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La révélation selon Guy Lafon

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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La révélation selon Guy Lafon

Mémoire

Immaculée Nyembo Mamba

Maîtrise en Théologie

Maître ès arts(M.A)

Québec, Canada

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Résumé

La présente étude est consacrée à la pensée théologique de Guy Lafon sur la révélation. Qui est Guy Lafon ? Comment aborde-t-il la question de la révélation ? Quelle est sa pensée théologique ? S’est-il inscrit dans les traces de la conception traditionnelle chrétienne de la Révélation ? Que pouvons-nous retenir de sa pensée ? À la lumière de quelques-uns de ses principaux ouvrages, notre étude réfléchit à toutes ces interrogations. Une première étape nous permettra de dégager, grâce à la mise en contexte et en perspective de Guy Lafon, les principales articulations de sa vie intellectuelle. Avant de traiter de la question proprement dite, nous ferons, dans la seconde étape, une relecture de la conception de la Révélation dans la constitution dogmatique Dei Verbum relayée par la pensée théologique de Christoph Theobald et l’exhortation apostolique post-synodale

Verbum Domini de Benoît XVI. Cette transition permettra, dans une troisième étape,

d’aborder la question de la Révélation chez Guy Lafon, grâce à sa pensée théologique reposant essentiellement sur le concept d’entretien. Cette démarche permettra de découvrir que la pratique théologique sur la méditation et la lecture des textes bibliques donne une ouverture à penser la révélation chez Guy Lafon.

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Table des matières

Résumé ... iii

Table des matières ... v

Avant-Propos ... vii In mémoriam ... ix Introduction ... 1 L’objet du travail ... 3 La problématique... 3 La question de la recherche ... 4

Situation de la question de recherche ... 5

Les sources ... 6

Le plan du mémoire ... 7

Chapitre 1... 9

Guy Lafon : parcours bio-bibliographique ... 9

1. Parcours biographique de Guy Lafon ... 9

1.1 Formation scolaire et universitaire ... 10

1.2 Engagement académique ... 11

1.3 Activités ministérielles et sacerdotales... 13

2. L’œuvre de Guy Lafon ... 14

2.1 Avant sa carrière universitaire : 1955-1968 ... 15

2.2 Pendant sa carrière universitaire : 1968- ... 17

2.3 La période de sa retraite : de 1996 à nos jours ... 21

3. Influences... 23

4. Apport de la pensée de Guy Lafon ... 28

5. Conclusion ... 29

Chapitre 2... 31

Révélation, dialogue et Écriture ... 31

1. La révélation chrétienne dans la Constitution dogmatique Dei Verbum ... 32

1.1 La révélation chrétienne est dialogue ... 33

1.2 La révélation de Dieu est historique ... 35

2. La révélation chrétienne selon l’exhortation apostolique Verbum Domini ... 39

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2.2 La révélation de Dieu et l’expérience ecclésiale ... 45

2.3. La révélation de Dieu et l’ouverture missionnaire ... 47

3. La révélation chrétienne : Hypothèse de Christophe Theobald ... 48

3.1. La perspective culturelle de la révélation chrétienne ... 49

3.2. La révélation chrétienne dans l’expérience de la foi ... 51

4. Conclusion ... 53

Chapitre 3... 55

La révélation selon Guy Lafon ... 55

1. La théologie de l’entretien chez Guy Lafon ... 55

1.1 L’entretien est un champ auquel rien n’échappe ... 56

1.2 L’entretien est une forme transcendantale... 58

1.3 L’entretien est à la fois mort et vie, présence et absence ... 60

2. De la théologie de l’entretien à la révélation ... 62

2.1. La révélation de Dieu dans la dynamique de la communication... 63

2. 2 La révélation de Dieu et la lecture des Écritures ... 70

3. Conclusion ... 73

Conclusion générale ... 75

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Avant-Propos

Au terme de notre parcours, nous sommes pleine de reconnaissance envers Dieu à qui nous rendons grâce et qui nous a donné de mener à bien ce travail. Si cette étude a été rendue possible, c’est grâce à Monsieur François Nault, directeur de nos recherches. Je tiens à lui adresser mes sincères remerciements pour son écoute, sa disponibilité, sa rigueur et surtout ses encouragements. J’ai pu bénéficier de ses qualités tant intellectuelles qu’humaines. J’en suis très reconnaissante.

