N° 499 - novembre 2016

ÉDITORIAL

Pression artérielle :

la mesure importe plus que tout

Arterial pressure: measurement matters the most

L

a prise en charge de l’hypertension artérielle est un des grands succès de la prévention : un traitement précoce et efficace permet de retarder, voire d’éviter, les conséquences de l’hypertension sur les organes cibles et de réduire le risque d’accident vasculaire cérébral, d’infarctus du myocarde, d’insuffisance cardiaque et d’insuffisance rénale.

Ces dernières années, de vifs débats ont opposé les spécialistes sur les stratégies optimales de prise en charge : choix des classes thérapeutiques à mettre en œuvre en première intention, identification des valeurs cibles, importance relative des chiffres de pression artérielle systolique et diastolique, importance de la variabilité tensionnelle. Ces débats ont été ravivés par la publication des résultats de l’étude SPRINT (1). Comme nous l’avons déjà évoqué dans le numéro de La Lettre du Cardiologue de septembre, cet essai randomisé, coordonné par l’Institut américain de la Santé (NIH), a comparé 2 cibles de pression artérielle systolique : 120 contre 140 mmHg. Le groupe assigné à une cible de 120 mmHg a eu une réduction franche du risque d’événements cardiovasculaires (infarctus du myocarde, syndrome coronaire aigu, accident vasculaire cérébral, insuffisance cardiaque ou décès cardiovasculaire), de 5,2 contre 6,8 %, p < 0,001. Il y avait également une réduction du risque d’insuffisance cardiaque (1,3 contre 2,1 %) et, surtout, une réduction de la mortalité toute cause (3,3 contre 4,5 %, p = 0,003). Malgré un risque d’effet indésirable du traitement plus important dans le groupe “traitement intensif”, avec plus d’insuffisance rénale aiguë (4,3 contre 2,5 %), plus d’hypotension artérielle (2,4 contre 1,4 %), l’ampleur du bénéfice cardiovasculaire et, surtout, la réduction de la mortalité totale sur une courte durée de traitement constituent des arguments forts pour viser une cible à 120 mmHg.

La méthode de mesure de la pression artérielle est un aspect important du débat : dans l’essai SPRINT, la mesure était réalisée de façon automatisée après 5 minutes de repos et en l’absence d’observateur susceptible d’interférer avec cette mesure. C’est un point crucial car on sait depuis longtemps que la pression artérielle est une grandeur labile, susceptible d’être fortement influencée par le repos, l’activité physique ou le stress, et d’être surestimée de façon parfois notable, lorsqu’elle est prise à l’hopital ou au cabinet médical, et par un professionnel de santé : c’est ce que l’on appelle

“l’hypertension à la blouse blanche”. Pour minimiser les interférences liées à ce phénomène, on recommande aux professionnels de santé de standardiser la mesure de la pression artérielle, en la prenant

Pr Philippe Gabriel Steg

Rédacteur en chef de La Lettre du Cardiologue, département de cardiologie, hôpital Bichat, AP-HP, Paris.

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ÉDITORIAL

P.G. Steg déclare avoir reçu des bourses de recherche de Merck, Sanofi et Servier, ainsi que des honoraires de Amarin, Amgen, AstraZeneca, Bayer, Boehringer-Ingelheim, Bristol- Myers Squibb, CSL Behring, Daiichi-Sankyo, GlaxoSmithKline, Janssen, Lilly, Merck, Novartis, Pfizer, Regeneron, Sanofi, Servier, The Medicines Company.

après un repos de 5 minutes, en position allongée ou demi-assise, lors de plusieurs consultations différentes, et de confirmer le diagnostic, avant toute instauration de traitement médicamenteux, par une automesure ou une mesure ambulatoire automatisée (MAPA).

En effet, cela évite le traitement intempestif des sujets “émotifs” dont la pression artérielle pourrait être surestimée au cabinet médical mais parfois notablement plus basse dans la vie quotidienne. Chez ces sujets, un traitement excessif entraîne une majoration substantielle du risque d’effets indésirables, parfois sans bénéfice, voire, si la pression artérielle est trop basse, avec des effets délétères notables, compte tenu de l’existence d’une courbe en J de la relation entre pression artérielle et risque cardiovasculaire dans les populations fragiles telles que les coronariens (2). Or, si la cible visée dans SPRINT est de 120 mmHg, ceci est mesuré dans des conditions tellement drastiques que cela peut correspondre à une pression artérielle “casuelle” au cabinet médical qui pourrait être aisément de 5 à 10 mmHg plus élevée, voire jusqu’à 15 mmHg. Une difficulté majeure est que la pression artérielle mesurée en consultation casuelle est souvent plus élevée que la pression artérielle ambulatoire, mais aussi plus variable et donc qu’on ne peut “calculer”

une différence standardisée qui permettrait de relier l’une à l’autre.

Essayer d’obtenir une pression artérielle systolique de 120 mmHg lors d’une prise casuelle correspondrait peut-être, chez certains patients (mais pas chez tous !), à des chiffres beaucoup plus bas de pression artérielle réelle (3). C’est probablement une des raisons qui a freiné la Société francaise d’hypertension artérielle (SFHTA) et la Haute Autorité de santé dans l’adoption d’une stratégie visant une pression cible à 120 mmHg, et qui explique que les toutes récentes recommandations françaises continuent de préconiser une cible de traitement à

140/90 mmHg.

En pratique, pour le clinicien, il n’y a pas d’autre choix que de

s’acharner à obtenir une mesure fiable de pression artérielle, en “prenant le temps” de la mesure, en multipliant les mesures et, surtout, en

s’appuyant chaque fois que cela est possible, pour les modifications du traitement, sur les résultats de l’automesure, qui ont l’avantage d’être un bien meilleur reflet de la pression artérielle “ambulatoire” du ou de la patient.e, et d’impliquer celui-ci ou celle-ci dans sa prise en charge.

1. SPRINT Research Group, Wright JT Jr, Williamson JD et al. A randomized trial of intensive versus standard blood-pressure control. N Engl J Med 2015;373:2103-16.

2. Vidal-Petiot E, Ford I, Greenlaw N et al. Cardiovas- cular event rates and mortality

according to achieved systolic and diastolic blood pressure in patients with stable coronary artery disease: an international cohort study. Lancet 2016 388(10056):2142-52.

3. Kjeldsen S, Lund-Johansen P, Nilsson PM, Mancia G.

Unattended Blood Pressure Measurements in the Systolic Blood Pressure Intervention Trial. Implications for entry and achieved blood pres- sure values compared with other trials. Hypertension 2016;67(5):808-12.

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