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Identification, chez des étudiantes en sciences infirmières, des déterminants de l'intention d'initier, auprès d'un patient, un enseignement à propos de la sexualité

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Identification, chez des étudiantes en sciences

infirmières, des déterminants de l’intention d’initier,

auprès d’un patient, un enseignement à propos de la

sexualité

Mémoire

Jérôme Pelletier

Maîtrise en sciences infirmières

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

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RÉSUMÉ

Bien que les patients et les infirmières reconnaissent la légitimité des préoccupations des patients à l’égard de leur sexualité lorsqu’ils traversent un épisode de santé/maladie, la littérature montre que les infirmières initient rarement l’enseignement à ce sujet. Cette étude visait donc à identifier, chez des étudiantes en sciences infirmières, les déterminants de l’intention de ce comportement professionnel. Un questionnaire auto-administré (basé sur la théorie du comportement planifié d’Ajzen (1991) à laquelle d’autres variables psychosociales ont été ajoutées) a été complété en classe par 72 volontaires. L’identité personnelle, la norme descriptive et la perception du contrôle expliquaient 76% de la variance de l’intention. Par ailleurs, l’impression que se fait la répondante des besoins d’enseignement du patient et de la relation thérapeutique qu’elle entretient avec celui-ci, de même que le fait que celui-ci soit un homme, étaient les croyances sur lesquelles il serait pertinent d’intervenir afin augmenter l’intention des étudiantes.

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ABSTRACT

Although patients and nurses recognize the validity of patients' concerns with respect to their sexuality while they are going through an episode of health/disease, the literature shows that the nurses rarely initiate a discussion on this topic. The purpose of this research is thus to identify the determinants of the intention of this professional behavior among nursing students. A self-administered questionnaire (based on the theory of planned behavior (Ajzen, 1991) to which other psychosocial variables were added) was filled in class by 72 volunteers. Personal identity, descriptive norm and perception of control accounted for 76% of the variance of the intention. Besides, the impression the student has of patient's needs for a discussion on the topic of sexuality, of the nurse/patient relationship, and the fact that the patient is a man, were the three beliefs on which it would be relevant to intervene in order to increase the students’ intention.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... iii

ABSTRACT ... v

TABLE DES MATIÈRES ... vii

LISTE DES TABLEAUX ... ix

REMERCIEMENTS ... xiii

INTRODUCTION ... 1

Chapitre 1 : PROBLÉMATIQUE ... 3

1.1. L’impact des épisodes de santé / maladie sur la sexualité ... 3

1.1. Les besoins d’informations exprimés par les patients à l’égard de l’impact de l’épisode de santé / maladie sur leur sexualité ... 5

1.2. Le rôle infirmier en lien avec la sexualité, selon les théories, les associations d'infirmières, et les infirmières elles-mêmes ... 6

1.3. La discordance entre les soins attendus par les personnes, et les soins prodigués par les infirmières ... 8

1.4. Les conséquences de cette discordance ... 8

Chapitre 2 : RECENSION DES ÉCRITS ... 11

Chapitre 3 : CADRE THÉORIQUE ... 25

3.1. La théorie du comportement planifié ... 26

3.2. La norme morale et la croyance en l’existence de rôles sociaux ... 28

3.3. La norme descriptive ... 28

3.4. L’identité personnelle ... 29

3.5. Questions de recherche ... 29

Chapitre 4 : MÉTHODE ... 31

4.1. Population et échantillon, recrutement ... 31

4.2. Mise à niveau des connaissances préalables ... 31

4.3. Élaboration des instruments de mesure ... 32

4.4. Taille d’échantillon pour le volet quantitatif destiné à répondre aux questions de recherche ... 35

4.5. Collecte de données pour la phase quantitative ... 36

4.6. Devis de l’étude ... 36

4.7. Analyses statistiques ... 36

Chapitre 5 : RÉSULTATS ... 39

5.1. Description de l’échantillon... 39

5.2. Qualités psychométriques des mesures ... 40

5.3. Statistiques descriptives ... 43 5.4. Prédiction de l’intention ... 44 5.5. Croyances saillantes ... 47 Chapitre 6 : DISCUSSION ... 49 6.1. L’identité personnelle ... 52 6.2. La norme descriptive ... 52

6.3. La perception du contrôle et l’importance accordée aux croyances liées au contrôle ... 53

6.4. Autres construits ... 55

6.5. Les limites de l’étude ... 57

6.6. Les forces de l’étude ... 59

6.7. Les pistes de recherches et d’interventions ... 61

CONCLUSION ... 65

BIBLIOGRAPHIE ... 67

Annexe 1 : PLAN DÉTAILLÉ DE LA MISE À NIVEAU DES CONNAISSANCES ... 75

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Annexe 3 : INSTRUMENTS DE COLLECTE DE DONNÉES DE LA PHASE DE PRÉ-EXPÉRIMENTATION 101 Annexe 4 : INSTRUMENTS DE COLLECTE DE DONNÉES DE LA PHASE QUANTITATIVE ... 115

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1: Croyances les plus endossées par les répondantes de l'étude de Tsaï (2004) (traduction libre) ... 17 Tableau 2: Caractéristiques sociodémographiques de l'échantillon ... 40 Tableau 3: Coefficient alpha de Cronbach pour chacune des variables à l'étude (n=71) ... 41 Tableau 4: Coefficients de corrélation entre les construits directs et indirects de la TCP (n=71) ... 41 Tableau 5: Saturation des items mesurant la norme morale et l'identité personnelle sur une solution à deux

facteurs ... 43

Tableau 6: Scores moyens, écarts-types, scores minimums et maximums de chacune des variables

psychosociales conservées pour les analyses (n=71) ... 44

Tableau 7: Coefficient de corrélation entre les variables à l'étude (n=71)* ... 45 Tableau 8: Résultats de la seconde étape de la régression hiérarchique identifiant les prédicteurs de l'intention

d'adopter le comportement (n=71) ... 46

Tableau 9: Résultats de la régression hiérarchique portant uniquement sur les prédicteurs statistiquement

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Parce que, quoique vous espériez, même vos

parents ont déjà eu (au moins) une relation

sexuelle.

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REMERCIEMENTS

Plusieurs personnes ont contribué à l’accomplissement de ce processus de recherche, que ce soit par un soutien technique, par un soutien pédagogique ou scientifique, ou encore par un soutien moral.

Je remercie Frédéric Douville pour avoir fait avec moi l’analyse de contenu de la phase qualitative. Je remercie également Julie Bourque et Mélanie Dionne pour m’avoir aidé à élaborer, de façon crédible et réaliste, la mise en situation utilisée pour l’ensemble de ce projet. Dans le même ordre d’idées, j’aimerais remercier mesdames Marie-Pierre Gagnon et Maria-Cécilia Gallani pour avoir approuvé, à la demande du comité d’éthique, le plan de la mise à niveau des connaissances dispensée dans le cadre de ce projet. Merci également à Heidi Lepage et Diane Tapp pour m’avoir soutenu dans la difficile tâche de faire entrer un bloc rond dans un trou carré. Finalement, merci à une précieuse amie qui a toujours les bons mots, Katerine Gosselin.

Merci à tous ceux qui m’ont soutenu moralement dans ce projet : mon amoureuse Maryse, qui n’a jamais cessé de m’encourager à poursuivre et, surtout, à terminer mon mémoire; ma mère et mon père (tous deux infirmiers) pour m’avoir prédisposé au soin mais aussi à l’engagement envers la profession; et finalement mon amie Sophie, pour les (interminables!) réflexions sur la sexualité.

J’aimerais aussi souligner la très grande contribution de madame Caroline Maltais : pour son soutien sans limite dans le déploiement de mon projet à l’intérieur de son cours, mais aussi pour m’avoir donné, bien qu’involontairement, l’idée du projet, alors que j’étais étudiant au baccalauréat en sciences infirmières. Caroline nous avait raconté comment, lorsqu’elle était jeune infirmière, un de ses patients s’était mérité une débarbouillette (froide!) pour avoir manifesté de façon un peu trop ostentatoire son enthousiasme à la perspective se faire installer une sonde urinaire par Caroline. Monsieur X, ce mémoire est donc aussi pour vous.