Mes remerciements s’en vont aussi et tout droit aux Messieurs Marc Pelchat et Gilles Routhier, respectivement doyen émérite et doyen de la Faculté de Théologie et des Sciences Religieuses de l’université Laval, ainsi qu’à tous les professeurs et personnels administratifs pour toute la formation tant scientifique, humaine que spirituelle dont j’ai été bénéficiaire.

Je ne saurai pas oublier mon papa Donatien Nyembo wa Nyembo, mes frères et sœurs, oncles, tantes qui n’ont cessé de m’encourager et me porter dans leurs cœurs et prières. Que chacun trouve, à travers ce travail, le signe de ma sympathie.

Que tous ceux et celles qui, d’une manière ou d’une autre, ont marqué mon histoire personnelle, trouvent dans le présent travail mes sentiments de profonde gratitude. Je pense particulièrement et spécialement à Élisabeth Dégalbert, Anne-Élisabeth de Bouvier, François Lecluse et à toutes leurs familles pour leurs conseils et soutiens ; sans oublier tous ceux dont leurs noms ne sont pas cités.

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Ma gratitude est exprimée aussi et d’une façon particulière à tous mes collègues de promotion, mes ami(e)s et connaissances avec qui j’ai cheminé jusqu’ici dans les jours de joie comme dans les jours de peine.

Immaculée NYEMBO MAMBA Août 2013

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In mémoriam

A toi, notre très chère mère, Bernardine KABEZYA KAHITE SULIA, rappelée auprès de Dieu le 14 Septembre 1999.

Toi qui as su semer en moi la sève de la recherche de Dieu, l’amour, l’ouverture à la contemplation et la louange de Dieu en Jésus.

Toi dont le regard silencieux et la discrétion de femme noire ont éveillée en moi la conscience responsable et le goût de la recherche.

À toi, ma jeune sœur Jacqueline NYEMBO KUNGWA, rappelée auprès de Dieu le 6 septembre 2008.

Je sais que vous jubilez toutes deux dans l’au-delà où vous plantez les bananiers pour mieux nous y accueillir.

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Introduction

La question de la révélation de Dieu a toujours été au cœur de nos réflexions. Plusieurs éléments cependant s’étaient bousculés, non seulement tout au long de notre parcours, mais aussi et surtout dans le choix du sujet de recherche. Ces éléments avaient légitimé les efforts consentis durant toute la période de nos recherches. De nombreuses interrogations s’étaient ainsi dégagées dont la principale portait sur la pertinence de la question de la révélation, étant donné les débats qu’elle a suscités dans l’histoire de l’Église au point de figurer parmi les grands thèmes traités aux deux conciles du Vatican. Ce sont ces interrogations qui nous avaient amenée à prendre l’option pour ce sujet intitulé la révélation selon Guy Lafon. Car, en effet, la révélation est un concept essentiel pour le fait religieux et spécialement pour le christianisme comme religion prophétique1. Il y a une révélation et plusieurs théologies de révélation ; plusieurs manières de comprendre ce concept de révélation et ce qu’elle est exactement. Autrement dit, il y a une diversité d’approches sur ce thème de révélation. Par où nous avions compris la valeur de différents concepts qui en découlent et qui parlent de cette notion de Révélation. Le théologien s’engage, à partir de sa foi, ce lieu d’intelligence qu’est la théologie, et de sa démarche croyante, à parler de la Révélation. Cette démarche revêt un caractère important et central dans l’étude de la religion, et renvoie à la question de la foi comprise comme une réponse de l’homme à l’appel de Dieu.

