Universit´e Pierre et Marie Curie – Paris 6 Examen partiel
Licence de Math´ematiques Analyse Hilbertienne et Num´erique
18 novembre 2006 9h00 `a 12h00
R´esoudre chaque probl`eme sur une feuille s´epar´ee. Les appareils ´electroniques et les documents sont interdits. Les solutions devront ˆetre r´edig´ees de mani`ere ri- goureuse. Lorsque des r´esultats du cours seront utilis´es, ils devront clairement ˆetre
´enonc´es. On notera que certaines questions peuvent ˆetre r´esolues ind´ependamment.
Probl`eme I. (50 points) SoitE en espace vectoriel r´eel. On dit qu’un sous-ensembleC deE est un cˆone si (∀α∈]0,+∞[)(∀x∈C) αx∈C.
1. Soit (Ci)i∈I une famille de cˆones deE. Montrer que T
i∈ICi est un cˆone.
2. Soit C un cˆone de E. Montrer queC est convexe si et seulement si (∀(x, y)∈C×C) x+y∈C.
3. On suppose d´esormais que E est un espace vectoriel r´eel norm´e. Soit (xi)i∈I une famille finie de vecteurs non nuls de E. On appellecˆone point´e engendr´e par (xi)i∈I l’ensemble
C= (
X
i∈I
αixi |(∀i∈I) αi ≥0 )
.
(a) Montrer que C est un cˆone convexe.
(b) On suppose que (xi)i∈I est une famille libre. On poseV = vect(xi)i∈I et on se donne une suite (zn)n∈Ndans C et un pointz∈E tels que zn→z.
i. Montrer que (xi)i∈I est une base de V.
ii. Montrer qu’il existe une famille {αi}i∈I ⊂R telle que z=P
i∈Iαixi.
iii. Puisque toutes les normes sont ´equivalentes dans l’espace vectoriel norm´e de dimension finie V, on peut supposer que zn → z au sens de la norme k · k d´efinie sur V par k · k:x=P
i∈Iβixi7→P
i∈I|βi|. Montrer quez∈C.
iv. Conclure que C est ferm´e.
(c) On suppose que (xi)i∈I est une famille li´ee.
i. Montrer qu’il existe des r´eels (βi)i∈I tels que X
i∈I
βixi = 0E et J =
i∈I |βi <0 6=∅.
ii. Soit `a pr´esent z un vecteur quelconque de C, disons z = P
i∈Iαixi o`u {αi}i∈I ⊂ [0,+∞[. On pose γ = maxj∈J{αj/βj}, o`u la famille (βi)i∈I et l’ensemble J sont d´efinis en 3(c)i, et (∀i ∈ I) δi = αi −γβi. Montrer que γ ≤ 0, {δi}i∈I ⊂[0,+∞[ et z=P
i∈Iδixi.
iii. Montrer que la famille (δi)i∈I du 3(c)ii contient au moins un terme nul. En d´eduire qu’il existe j∈I tel que zs’´ecrive z=P
i∈Ir{j}δixi. iv. On pose (∀j ∈ I) Cj = P
i∈Ir{j}ξixi | (∀i∈Ir{j}) ξi≥0 . D´eduire du 3(c)iii queC =S
j∈ICj.
v. Montrer qu’en r´ep´etant la proc´edure ci-dessus, on aboutit `a une ´ecriture deC en tant que r´eunion finie de cˆones point´es engendr´es par des familles libres.
vi. Conclure que C est ferm´e.
Probl`eme II. (50 points) Soit (E,k · k) un espace de Banach r´eel. On suppose que sa norme v´erifie l’identit´e du parall´elogramme :
(∀(x, y)∈E×E) kx+yk2+kx−yk2 = 2(kxk2+kyk2).
1. (a) Rappeler la d´efinition d’un espace de Banach et d’un espace de Hilbert.
(b) Soit l’application d´efinie par
h· | ·i: E×E −→ R (x, y) 7−→ 1 2
kx+yk2− kxk2− kyk2 .
V´erifier que c’est un produit scalaire tel que (∀x ∈ E) hx|xi= kxk2. Pour cela, v´erifier pour (x, y, z)∈E3 etα∈Rquelconques les identit´es suivantes.
i. hx|yi=hy|xi,hx| −yi=− hx|yi ethx|2yi= 2hx|yi.
ii. hx+y|zi=hx|zi+hy|zi(consid´erer l’identit´e du parall´elogramme avec (x, y), puis (x+z, y+z) et enfin (x+y+z, z)).
iii. hαx|yi=αhx|yi (consid´erer d’abord le casα∈N, puis α∈Z, puisα∈Q, et enfin α∈R)).
En d´eduire que (E,h· | ·i) est un espace de Hilbert.
2. SoientC1etC2 deux parties convexes ferm´ees non vides deE telles queC1⊂C2, et soitx∈E.
On note P1 etP2 les op´erateurs de projection sur C1 etC2, respectivement.