Toutes ces personnes ont été les échelons sur lesquels j’ai pu m’appuyer pour gravir l’abrupte pente des études supérieures. Toutefois, une échelle sans montant ne saurait nous porter bien haut. Aussi, il m’est indispensable de reconnaitre la différence que madame Camille Gagné, ma directrice de recherche, a fait dans ma vie. Bien au-delà du soutien pédagogique et scientifique nécessaire au parachèvement de ce mémoire, merci, Camille, pour m’avoir traité avec autant de respect, dans mes choix et, disons-le, dans mon rythme de travail! Merci pour ta grande intelligence et ta rigueur proverbiale, qui ont poussé ma réflexion au-delà de ce qu’indiquent les conclusions de cette recherche. Merci d’avoir su me parler en élève quand il s’agissait d’apprendre et de comprendre. Mais pour tout le reste, merci de m’avoir parlé comme à un égal.

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En terminant, il me faut remercier grandement le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec (MELS) et la Faculté des sciences infirmières de l’Université Laval pour m’avoir attribué une bourse qui m’a permis de me consacrer à mes études et mes recherches pendant un an.

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INTRODUCTION

Dans l’état actuel des connaissances, il n’existe pas de données suffisamment valides pour permettre de réduire la discordance entre, d’une part, les besoins exprimés par les patients en regard de l’impact sur leur sexualité de l’épisode de santé / maladie qu’ils vivent, et, d’autre part, les soins dispensés par les infirmières. Ainsi, bien que les effets des différents épisodes de santé / maladie sur la sexualité soient connus; bien que les patients aient exprimés, via plusieurs études, leurs besoins qu’une infirmière ou un professionnel de la santé initie avec eux un enseignement à propos de la sexualité; et bien que les infirmières adhèrent de fait à une conception du rôle infirmier dans lequel l’enseignement à propos de la sexualité trouve sa place légitime, la discordance entre les besoins des patients et les soins prodigués demeure.

Plusieurs études ont tenté de cibler les causes de cette situation. Peu d’entre elles, cependant, ont pu tirer des conclusions suffisamment probantes pour guider l’élaboration d’interventions efficaces visant à favoriser l’adoption, par les infirmières, du comportement d’« initier, auprès d’un patient, un enseignement à propos de la sexualité ». En effet, selon Kok, van den Borne, et Mullen (1997), l’identification préalable des déterminants de l’adoption du comportement est essentielle à l’élaboration d’une intervention efficace. Par ailleurs, la revue de littérature effectuée montre qu’à ce jour, aucune étude n’a mesuré l’impact d’interventions déjà en place visant l’adoption de ce comportement par des infirmières.

Afin d’offrir aux infirmières en formation les outils nécessaires à la dispensation de soins correspondant aux besoins des patients, cette recherche a pour but d’identifier, chez des étudiantes en sciences infirmières, dans la cadre de la théorie du comportement planifié (TCP) d’Ajzen (1991), les déterminants de l’intention d’initier, auprès d’un patient, un enseignement à propos de la sexualité. Les résultats de la recherche permettront de guider l’élaboration d’interventions visant l’adoption du comportement à l’étude.

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Chapitre 1 : PROBLÉMATIQUE

1.1. L’impact des épisodes de santé / maladie sur la sexualité

La fonction sexuelle étant tributaire des systèmes vasculaires, endocrinien et neurologique, de même que d’une multitude de facteurs psychologiques (Ho & Fernandez, 2006), l’ensemble des épisodes de santé / maladie que traverse une personne dans sa vie, de même que les traitements ou interventions qui y sont associés, peuvent avoir un impact sur sa sexualité (Odey, 2009; Guthrie, 1999). De façon générale, ces impacts peuvent être d’ordres biologique, psychologique (ex. : perception de soi et des autres), social, émotionnel, ou spirituel (Odey, 2009), et toucher tant la personne concernée que ses partenaires sexuels.

Certains de ces épisodes font partie de l’évolution normale d’une personne. L’adolescence, par exemple, est la période où se développe la maturité sexuelle. Lors de cette transition, les adolescents peuvent avoir des considérations importantes à l’égard de leur apparence, considérations qui peuvent être amplifiées par une maladie (Rana, Kanik, Özcan & Yuzer, 2007). Selon Halvorsen et al. (2010), le fait de souffrir d’acné sévère serait même corrélé avec le fait de ne pas avoir eu de relation sexuelle à l’âge de 18-19 ans. La grossesse et la parentalité peuvent aussi avoir des modifications quant à l’intérêt pour la sexualité, aux fonctions sexuelles et aux émotions reliées à la sexualité, comme l’ont montré Alteneder et Hartzell (1997). Selon ces auteurs, ces modifications peuvent entraîner, chez les deux membres du couple, du stress et de l’anxiété. Le vieillissement est également une étape de la vie où la sexualité se transforme. En interrogeant 1455 hommes et 1550 femmes âgés de 57 à 85 ans, Lindau et al. (2007) ont montré que plus de la moitié des répondants (hommes et femmes confondus) avaient au moins une préoccupation en lien avec la sexualité, tandis qu’un tiers en avaient au moins deux. Ces préoccupations concernaient, chez les hommes, la difficulté à obtenir et à maintenir une érection, la perte d’intérêt pour la sexualité, l’éjaculation précoce, l’anxiété de performance et l’incapacité à atteindre l’orgasme. Chez les femmes, les préoccupations étaient la perte d’intérêt pour la sexualité, les troubles de la lubrification vaginale, l’incapacité à atteindre l’orgasme, l’absence de plaisir sexuel et la douleur.

Du point de vue de la santé publique, d’autres épisodes de santé / maladie ayant un impact sur la sexualité sont directement en liens avec des problématiques d’ordre sexuel. À ce titre, nommons par exemple l’augmentation de l’incidence des infections transmises sexuellement et par le sang (ITSS) au Québec (ministère de la Santé et des Services Sociaux [MSSS], 2010) et dans le monde en général (Magnan & Norris, 2008).

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Dans un autre ordre d’idées, un grand nombre d’épisodes de santé / maladie ayant un impact sur la sexualité sont liés à différentes pathologies, de même qu’aux traitements qui y sont associés. Selon Odey (2009), par exemple, une chirurgie colorectale, qu’elle implique ou non la mise en place d’une stomie, peut entraîner les conséquences suivantes de façon temporaire ou permanente: une dysfonction sexuelle, un impact sur l’estime de soi, sur le concept de soi, sur l’attrait sexuel et sur l’intimité (en lien avec l’odeur, l’apparence ou le décollement de la stomie). Odey ajoute que ce type de chirurgie peut entraîner, chez la femme, de la sécheresse vaginale et de la dyspareunie (résultant de cicatrices intra vaginales), et, chez l’homme, de l’impuissance ou des troubles de l’érection (résultant des dommages aux nerfs qui contrôlent l’éjaculation et l’érection).

À propos du cancer, Stilos, Doyle et Daines (2008) indiquent que la dysfonction sexuelle affecte 50% des survivants de cancers du sein, de cancers gynécologiques ou d’autres formes de cancers. Il s’agit de la complication à long terme la plus fréquente des traitements de cette maladie, ce qui fait de la sexualité une préoccupation tout aussi légitime que celles qui concernent les autres aspects de la vie, selon ce qu’indiquent les personnes touchées par cette maladie. Plus précisément, dans le cas des cancers du sein ou des cancers gynécologiques, la chimiothérapie et la radiothérapie peuvent altérer ou limiter l’expression de la sexualité en diminuant la libido, en causant de la dyspareunie, et en entravant l’atteinte de l’orgasme. Dans le cas du cancer de la prostate, la prostatectomie radicale peut entraîner la dysfonction érectile, l’incontinence urinaire et le raccourcissement du pénis dans 68 à 71% des cas (Yu Ko, Degner, Hack & Schroeder, 2010).

