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la mise en œuvre d’une nouvelle stratégie
Carla Martinez
To cite this version:
Carla Martinez. L’action sur le contexte organisationnel dans le cadre de la mise en œuvre d’une nouvelle stratégie. Gestion et management. HEC PARIS, 1991. Français. �NNT : 1991EHEC0009�. �pastel-00994951�
L~ACTION
SUR LE CONTEXTE ORGANISATIONNEL
DANS LE CADRE DE LA MISE EN OEUVRE
D'UNE NOUVELLE STRATEGIE
THESE
présentée et soutenue publiquement par
Carla MARTINEZ
pour l'obtention du titre de
DOCTEUR DE L'ECOLE
DES HAUTES ETUDES COMMERCIALES
Doctorat ès-Sciences de Gestion contonne au nouveau régimedéfini par l'arrêté du 23novembre 1988
JURY
Directeur de thèse
ROLAND REI1TER
Professeur au Groupe HEC
Suffragants
JEAN-PAUL lARÇON
Professeur au Groupe HEC, rapporteur
ALAIN-CHARLES MARTINET
Professeur à l'Université de Lyon III
JACQUES ORSON!
L'ACTION SUR LE CONTEXTE ORGANISATIONNEL DANS LE CADRE DE LA MISE EN OEUVRE D'UNE NOUVELLE STRATEGIE: PLAN DE LA THESE
INTRODUCTION p. 1
PREMIERE PARTIE: REVUE DE LA LITTERATURE p. 4
1) LES RELATIONS STRATEGIE-STRUCTURE p.4
1. Construction de la problématique p. 5
2. Stratégie et Structure : études empiriques p. 11
3. Environnement, Stratégie et Structure : le problème de
l'adaptation p. 12
4. Environnement, Stratégie et Structure : un modèle
intégrateur p. 20
Il) CONTEXTE ORGANISATIONNEL ET COMPORTEMENTS p. 23
1. L'organisation en tant que système d'influence des
comportements individuels et des processus de décision p. 24
2. Le domaine du symbolique et les comportements p. 29
3. Contexte organisationnel, image interne et adaptation
stratégique p. 32
III) PEUT-ON ORIENTER LA CULTURE D'UNE ORGANISATION? p. 34
1. Des méthodes de management de la culture p. 34
A) Des méthodes globales
B) Analyse d'instruments spécifiques d'action sur la culture
2. Conditions et spécificités d'un processus de
IV) LE PROCESSUS DE CHANGEMENT ORGANISATIONNEL p. 50
1. Les origines d'un processus de changement p. 50
2. Les caractéristiques d'un processus de changement p. 54
A) Le rythme des changements : revolutions et ajustements
B) Ce qui change
C) La conduite du changement : ::>Ianification et opportunisme
D) L'association du personnel au processus de changement
3. Resultats et limites d'un processus de changement p. 65
DEUXIEME PARTIE: CONSTRUCTION DU MODELE ET METHODOLOGIE DE RECHERCHE
1)ANALYSE CRITIQUE DE LA LITTERATURE EXISTANTE p.68
Il) OBJECTIFS DE LA RECHERCHE p. 71
III) CONSTRUCTION DU MODELE: LES HYPOTHESES DE DEPART .. p.74
1. Conception de l'organisation p.74
2. La possibilité d'une prise de conscience p. 76
3. Les difficultés d'un changement organisationnel global p. 77
4. Les finalités d'un tel changement p. 78
5. Les caractéristiques d'un changement organisationnel
global p. 78
IV) LA METHODOLOGIE DE RECHERCHE p.79
1. Des etudes longitudinales p. 79
TROISIEME PARTIE PRESENTATION DES CAS THOMSON DCH
INTRODUCTION: PRESENTATION DE LA SOCIETE p.88
1)DIAGNOSTICS INTERNE ET EXTERNE: LES MOTIFS D'UNE
REDEFINITION DU CONTEXTE ORGANISATIONNEL p. 90
1. Diagnostic externe: des marchés en maturité p. 90
A) Le secteur Communication
B) Le secteur Professionnel
C) les réorientations stratégiques
2. Diagnostic interne: le problème d'identité p. 92
Il) ANALYSE D'UN PROCESSUS DE CHANGEMENT: L'ACTION SUR LES
DIFFERENTS PARAMETRES DU CONTEXTE ORGANISATIONNEL p.94
1. L'élaboration de la Charte DCH p.95
A) Les différentes étapes
B) Les caractéristiques du processus d'élaboration suivi
2. L'évolution des structures p. 100
A) Les différentes étapes
B) Principales caractéristiques de l'évolution des structures et
objectifs du changement structurel
3. Actions sur le processus de décision et d'information p. 106
A) La mise en place de groupes de savoir-faire B) Les cercles de qualité
C) L'évolution des systèmes de Planification/Contrôle
4. Le développement d'une politique des Ressources
Humaines p. 117
A) Structure du personnel et situation actuelle
B) La politique de recrutement
C) La politique d'évaluation
D) La politique de remunération et d'évaluation
E) La politique de formation
F) La politique d'intégration
5. La gestion du symbolique p. 121
A) Signifier la volonté de changement: le Projet
B) Signifier l'intégration : l'instauration de rites
C) Signifier la transparence : l'aménagement de l'espace
IV) LES RESULTATS OBSERVES p.123
1. Des résultats ponctuels p. 124
2. Des indicateurs encourageants p.124
3. Une amélioration du résultat global de l'entreprise p. 125
4. Les résultats du questionnaire d'attitude p. 125
5. Le tournant d'août 1987 p. 126
V) ELEMENTS DE REFLEXIONSUR UN CHANGEMENT
ORGANISATIONNEL p.128
1. Une prise de conscience p. 128
2. Une démarche participative mais orientée p. 128
3. Une cohérence globale des changements opérés p. 129
4. Le rôle clé du leader p. 130
CAS
ICI PH ARMA
INTRODUCTION p. 136
1) POURQUOI UNE ACTION GLOBALE SUR LE CONTEXTE
ORGANISATIONNEL ? p. 140
1. De nouveaux axes stratégiques p. 140
2. Des problèmes d'intégration p. 142
Il) ANALYSE DES CHANGEMENTS EFFECTUES SUR LE CONTEXTE
ORGANISATIONNEL p. 145
1. L'élaboration du Contrat d'Entreprendre p. 145
A) Les objectifs
B) Le processus d'élaboration
C) Le contenu du Contrat d'entreprendre
D) Les difficicultés rencontrées
E) Les témoignages
2. Les modifications structurelles
A) La réorganisation de la Direction Ventes
B) La création d'un service Ressources Humaines C) La création d'un Comité Médico-Marketing
D) Les modifications structurelles à l'usine de Reims
E) La logique des modifications structurelles introduites
p.