Partant de l’intérêt accordé à cette question de la révélation, sa conception dans la tradition de l’Église reste une référence pertinente. La constitution Dei Verbum du second concile du Vatican présente une nouvelle orientation et une ouverture de la conception de la révélation divine. Cet élément constituait l’une des raisons qui avaient motivé notre option pour ce sujet dans le sillage de Guy Lafon. Dans cette perspective choisie, l’enjeu était de chercher à comprendre si, d’une part, la pensée théologique de Guy Lafon passe

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par la conception de la révélation telle qu’elle est présentée par Vatican II et, d’autre part, de déterminer si l’aspect dialogique souligné au second concile du Vatican s’y retrouve, bien que Guy Lafon lui-même n’ait pas directement utilisé le concept de dialogue. Sa théologie qui repose sur le concept d’entretien permet de penser la révélation en tant que Dieu qui se communique à l’homme.

La constitution Dei verbum met plus d’accent sur l’Écriture Sainte. La redécouverte de la Parole de Dieu dans la vie de l’Église a aussi constitué l’objet de plusieurs études et réflexions théologiques. Certes, il est vrai que la pensée et la théologie de Guy Lafon ont constitué l’objet de nombreuses études, de différents articles et recensions2 dans les milieux de ses contemporains. Cependant, ses analyses sur la question de la révélation, dans leur dynamique de dialogue, dans le registre de lecture de l’Écriture Sainte n’ont pas encore été l’objet d’études à proprement parler. Autrement dit, l’originalité de notre étude est à situer au niveau de la manière avec laquelle Guy Lafon, avec un nouveau vocabulaire, s’inscrit dans la pensée de la révélation selon la vision du second concile du Vatican et cela en lien avec la lecture de l’Écriture Sainte. Et c’est à ce niveau que se situe aussi l’intérêt que nous avons accordé à ce sujet.

2 Nous avons retrouvé et rassemblé quelques travaux théologiques qui ont déjà été produits sur l’œuvre de

Guy Lafon. Indiquons tout d’abord le mémoire de licence qui fut réalisé en juin 1992 par Alfonso Colzani à la faculté de théologie de l’Italie septentrionale à Milan sous le thème « La théologie de l’altérité de Guy

Lafon. Entre réinterprétation sémiologique et théorie de la pratique » dont la version originale en italien

est « La teologia dell Õalterità di Guy Lafon. Fra ricomprensionesemiologica e pensierodellapratica. » Une thèse de doctorat en théologie dirigée par Joseph Caillot a été réalisée par un franciscain francophone et slovène, Mari Joze Osredkar, à l’Institut catholique de Paris en 2002, soutenue le 25 octobre de la même année dont l’intitulé de la thèse était: « Vivre avec ‘tout autre’. Penser le salut d’après les écrits de Guy

Lafon. » Ce sujet fera l’objet d’une recension qu’il publiera dans Bogoslovnivestnik, revue slovène de la

faculté de théologie de Ljubljana, numéro 2 de l’année 2003, de la page 193 à la page 216 en trois langues dont le français, l’anglais et le slovène. Nous disposons de la version française. Mari Joze Osredkar actuellement enseignant à la faculté de théologie de Ljubljana, est resté un disciple fidèle à la pensée théologique de Guy Lafon puisque dans la poursuite de son travail de relecture de l’œuvre de son maître à penser, il a rendu explicites les démarches de la théologie de Guy Lafon et a prolongé, dans ses travaux et publications, les lignes de force des écrits qu’il a analysés. Il publie un nouvel ouvrage de 165 pages intitulé : Il est important d’être ensemble : hommage à Guy Lafon, un penseur de l’entretien, Paris, Cerf, 2008.