Les troubles psychiatriques peuvent aussi avoir des liens important avec la sexualité des personnes atteintes, et ce, que les problématiques d’ordre sexuel soit antérieures, concomitantes, secondaires ou même causales de la maladie mentale (Cort, Attenborough & Watson, 2001). À titre d’exemple, selon McKay, Gallop, Austin, Bayer & Peternelj-Taylor (1997), l’abus sexuel serait lié à l’occurrence des troubles psychiatriques, aux résultats de soins chez les patients ayant une problématique psychiatrique, à la consommation d’alcool et de drogue, au suicide et à l’automutilation. Par ailleurs, selon Cort et al. (2001), de même que selon Saunamäki, Andersson et Engström (2010), l’ensemble des classes de médicaments psychotropes peuvent avoir un impact sur la fonction sexuelle, ce qui peut affecter la compliance au traitement.

Finalement, Özdemir et Akdemir (2008) indiquent que la reprise des activités sexuelles après un infarctus du myocarde est une préoccupation majeure des patients, surtout en ce qui a trait à la fréquence des activités sexuelles, à l’intérêt pour la sexualité, à la satisfaction et à la performance sexuelle. Par ailleurs, l’augmentation du rythme cardiaque et du rythme respiratoire, de même que la transpiration, qui sont des signes normaux de l’excitation sexuelle, peuvent être confondus avec les symptômes de l’infarctus : la confusion possible entre les signes normaux de l’excitation sexuelle et les signes avant-coureurs de l’infarctus

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5 peut causer de l’anxiété chez ces personnes, de mêmes que chez leurs partenaires sexuels, et ce même si la survenue d’un infarctus après une relation sexuelle demeure extrêmement rare.

1.1. Les besoins d’informations exprimés par les patients à

l’égard de l’impact de l’épisode de santé / maladie sur leur

sexualité

En dehors du fait que les impacts de différents épisodes de santé / maladie sur la sexualité sont documentés, ce sont les personnes touchées elles-mêmes qui, via différentes études, demandent aux professionnels de la santé, notamment les infirmières, d’aborder ce sujet avec eux.

À titre d’exemple, la revue de littérature faite par Gamel, Davis et Hengeveld (1993) indique que les patients estiment qu’il est approprié, pour une infirmière, d’aborder avec eux la question de l’impact de leur épisode de santé / maladie sur leur sexualité ; elle indique également que les patients préfèrent que ce soit l’infirmière qui initie la discussion sur ce point.

Gott, Galena, Hinchliff et Elford (2004) remarquent que la littérature existante sur le sujet cible rarement la pratique spécifiquement infirmière; ils nous réfèrent donc à des études qui concernent la pratique médicale en lien avec la sexualité. À titre d’exemple, ils réfèrent le lecteur à l’étude de Read, King et Watson (1997), qui indique que, sur les 170 personnes qu’ils ont interrogées, 35% des hommes et 42% des femmes vivaient une forme de dysfonction sexuelle; et 70% estimaient que le médecin est une personne appropriée pour parler de ce sujet. Cependant, c’est seulement chez 2% de ces personnes qu’une note médicale avait été ajoutée au dossier, indiquant une problématique d’ordre sexuel. Dans une revue de littérature, Waterhouse (1996) rapporte des résultats concordants selon lesquels les patients, qu’ils soient apparemment en bonne santé, qu’ils présentent une problématique de santé mineure, ou qu’ils soient suivi pour un problème de santé plus important, ont des préoccupations à l’égard de l’impact de leur situation de santé / maladie sur leur sexualité, et souhaitent que le professionnel de la santé qu’ils consultent initie auprès d’eux une discussion à ce sujet.

Plus près de chez nous, la Société des Obstétriciens et Gynécologues du Canada [SOGC] (2010) a compilé différentes études à propos des besoins d’éducation à la sexualité tels que perçus par des jeunes dans les écoles secondaires du Canada. Pour la majorité de ceux-ci, l’école demeure la première source d’information sur la santé sexuelle, contexte dans lequel les infirmières jouent actuellement un rôle de premier plan. Les jeunes interrogés demandent à ce que l’éducation à la santé sexuelle soit enseignée à l’école secondaire, et qu’elle aborde prioritairement le sujet des relations saines, du VIH/SIDA et du plaisir sexuel.

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Waterhouse et Metcalfe (1991) indiquent même que 92% des personnes en bonne santé qu’elles ont interrogées pensent que les infirmières devraient parler de sexualité avec leurs patients. Cependant, de l’aveu même des auteures, ces résultats doivent être utilisés avec une grande prudence, l’étude comportant de grandes failles méthodologiques.

De la sorte, il est établi scientifiquement que, d’une part, les personnes qui traversent un épisode de santé / maladie peuvent vivre des perturbations dans leur vie sexuelle. D’autre part, ces personnes ressentent le besoin d’obtenir de l’information sur ces éventuelles perturbations, ou de parler de leurs préoccupations à l’égard de la sexualité. Aussi, bien que la sexualité ne soit pas une préoccupation pour tous les patients, tous devraient se voir offrir la possibilité de parler de ce qu’ils vivent en lien avec cette dimension de la vie humaine, dans le contexte de l’épisode de santé / maladie en cours (Guthrie, 1999). À ce titre, Gamel, Hengeveld, Davis et Van Der Tweel (1995) insistent sur la position privilégiée de l’infirmière dans l’épisode de santé maladie (soins d’hygiène, soins personnels et support émotionnel) pour aborder le sujet de la sexualité avec les patients.

1.2. Le rôle infirmier en lien avec la sexualité, selon les théories,

les associations d'infirmières, et les infirmières elles-mêmes

Une grande part de la littérature consultée insiste sur le fait qu’une perspective de soins qui se prétend holiste doit inclure l’aspect de la sexualité dans les soins dispensés, et ce, afin de mieux comprendre les patients (leurs attentes, leur vécu ainsi que leurs choix en lien avec leur santé), et de leur permettre de vivre moins d’incertitude en lien avec l’épisode de santé / maladie (Saunamäki, et al., 2010; Kong, Wu et Loke, 2009; Odey, 2009; Stilos et al., 2008; Tsai, 2004; Cort et al., 2001; Maughan & Clarke, 2001; Duldt & Pokorny, 1999; Alteneder & Hartzell, 1997; Hayter, 1996).

Il est également à noter que la plupart des théories infirmières reconnaissent, du moins implicitement, la pertinence d’aborder le thème de la sexualité avec les personnes soignées, et ce, même si leurs interprétations des concepts centraux de la discipline varient. En effet, que cette « personne » soignée soit décrite comme un tout égal ou supérieur à la somme de ses parties, l’aspect « sexualité » ne peut en être logiquement exclu. Quant au « soin » (concept défini comme une intervention dont la nature peut varier selon les auteurs), il est généralement dirigé vers le but d’atteindre ou de maintenir la « santé » (concept dont la définition varie là encore, allant de l’absence de maladie à une expérience ou une valeur unique à chaque être humain) (Kérouac, Pépin, Ducharme & Major, 2003). Toutefois, quelles que soient les définitions retenues pour ces concepts, par la reconnaissance partagée que le soin infirmier a pour but d’intervenir dans le contexte d’un épisode de santé / maladie auprès d’une personne, les théories infirmières légitiment l’intérêt

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7 disciplinaire face au rôle infirmier en ce qui a trait à la sexualité des personnes soignées, celle-ci faisant partie intégrante de leur vie.

À titre indicatif, Dorothy Johnson a abordé de façon plus explicite le thème de la sexualité à l’intérieur de son modèle conceptuel (le Behavioral System Model). Elle y décrit la personne comme un système comportemental (composé des sept sous-systèmes interdépendants que sont l’attachement-affiliation, l’ingestion, l’élimination, la protection-agression, l’accomplissement, la dépendance et la sexualité) interagissant avec l’environnement suivant certains patterns. Face à des stresseurs, la personne peut avoir besoin de l’aide de l’infirmière pour réguler, ajuster ou maintenir l’équilibre des chacun des sous-systèmes, ou encore du système entier. Ainsi, le soin y est décrit comme un art et une science qui vise la restauration, et le maintien de l’équilibre dynamique du système comportemental à un degré le plus élevé possible. En ce qui a trait au sous-système sexuel dans le modèle de D. Johnson, il a deux fonctions (la procréation et le plaisir), et est impliqué dans le développement de l’identité sexuelle et des comportements liés au genre (Johnson, 1990). Dans cette perspective, le rôle de l’infirmière ne peut être actualisé si le thème de la sexualité n’est pas abordé avec les personnes soignées.