1533. L'évolution des systèmes d'information et de décision p. 159
A) L'évolution du système de Planification-Contrôle
B) La création de cercles de qualité C) La mise en place d'une GPAO
D) La création d'un tableau de bord de pilotage sur le site de Reims E) Une nouvelle politique de communication
4. De nouvelles politiques du personnel
A) La politique de recrutement
8) Les politiques d'évaluation et de rémunération C) La politique de Formation
D) La gestion des potentiels et la politique de promotion
5. Les indicateurs de Progrès et les Trophées p. 174
6. La gestion du symbolique p. 177
A) L'aménagement de l'espace : signifier la transparence
8) L'aménagement du temps : signifier la flexibilité
C) Le logo : signifier la pérennité
0) La dimension symbolique du Contrat d'Entreprendre
E) L'instauration de rites
III) LES PREMIERSRESULTATS p. 181
1. Choix de l'échantillon p. 181
2. Elaboration du guide d'entretien p. 182
3. Déroulementde l'enquête p. 183
4. Les résultats obtenus : l'impact du Contrat d'Entreprendre et des actions
associées au Projet à Cergy et da(ls le Réseau p.184
A) Le Projet d'Entreprise
8) L'Opération Trophées
C) Les Contrats d'Entreprendre Individuels
D) L'attitude vis-à-vis des Plans d'Action Prioritaires (PAP) E) La gestion des carrières
F) Perception globale des changements introduits
G) Les difficultés actuelles : ce qui resterait à améliorer
5. Impact du Contrat d'Entreprendre et des actions associées au Contrat
d'Entreprendreà l'usinede Reims p.208
A) Le Projet d'Entreprise B) L'Opération Trophées
C) Les Contrats d'Entreprendre individuels
0) Les missions inter-services et les PAP
E) Les cercles de qualité
G) Les améliorations souhaitées
IV) ELEMENTS DE REFLEXION p. 224
1. Une entreprise en croissance p. 224
2. Le rôle du Contrat d'Entreprendre p. 225
3. Le rôle du PDG p. 226
4. Un environnement défavorable p. 227
5. Le problème du relai hiérarchique p. 228
6. Les effets inévitables de la croissance p. 229
CAS TOTAL FRANCE
INTRODUCTION: PRESENTATION DE LA SOCIETE p.231
1)LES MOTIFS D'UN CHANGEMENT ORGANISATIONNEL GLOBAL p.232
1. Le contexte en 1985 : les difficultés de l'économie pétrolière ... p. 232
A) Une stagnation générale des besoins énergétiques
B) Des surcapacités logistiques et de raffinage
C) Des phénomènes spécifiques à la France
D} Des marges commerciales vulnérables
E) La position de TOTAL
2. Diagnostic interne p. 236
A) Des structures lourdes et centralisées
B) Une culture d'entreprise inadaptée
e) Des politiques du personnel non motivantes
Il} L'ACTION SUR LE CONTEXTE ORGANISATIONNEL p.240
1. L'évolution des structures p. 241
B) la réorganisation de la Direction Distribution
C) Les restructurations dans les sites industriels l'exemple de la
Raffinerie de Provence
2. La mise en place du Projet Gagner p.254
A) Les origines du Projet Gagner
B) Le processus d'élaboration du Projet Gagner C) Le Projet Gagner
D) La diffusion du Projet
E) L'élargissement de la démarche
3. L'évolution des systèmes d'information et de décision p. 266
A) La mise en place de cercles de qualité
B) La création de Plans d'Amélioration de la Qualité C) La Politique de Communication
4. Les politiquesdu personnel p. 272
A) L'appréciation des performances B) L'appréciation des fonctions C) L'appréciation du potentiel D) Les systèmes de rémunération
III)LES PREMIERSRESULTATS p.278
1. Mesure de l'impact de l'action sur le contexte organisationnel sur les attitudes, les représentations et les comportements du personnel de la
raffineriede Provence p. 280
A) Le choix du site
B) Méthodologie de recherche C) Déroulement de l'enquête
D) Les Résultats obtenus : synthèse des entretiens effectués
à
laRaffinerie de Provence.
2. Mesure de l'impact de l'action sur le contexte organisationnel sur les attitudes, les représentations et les comportements du personnel de la
Direction Régionale Nord Ile de France p.303
A) Choix du site
C) Déroulement de l'enquête
D) Les résultats obtenus : synthèse des entretiens effectués à la
Direction Régionale Nord Ile de France.
IV) ELEMENTS DE REFLEXIONSUR UN CHANGEMENT
ORGANISATIONNEL : p. 328
1. Le rôle clé de quelques acteurs p. 328
2. Le Projet et sa concrétisation p. 329
3. Les difficultés associées à la taille de l'organisation p. 329
4. Le poids d'un environnement difficile p. 331
QUATRIEME PARTIE : ANALYSE COMPAREE DES QUATRE CAS ET CONCLUSIONS
1) LES ORIGINES D'UN PROCESSUS DE CHANGEMENT ORGANISATIONNEL
GLOBAL p. 333
1. Une prise de conscience p. 333
2. Un Projet d'ensemble: l'adaptation à l'environnement p. 335
3. Des problèmes d'intégration p.337
4. Des situations différenciées p. 340
Il) CARACTERISTIQUES DE L'ACTION SUR LE CONTEXTE ORGANISATIONNEL
1. Un changement global p. 341
2. Une démarche cohérente p. 346
3. Une stratégie de changement p. 349
4. L'importance de la dimension temporelle p. 352
6. Le rôle attribué au Projet dans la démarche de changement
organisationnel p. 357
A) Une première réponse aux problèmes d'intégration et d'adaptation
à
l'environnement
B) Le Projet comme processus C) Le Projet comme produit
III) L'IMPACT D'UNE ACTION SUR LE CONTEXTE ORGANISATIONNEL p.370
1. Le problème de la mesure p. 370
2. Les instruments de mesure p. 371
3. Les résultats obtenus p. 372
IV) DIFFICULTES RENCONTREES PAR UNE OPERATION D'ACTION SUR LE
CONTEXTE ORGANISATIONNEL p. 380
1. La lenteur des changements et le besoin de stabilité p. 381
2. Le télescopage p. 385
3. La perception d'incohérences ponctuelles p. 389
4. Le problème du relais hiérarchique p. 392
5. Les problèmes associés
à
la taille de l'organisation p. 3986. Des attitudes différenciées: le problème des scissions internes .. p. 401
7. Projet d'entreprise et changement organisationnel. p. 402
CONCLUSION p. 407
l'ACTION SUR lE CONTEXTE ORGANISATIONNEL DANS lE CADRE DE
lA MISE EN OEUVRE D'UNE NOUVEllE STRATEGIE
INTRODUCTION
Le sujet de cette recherche est : "L'action sur le contexte organisationnel dans le cadre de la mise en oeuvre d'une nouvelle stratégie".
Elle s'intéresse par conséquent au processus à travers lequel une
organisation modifie son contexte organisationnel, c'est-à-dire l'ensemble
de ses caractéristiques internes - structures, systèmes de contrôle,
politiques du personnel .... - en vue de faciliter des réorientations
stratégiques éventuellement imposées par les évolutions de
l'environnement de la firme.
Notons dès maintenant que le sujet de cette recherche est fort large ce qui, nous le verrons, est à l'origine de difficultés aussi bien dans la phase d'analyse de la littérature que dans celle d'étude sur le terrain.
Lors de l'analyse de la littérature, il faudra en effet opérer
nécessairement une sélection vu la multiplicité des recherches qui ont de près ou de loin abordé ce sujet afin de retenir celles qui nous ont semblé
les plus significatives et surtout celles qui ont représenté un réel apport
dans la construction de notre problématique.
L'identification des terrains d'étude suppose quant à elle de parvenir à
trouver des entreprises prêtes à laisser une personne extérieure avoir
accès à une très grande variété d'informations concernant aussi bien leurs
choix stratégiques et structurels que leurs politiques du personnel, leur
politique de communication .... etc.
Enfin, notons que l'étendue du sujet impose en contrepartie une grande
rigueur dans la méthodologie d'approche afin de ne pas se disperser mais au contraire de construire de manière progressive une réflexion structurée bâtie autour d'une problématique claire.
Cette problématique, quelle est-elle ? Quelles en sont les grandes lignes ?
Il s'agit d'étudier les processus d'adaptation qui reposent sur un
changement organisationnel global, de comprendre leur origine, leurs
modalités et d'analyser leur impact.
Pourquoi parlons-nous de "contexte organisationnel" ? Ce terme peut
évidemment prêter
à
confusion, le mot contexte renvoyant généralement àcelui d'environnement c'est-à-dire à ce qui est externe à l'entreprise.
En fait nous désignons par contexte organisationnel le cadre spécifique à une organisation donnée dans lequel les individus pensent et agissent et
comportements.