(a) Montrer que
hP2(x)−P1(x)|x−P2(x)i ≥0.
(b) En d´eduire que
k2x−P1(x)−P2(x)k2≥4kx−P2(x)k2.
(c) En utilisant le r´esultat du 2.(b) et l’identit´e du parall´elogramme pour les vecteurs (x− P1(x)) et (x−P2(x)), montrer que
kP1(x)−P2(x)k2 ≤2(dC1(x)2−dC2(x)2).
3. Soient (Cn)n∈N une suite croissante (i.e., (∀n∈ N) Cn ⊂Cn+1) de convexes ferm´es non vides de E etC=S
n∈NCn.
(a) Montrer que C est un convexe ferm´e.
(b) Montrer que
(∀x∈E) lim
n→+∞kPCn(x)−xk=kPC(x)−xk,
o`uPCn etPC sont les op´erateurs de projection sur Cn etC, respectivement.
Indication : On pourra introduire une suite (yn)n∈N telle que (∀n ∈ N) yn ∈ Cn et
n→+∞lim yn=PC(x).
(c) En d´eduire que
(∀x∈E) lim
n→+∞PCn(x) =PC(x).
Paris 6 – Licence de Math´ematiques – Analyse Hilbertienne et Num´erique Solution du partiel de novembre 2006
Solution du Pb I : 1. Soientx∈T
i∈ICi (siT
i∈ICi=∅, c’est trivialement un cˆone) etα >0. Alors (∀i∈I)αx∈Ci et donc αx∈T
i∈ICi.
2. Soient x ety dansC et α∈]0,1[. Supposons que C+C ⊂C. Alors α >0 et 1−α >0. Par cons´equent, puisqueCest un cˆone,αx∈Cet (1−α)y∈C, et on conclut queαx+(1−α)y∈C, d’o`u la convexit´e deC. R´eciproquement, supposons queC soit convexe. PuisqueC est un cˆone, on ax/α∈Cety/(1−α)∈C. Doncx+y=α(x/α)+(1−α)(y/(1−α))∈C. AinsiC+C⊂C.
3. (a) Soit α >0 et soient x et y deux points de C, disons x =P
i∈Iαixi et y =P
i∈Iβixi o`u mini∈Iαi≥0 et mini∈Iβi ≥0. Alorsαx=P
i∈I(ααi)xi ∈C puisque mini∈Iααi≥0. Par ailleurs,x+y=P
i∈I(αi+βi)xi ∈C puisque mini∈Iαi+βi ≥0.
(b) i. (xi)i∈I est libre et g´en´eratrice.
ii. V est un espace vectoriel de dimension finie, il est donc ferm´e. PuisqueV ⊃C3zn→ z, on a donc z∈V. Par suite, (∃ {αi}i∈I⊂R) z=P
i∈Iαixi. iii. Puisque (zn)n∈Nest dans C,
(∀n∈N)(∃ {αn,i}i∈I⊂[0,+∞[) zn=X
i∈I
αn,ixi.
Par ailleurs, puisquezn→z, on aP
i∈I|αn,i−αi|=kP
i∈I(αn,i−αi)xik=kzn−zk → 0. Donc (∀i∈I) 0≤αn,i→αi etαi≥0. Par suite,z∈C.
iv. C contient la limite de toute suite convergente d’´el´ements de C.
(c) i. On peut trouver des r´eels non tous nuls (αi)i∈I tels que P
i∈Iαixi = 0E et donc tels queP
i∈I(−αi)xi = 0E. D’o`u le r´esultat en prenant (βi)i∈I =±(αi)i∈I.
ii. (∀j ∈ J) αj ≥ 0 et βj < 0. Donc γ ≤ 0. Soit i ∈ J. Alors βi < 0 et donc δi = αi−γβi =αi−maxj∈J(αj/βj)βi ≥αi−(αi/βi)βi = 0. Soit i∈I rJ. Alors βi ≥0 et donc, puisqueγ ≤0,δi =αi−γβi ≥αi ≥0. Finalement, z =P
i∈Iαixi−γ0E = P
i∈Iαixi−γP
i∈Iβixi=P
i∈I(αi−γβi)xi =P
i∈Iδixi.
iii. Soit j ∈ J tel que αj/βj = maxi∈Jαi/βi = γ. Alors δj = αj −γβj = 0. Donc z=P
i∈Iδixi=P
i∈Ir{j}δixi. iv. On vient de montrer que
(∀z∈C)(∃j∈I)(∃(ξi)i∈Ir{j} ⊂[0,+∞[) z= X
i∈Ir{j}
δixi.