Selon Gamel et al. (1993), une grande quantité d’associations reconnaissent par ailleurs que la sexualité est une préoccupation infirmière (American Nurses’ Association, American Association of Neuroscience Nurses, Oncology Nursing Society, Association of Rehabilitation Nurses, Nurses Association of the American College of Obstetricians and Gynaecologists). En 2006, l’International Society for Sexuality and Cancer organisait une conférence dont le titre était « Onco-sexologie : une nouvelle discipline? », conférence au cours de laquelle le fait que l’on pouvait très bien soigner la fonction sexuelle sans parler de sexualité a justement été soulevé (Giami, Moreau & Moulin, 2007).

Finalement, d’un point de vue plus pragmatique, ce sont les infirmières elles-mêmes qui, dans un grand nombre d’études, reconnaissent qu’il fait partie de leur rôle de parler de sexualité avec leurs patients. Quatre-vingt-onze pour cent des infirmières interrogées par Wilson et Williams (1988) pensent que la sexualité devrait être une composante de routine des soins infirmiers en oncologie. Des résultats comparables ont par la suite été obtenus dans d’autres champs de pratique infirmière, notamment par Saunamäki et al. (2010) auprès d’infirmières de départements de médecine et de chirurgie, par Magnan et Norris (2008) auprès d’étudiantes en sciences infirmières, par McKay et al. (1997) auprès d’infirmières œuvrant en psychiatrie, par Rana et al. (2007) auprès d’infirmières en pédiatrie, ainsi que par Matocha et Waterhouse (1993) (secteur d’activité infirmière non-précisé). Aussi, Maughan et Clarke (2001) ont déjà montré l’efficacité d’une intervention infirmière en lien avec la sexualité. Dans leur étude, les femmes qui avaient subi une chirurgie gynécologique en raison d’un cancer, et qui avaient été rencontrées à quatre reprises par une infirmière spécialisée qui

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abordait avec elles le thème de la sexualité, montraient une différence significative par rapport aux femmes du groupe contrôle à l’égard de la santé en général, des troubles du sommeil, des fonctionnements cognitif, physique et sexuel, de l’appétit et de la douleur. Les femmes issues du groupe contrôle n’avaient quant à elles reçu que les soins usuels, à savoir, un enseignement préopératoire et une référence médicale, au besoin, si un problème de nature sexuel était décelé.

1.3. La discordance entre les soins attendus par les personnes,

et les soins prodigués par les infirmières

Malgré l’évidence scientifique en ce qui a trait aux conséquences des différents épisodes de santé / maladie que peut vivre une personne sur sa sexualité; malgré les demandes claires des patients d’obtenir de l’information sur ce sujet et surtout la demande que cette discussion soit initiée par les infirmières; malgré la reconnaissance par les théories de soins infirmiers, par différentes associations infirmières, par la littérature de plus en plus abondante sur le sujet, de même que par les infirmières elles-mêmes que les soins en lien avec la santé sexuelle font partie du rôle infirmier; il demeure que, dans les faits, les infirmières n’abordent que peu, et le plus souvent pas du tout, ce sujet avec leurs patients (Saunamäki et al., 2010; Özdemir & Akdemir, 2008; Rana et al. 2007; Magnan & Reynolds, 2006; Gamel et al., 1993; Matocha & Waterhouse, 1993; Wilson & Williams, 1988).

Différents auteurs apportent des précisions ou des nuances à cet état de fait. Brêtas, Ohara et Querino (2008) indiquent que lorsque la sexualité est abordée avec les patients, c’est toujours dans un cadre bien précis : la biologie, le planning familial ou les ITSS. Kong et al. (2009) précisent que l’éducation à la sexualité chez les jeunes est « au mieux inadéquate, au pire inexistante ». Webb (1988) qualifie plutôt l’enseignement général à propos de la sexualité par les infirmières qu’il a interrogées comme étant « un fragment d’informations vagues, mensongères et inexactes ». Özdemir et Akdemir (2008) indiquent qu’au-delà des infirmières elles-mêmes, ce sont les programmes de formation en soins infirmiers qui n’abordent pas le thème de la sexualité.

1.4. Les conséquences de cette discordance

Le fait de ne pas aborder le sujet de la sexualité avec les patients n’est pas sans conséquences. La plus importante de celles-ci est le maintien d’une situation où la santé sexuelle est sous-optimale. Rappelons que l’Organisation Mondiale de la Santé [OMS] (2013) définit la santé sexuelle comme

un état de bien-être physique, émotionnel, mental et social en relation avec la sexualité, et non pas simplement l’absence de maladies, de dysfonctionnements ou d’infirmités. [Elle] requiert une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que la

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9 possibilité d’avoir des expériences sexuelles agréables et sûres, sans contrainte, discrimination et violence.

Rana et al. (2007) précisent que le fait de toucher un adolescent (dans le cadre de la dispensation de soins) sans lui demander sa permission et/ou sans lui donner d’informations sur la procédure peut l’atteindre dans son estime de lui-même, et conséquemment, dans sa sexualité.

Hardman, Jones, Scott et Stevens (1998) indiquent que les infirmières qui interviennent auprès de personnes ayant été victimes d’abus à caractère sexuel ont souvent des attitudes inappropriées à ces situations, potentiellement dommageables pour les victimes (ex. : tendance à blâmer quelqu’un d’autre que l’agresseur, comme la société en général, la famille, voire même la victime elle-même). Irwin (1997) va dans le même sens et précise que l’individualisme, le fait de blâmer les mauvaises personnes pour les mauvaises raisons (ex. : personnes qui ont des comportements à risque pour leur santé sexuelle), ainsi que la médicalisation de la sexualité contribuent à des activités de promotion de la santé sexuelle inefficaces, voire dommageables pour certaines personnes. Röndahl (2009) soulève quant à lui l’impact de l’homophobie de certaines infirmières sur la santé des personnes homosexuelles et leurs conjoint(e)s: peur de ne pas recevoir les soins adéquats, anxiété, inconfort, insécurité, isolement, négligence. Selon l’auteur, tout cela entraînerait un délai dans la recherche de soins par ces personnes, ce qui pourrait avoir d’autres conséquences importantes sur leur santé.

D’autres auteurs mettent en lumière les conséquences positives du fait d’initier cet enseignement avec une personne. En effet, selon Lewis et Bor (1994), le fait d’initier, avec les patients, une discussion à propos de la sexualité, permet de leur envoyer le message que toutes leurs préoccupations, quelles qu’elles soient, seront abordées, lors de cette consultation ou lors d’une consultation ultérieure. Cela permet également de mettre en pratique d’autres rôles du professionnel de la santé comme la prévention et l’éducation. Toujours selon Lewis et Bor, en initiant une discussion à propos de la sexualité, le professionnel de la santé peut aussi détecter des problématiques autres que celles pour laquelle la personne avait initialement requis des soins de santé. Tsai (2004) ajoute que le fait d’initier une discussion à propos de la sexualité permet à l’infirmière d’être un modèle de rôle pour le patient, qui peut alors apprendre que ce sujet peut être abordé sans honte ou culpabilité.