Ainsi, la notion de contexte organisationnel intègre bien entendu les
structures, les systèmes de contrôle et d'évaluation , les politiques de
rémunération et de promotion mais aussi des paramètres plus informels renvoyant à un imaginaire organisationnel qui marquent la spécificité de l'organisation et qui font aussi partie du cadre dans lequel vivent, pensent,
agissent les acteurs. Par conséquent, "l'action sur le contexte
organisationnel" désigne certes les modifications de structures, de
systèmes et politiques mais fait également référence aux tentatives de
"gestion du symbolique", c'est-à-dire aux actions destinées à influencer
les productions symboliques.
La notion de contexte organisationnnei s'éclairera progressivement au
cours de cette recherche, en particulier, dans la partie consacrée à
l'analyse de la littérature où nous examinerons un ensemble de travaux qui ont contribué à la construction de cette notion.
La première partie de cette recherche s'intéresse en effet à l'analyse de la
littérature. C'est
à
partir de ces apports que nous tenterons dans ladeuxième partie de proposer un modèle très général destiné à rendre
compte du processus d'action sur le contexte organisationnel. Dans cette
deuxième partie, nous préciserons les finalités et l'objet de cette
recherche ainsi que la méthodologie retenue.
La troisième partie sera consacrée
à
la présentation de quatre cas d'étude:pour chacune de ces entités, nous décrirons la démarche entreprise et les
résultats observés. La troisième partie de cette recherche se veut
volontairement descriptive. Nous nous sommes efforcés, dans un souci de rigueur méthodologique de séparer la présentation des données de leur analyse. Cette dernière fait l'objet de la quatrième et dernière partie de la thèse laquelle comporte une étude comparée des quatre cas qui sert de support à une réflexion sur les spécificités - origines, modalités, impact-d'un processus de changement organisationnel global. Le modèle construit
dans la deuxième partie est sensiblement complété et enrichi et les
observations ayant pu être effectuées sont confrontées avec les
conclusions de recherches introduites en première partie.
Plusieurs préoccupations ont guidé la conduite de cette recherche et sa présentation.
Un souci de clarté tout d'abord : les processus observés s'avèrent
relativement complexes compte-tenu de l'ampleur des changements mis en oeuvre. Nous avons tenté de présenter les modifications opérées de la manière la plus claire possible.
Une deuxième préoccupation qui a dominé la conduite de cette étude est la
rigueur méthodologique et l'honneté intellectuelle : là encore, nous nous
sommes efforcés de dissocier les faits, les commentaires receuillis lors
Si seuls quatre cas ont été étudiés, c'est aussi parce qu'il s'agissait ici de ne rien avancer sans avoir fait au préalable une étude approfondie. Des cas qui n'auraient pu être étudiés que de manière superficielle ont donc été écartés. Les quatre entités analysées ont d'ailleurs représenté plusieurs centaines d'interviews et plusieurs milliers de pages de retranscription.
Un dernier souci fut d'effectuer un travail constructif c'est-à-dire
d'apporter une contribution même modeste au domaine de la recherche en Politique Générale. Si nous avons choisi ce sujet, c'est bien sûr parce qu'il nous intéressait mais aussi parce qu'il nous semblait que les processus de
changement organisationnel avaient été jusqu'alors relativement peu
Si le sujet de cette recherche a en partie été défini à partir des lectures
effectuées, il convient avant de passer celles-ci en revue, de préciser les
termes utilisés et de présenter la problématique, objet de cette étude.
La stratégie d'une organisation peut être définie comme l'ensemble des
décisions qui "intéressent les produits et les marchés que l'entreprise
choisit, ses objectifs de développement et les orientations qu'elle se
donne: expansion de marchés, diversification ...." (H.!. ANSOFF). Définir une
stratégie consistera à choisir un champ d'activité, retenir un vecteur de
croissance, se doter d'un avantage compétitif et enfin savoir utiliser des synergies.
La Stratégie constitue donc l'ensemble des décisions et des actions
relatives au choix des moyens et à l'articulation des ressources en vue
d'atteindre un objectif : elle se définit en termes de missions, de
portefeuille d'activités, de synergie, de moyens d'action, de mode de
développement de priorités .... (R. A. THIETARD).
La notion de contexte organisationnel quant à elle fait renvoit à
l'ensemble des paramètres d'une organisation qui, d'une façon ou d'une
autre, orientent les comportements des acteurs. Ainsi, la structure en
définissant les rôles de chacun, en instaurant un ensemble de règles et de procédures, constitue sans doute l'élément le plus immédiat du contexte organisationnel. C'est donc par elle que nous allons commencer, en nous interrogeant sur la dynamique qui relie la stratégie et la structure d'une
organisation. Par la suite, nous tenterons de construire de manière plus
complète la notion de contexte organisationnel.
1) LES RELATIONS
STRATEGIE-STRUCTURE
Le sujet exploré dans cette partie est donc la suivant : dans quelle mesure
une modification de stratégie (une nouvelle stratégie) induit-elle un
changement de la structure de l'organisation (action sur l'un des
paramètres du contexte organisationnel) ? De multiples travaux se sont
intéressés
à
cette question.Avant d'introduire ceux qui nous semblent les plus intéressants dans le cadre de cette recherche, il convient de souligner que des différences
importantes existent d'une recherche
à
l'autres au moinsà
deux niveaux:- L'étendue du champ organisationnel étudié : dans certains cas, l'étude se
limite à l'analyse des liens entre la stratégie d'une firme et sa structure
au sens strict, c'est-à-dire la division des tâches telle qu'elle peut être
représentée par l'organigramme. D'autres travaux définissent la structure
de manière beaucoup plua large : le terme désigne alors non seulement la
division du travail mais aussi les mécanismes de coordination et de
résolution des conflits, les systèmes d'information et de décision, le
degré de centralisation ...
1. CONSTRUCTION DE LA PROBLEMATIQUE
A l'origine même de l'élaboration du concept de stratégie, on trouve une
réflexion sur la nécessité d'articuler la structure et les systèmes de
gestion avec la stratégie de la firme. Ainsi, le modèle de Harvard, appelé
aussi modèle LCAG des initiales de ses premiers auteurs - Learned,
Christensen, Andrews et Guth - distingue une phase de formulation de la
stratégie et une phase de mise en oeuvre composée d'une série de
sous-activités qualifiées d'administratives.
Chaque organisation devrait en effet avoir un ensemble d'objectifs
clairement définis qui lui permette de s'orienter vers une direction
délibérement choisie. La phase de formulation de la stratégie consiste à
définir l'ensemble des buts ainsi que les principaux plans d'action pour
atteindre ces buts. Ces plans d'action préciseront dans quelle activité
opère ou doit opérer l'entreprise et le type d'entreprise qu'elle est (ou doit
être) .
A partir de là, il convient de mobiliser les ressources de l'entreprise en
vue d'atteindre les buts fixés à l'étape précédente. La phase de mise en
oeuvre suppose dès lors un ensemble coordonné d'actions sur la structure,
sur les processus organisationnels, le style de leadership jouant un rôle
déterminant à ce stade.
La stratégie ayant été définie, il importe en effet de mettre en place une
structure appropriée à la réalisation efficiente des tâches exigées. La
démarche consiste à identifier les tâches clés et à répartir les
responsabilités associées aux tâches, d'assurer la coordination de ces
responsabilités et enfin de concevoir des systèmes d'information
efficaces qui fournissent à chacun l'information dont il a besoin pour
remplir sa tâche et relier son travail à celui des autres.
L'action sur les systèmes et les processus organisationnels est également
fondamentale. Ceux-ci doivent en effet permettre d'orienter les efforts
individuels vers les buts organisationnels. Ainsi, l'établissement des
standards et la mesure des performances, la création et l'administration
d'un système de contrôle et les procédures de recrutement et de
développement des ressources humaines constituent autant de
mécanismes dont la cohérence avec les buts de l'organisation et la
stratégie qu'elle a retenu est essentielle. Il importe en effet d'assurer une harmonie entre ces différents systèmes et une cohérence ce ces derniers avec les choix stratégiques opérés par l'entreprise.