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L’objet du travail

De la constitution dogmatique Dei Filius du concile Vatican I à la constitution dogmatique Dei Verbum du concile Vatican II sur la Révélation divine, les questions, toujours actuelles, en rapport avec la connaissance et la révélation de Dieu ont toujours suscité des réactions diversifiées et parfois controversées en particulier dans le catholicisme.

Ce travail veut traiter la même question de la révélation divine, mais selon l’interprétation qu’en a fait le français Guy Lafon. L’objet ou le contenu de notre étude n’est certes pas à confondre avec celui de la révélation proprement dite. Ce que nous voulons ou allons communiquer dans ce travail, à partir de l’interprétation que nous faisons de la manière avec laquelle Guy Lafon traite ou comprend la question de la révélation, c’est cela qui fera l’objet de nos recherches. Notre démarche s’inscrit dans un processus herméneutique, de relecture et de compréhension de l’approche théologique de Guy Lafon sur la révélation. C’est en définissant les paramètres de notre recherche (cadre temporel et les grandes thématiques) que nous allons nous orienter vers le cœur même de la problématique que nous soulevons dans les lignes qui suivent.

La problématique

Toutes les religions du monde n’accordent pas la même valeur à la révélation divine bien qu’elles en parlent. Certaines de ces religions se fondent sur une sagesse qui, selon elles, permet au croyant d’atteindre une connaissance de Dieu, et de parvenir à une pratique de la vie sainte par ses propres moyens, par ses efforts personnels, par sa réflexion, sa piété et son action. Ces religions accordent de l’importance à l’être humain qui doit découvrir, par lui-même, la voie du salut, à travers l’enseignement reçu de ses maîtres spirituels. Sa religion dépend essentiellement de lui et repose sur ce qu’il est et ce qu’il fait. C’est le cas de plusieurs de religions de l’antiquité et asiatiques.

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D’autres religions se fondent sur une révélation. Ainsi, les religions dites prophétiques se considèrent comme fondées sur une action de Dieu qui intervient dans la vie de l’homme, en se manifestant à lui et en lui délivrant des messages de promesse. Il s’agit notamment du judaïsme, du christianisme et de l’Islam dont Dieu est à la fois le révélateur, le révélé et la révélation elle-même. En tant que révélateur, Dieu est le seul sujet qui se révèle lui-même en allant vers l’homme. C’est lui qui prend l’initiative. La religion étant la voie à travers laquelle il va à la rencontre de l’homme. « Il a plu à Dieu dans sa bonté et sa sagesse de se révéler en personne et de faire connaître le mystère de sa volonté (cf. Ep. 1, 9) grâce auquel les hommes, par le Christ, le Verbe fait chair, accèdent dans l’Esprit Saint, auprès du Père et sont rendus participants de la nature divine (cf. Ep. 2, 18 ; 2 P 1, 4)3 ». Les êtres humains accueillent la révélation de Dieu mais ne la provoquent pas. Tout part de Dieu.

Par ailleurs, bien que ce soit Dieu qui a l’initiative, que c’est lui qui fait irruption dans la vie de l’homme, celui-ci n’est pas spectateur. L’accueil de la révélation non seulement lui donne part à la révélation divine, mais aussi remet continuellement en question ce concept de révélation. Car, Dieu ne cesse de se révéler, ce qui veut dire que l’homme, à son tour, est toujours dans ce mouvement d’accueil. Cette approche donne la possibilité de penser et de repenser la révélation divine dans la vie de l’Église et dans la vie de l’homme. Elle donne une ouverture à plusieurs questionnements sur la révélation elle-même, sur son contenu, voire sur la manière dont Dieu se révèle. Plusieurs orientations s’inscrivent dans la tâche de la relecture de la révélation de Dieu.