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Chapitre 2 : RECENSION DES ÉCRITS

Devant l’évidente discordance entre les soins attendus par les patients (en lien avec l’impact de leur situation de santé / maladie sur leur sexualité) et les soins prodigués par les infirmières, une intervention visant à favoriser, chez ces dernières, l’initiation d’un enseignement à propos de la sexualité s’impose. Une recherche de documentation scientifique dans les banques de données CINAHL, Current Contents, Google Scholar,

PubMed, Psycinfo et Web of Sciences a été effectuée (dernière révision à l’automne 2012), afin de repérer, en

premier lieu, des études susceptibles d’expliquer les raisons possibles de cette discordance, et, en second lieu, des études menées sur des interventions qui visent à réduire cette discordance. Parmi toutes les études recensées, un volume considérable de littérature était disponible en ce qui concerne le lien entre un épisode de santé / maladie et la sexualité. Toutefois, un nombre plus restreint d’études s’intéressait à la pratique infirmière en lien avec la sexualité, et, de ce nombre, peu étaient suffisamment fiables pour permettre de cibler l’objet d’intérêt de cette étude, à savoir, les déterminants de l’intention comportementale d’aborder, avec un patient, le thème de la sexualité.

Ces études cherchent à mieux comprendre pourquoi, malgré l’abondante documentation scientifique soutenant la pertinence d’aborder le sujet de la sexualité avec les patients, les infirmières n’initient toujours pas de discussion à ce propos. La grande majorité de ces études tentent de mesurer, chez des infirmières, différents construits, tels l’attitude, la perception d’obstacles, ou encore des croyances reliées de près ou de loin à la sexualité, et à corréler ces scores entre eux et / ou avec différentes données sociodémographiques. Bien qu’ayant jeté un éclairage sur une multitude de variables (sociodémographiques, psychosociales ou environnementales), la portée de cet éclairage doit être réévaluée et mise en perspective.

En effet, dans l’ensemble de la littérature consultée, l’absence de cadre conceptuel permettant de définir uniformément les construits mesurés (ex. : l’attitude, le confort, etc.), de les distinguer entre eux et de comprendre la nature des relations les unissant, ainsi que la présence de nombreux biais (ex. : biais de sélection, biais de désirabilité sociale) et le nombre limité de répondants compromettent la validité des données obtenues. En outre, la majorité des études ne portaient pas sur le comportement ou l’intention comportementale, chez l’infirmière, d’initier un enseignement à propos de la sexualité, mais bien sur la perception des infirmières à propos de différents aspects de la sexualité elle-même (ex. : l’homosexualité, le VIH/SIDA, la masturbation, l’expression de la sexualité chez les personnes âgées ou vivant avec des problématiques de santé mentale, la contraception, etc.). Considérant le faible nombre d’études directement liées à la problématique soulevée dans ce mémoire, les résultats de celles-ci seront tout de même présentés, malgré les limitations dont nous venons de faire état. Notre présentation suivra l’ordre chronologique de la

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publication des études sélectionnées. Cette présentation nous apparaît comme étant la plus logique et la seule possible, attendu que chacune des études procède à un assemblage spécifique de plusieurs variables (sociodémographiques et / ou psychosociales et / ou contextuelles), et que celles-ci sont mises en lien avec une grande variété de construits relatifs à la sexualité (attitude envers la sexualité, comportements professionnels en lien avec la sexualité, confort avec le thème de la sexualité, etc.). Par ailleurs, le lecteur peut tenir pour acquis que, sauf avis contraire, les auteurs de ces études n’ont pas utilisé de cadre théorique et n’ont pas défini les construits à l’étude. Toujours sauf avis contraire, les études présentées n’ont pas fait de lien entre les mesures prises et l’occurrence du comportement à l’étude, que ce soit via une mesure « objective » (ex. : par observation du chercheur), via une mesure auto-rapportée, ou encore via une mesure de l’intention comportementale. Toutefois, il importe de garder en tête que, malgré l’ensemble des limitations de chacune de ces études, toutes présentent des résultats qui semblent à la fois logiques et concordants, comme nous tenterons de le montrer.

Payne (1976), via les deux sous-échelles du SKAT (Sexual Knowledge and Attitude Test) a mesuré les connaissances ainsi que les attitudes à l’égard de quatre aspects de la sexualité (nommément les relations hétérosexuelles, la masturbation, l’avortement, les mythes à l’égard de la sexualité), chez des infirmières travaillant sur des unités de planning familial et des étudiantes en sciences infirmières, et ce, en lien avec des variables sociodémographiques et le score au PSRI (Professionnal Sexual Role Inventory). Le but de l’étude était de déduire, en fonction des données obtenues, le confort des répondantes à parler de sexualité avec leurs patients. L’auteur postulait que, pour l’infirmière, le fait d’être consciente de ses attitudes par rapport à la sexualité favorisait la communication avec le patient à ce sujet. De façon statistiquement significative, les étudiantes ont obtenu des résultats supérieurs aux infirmières de planning familial, et ce, à toutes les sous-échelles (à l’exception des mythes à l’égard de la sexualité), indiquant une attitude plus libérale à l’égard de la sexualité. Puisque les deux échantillons à l’étude étaient significativement différents, l’auteur a analysé les scores séparément pour les deux groupes. Il en conclut que, de façon significative, les infirmières de planning familial, les infirmières de moins de 40 ans, catholiques mais se disant non pratiquantes, vivant en milieux urbain et ayant un niveau d’éducation en sciences infirmières plus élevé ont une attitude plus favorable et plus de connaissances en rapport avec la sexualité que leurs vis-à-vis.

En utilisant aussi le SKAT et le PSRI, de même que l’AWS (Attitude Towards Women Scale), Webb (1988) a mené une étude auprès d’infirmières, qu’il a divisées en deux groupes selon qu’elles travaillaient ou non en gynécologie. Cette étude a mis en évidence que les infirmières œuvrant en gynécologie avaient, de façon significative, un score plus élevé au SKAT (section connaissances) et à l’AWS. Tout en constatant la faible moyenne obtenue au SKAT (section connaissances) pour l’ensemble des répondantes, l’auteur conclut que

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13 c’est d’abord sur cette variable que devraient être centrées les interventions destinées aux infirmières, et visant à favoriser chez celles-ci une attitude plus ouverte en lien avec la sexualité.

En utilisant le WWSS (Williams-Wilson Sexuality Survey), Wilson et Williams (1988) ont tenté de décrire les attitudes et les pratiques d’infirmières soignantes en oncologie. Plus de 92% des répondantes se disaient confortables pour parler de sexualité avec un patient, mais seulement si c’était ce dernier qui initiait la discussion, alors que 57.5% se disaient suffisamment confortables pour initier la discussion. Les auteurs ont également mesuré les comportements de l’infirmière (mesure auto-rapportée) en lien avec l’enseignement à propos de la sexualité : 89.5% des répondantes indiquaient que, dans les six derniers mois, elles avaient discuté de sexualité avec 10 patients ou moins. Un quart de ces infirmières disaient n’avoir jamais parlé de sexualité avec un patient dans toute leur carrière. Dans la section commentaires mise à la disposition des répondantes dans le questionnaire, le manque d’intimité sur les unités de soins, le manque de connaissances et l’inconfort étaient les obstacles le plus souvent rapportés à l’initiation d’un enseignement à propos de la sexualité. Selon les auteurs, de façon significative, 29% de la variance du comportement était expliqué par l’attitude (cette dernière étant mesurée par le score à l’ensemble du questionnaire), et un 2% supplémentaire était expliqué par le nombre d’années d’expériences et le niveau de scolarité.

La même année, Malloy et Herold (1988) ont identifié, chez 226 professionnels de la santé (médecins, infirmières, ergothérapeutes et physiothérapeutes), neuf prédicteurs de la probabilité que ces professionnels abordent le sujet de la sexualité avec leurs patients handicapés. Ces neufs prédicteurs étaient : le niveau de connaissance à propos de la sexualité, la perception de ce niveau de connaissance par le répondant, la participation antérieure à des ateliers de formation professionnelle à propos de la sexualité, la lecture de documentation à ce sujet, le niveau d’habileté de communication, la perception (pour le répondant) que la sexualité est importante, la perception (pour le répondant) qu’il est légitime pour un professionnel de la santé d’aborder ce sujet avec un patient, le niveau de confort avec sa propre sexualité, et finalement la perception (pour le répondant) qu’il est de sa responsabilité professionnelle d’aborder le sujet de la sexualité avec son patient. Dans le cas des infirmières interrogées pour cette étude, ces neufs prédicteurs se sont avérés corrélés de façon statistiquement significative avec la mesure auto-rapportée du comportement, interprétée par les auteurs comme la probabilité que le répondant aborde le sujet de la sexualité avec ses patients handicapés. Pour l’ensemble des professionnels interrogés, une analyse de régression multiple montre que ces neufs prédicteurs compteraient pour 53% de la variance de comportement.