Enfin, le Directeur général remplit un rôle primordial dans le processus
d'adaptation interne de l'organisation aux orientations stratégiques. En
effet, il est responsable du climat dans l'organisation, c'est-à-dire de la
qualité de l'environnement interne. Celle-ci conditionne à son tour la
qualité de la coopération et le degré d'engagement des membres vis-à-vis des buts organisationnels ainsi que de l'efficience avec laquelle ces buts sont traduits en résultats.
Notons d'ors et déjà que dans ce modèle, pouvant être considéré comme
fondateur, c'est une problématique d'adaptation organisationnelle
relativement globale qui est introduite. En effet, la nécessité d'une
adéquation entre la stratégie d'une organisation et le système
organisationnel est soulignée. Ce ne sont pas seulement les structures au sens de division des tâches qu'il s'agit de rendre cohérentes avec les choix stratégiques : les systèmes d'information, d'évaluation, de récompense .... doivent également être revus et adaptés à la nouvelle stratégie à mettre en oeuvre. Le rôle du dirigeant architecte est justement d'assurer cette
harmonie stratégique en construisant un cadre de l'action
organisationnelle adapté à la stratégie définie.
En quoi une telle "harmonie" est-elle indispensable ? Qu'est-ce-qui relie
les caractéristiques organisationnelles aux choix stratégiques ? Les
travaux de Harvard présentent une orientation normative relativement
forte : la structure et les systèmes et processus de gestion doivent être adaptés à la stratégie à mettre en oeuvre. Tout se passe comme si, au départ, il n'y avait pas déjà une organisation avec une structure et des
modes de fonctionnement particuliers et que le dirigeant pouvait créer
ceux-ci de toute pièces. Cette vision apparait quelque peu simplificatrice
et ne permet pas d'aborder réellement le problème du changement
organisationnel.
Pourquoi en effet des modifications dans les orientations stratégiques de
l'organisation ont-elles pour conséquence des changements structurels ?
Quels sont les mécanismes à l'oeuvre dans une telle dynamique
d'adaptation ? Plusieurs modèles explicatifs ont été élaborés : chacun met en avant un concept clé pour rendre compte des liens qui unissent les
structures organisationnelles aux choix stratégiques effectués par la
firme.
Les problèmes administratifs soulevés par une stratégie de croissance
et structure. A mesure que les organisations changent leur stratégie de
croissance afin d'employer leurs ressources de façon plus profitable, de
nouveaux problèmes administratifs se posent. La seule solution possible
réside dès lors dans le remodelage de la structure de l'organisation afin que celle-ci devienne cohérente avec la nouvelle stratégie. (A. CHANDLER). Ainsi, quatre phases peuvent être distinguées dans l'histoire des grandes firmes américaines :
- l'expansion initiale et l'accumulation de ressources
- la rationalisation de l'utilisation de ces mêmes ressources
à
travers lamise en place d'une structure fonctionnelle
- la diversification dans de nouveaux marchés et dans de nouvelles lignes de produit
- la création d'une structure multidivisionnelle.
L'analyse historique approfondie menée par A. CHANDLER sur plusieurs
grandes entreprises américaines l'a ainsi conduit à mettre en évidence
l'existence d'un lien entre la stratégie d'une firme et sa structure qu'il
définit comme : "les lignes d'autorité et de communication entre les
différentes unités et les informations qui circulent
à
travers ces lignes".Notons à ce stade que la définition qu'il propose de la structure est
relativement limitée : elle n'intègre pas des éléments tels les systèmes d'évaluation et de récompense ....
L'une des forces en revanche de ses recherches est de s'appuyer sur l'étude approfondie d'un certain nombre de cas : la séquence Stratégie-Structure n'apparait pas comme automatique. L'adaptation des structures est le fruit
d'un processus au cours duquel des problèmes administratifs que la
structure en place ne parvient plus à résoudre se développent. Un délai relativement important peut s'écouler entre la formulation de la nouvelle
stratégie et le changement de structure. Ce dernier ne se produit
généralement qu'après la constatation d'une baisse des performances de la firme.
L'une des raisons avancées par A.CHANDLER pour rendre compte d'un tel
décalage réside dans les caractéristiques du leadership. En effet, il y
aurait d'importantes différences psychologiques entre, d'une part
l'Entrepreneur, bâtisseur d'empires, qui formule des stratégies et d'autre
part l'Organisateur capable de mettre en place la nouvelle structure plus
adaptée aux changements de stratégie. Il s'agirait de deux types
spécifiques de personnes avec des façons différentes de penser et d'agir. Le départ de l'Entrepreneur serait même nécessaire pour pouvoir opérer la
réorganisation structurelle.
Les réorientations stratégiques conditionnent donc le développement de
problèmes administratifs dont la résolution passe par des changements de structure avec parlois même une évolution dans le style de management.
---Un autre phénomène susceptible de rendre compte des interrelations entre
la structure et la stratégie d'une firme est l'existence de coûts de
transaction. Le développement des structures fonctionnelles et
multidivisionnelles peut s'expliquer par les bénéfices associés à une
réduction des coûts de transaction (O. WILLlAMSON).
L'organisation interne et les processus administratifs résulteraient de
l'échec de la structure de marché. Dans une situation caractérisée par
l'incertitude, par une information inégalement distribuée, par des
phénomènes d'opportunisme, il apparait que la main invisible du marché se
révèle inapte à gérer les transactions de façon économiquement
efficiente. L'inventeur d'une forme institutionnelle peut profiter ainsi
d'une efficience économique accrue rendue possible par une diminution des
coûts de transaction. C'est le cas par exemple des flux de travail
verticalement intégrés, gérés par des organisations fonctionnelles qui
remplacent les systèmes de marchandage bilatéraux. De même, une
entreprise qui s'est lancée dans une stratégie de diversification sera
gérée de manière plus efficiente par une structure multidivisionnelle
plutôt que par un marché de capitaux qui allouerait ses ressources à des
organisations fonctionnelles.
Il apparait donc que les choix stratégiques d'une organisation conduisent à
poser des problèmes d'organisation interne dont les solutions sont en
partie dictées par la nécessité de réduire les coûts de transaction. Ainsi, une stratégie de diversification des activités devrait être accompagnée de
la mise en place d'une structure multidivisionnelle : c'est celle-ci qui
permet alors l'allocation la plus efficace du capital en vue de maximiser
le profit. Dans ce cas, la structure multidivisionnelle s'averera plus
efficace que l'organisation fonctionnnelle, la firme holding ou bien encore les entreprises indépendantes régulées uniquement par le marché.
La notion de structure définie par O. WILLIAMSON est relativement large puisqu'elle intègre les systèmes de contrôle, de récompense ainsi que le
style de management. La supériorité de la structure divisionnelle sur la
structure holding dans le cas d'une firme à activités diversifiées
résiderait notamment dans les mécanismes de contrôle et de délégation que la première permet de mettre en oeuvre.
Une autre approche qui s'est efforcée d'offir un cadre explicatif du
développement des firmes et des interactions entre leur stratégie et leurs
choix en termes d'organisation repose quant à elle sur le concept de
dépendance critique (J D. THOMPSON).
Une organisation commencerait en effet par choisir un domaine et une technologie donnée. Ces choix conditionnent le degré de dépendance de la firme par rapport à son environnement. A partir de là, l'organisation se développe en intégrant dans ses frontières les éléments qui présentent les
interdépendances les plus critiques et pour lesquels la gestion par les contrats serait trop couteuse. Trois types d'interdépendance sont en effet distingués :
- l'interdépendance de ressources qui se produit lorsque deux unités
partagent le même ensemble de ressources (humaines, financières .... ).
- L'interdépendance séquentielle : plus critique que la précédente, elle
comporte en outre des liens séquentiels entre les unités. - l'interdépendance réciproque, la plus critique de toutes.
