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ANALYSE CRITIQUE
DE LA LITTERATURE
EXISTANTE
La première partie de cette recherche a été consacrée à l'analyse des différents travaux qui ont étudié le problème de l'action sur le contexte organisationnel. Ces travaux ont été regroupés en quatre parties, l'objectif
du regroupement effectué étant de comparer certaines recherches,
d'identifier leurs apports et leurs limites par rapport aux problématiques
étudiées.
En effet, ainsi que nous l'avions souligné dans l'introduction à la revue de
la littérature, le caractère relativement vaste du sujet de cette thèse
explique que des recherches focalisées sur des problématiques différentes l'aient cependant d'une façon ou d'une autre abordé. Il convient de rappeler
ici que la revue de la littérature effectuée ne prétend nullement
à
l'exhaustivité : les travaux retenus ont été ceux estimés les plus
représentatifs des divers courants de recherche. La présentation de ces travaux s'est accompagnée d'une tentative d'analyse critique dont le but
était de situer les apports de chaque recherche à la problématique :
"L'action sur le contexte organisationnel dans le cadre de la mise en
oeuvre d'une nouvelle stratégie", ainsi que d'identifier ses limites non pas
dans l'absolu mais toujours par rapport
à
la préoccupation qui était lanotre.
De manière plus globale il apparaît que la plupart des recherches
identifiées dans les trois premières parties de la revue de la littérature présentent généralement l'une au moins des limites suivantes :
* La tentation normative : quelques unes des recherches introduites dans
la partie précedente relèvent d'une volonté normative . Elles ont tendance
à
aborder le problème du Changement organisationnelà
partir d'un modèlepréconstruit et souvent simplificateur. De telles recherches, malgré
l'intérêt des modèles qu'elles proposent risquent de réduire la complexité réelle des processus de changement organisationnel.
* La focalisation sur un paramètre : d'autres études abordent le problème
de l'adaptation de l'un seulement des paramètres du contexte
de prendre en compte les interactions multiples susceptibles d'exister
entre les différents paramètres organisationnels.
Ainsi, les travaux focalisés sur les relations entre la Stratégie et la
Structure d'une organisation peuvent apparaître quelque peu
simplificateurs. Certains supposent en effet une adaptation mécanique des structures au fur et à mesure que la stratégie de la firme se modifie. Or
des changements de structure introduits à la suite de réorientations
stratégiques peuvent se heurter à des difficultés dont l'origine relève de phénomènes d'ordre culturel ou politique. Ainsi, dans la mesure où les nouvelles structures impliquent des changements dans les comportements
et dans les modes de fonctionnement, elles peuvent rentrer en
contradiction avec ce que certains auteurs définissent comme l'imaginaire partagé. De même, un changement de structure peut se traduire par la mise en place de nouvelles règles du jeu et par une redistribution des cartes et du pouvoir : si des acteurs ou des groupes d'acteurs se sentent menacés par ces évolutions, il y a de fortes chances pour que des résistances se manifestent.
De manière similaire, les études qui se sont attachées à comprendre les articulations entre la Stratégie d'une organisation et sa culture n'ont pas toujours pris en compte le rôle susceptible d'être joué par les structures
de la firme. Or, les tentatives d'orientation de la culture s'appuient
souvent sur des modifications des structures , des systèmes d'évaluation et de sanction.
Il semblerait donc que les approches qui ne considèrent qu'un des aspects
du contexte organisationnel, malgré l'intérêt de leurs apports, ne
permettent pas de rendre compte d'un processus de changement
organisationnel.
* Une analyse statique : la majeure partie des travaux examines étudient
les interactions entre la Stratégie et la Structure d'une organisation ou
bien encore entre sa culture et ses choix stratégiques en privilégiant une analyse de leur adéquation à un moment donné. Ils ne prennent donc pas en
compte la dimension temporelle essentielle lorsqu'on essaye
d'appréhender un processus d'évolution.
* Une non prise en compte du processus : ceux qui ont étudié les stades de
développement se sont avant tout efforcés de caractériser les différents
stades et de mettre en évidence leur caractère séquentiel. En revanche, peu d'attention a été consacrée au processus par lequel les organisations passent d'un stade à un autre.
littérature se sont plus particulièrement intéressées au processus de changement et échappent par conséquent en partie aux limites évoquées ci- dessus. A.PETTIGREW,J.DENT, H.MINTZBERG,M.CROZIER,R.M. KANTER .... ont
en effet conduit des études longitudinales et se sont efforcés de
comprendre la dynamique d'un processus de changement (sans tenter
d'appliquer des modèles préétablis), de prendre en compte les interactions
complexes entre Environnement, Choix Stratégiques, Structures,
Processus de Décision, Culture d'entreprise, phénomènes politiques ...., de
suivre les tentatives de changement organisationnel dans le temps et
enfin d'analyser non seulement la nature des changements introduits mais les processus par lesquels ces changements sont élaborés et appliqués. Sans revenir ici sur l'analyse des forces et des limites de chacune de ces recherches, on peut cependant avancer qu'elles abordent peu voire pas du tout les deux thèmes suivants :
- Quel est l'impact réel de ces changements sur le personnel, sur les
attitudes et les comportements des membres de l'organisation ? Très
souvent en effet les auteurs soulignent des évolutions dans les attitudes, sujets de préoccupation et façons de travailler des cadres dirigeants mais peu de choses sont dites sur la manière dont l'ensemble du personnel et en particulier la base vit ce processus de changement.
- Quel rôle sont appelées
à
jouer les démarches de gestion du symboliquedans un processus de changement global? A. PETTIGREW, R.M. KANTER,
M.CROZIER .... soulignent l'importance que jouent les changements
idéologiques, la production de discours destinés à donner un sens à ce qui se passe, la force du gouvernement par la culture mais la manière dont les actions de production de discours, de gestion du symbolique s'articulent
avec les modifications de stratégie, de structure, de politiques du
personnel sont finalement peu étudiées par ces auteurs. A l'heure où se
multiplient les projets ou chartes d'entreprise, où des cabinets
spécialisés dans l'élaboration de "grand-messes" se développent, une
réflexion mérite d'être menée sur la place qu'occupent ces nouveaux outils dans un processus de changement.
Par conséquent, il semble intéressant de compléter les études existantes par une recherche qui s'efforcerait de suivre un processus de changement organisationnel afin de comprendre ses origines, sa dynamique et d'évaluer
son impact tout en tentant d'analyser le rôle supposé et réel des