Kautz, Dickey et Stevens (1990) ont tenté de comprendre pourquoi, malgré une politique d’établissement claire à ce sujet, les infirmières d’un hôpital américain n’initiaient pas de discussions à propos de la sexualité. Auprès d’infirmières de différentes unités (obstétriques, psychiatrie, soins intensifs, médecine / chirurgie,

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pédiatrie, bloc opératoire), ils ont mesuré la perception de barrières à l’initiation d’une discussion à propos de la sexualité, la priorisation dans les soins de l’aspect sexualité (par rapport aux aspects contrôle de la douleur,

activité physique, élimination et enseignement de départ), et, en utilisant des mises en situation, les

connaissances et la motivation de l’infirmière à intervenir à propos de la sexualité. Les principales barrières rapportées par les répondantes étaient : la perception que les autres infirmières ne parlent pas de sexualité avec leurs patients, la croyance qu’il n’y a pas de lien entre l’épisode de santé / maladie et la sexualité, la croyance que le patient est trop malade pour se préoccuper de la sexualité, et la crainte qu’une discussion au sujet de la sexualité puisse causer de l’anxiété chez le patient. De façon significative, les infirmières œuvrant dans les unités de soins intensifs, de médecine / chirurgie, en pédiatrie et dans salles d’opérations percevaient plus de barrières que celles œuvrant en obstétrique et en psychiatrie.

Afin de vérifier les résultats obtenus par Payne en 1976, Lewis et Bor (1994), ont utilisé le SKAT et 16 mises en situations visant à évaluer la pratique infirmière en lien avec la sexualité. Dans cette étude, la section

connaissances du SKAT était corrélée avec chacune des quatre sous-échelles de la section attitude du même

instrument (portant respectivement sur l’avortement, les relations hétérosexuelles, les mythes en lien avec la sexualité et la masturbation). Par contre, les auteurs n’ont décelé aucune relation significative entre l’une ou l’autre des sous-échelles du SKAT et la mesure, via les mises en situations, de la pratique infirmière. Seules deux autres relations significatives, d’intérêt pour l’étude en cours, se sont dégagées de cette étude. Premièrement, l’item mesurant l’habitude de questionner les patients à propos de la sexualité lors de leur admission sur l’unité était corrélé à l’item rapportant si l’infirmière avait déjà suivi une formation dans laquelle on lui avait indiqué d’agir de la sorte. Deuxièmement, les scores faibles à l’ensemble des sous-échelles (attitudes et connaissances) étaient corrélés avec le fait de pratiquer activement sa religion, quelle qu’elle soit.

Gamel et al. (1995) ont utilisé la théorie de l’action raisonnée (TAR) (Ajzen & Fishbein, 1980) pour examiner les déterminants du comportement d’aborder le thème de la sexualité avec des patients atteint de cancer, chez 104 infirmières. Les auteurs ont mesuré l’occurrence (auto-rapportée), les connaissances, le confort et l’attitude des répondantes à l’égard de 24 comportements professionnels en lien avec la sexualité. Ils ont également mesuré l’attitude des répondantes en lien avec la santé et la sexualité, la norme subjective, ainsi que la fréquence de la formation continue sur la sexualité. Des 24 actions étudiées, 20 n’étaient que rarement, voire jamais mises en pratique par les infirmières. Étonnament, les 24 comportements étaient toutefois considérés comme importants ou très importants pour la profession infirmière par l’ensemble des répondantes, et les infirmières avaient de surcroît une attitude favorable envers ceux-ci. Pour 13 des 24 comportements, les répondantes rapportaient un niveau suffisant de confort. Concernant la norme subjective, la perception (négative) des collègues par rapport à une infirmière qui initierait une discussion à propos de la sexualité semblait être une barrière importante, et ce, malgré le fait que la majorité des répondantes avaient la

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15 croyance que les patients s’attendaient à ce que l’infirmière initie la discussion. Le confort et les connaissances étaient toutefois les variables les plus fortement liées à la fréquence des 24 comportements professionnels envers la sexualité des patients; ils comptaient pour 37% de la variance de ceux-ci.

Pour sa part, Waterhouse (1996), en fonction de la revue de littérature effectuée à cette époque, a élaboré un questionnaire (le SSRNP, ou Survey on Sexuality Related Nursing Practice) portant sur huit variables en lien avec la pratique infirmière relative à la sexualité (évaluée par la mesure, auto-rapportée, de la fréquence de différents comportements infirmiers). Via des équations structurelles, l’auteur a observé que le type d’unité, la perception de l’attitude des collègues en lien avec le comportement, l’éducation continue, la confiance de l’infirmière en ses capacités, la perception que le fait de parler de sexualité est une responsabilité infirmière, l’habitude du comportement, la perception des attentes des patients et les valeurs de l’infirmière étaient responsables de 56% de la variance de la pratique infirmière en lien avec la sexualité. Ce modèle suggère donc que les stratégies susceptibles de résoudre la discordance entre les soins attendus et les soins dispensés en lien avec la sexualité se situeraient dans l’éducation continue spécialisée en fonction des besoins de chaque unité, cela favorisant la confiance en les capacités de l’infirmière, la perception d’une attitude positive des collègues, et l’établissement de modèles de rôles.

McKay et al. (1997) ont mené une étude visant à établir les qualités psychométriques du SACS (Sexual Abuse

Comfort Scale), une échelle mesurant le confort des infirmières à aborder le sujet de l’abus sexuel avec des

personnes vivant avec des problématiques de santé mentale. Les résultats obtenus montrent que, de façon significative, le confort et la compétence des infirmières à travailler avec des patients ayant été victimes d’abus à caractère sexuel sont associés aux niveaux d’éducation / formation infirmière, au genre (féminin), et au fait d’avoir été victime d’un abus à caractère sexuel. Par ailleurs, les infirmières ayant rapporté un niveau de compétence élevé pour aborder le sujet des abus sexuels, ainsi que celles rapportant une expérience antérieure de prestation de soins à une personne ayant été abusée sexuellement, avaient un score significativement plus bas au SACS, indiquant un plus grand confort à aborder le sujet des abus sexuels avec leurs patients.

Laschinger et Tresolini (1999) ont comparé le sentiment d’efficacité personnelle (construit issu de la théorie sociale cognitive [TSC] de Bandura [1986]) de 41 étudiantes en sciences infirmières (3e année) et de 60

étudiants en médecine (4e année) au regard de cinq activités de promotion de la santé : le tabagisme,

l’exercice physique, la nutrition, les ITSS et les traumatismes. Lorsque que considérée isolément, la différence entre les étudiantes en sciences infirmières et les étudiants en médecine n’était pas significative en ce qui a trait à la prévention des ITSS. Toutefois, de façon globale, c’est-à-dire en considérant les cinq domaines de prévention, les étudiantes en sciences infirmières avaient un sentiment d’efficacité personnelle

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16

significativement plus élevé que leurs vis-à-vis à l’égard de leurs connaissances et de leur compétence. Les auteurs expliquent cette différence par le fait que, par rapport aux étudiants en médecine, les étudiantes en sciences infirmières ont davantage rapporté l’exposition à des stratégies d’enseignement visant à augmenter le sentiment d’efficacité personnelle lors de leur formation. Ces stratégies étaient : l’apprentissage d’informations sur les risques reliés à ces comportements, l’apprentissage explicite de stratégies d’enseignements destinées aux patients, l’observation de modèles de rôles, la pratique des stratégies d’enseignement, le feedback quant à leur performance lors de ces simulations.