La question de la recherche

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5 Le second concile du Vatican parle de la révélation dans une perspective dialogique et historique, qui met l’accent sur la lecture de l’Écriture sainte. À la suite de la relecture de la constitution Dei Verbum à travers d’une part, l’Exhortation post-synodale Verbum

Domini de Benoît XVI et d’autre part les analyses théologiques de Christoph Theobald,

Guy Lafon s’inscrit-il, grâce de par sa pensée théologique reposant sur le concept d’entretien, dont la communication demeure le moteur, dans les mêmes rouages de la vision de la révélation retracée depuis le Concile Vatican II ? Autrement dit, à la lumière de la constitution dogmatique Dei verbum qui parle de la révélation dans sa dimension historique et de dialogue, en lien avec la lecture de l’Écriture, comment Guy Lafon s’inscrit-il dans cette vision conciliaire ? Quelle est sa conception de la révélation ? Comment parle-t-il de la révélation ? C’est à partir de ces concepts de communication, du langage et tout simplement de l’entretien que nous nous sommes posé toutes ces questions.

Situation de la question de recherche

C’est à la question que nous venons d’évoquer ci-dessus qu’est consacrée la présente étude que nous tenterons de répondre. Faisons remarquer que dans chaque domaine scientifique, il existe des concepts d’usage usuels qui sont non seulement incontournables mais aussi et surtout constituent de concepts centraux ou de base. Par exemple les concepts de liberté, de vertu, de justice, d’amour, d’âme, de la mort, etc. sont au cœur de nombreux débats dans le domaine philosophique. En sociologie nous rencontrons des concepts de travail, de pauvreté, ou encore celui de société. De même, en théologie fondamentale, la question de révélation comme d’ailleurs celle la foi et du sacré, etc., constitue la notion de base. Et cela malgré les différentes significations dans sa compréhension (comme pour la religion prophétique comme le christianisme, l’Islam et le judaïsme). Il s’agit d’un concept clé pour comprendre ce qu’il en est du phénomène religieux. L’idée de révélation est présente dans toutes les religions quelles qu’elles

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soient même si elle n’a pas la même portée. La théologie c’est la foi qui cherche à comprendre (Fides quarens intellectum), la foi en quête d’intelligence. La foi est la réponse à la révélation, la démarche qui accepte de voir, dans l’expérience, quelque chose de révélé.

Les sources

Afin de bien mener à bon terme l’étude dans laquelle nous nous sommes engagée sur la problématique de la révélation chez Guy Lafon, nous utiliserons principalement deux de ses principaux ouvrages ayant trait à notre sujet. Il s’agit notamment de son livre intitulé

Le Dieu commun4. C’est dans cet ouvrage qu’il analyse, de manière très approfondie, sa pensée théologique du concept-clé de l’entretien. Le second chapitre est consacré à la religion. Le deuxième livre porte le titre Croire, espérer, aimer5. C’est dans cet ouvrage que sont repris deux importants articles parus quelques années plus tôt dont « Christianisme et Révélation », en 1980, et « Communication et Révélation », en 1981. Ces deux textes ou articles ont occupé une place de choix dans notre étude car ils présentent toute l’orientation empruntée par Guy Lafon dans ses analyses et ses réflexions théologiques.

La perspective de la révélation dans sa dimension de dialogue en lien avec la lecture de l’Écriture a permis de déterminer les sources pour notre étude. C’est ainsi que pour cette raison nous nous sommes servie de la constitution dogmatique Dei Verbum, plus particulièrement le premier chapitre qui traite de la question de la révélation divine elle-même. Il s’agit d’un texte officiel de l’Église qui donne la conception de la révélation chrétienne avec insistance sur la lecture de l’Écriture Sainte.