Ce sont justement les éléments participant d'une interdépendance
réciproque qui seraient les premiers acquis ou intégrés dans les
frontières organisationnelles : c'est ainsi que se développent les éléments fonctionnels (stade 1). L'étape suivante de la croissance d'une firme serait
l'intégration verticale qui s'accompagne de l'incorporation des éléments
séquentiellement interdépendants (stade Il). Par la suite l'excès de
capacités au niveau des fonctions cruciales incite l'organisation à se
diversifier dans de nouveaux domaines permettant de partager la
technologie sous-utilisée. La diversification induit donc une
interdépendance de ressources entre les unités qui partagent la
technologie, les canaux de distribution communs, .... (Stade III).
Le lien entre Stratégie et Structure peut s'analyser à partir de la notion d'interdépendance : la stratégie, en créant de nouvelles dépendances de
l'organisation vis-à-vis de l'environnement a pour conséquence une
intégration au sein de l'organisation des éléments qui présentent les
interdépendances les plus critiques.
Les travaux de J.O. THOMPSON et ceux de O. WILLIAMSON constituent des
études conceptuelles intéressantes dans la mesure où elles s'efforcent
d'articuler les rapports entre la stratégie et la structure d'une firme en
ayant recours à des concepts "importés" de l'économie (WILLIAMSON) ou de la sociologie (THOMPSON). A partir de cadres de référence relativement différents, ces auteurs ont été conduits à fournir des schémas explicatifs
des rapports qui associent les réorientations stratégiques avec les
changements de structure.
Un autre facteur qui contribuerait à rendre compte des phénomènes
d'adaptation organisationnelle est constitué par les mécanismes de
succession.(J. PFEFFER et G.R. SALANCIK).
Les organisations sont en effet contraintes par les demandes et les
pressions des groupes présents dans leur environnement. Elles ne
survivront que dans la mesure où elles sont efficaces. Or, leur efficacité dépend justement de leur capacité à gérer les demandes des groupes d'intérêt dont elles dépendent pour obtenir ressources et appui.
Si toute organisation est contrôlée ou contrainte par son environnement, il
facteurs externes affectent les choix organisationnels. Le mécanisme essentiel par lequel les organisations procèdent à cette adaptation serait,
selon les auteurs, la "succession des dirigeants". La séquence causale
proposée est la suivante :
- Dans un premier temps, le contexte environnemental avec ses
contingences, incertitudes et interdépendances, influence la distribution
du pouvoir et du contrôle à l'intérieur de l'organisation.
- Dans la mesure où l'organisation est appréhendée comme une coalition de
groupes d'intérêt dans laquelle chacun a ses propres préférences et
objectifs et s'efforce d'obtenir quelque chose de la collectivité en
interagissant avec les autres, cette redistribution du pouvoir et du
contrôle affecte à son tour la position et la sélection des principaux
gestionnaires.
En effet, les difficultés et les problèmes rencontrés par l'organisation ont tendance à être attribués au dirigeant même si ce dernier n'est pas à
l'origine de ces problèmes. Par ailleurs, il se peut que le dirigeant
lui-même se perçoive comme incapable de résoudre les nouveaux problèmes qui se présentent.
La sélection des nouveaux managers sera liée aux caractéristiques de
l'environnement de l'organisation. Les individus sélectionnés seront ceux
que l'on estimera capable de résoudre les problèmes critiques auxquels l'organisation doit faire face à un moment donné.
- Dans un troisième temps, la sélection et le remplacement des dirigeants
affectent les choix et les structures organisationnelles. En effet, les
nouveaux venus vont prendre des décisions destinées à rendre
l'organisation plus cohérente avec les exigences de l'environnement. Ces décisions modifient la structure et les modes internes de fonctionnement. Le mécanisme de la succession conduit donc à expliquer les changements
organisationnels par des processus politiques qui prennent place
à
l'intérieur de l'organisation. Les organisations seraient certes couplées
avec leur environnement mais de manière souple et le pouvoir jouerait un
rôle essentiel de médiateur entre les organisations et leurs
environnements.
Si les travaux qui viennent d'être ici examinés tentent de construire des modèles explicatifs de la relation entre la stratégie d'une organisation et les structures qu'elle est conduite à adopter, d'autres recherches se sont
quant à elles attachées à mettre en évidence l'existence d'une telle
2. STRATEGIE ET STRUCTURE : ETUDES EMPIRIQUES
L'analyse conjointe de l'évolution des stratégies et de l'évolution des
structures des entreprises permettrait de mettre en évidence l'existence
d'une corrélation. Les recherches portent sur les firmes américaines
(WRIGLEY 1970, RUMELT 1973) et sur les firmes européennes (CHANNON 1971 ; POOLEY DYAS 1972; PAVAN 1972; THANHEISER 1972).
L'un des principaux problèmes rencontrés résidait dans
''l'opérationnalisation" des variables de stratégie et de structure.
Ainsi, Wrigley fut conduit à identifier quatre types de stratégie - Les firmes à produit unique
- Les firmes diversifiées mais dans lesquelles une activité dominante
représente plus de 70% du Chiffre d'Affaires
- Les firmes diversifiées dont les activités sont liées (partage d'un canal de distribution, d'une technologie .... )
- Les firmes diversifiées dans des activité totalement indépendantes.
Après avoir tiré un échantillon à partir des 500 premières firmes du
classement de Fortune, l'auteur analyse pour chaque type de stratégie, le
nombre d'organisations ayant adopté une structure fonctionnelle ou
multidivisionnelle. Ces données montrent alors que, plus une firme adopte
une stratégie de diversification, plus elle sera susceptible de mettre en
place une structure multidivisionnelle.
Ainsi, les firmes à produit unique présentent toutes une structure
fonctionnelle. Les entreprises diversifiées mais avec une activité
dominante sont organisées suivant une structure hybride : structure
fonctionnelle pour l'activité principale et divisionnelle pour les autres
activités. Enfin, celles qui se sont diversifiées dans des activités liées ou indépendantes "choisissent" une structure par divisions.
Les travaux tels ceux de WRIGLEY permettent de mettre en évidence de
façon quantifiée l'existence d'une corrélation entre la stratégie d'une
firme et la structure qu'elle adopte.
Une recherche du même type mais plus détaillée fut développée par
RUMELT. Celui-ci définit neuf types de stratégies en subdivisant les
catégories élaborées par WRIGLEY. Par ailleurs, cinq types de structure
furent distinguées fonctionnelle, fonctionnelle avec filiales,
multidivisonnelle par produits, multidivionnelle par zones géographiques,
holding.
L'étude repose sur le tirage de trois échantillons, l'un en 1949, l'autre en
1959, le dernier en 1969. Les résultats obtenus confirment l'hypothèse
selon laquele la structure "suit" la stratégie. Ainsi, au cours de la période
1949-1969, le nombre de firmes
à
activité unique ou dominante diminueet parallèlement à l'essor des stratégies de diversification, on assiste
à
Par ailleurs, RUMELT procède à l'analyse des performances financières des
firmes de l'échantillon afin d'étudier la relation entre la stratégie, la
structure et les performances. Il est apparu que les firmes à structure
muitidivisionnnelle enregistraient les meilleurs taux de croissance et de
bénéfice par action. En revanche, les tests destinés à vérifier l'impact de
la cohérence Stratégie/Structure sur les performances de la firme ne se
sont pas révélés concluants.
Des études similaires, conduites en Grande Bretagne (Chan non 1971),
France (POOLEY DYAS 1972), Allemagne (THANHEISER 1972) et Italie (PAVAN 1972-1976) aboutirent à des constats comparables.
L'ensemble de ces recherches contribua à confirmer l'existence d'un lien entre la stratégie d'une firme et sa structure. Elles montrent de manière
quantitative comment une stratégie donnée est accompagnée s'une
structure correspondante.