Postulant que les connaissances, les habiletés et l’attitude sont les trois conditions nécessaires pour bien intervenir auprès des patients en ce qui a trait à leur sexualité, McKelvey, Webb, Baldassar, Robinson et Riley (1999) ont examiné les connaissances et les attitudes d’étudiants en médecine et en sciences infirmières à l’égard de certains aspects « controversés » de la sexualité : la sexualité pré / extra maritale, la masturbation, l’homosexualité, la bisexualité, la contraception, l’avortement (qu’il soit thérapeutique ou non), et l’insémination artificielle pour les femmes sans conjoint. De façon générale, la fréquence élevée d’assistance à un service religieux (quelle que soit la religion), l’orientation politique de droite, un faible niveau de connaissances en lien avec la sexualité, de faibles revenus familiaux et un petit nombre de partenaires sexuels à vie étaient corrélés avec une attitude défavorable envers les huit aspects « controversé » de la sexualité. La fréquence d’assistance aux services religieux était la variable sociodémographique ayant l’impact le plus important sur l’ensemble des mesures attitudinales.

En utilisant le PESIS (Prejudicial Evaluation and Social Interaction Scale), Stewart (1999) a évalué, à différents moments de leur formation, les préjugés d’étudiantes en sciences infirmières à l’égard des personnes vivant avec le VIH (PVVIH), ainsi qu’envers les personnes homosexuelles. Des questions en lien avec quatre mises en situations, combinant l’orientation sexuelle du personnage (hétérosexuel ou homosexuel) et sa maladie (VIH ou leucémie), étaient soumises aux répondants. Les conclusions de l’étude montrent que, peu importe leur niveau de formation, les étudiantes interrogées ont significativement plus de préjugés envers les PVVIH qu’envers les personnes atteintes de leucémie, et croient que les PVVIH sont responsables de leur maladie, plus que celles qui sont atteintes de leucémie. Cependant, le PESIS mesurant également la motivation à interagir avec les personnes présentées dans les mises en situations, les préjugés rapportés n’avait pas d’impact sur l’intention comportementale des étudiantes, quel que soit leur niveau de scolarité, à soigner une PVVIH, qu’elle soit hétérosexuelle ou homosexuelle.

Hayter (2004) a comparé l’attitude d’infirmières en rapport avec l’offre de prophylaxie post-exposition (PPE) sexuelle au VIH dans deux contextes : une exposition au VIH dans un couple stable séro-discordant, et une exposition au VIH lors d’une aventure sans lendemain. Il observe des liens significatifs entre une expérience

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17 professionnelle antérieure en lien avec la PPE sexuelle au VIH, et une attitude plus favorable envers l’administration de la PPE, quelle qu’en soit la raison (couple séro-discordant ou aventure sans lendemain). Par ailleurs, Hayter observe des relations significatives entre une attitude plus conservatrice, à plus forte raison lorsqu’il s’agit d’une aventure d’un soir, et une orientation éthique, chez l’infirmière, soutenue par la croyance que d’offrir la PPE dans le contexte d’une relation sexuelle est un gaspillage des ressources et pourrait augmenter la prise de risques sexuels par les personnes.

Tableau 1: Croyances les plus endossées par les répondantes de l'étude de Tsaï (2004) (traduction libre) Catégorie d’item Item (% d’endossement)

Facilitateurs Pour savoir si l’histoire sexuelle du patient est liée à sa maladie (92.3%). Le patient a exprimé qu’il avait des problèmes de nature sexuelle (87.2%).

Je voudrais prévenir, pour mes collègues, un accident impliquant une aiguille souillée (78.8%).

Je voudrais prévenir, pour moi-même, un accident impliquant une aiguille souillée (81.3%).

Avoir développé mes habiletés de communication (81.0%).

Avoir développé mes connaissances de base à propos de la sexualité (80.5%). Barrières Les patients se sentent embarrassés et ne savent pas comment répondre aux

questions des infirmières (91.5%).

Les patients ne veulent pas parler de sexualité parce qu’ils sentent que ça n’est pas en lien avec leur situation de santé (81.6%).

Les patients dissimulent volontairement des informations (87.7%). Les patients refusent (76.7%).

Sentir qu’on n’est pas assez expérimenté pour résoudre le problème du patient (77.8%).

Peur de violer l’intimité du patient (77.5%).

Sentir que la relation infirmière-patient n’est pas assez bonne et que le patient ne voudra pas parler (77.5%).

Peur de causer de la confusion chez les patients (77.5%).

Manque de professionnels à qui on peut référer les patients (83.4%).

Manque de modèles de rôles avec qui on peut apprendre à parler de sexualité avec un patient (75.5%).

Tsaï (2004) a mesuré la perception de 391 infirmières issues de différents milieux de pratique à propos de l’impact de facilitateurs et de barrières sur l’initiation d’une discussion à propos de la sexualité avec un patient. Les facilitateurs (10 énoncés) consistaient en des conséquences perçues à l’adoption du comportement, ou encore en la présence d’un contexte favorable à l’initiation de la discussion. Quant aux barrières (26 énoncés), elles étaient de trois ordres, étant relatives soit à la perception qu’a l’infirmière du patient, soit à la perception que l’infirmière a d’elle-même, soit à la perception que l’infirmière a de son environnement de travail. Les conclusions de l’auteur indiquent que, de façon statistiquement significative, les infirmières ayant une formation universitaire perçoivent moins de barrières que leurs collègues moins scolarisées. Elles indiquent également que les infirmières ayant une expérience antérieure de collecte de données relative à la sexualité

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perçoivent plus de facilitateurs et moins de barrières que celles qui n’ont pas cette expérience. Par ailleurs, dans cette étude, chacun des énoncés présentés dans le Tableau 1 était endossé fortement ou très fortement par au moins 75% des répondantes. Dans des proportions moindres mais tout de même intéressantes, 16.4% des répondantes se seraient déjà fait dire par leur supérieur immédiat que la sexualité est le sujet le moins important des soins infirmiers, alors que 11.8% se seraient fait dire qu’il est tout simplement inapproprié de parler de ce sujet avec un patient. Pour 40.1% des répondantes, la peur d’une agression à caractère sexuel de la part d’un patient du sexe opposé était une barrière forte ou très forte.

Reynolds et Magnan (2005), ont élaboré, dans un processus collaboratif avec des infirmières en pratique avancée, le SABS (Sexual Attitudes and Beliefs Survey), un questionnaire de 12 items visant à examiner les attitudes et les croyances des infirmières en lien avec le rôle infirmier à propos de la sexualité des patients. Dans cette étude, la consistance interne (testée à deux reprise, pour des résultats de .72 et .85) de même que la fidélité test-retest, mesurée entre sept et dix jours après une première administration de l’instrument (r = .85,

p < .001) atteignent des niveaux satisfaisants. Par ailleurs, selon les auteurs, le SABS ne serait pas corrélé au

MCSDS (Marlowe-Crowne Social Desirability Scale), ce qui laisse comprendre que la validité de l’instrument n’est pas contaminée par le biais de désirabilité sociale. Cependant, en ce qui a trait à la validité de construit, les auteurs ont observé une corrélation statistiquement significative entre le SABS et la sous-échelle mythes

concernant la sexualité du SKAT élaboré par Payne (1976), et ont ainsi conclu que l’instrument mesurait

effectivement l’attitude des infirmières en lien avec la sexualité. Concernant l’application du questionnaire, les résultats montrent que le fait d’avoir déjà participé à un atelier sur la sexualité diminue significativement le score au SABS, indiquant, selon les auteurs, une perception plus faible des barrières à discuter du thème de la sexualité avec les patients. Cependant, à ce sujet, ils soulèvent un problème très pertinente, qui peut être appliquée à l’ensemble de la littérature concernant la relation des infirmières avec la sexualité: ils indiquent que les instruments disponibles ne permettent pas de déterminer si une infirmière est plus à l’aise à parler de sexualité parce qu’elle a suivi un atelier sur ce sujet dans le passé, ou si, inversement, elle a suivi cet atelier parce qu’elle était déjà à l’aise avec la sexualité. Les auteurs rapportent également que, dans l’ordre, la croyance que les patients ne s’attendent pas à ce que l’infirmière initie une discussion à propos de la sexualité, le manque de temps, le manque de confort, et le manque de confiance (pour l’infirmière) en ses capacités à parler de sexualité avec un patient étaient les items pour lesquels les infirmières reconnaissaient le plus grand impact (négatif) sur le fait de discuter du thème de la sexualité avec un patient. Toujours en 2005, Magnan, Reynolds et Galvin ont administré le même questionnaire (SABS) à 148 infirmières de différentes unités (médecine, chirurgie, oncologie) et ont confirmé les résultats obtenus précédemment, en ce qui a trait aux principales barrières, pour les infirmières, à la discussion à propos de la sexualité. Les scores moyens aux différents items ont permis de mettre en lumière, une fois de plus, les contradictions entre les différentes croyances des infirmières. En effet, alors que 72.3% des répondantes pensent qu’il est de la