4 Guy Lafon, Le Dieu commun, Paris, Seuil, 1982. 5 Guy Lafon, Croire, espérer, aimer, Paris, Cerf, 1983.

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7 Ensuite, nous avons choisi le texte de l’Exhortation post-synodale Verbum Domini de Benoît XVI publiée le 11 novembre 2010 qui faisait suite à l’assemblée générale du Synode des évêques sur la Parole de Dieu dans la vie et dans la mission de l’Église qui s’était tenue à Rome du 5 au 26 octobre 2008. C’est cet aspect important qui a motivé le choix apporté à ce texte. C’est entre autre une relecture de la constitution Dei verbum. Benoît XVI s’inscrit dans la redécouverte de la Parole de Dieu à la suite du Synode des évêques. Par rapport à notre étude, c’est l’insistance sur la lecture de l’Écriture Sainte qui a motivé le choix de ce texte magistériel. Aussi, l’un des théologiens contemporains, Christoph Theobald a fait une relecture de la constitution Dei Verbum. Sa prise de position et son ouverture culturelle dans l’approche de la révélation permet de comprendre la pensée de Guy Lafon sur la révélation.

Le plan du mémoire

Nous nous proposons de traiter la question en trois chapitres. Étant donné que notre travail de recherche repose sur la pensée théologique de Guy Lafon, nous avons trouvé logique de commencer, dans la première partie, par parler de l’auteur en question. Autrement dit, le premier chapitre présentera le parcours biographique et bibliographique de Guy Lafon. D’abord nous allons présenter l’essentiel de son itinéraire intellectuel, académique et sacerdotal. Ensuite, nous présenterons l’ensemble de ses œuvres en trois étapes, qui caractérisent les étapes de sa vie : avant, pendant et après sa carrière universitaire. La dernière étape du premier chapitre évoquera les influences dont Guy Lafon aurait bénéficié au cours de sa carrière intellectuelle. Il est question de le présenter en indiquant les grands évènements qui ont marqué son itinéraire intellectuel afin de comprendre son environnement et sa pensée théologique.

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Après cette mise en contexte, il nous a semblé important d’envisager un second chapitre qui serait consacré à la question de révélation à la lumière successivement de la constitution dogmatique Dei Verbum du second concile du Vatican, de l’exhortation post-synodale Verbum Domini de Benoît XVI et des analyses théologiques réalisées par Christoph Theobald sur la constitution Dei Verbum. Cette section nous permettra de dégager l’essentiel de la conception pré-conciliaire de la révélation et la nouvelle orientation qu’a prise la problématique de la révélation. Nous y évoquerons l’aspect de dialogue dans le registre de la lecture de l’Écriture Sainte. Ce chapitre deuxième commence par traiter de la question de la révélation selon la constitution dogmatique Dei

verbum dans son aspect dialogale. Ensuite, vient la question de révélation telle que

reprise dans l’Exhortation post-synodale Verbum Domini et la relecture de la Constitution

Dei Verbum de Theobald. Cette approche nous permettra d’entrer dans la logique du

processus de Révélation chez Guy Lafon parce qu’elle met l’accent sur la lecture de l’Écriture Sainte dans la vie ecclésiale.

Le troisième et dernier chapitre traitera essentiellement de la question de la révélation selon Guy Lafon. Il s’agit, dans cette partie de voir comment Guy Lafon parle de la révélation à partir de son concept clé d’entretien. Cette analyse permettra de dégager l’existence d’un lien entre sa conception consistant à comprendre la révélation à partir de l’entretien et la conception traditionnelle formulée dans la constitution dogmatique Dei

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Chapitre 1

Guy Lafon : parcours bio-bibliographique

Notre étude repose sur la pensée théologique de Guy Lafon, prêtre et théologien français du 20ème siècle. Avant d’entrer dans le cœur de sa théologie, ce chapitre premier voudrait présenter tout d’abord sa vie intellectuelle. Il s’agit de sa mise en contexte et en perspective. C’est sur la base de la présentation de son parcours biographique et bibliographique que nous dégagerons ses principales convictions théologiques. Aussi, ce chapitre tentera d’identifier les sources d’inspiration de Guy Lafon ainsi que certaines de ses influences théologiques.