Cependant, on peut noter que la nécessité d'opérationnaliser les variales
conduit à réduire les notions de stratégie et de structure. Ainsi, la
stratégie se limite aux stratégies de diversification et la structure aux
grandes formes d'organisation du travail : par fonctions, par divisions .... Les concepts de stratégie et de structure sur lesquelles ces recherches travaillent apparaissent donc comme relativement "pauvres".
Par ailleurs, elles ne permettent pas de suivre le processus par lequel les
organisations revoient leurs structures suite à l'adoption d'une stratégie
de diversification. Ainsi, même si l'étude de RUMELT s'appuie sur l'analyse
de trois périodes successives, elle est en fait constituée de coupes
transversales ce qui n'autorise pas le suivi du processus de changement structu rel.
3. ENVIRONNEMENT, STRATEGIE ET STRUCTURE LE PROBLEME DE
L'ADAPTATION
Les firmes doivent adapter leur organisation aux caractéristiques de leur environnement. Il n'existe pas d'organisation idéale mais des organisations plus ou moins bien adaptées aux caractéristiques de l'environnement de la
firme ( P R. LAWRENCEet
J
W. LORSCH , H. MINTZBERG,MILES & SNOW).Ainsi, des évolutions dans l'environnement impliquent des changements
stratégiques et organisationnels.
En effet, les organisations font face à l'environnement en se fractionnant en unités de façon telle que chacune d'elles a pour principale tâche de
traiter une partie des conditions externes à l'entreprise. L'environnement
exerce donc une influence sur le niveau de différenciation de la firme
(LAWRENCE & LORSCH). Notons que la notion de différenciation ne recouvre
plus générale les différences d'attitudes et de comportements associées à:
- une orientation vis-à-vis d'objectifs particuliers
- la projection d'actions dans le temps
- l'orientation interpersonnelle
- la structure formelle.
A un niveau de différenciation donné correspond un niveau d'intégration
nécessaire, c'est-à-dire une certaine qualité de collaboration entre les
différents départements.
Les caractéristiques de l'environnement où évolue la firme déterminent
les degrés de différenciation et les mécanismes d'intégration les plus
adéquats. Ces conclusions sont tirées d'une étude approfondie de dix
entreprises situées dans trois industries différentes (l'industrie
plastique, l'agroalimentaire et l'emballage). C'est ainsi. qu'ils constatent
que lorsque l'environnement est complexe, la firme est conduite à
instaurer un niveau de différenciation élevé dans la mesure où chaque
département est confronté à un sous-environnement spécifique présentant
des niveaux d'incertitude différenciés.
Si l'environnement conditionne le niveau des différences
inter-départementales, ce dernier à son tour détermine le niveau d'intégration
et l'importance des mécanismes d'intégration à mettre en place - ligne
hiérarchique, comités de coordination, équipes, poste d'intégrateurs ....
-afin de permettre la liquidation des conflits.
Ils constatent également que les firmes les plus performantes dans un
environnement complexe, se caractérisent par un fort niveau de
différenciation et un fort niveau d'intégration.
En réalité LAWRENCE et LORSCH étudient la relation qui lie
l'environnement d'une firme, son degré de complexité et d'hétérogénéité
avec les caractéristiques de la structure adoptée par celle-ci.
Parmi les résultats auxquels ils parviennent, deux conclusions présentent un intérêt tout particulier dans le cadre de notre problématique :
- Les caractéristiques de l'environnement de la firme conditionnent non
seulement les structures globales mais aussi les structures formelles de chaque département, les orientations cognitives et affectives des cadres dans chaque département ainsi que les mécanismes de coordination mis en place. Leurs travaux s'appuient sur une conception "riche" de la notion de structu re.
- Les organisations les plus performantes de leur échantillon sont celles
qui présentent une adéquation entre les caractéristiques de
l'environnement et le degré de différenciation et d'intégration. La
cohérence entre l'organisation interne et l'environnement constituerait
donc un facteur de performance.
ne soulève pas le problème de la modification des caractéristiques
internes rendue nécessaire par une modification de l'environnement. Par
ailleurs, le processus d'adaptation des paramètres organisationnels au
niveau d'hétérogénéité et de complexité de l'environnement n'est pas
analysé. La vision d'une adaptation quelque peu "passive" se dégage de leurs travaux. Ceux-ci n'intègrent pas par exemple une réflexion sur le rôle que peut jouer un leader en définissant une stratégie d'adaptation à
l'environnement et en construisant une organisation interne qui permette
d'atteindre les niveaux de différenciation et d'intégration nécessaires.
Les caractéristiques de l'environnement de l'organisation mais aussi l'âge
et la taille de celle-ci ainsi que son système technologique
conditionneraient donc les structures qu'elle adopte. Les organisations
efficaces parviennent donc à atteindre une cohérence entre leurs
différentes composantes et elles ne changent pas un élément sans tenir compte des conséquences que cette modification peut avoir sur tous les
autres. Des configurations organisationnelles peuvent par conséquent être
distinguées (H. MINTZBERG) : la structure simple, la bureaucratie
mécaniste, la bureaucratie professionnelle, la structure divisionnalisée et
l'adhocratie. Ainsi, la division du travail, le degré de spécialisation des
tâches, la taille des unités, leur regroupement, les mécanismes de liaison, le type de décentralisation ... dans une organisation ne doivent pas "être choisis au hasard" mais définis en fonction de leur cohérence interne et de leur cohérence avec les facteurs de contingence que sont l'environnement de la firme, son âge et sa taille, son système technologique.
Comment s'effectue le passage d'une configuration organisationnelle à une
autre
?
Comment se déroule le processus d'adaptation?
Les travaux de MILES & SNOW offrent un modèle du cycle adaptatif qui
articule l'environnement d'une firme, sa stratégie, sa structure et ses
processus. Les dirigeants d'une organisation "créent" leur environnement
dans la mesure où ils disposent d'une relative liberté pour gérer les
environnements dans lesquels évoluent leurs organisations. Les choix
stratégiques effectués conditionnent dès lors la structure et les
processus organisationnels, les décisions stratégiques ne prennent en
effet sens qu'à partir du moment où elles sont traduites dans ces derniers.
A partir de là, l'ensemble Stratégie/Structure développé à un moment
donné limite la capacité de l'organisation à poursuivre ses activités
ailleurs que dans son "champ normal" d'opérations. L'organisation sait
faire des choses très bien mais présente un manque de capacités évidentes dans d'autres domaines.
Le processus d'adaptation organisationnelle peut donc être représenté
problèmes majeurs
* Le problème entrepreneurial.
Il comprend la définition du domaine d'activité de l'organisation ses
produits, ses services, ses marchés et segments de marché.
* Le problème d'ingénierie.
Il s'agit de créer un système qui assure la mise en oeuvre effective de la
solution apportée par le management au problème entrepreneurial. La
création d'un tel système passe par le choix d'une technologie appropriée pour produire et distribuer les produits ou les services choisis et par la mise en place de nouveaux canaux d'information, de communication et de contrôle.
* Le problème administratif.
Il consiste essentiellement à réduire l'incertitude à l'intérieur du système
organisationnel, c'est-à-dire à rationaliser et à stabiliser les activités
qui ont permis de résoudre avec succès les problèmes rencontrés par
l'organisation au cours de la phase entrepreneuriale et de la phase
d'ingénierie.
Le modèle du cycle adaptatif appréhende l'organisation comme un tout et
s'efforce de conceptualiser les principaux éléments de l'adaptation ainsi
que de visualiser les relations qu'ils entretiennent. Le processus se
déroule de façon séquentielle avec une succession de phases
entrepreneuriales, technologiques et administratives mais le cycle peut
se déclencher à l'un quelconque des niveaux.