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19 responsabilité de l’infirmière de donner au patient la possibilité ou la permission de parler de sexualité, 44.2% pensent que le sujet de la sexualité ne doit être abordé que si la discussion est initiée par le patient, et 78.3% croient que le patient ne s’attend pas à ce que l’infirmière aborde ce sujet. Les résultats illustrent aussi une autre contradiction : alors que 81.7% des répondantes estiment que la sexualité n’est pas un sujet trop privé pour être abordé par l’infirmière, 47.9% se sentent inconfortables de le faire. Par ailleurs, parmi les infirmières ayant participé à cette étude, celles qui avaient déjà suivi une formation à propos de la sexualité avaient un score SABS significativement plus bas que leurs vis-à-vis. Cette différence pouvait également être observée entre les infirmières de chirurgie d’une part, et les infirmières de médecine ou d’oncologie d’autre part. Magnan et Reynolds (2006) ont utilisé le même procédé pour comparer d’autres unités, ainsi que pour évaluer l’impact de déterminants sociodémographiques (âge, nombre d’années d’expérience comme infirmière, niveau de formation infirmière, formation en cours d’emploi à propos de la sexualité) sur le score au SABS. Ils ont montré que les infirmières de gynécologie et d’obstétrique avaient un score plus bas au SABS que leurs collègues d’oncologie et de réadaptation, et significativement plus bas que leurs collègues de chirurgie et de médecine. De façon générale, chez l’ensemble des répondantes, les barrières les plus importantes étaient encore la croyance que les patients ne souhaitent pas que l’infirmière initie une telle discussion, de même que le manque de temps. Le seul déterminant sociodémographique statistiquement lié au score au SABS était le fait d’avoir suivi une formation sur le thème de la sexualité : les répondantes ayant suivi ce genre de formation avaient un score significativement plus bas que leurs vis-à-vis, révélant, selon les auteurs, une attitude plus favorable (t299 = -2.92, p = .004). Auprès d’étudiantes en sciences infirmières (issues de chacune des quatre

années de formation universitaire où l’étude a pris place), Magnan et Norris (2008) ont tenté de voir si les barrières perçues par les infirmières étaient intrinsèques ou apparaissaient plutôt en cours de formation / en cours d’emploi. Ces résultats sont toutefois difficilement interprétables. En effet, pour plusieurs des items du SABS, des différences statistiquement significatives ont été observées entre les différentes années de formation infirmière. Mais comme ce sont, selon l’item, tantôt les plus jeunes et tantôt les plus anciennes qui endossent plus ou moins fortement un item, il n’a pas été possible pour les auteurs de conclure clairement que le score au SABS augmentait ou diminuait en cours de formation. Dans l’ensemble de ces articles, les auteurs avancent l’hypothèse que les infirmières n’initieraient pas de discussion à propos de la sexualité, et cela même si elles estiment que cela fait partie du rôle de l’infirmière, en soutenant que le patient ne souhaite pas ou ne s’attend pas à ce que l’infirmière ait ce comportement. Cette façon de voir la situation pourrait permettre aux infirmières de résoudre une « dissonance cognitive » entre leur perception du rôle et leur performance du rôle, tout en évitant l’embarras d’aborder un sujet sensible pour lequel elles disent manquer de temps et de connaissances, et face auquel elles se sentent inconfortables. Plus récemment, en utilisant toujours le SABS, Saunamäki et al. (2010) ont produit des résultats comparables : le fait d’avoir suivi une formation à propos de la sexualité diminue le score au SABS. À la différence de leurs prédécesseurs, ces auteurs ont de plus montré

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que le score à cet instrument était, dans cette étude, plus bas chez les infirmières plus âgées. Celles-ci rapportaient également une plus grande confiance à aborder ce sujet avec leurs patients. Il importe également de préciser que, dans l’ensemble de ces articles, aucune mesure de l’intention comportementale ou d’un comportement infirmier en lien avec la sexualité n’était rapportée.

Rana et al. (2007) ont examiné l’approche de 424 infirmières à propos de la sexualité de patients adolescents. La première partie du questionnaire (portant sur les connaissances et les perceptions des infirmières à propos de la sexualité des adolescents) indique que 83.2% des infirmières interrogées considèrent que le sujet de la sexualité devrait être abordé auprès des adolescents; 68.6% croient même que cela devrait être une routine dans la pratique des soins infirmiers auprès des adolescents, et 65.8% se disent à l’aise de parler de sexualité avec un patient adolescent si c’est ce dernier qui a initié la discussion. Toutefois, la seconde partie du questionnaire (portant sur les pratiques infirmières en lien avec la sexualité) révèle que 79.0% des infirmières n’ont jamais abordé le thème de la sexualité avec un patient adolescent lors d’un enseignement préopératoire, que 76.0% n’ont jamais discuté des préoccupations des patients à propos de la modification de leur apparence physique, et que 82.3% n’ont jamais discuté de sexualité avec un adolescent qui vivait effectivement des modifications dans cette sphère de sa vie en raison de son état de santé.

Özdemir et Akdemir (2008) ont mesuré, chez des infirmières en cardiologie, les connaissances et le comportement (auto-rapporté) d’initier un enseignement à propos de la sexualité avec un patient, et ont tenté d’établir des corrélations entre ces données et des variables sociodémographiques. Les auteurs indiquent que, sur les 108 infirmières interrogées, 99.4% disaient ne pas aborder le sujet de la sexualité avec leurs patients. Dans un test de connaissances sur la reprise des activités sexuelles après un infarctus du myocarde, seulement 0.09% de ces infirmières œuvrant en cardiologie ont obtenu au moins 9 bonnes réponses sur 15. Treize pour cent n’ont obtenu aucune bonne réponse.

Dans son évaluation du cours « Sexualité Humaine », un cours intensif d’une durée de 2 jours, obligatoire pour les étudiants en médecine de l’université de Sherbrooke, Raymond (2008) a montré que ce programme, qui n’a pas été élaboré sur des bases scientifiques aussi solides que le recommandent Kok et al. (1997), a un impact limité, à long terme, sur le comportement des médecins. Dans le cadre de la théorie du comportement planifié (TCP) d’Ajzen (1991), Raymond a comparé l’intention, l’utilité perçue, le confort et le sentiment d’efficacité personnelle chez des étudiants en médecine qui avaient suivi la formation et chez d’autres qui ne l’avaient pas encore suivi. Les variables étaient mesurées en lien avec quatre thèmes à aborder avec les patients dans le contexte de la pratique médicale : l’impact de la situation de santé / maladie sur la vie sexuelle, la gestion des risques en lien avec les comportements sexuels, la qualité de vie sexuelle, et les thématiques jugées taboues. Alors que les deux groupes étaient semblables avant la formation (selon l’âge, le

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Tableau 1: Croyances les plus endossées par les répondantes de l'étude de Tsaï (2004) (traduction libre)  Catégorie d’item  Item (% d’endossement)
Tableau 2: Caractéristiques sociodémographiques de l'échantillon
Tableau 4: Coefficients de corrélation entre les construits directs et indirects de la TCP (n=71)
Tableau 5: Saturation des items mesurant la norme morale et l'identité personnelle sur une solution à deux  facteurs
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