Donc (∀z∈C)(∃j∈I)z∈Cj. Il s’ensuit queC⊂S
j∈ICj et donc queC =S
j∈ICj. v. On aC=S
j∈ICj. Si pour chaquej∈I, la famille (xi)i∈Ir{j} est libre, alors on a le r´esultat. Sinon, pour chaquejtel que (xi)i∈Ir{j} soit li´ee, on r´e-applique la proc´edure ci-dessus et on ´ecritCj comme une r´eunion de cˆones point´es engendr´es par (cardI)−2
´
el´ements. On r´eit`ere ce processus jusqu’`a ce que chaque cˆone point´e apparaissant dans les d´ecompositions soit engendr´e par des vecteurs libres.
vi. D’apr`es 3b et 3(c)v, C est une r´eunion finie de parties ferm´ees, il est donc ferm´e.
Solution du Pb II : 1. (a) Voir cours.
(b) i. D´evelopper avec l’identit´e du parall´elogramme, ´ecrire x+ 2y = (x+y) +y pour la derni`ere.
ii. L’identit´e du parall´elogramme donne
kx+yk2+kx−yk2 = 2(kxk2+kyk2) (1) kx+y+ 2zk2+kx−yk2 = 2(kx+zk2+ky+zk2) (2) kx+y+ 2zk2+kx+yk2 = 2(kx+y+zk2+kzk2) (3).
(1)-(2)+(3) donnekx+yk2=kxk2+kyk2− kx+zk2− ky+zk2+kx+y+zk2+kzk2, d’o`uhx+y|zi=hx|zi+hy|zi.
iii. On a d´ej`a hx+y|zi = hx|zi+hy|zi et h2x|yi = 2hx|yi. Donc par r´ecurrence (∀n∈N)hnx|yi=nhx|yi. De plus, (∀n∈N)h−nx|yi=hn(−x)|yi=nh−x|yi= nhy| −xi = −nhy|xi = −nhx|yi. Donc (∀n ∈ Z) hnx|yi = nhx|yi. Par suite, pour α = p/q ∈ Q ((p, q) ∈ Z×Z∗), hαqx|yi = hpx|yi = phx|yi et hαqx|yi = qhαx|yi, d’o`uhαx|yi=αhx|yi. Enfin, siα∈R, il existeQ3αn→αet, par conti- nuit´e deh· | ·i,hαx|yi=hlimαnx|yi= limhαnx|yi= limαnhx|yi=αhx|yi.
2. (a) Par d´efinition deP2, on a (∀z∈C2) hz−P2(x)|x−P2(x)i ≤0. Il suffit alors de prendre z=P1(x) (qui appartient bien `aC2).
(b) On a k2x−P1(x)−P2(x)k2 =kx−P1(x)k2+kx−P2(x)k2+ 2hx−P1(x)|x−P2(x)i.
Comme C1 ⊂C2, on a kx−P1(x)k2 ≥ kx−P2(x)k2. De plus, hx−P1(x)|x−P2(x)i = hP2(x)−P1(x)|x−P2(x)i+kx−P2(x)k2. En utilisant le r´esultat de la question 2 (a), on a hx−P1(x)|x−P2(x)i ≥ kx−P2(x)k2 et on obtient bien l’in´egalit´e d´esir´ee.
(c) L’identit´e du parall´elogramme donne :k2x−P1(x)−P2(x)k2+kP1(x)−P2(x)k2= 2(kx− P1(x)k2+kx−P2(x)k2). Grˆace `a l’in´egalit´e montr´ee en 2 (b) et au fait quekx−Pα(x)k= dCα(x), α= 1,2, on a bien le r´esultat escompt´e.
3. (a) Le fait queCsoit ferm´e est ´evident puisque c’est l’adh´erence de la r´eunion desCn. Passons
`
a la convexit´e. Soitx, y∈C. On sait qu’il existe deux suites (xn)n∈Net (yn)n∈Nconvergeant vers x ety telles que (∀n∈N) xn, yn∈Cn. Soitλ∈(0,1) etzn=λxn+ (1−λ)yn. On a bien zn∈Cn car Cn est convexe et zn →λx+ (1−λ)y quand n→+∞. Or (zn)n∈N est une suite convergente dans C qui est ferm´e, doncλx+ (1−λ)y appartient bien `aC.
(b) Puisque PCn(x) ∈ C, on a kPC(x)−xk ≤ kPCn(x) −xk. De plus, comme yn ∈ Cn, kPCn(x)−xk ≤ kyn−xk. L’in´egalit´e triangulaire nous donnekyn−xk ≤ kyn−PC(x)k+ kPC(x)−xk. En passant `a la limite dans l’encadrement
kPC(x)−xk ≤ kPCn(x)−xk ≤ kyn−PC(x)k+kPC(x)−xk on obtient bien limn→+∞kPCn(x)−xk=kPC(x)−xk.
(c) Comme limn→+∞PCn(x) ∈ C et que PC(x) est unique, on a bien la convergence de la suite.