Par ailleurs, une typologie des adaptations organisationnelles peut être
dressée. Si le choix de la combinaison stratégie/structure/processus est
très vaste, les auteurs sont conduits à distinguer, à partir des
observations qu'ils ont effectuées, plusieurs archétypes. Chacun d'eux se
caractérise par une stratégie donnée face à l'environnement et une
configuration particulière de technologie, de structure et de processus
cohérente avec la stratégie. Quatre types organisationnels ont ainsi été
définis :
- Les défenseurs : il s'agit d'organisations présentes dans des
couples/marchés étroits, expertes dans leur zone d'intervention mais qui
ne cherchent pas à saisir de nouvelles opportunités hors de leur domaine
d'activité traditionnel. Du fait de cette focalisation étroite, ces firmes
sont rarement conduites à opérer des réajustements majeurs de leurs
structures, technologies et processus.
- Les prospecteurs : à la recherche permanente d'opportunités, ces firmes
changements d'environnement mise en place d'équipes de projet,
organisation par produit, décentralisation des activités entrepreneuriales
et technologiques, mécanismes coûteux et complexes de coordination .... - Les analystes : présentes dans des domaines produit/marché stables et changeants, ces organisations ont des structures souvent matricielles qui combinent des divisions fonctionnelles et des groupes autonomes avec des
responsabilités produits spécifiques.
- Les réacteurs : Les dirigeants de ce type d'organisation s'avèrent souvent incapables de répondre efficacement aux changements qui se produisent
dans l'environnement, l'une des raisons étant le manque de consistance
dans la relation Stratégie/Structure.
La méthodologie de recherche rigoureuse sur laquelle reposent les travaux
de MILES & SNOW - construction et étude approfondie d'entreprises
présentes dans des secteurs spécifiques
à
savoir l'édition de livresscolaires, l'électronique, l'agro-alimentaire et le secteur hospitalier
-leur a permis de construire un modèle et de le tester.
La typologie qu'ils élaborent met en évidence l'existence d'un rapport
complexe mais certain entre l'environnement d'une firme, sa stratégie et
sa structure, ses systèmes de planification-contrôle, ses mécanismes de
coordination et de résolution des conflits, ses systèmes d'évaluation ....
Leur analyse souligne la complexité des inter-relations : les choix
organisationnels effectués conditionnent
à
leur tour les compétences etattitudes de l'organisation face
à
l'environnement ; les décisionsd'adaptation ont tendance
à
se figer.Cependant, cette étude, de par la méthodologie même qu'elle a utilisée,
des coupes transversales, n'intègre pas une approche dynamique des
rapports entre stratégie et organisation. C'est en tentant d'appréhender
l'évolution des types organisationnels que d'autres travaux ont introduit la notion de cycle de vie d'une organisation.
Les changements qui interviennent dans les organisations suivraient un
modèle marqué par des stades de développement. Chaque stade
présenterait des complémentarités entre des variables d'environnement,
la stratégie, la structure et les méthodes de prise de décision. (SCOTT,
SMITH & CHARMOZ, SALTER, STOPPORD). Un certain nombre de transitions
typiques se produiraient au fur et
à
mesure qu'une organisation, petite etsimple, grandit et devient plus complexe.
Plusieurs modèles du cycle de vie ont été construits. Ils diffèrent par le nombre de stades constitutifs de la séquence de développement, par le nombre de dimensions de la stratégie, des structures, des méthodes de décision prises en compte et par le principal facteur qui conditionne le
Ainsi, SCOTT distingue trois stades
- Le stade 1 est constitué par une organisation simple avec une seule ligne de produit et une seule fonction.
- La stratégie d'intégration verticale conduit la firme à intégrer d'autres
fonctions comme par exemple les fonctions de distribution et de vente. De nouveaux problèmes se posent associés à la gestion des flux de travail
horizontaux. L'organisation adopte alors une structure fonctionnelle et
met en place des processus de prévision et de planification. Ce type de firme constitue le stade Il du modèle de SCOTT.
- La passage au stade III se caractérise par le développement d'une
stratégie de diversification des lignes de produit. La gestion de produits
multiples soulève des problèmes liés à l'évaluation de la performance
financière de chacun d'eux et à l'allocation des ressources. Ces problèmes
sont résolus par l'adoption d'une structure multidivisionnelle dans
laquelle chaque division constitue une organisation fonctionnelle
s'occupant d'un produit unique ou d'une ligne de produits limitée. Chaque division constitue dès lors un centre de profit.
SALTER, quant à lui, décompose le stade III qui vient décrit en deux stades:
le premier (stade III) se caractérise par une structure multidivisionnelle
avec des zones géographiques, le second (stade IV) présente une structure
multidivisionnelle par lignes de produit.
D'autres recherches (STOPFORD & WELLS, SMITH & CHARMOZ) ont bâti des
modèles de développement international qui intégraient l'analyse des
mouvements d'expansion à l'étranger.
L'intérêt de ces modèles, compte tenu du sujet de cette recherche , est de
mettre en évidence l'existence de configurations qui se caractérisent par
un ensemble donné de structures, de processus et de systèmes de
récompense.
De plus, ils permettent d'introduire la problématique du changement
organisationnel : face à des changements très importants dans
l'environnement, l'organisation, afin de s'adapter, est conduite à se
métamorphoser. Une simple modification dans les structures ou bien
encore dans les systèmes de récompense s'avère insuffisante : c'est
l'ensemble de la constellation - système, processus et structure - qui doit être défaite et reconstruite.
Les travaux sur les modèles du cycle de vie font donc apparaître les
rapports étroits qui existent entre la stratégie d'une firme et certaines
caractéristiques de son organisation. Ils mettent également en évidence la nécessité d'opérer des changements organisationnels relativement globaux
afin de permettre
à
la firme de s'adapter aux grandes évolutions de sonCependant, certaines limites doivent être ici soulignées. Le passage d'un
stade au suivant apparait dans ces études comme relativement
"mécanique" et elles ne comportent pas une véritable analyse du processus de changement organisationnel.
On a parfois souligné l'importance du temps nécessaire pour que s'effectue la transition et l'hypothèse a été avancée que le changement, surtout
lorsqu'il affectait les statuts et la structure de pouvoir, prenait place
à
l'occasion d'une crise.
Mais, les méthodologies généralement retenues constructions
conceptuelles et études empiriques
à
partir de coupes transversales-limitent la capacité d'étudier de manière approfondie le changement
organisationnel en tant que processus. Afin de mieux comprendre
l'évolution des inter-relations entre les stratégies, les structures et les processus de décision, des méthodes d'analyse longitudinales ont été développées.
Ainsi, c'est
à
partir d'études logitudinales que MILLER & FRIESEN ontanalysé les cycles de vie organisationnels. Ils distinguent cinq stades - la
naissance, la croissance, la maturité et le déclin - se caractérisant
chacun par une configuration particulière :
- de situation : taille de la firme, âge, caractéristiques de l'environnement
- d'organisation : structure fonctionnelle ou divisionnelle, degrés de
différenciation et de décentralisation, processus d'information et de
décision retenus ....
- d'innovation et de stratégie : taux de croissance, attitude face au risque, stratégie d'expansion, de consolidation, de diversification ....
Quatre hypothèses sont alors formulées :
* Au cours des quatre premières phases, la taille de la firme augmente, le
degré de concentration de l'actionnariat diminue. Au fur et à mesure que la
firme étend sa gamme de produits et de services afin de répondre
à
desmarchés plus mûrs et saturés, elle voit son environnement devenir plus hétérogène et hostile.
* La complexité croissante de la situation conduira la firme à se doter
d'une structure plus sophistiquée au fur et
à
mesure qu'elle traverse lesquatre premiers stades du cycle de vie.
L'accroissement de la complexité se manifestera par un nombre plus
important de procédures de traitement de l'information. On assistera
également
à
une décentralisation progressive de l'autorité pour lesdécisions stratégiques, à une délégation de l'autorité pour les décisions
routinières et
à
un management plus participatif. Enfin, les départementscomplexité de l'environnement.
* Au fur et
à
mesure que l'organisation grandit et que son environnementdevient plus complexe, des analyses plus poussées seront effectuées lors des prises de décision, un plus grand nombre de points de vue seront pris
en compte. On accentuera les efforts pour intégrer les décisions des
différents secteurs et assurer leur complémentarité ou au moins leur
compatibilité.
* En termes de stratéoie, on suppose que les efforts d'innovation
prédomineront pendant les phases de naissance et de renouveau alors que les phases de maturité et de déclin seront marquées par une focalisation sur les problèmes d'efficience.
Afin de tester ces hypothèses, la méthodologie retenue consista à étudier 36 firmes pendant une longue durée ( 20 ans ou plus ) en s'appuyant sur les bilans sociaux, sur des articles parus dans la presse ainsi que sur des
questionnaires envoyés aux anciens dirigeants et dirigeants actuels des
firmes étudiées. A partir des données receuillies, les auteurs
distinguèrent 161 périodes d'histoire ( sur 36 firmes observées) les
classèrent suivant les cinq stades du cycle de vie.
Une analyse de la variance effectuée sur 54 variables de stratégie,
situation, structure et style de prise de décision montra que les firmes
présentaient des différences significatives suivant le stade de cycle de
vie qu'elles traversent, chaque phase comportant un scénario spécifique de
caractéristiques cohérentes entre elles.
La typologie dressée semble donc avoir une valeur prédictive puisque la
classification initiale en 5 stades fut confirmée par la mise en évidence
de différences collatérales significatives en termes de stratégie,
situation, structure et style de prise de décision. En revanche, les
organisations ne passeraient pas toutes d'un stade
à
l'autre suivant lamême fréquence.
Les travaux de MILLER & FRIESEN s'efforcent donc d'analyser les
interactions entre l'environnement, les stratégies, les structures et les
processus de décision dans le cadre d'une approche dynamique. Ils
présentent un intérêt compte tenu de la méthodologie utilisée : le suivi de l'évolution d'un grand nombre de firmes au cours d'une longue période de temps.
Cependant, leur démarche présente quelques limites : l'effort réalisé pour
tester les hypothèses de façon quantitative (analyse de la variance) et
leur distance par rapport au terrain leur interdit d'effectuer une véritable analyse du processus de passage d'un stade au suivant.
L'ensemble des recherches exammees jusqu'à maintenant ont contribué à
mettre en évidence la problématique de l'adaptation organisationnelle.
Face à des environnements qui évoluent, les firmes sont conduites à
redéfinir leurs stratégies et à adapter leurs structures en conséquence.
C'est ainsi que l'on voit apparaitre des configurations organisationnelles
ou bien encore des stades caractérisés par une combinaison spécifique de
caractéristiques environnementales, stratégiques et organisationnelles.
L'une des approches les plus complètes est sans doute celle présentée par
les recherches de
J.
GALBRAITH.4. ENVIRONNEMENT, STRATEGIE ET STRUCTURE
INTEGRATEUR
UN MODELE
Lorsque l'évolution de l'environnement conditionne des réorientations
stratégiques, il peut s'avérer nécessaire de procéder à une adaptation de
l'organisation interne. Ce processus d'adaptation affectera un grand
nombre de paramètres organisationnels (J GALBRAITH).
La stratégie produit/marché choisie par la firme détermine dans une large
mesure le degré de diversité et d'incertitude des tâches auxquelles
l'organisation est confrontée.
L'organisation doit alors se doter d'une structure adéquate compte tenu
des tâches à réaliser : les choix structurels portent sur la division du
travail (degré de différenciation des rôles), la constitution des
départements, le nombre de niveaux hiérarchiques et la distribution
horizontale et verticale du travail. Des choix doivent également être
effectués concernant les processus d'allocation des ressources, les
systèmes de planification et de contrôle, les processus d'élaboration des
budgets, les mécanismes d'intégration et les systèmes de mesure des
performances.
Il convient aussi de s'assurer de la cohérence du système de récompense
avec les tâches et les structures et d'accorder une attention particulière
aux choix portant sur les systèmes de rémunération, la gestion des
carrières, le comportement du leader et la définition des rôles.
L'ensemble de ces choix doivent constituer une configuration cohérente. Si
l'une des pratiques est modifiée, toutes les autres dimensions devraient
être altérées afin de maintenir l'adéquation de la forme organisationnelle
avec la stratégie produit/marché.
A partir de là, J GALBRAITH distingue cinq types organisationnels
-simple, fonctionnel, holding, multidivisionnel, global - caractérisé chacun
performances, un système de récompenses et de gestion des carrières, un style de leadership et de contrôle, des choix stratégiques.
Ainsi, la mesure des performances devient plus formelle et explicite au
fur et à mesure que la firme passe du type simple à la forme
fonctionnelle, puis aux formes holding et multidivisionnelle. De façon
similaire, lorsque la firme passe du stade simple aux suivants, les
récompenses deviennent plus systématiquement liées aux performances. Une autre caractéristique majeure qui change est le type de carrière suivi par les cadres supérieurs. Dans la forme simple ou fonctionnelle, ce sont
généralement des spécialistes fonctionnels avec quelques généralistes
dans la forme fonctionnelle. La forme holding, quant à elle, exige un plus
grand nombre de généralistes. Par conséquent, les carrières sont
inter-fonctions. Ce sont dans les formes multidivisionnelle et globale que le
besoin de managers généraux se fait le plus sentir.
Le style de leadership et les modalités de contrôle changent également
suivant le type d'organisation. Dans la forme simple, le leader est un
décideur très impliqué dans la stratégie et les activités opérationnelles.
Au fur et à mesure qu'une firme se dirige vers les formes fonctionnelle et
multidivisionnelle, le leader a de plus en plus tendance à déléguer les
décisions opérationnelles qui sont contrôlées par des procédures et des systèmes de mesure des performances. Dans les formes multidivisionnelle
et globale, certaines décisions stratégiques devant être prises dans le
cadre des activités existantes sont déléguées aux divisions. La forme
holding présente le niveau de délégation le plus élevé ainsi que le plus grand degré de contrôle indirect à travers des systèmes de mesure des performances et de récompenses associées aux performances réalisées.
La firme change donc toutes ses caractéristiques au fur et à mesure
qu'elle passe d'une forme à une autre. Prises ensemble, ces
caractéristiques constituent la façon de vivre de l'organisation.
Elles forment un ensemble intégré qui permet la mise en oeuvre effective
de la stratégie. Lorsqu'une organisation change de stratégie, ces
caractéristiques doivent être modifiées et réalignées. Un tel changement
constitue une métarmorphose.
Les travaux de J GALBRAITH et de NATHANSON présentent un intérêt tout
particulier compte tenu du thème de cette recherche. Ils soulignent en
effet les interdépendances qui existent entre la stratégie d'une
organisation et les différents paramètres organisationnels que sont les
structures, les système de délégation et de contrôle, les systèmes
d'évaluation des performances et de récompense .... Ces différentes
variables doivent non seulement être articulées les unes avec les autres mais aussi former un tout cohérent conforme avec la stratégie à mettre en
changement global affectant l'ensemble des paramètres organisationnels qui doit être entreprise afin d'assurer de nouveau une adéquation globale. Quelques limites méritent toutefois d'être soulignées :
- d'une part, le modèle de
J.
GALBRAITH est le produit d'une réflexionconceptuelle et n'a pas été confronté à des observations sur des cas réels. - De l'autre, l'analyse du processus de changement appréhendé comme une métamorphose apparait quelque peu "mécaniste".
Que se passe-t-il en effet si les changements introduits menacent la
distribution du pouvoir existante ? Des résistances ne risquent-elles pas
de se manifester ? Plus généralement, quelles sont les difficultés
présentées par le remodelage des différents paramètres organisationnels? Pourquoi ces modifications s'avèrent-elles nécessaires ? Quel impact sont elles susceptibles d'avoir sur les comportements ?
Autant de questions que les travaux évoqués jusqu'à maintenant n'ont pas véritablement explorées.