Étant donné que notre étude ne porte pas sur Guy Lafon, mais plutôt sur sa pensée, il s’agira de la présentation d’un aperçu général sur lui, en nous basant sur les éléments que nous avons jugés essentiels pouvant nous permettre d’interpréter ses idées théologiques. C’est ainsi que nous commencerons par son parcours biographique, ensuite nous présenterons ses œuvres avant de terminer notre parcours en évoquant des éventuelles influences théologiques dont il aurait bénéficié.

1.

Parcours biographique de Guy Lafon

Qui est Guy Lafon ? De quelle formation a-t-il bénéficié ? Quels furent son itinéraire et son enracinement intellectuels ? Autant des questions que nous pouvons nous poser pour arriver à le présenter. Les éléments de réponse à toutes ces interrogations seront

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principalement tirés de l’ouvrage collectif réalisé en 2011, à l’honneur de Guy Lafon. Cet ouvrage est intitulé Chemins de liberté. Mélanges en l’honneur de Guy Lafon1.

Nous allons dans un premier temps parcourir les éléments les plus importants ayant marqué sa formation scolaire et universitaire étant donné, d’une part qu’il a œuvré dans l’enseignement supérieur et universitaire et que, d’autre part, ce passage dans de nombreuses écoles lui a permis d’asseoir davantage ou mieux, d’approfondir sa pensée théologique. Nous évoquerons cette étape de sa vie sans oublier les services qu’il a rendus dans l’exercice de son ministère sacerdotal.

1.1 Formation scolaire et universitaire

Né le 5 novembre 1930 à Paris dans le 5ème arrondissement de la France, Guy Lafon y a passé toute son enfance et a effectué ses premiers pas scolaires au petit séminaire du diocèse de Paris, dit de Conflans à Charenton-le-Pont, commune du département du Val-de-Marne en région d’Île-de-France. C’est là qu’il obtient son baccalauréat en 1949. Il poursuivra sa formation scolaire dans les classes préparatoires au Lycée Henry IV de Paris jusqu’en 1952. Cette formation lui permettra de participer au concours de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm qu’il intégrera en cette même année.

En 1953, Guy Lafon est élu président de la Fédération Française des Étudiants Catholiques (FFEC). Une responsabilité qu’il assumera jusqu’en 1955. C’est une étape importante qui lui a ouvert le chemin vers un itinéraire intellectuel dans lequel il s’est engagé pour la suite de sa vie. Entretemps, il fit connaissance de quelques personnalités qui l’ont aidé, d’une manière ou d’une autre, dans sa vie chrétienne et croyante. Nous

1 Guy Basset et François Weiser, (dir.), Chemins de liberté. Mélanges en l’honneur de Guy Lafon, Paris,

Nouvelle Alliance, 2011. Il est important de souligner que d’autres éléments sur la vie, la pensée théologique et les œuvres de Guy Lafon sont disponibles sur son site internet: [http://www.lafon.guy.free.fr].

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11 évoquons sa rencontre avec Mgr Paul-Joseph Schmitt, aumônier national de ce mouvement et directeur du Collège Saint Augustin de Bitche (Moselle). Celui-ci, bien que devenu, peu après, évêque du diocèse de Metz de 1958 à 1987, resta en contact avec Guy Lafon jusqu’à sa mort.

Guy Lafon obtint son agrégation de lettres classiques en 1955. Son engagement dans l’enseignement au lycée d’Amiens le conduit trois mois plus tard, soit dès la fin du mois de décembre 1955 à son incorporation pour un service militaire qui devait durer jusqu’en fin décembre 1957. C’est à cette occasion qu’il rejoint le séminaire des Carmes, un séminaire universitaire de l’Institut catholique de Paris situé dans le 6ème arrondissement de Paris et dont la fondation date de 1919.

Après sa formation sacerdotale (1957-1961), Guy Lafon est ordonné prêtre le 12 mars 1961 par Monseigneur Pierre Veuillot, évêque d’Angers, qui deviendra plus tard archevêque de Paris. Il fut l’un de ses professeurs au petit séminaire de Conflans. Il est resté proche de Guy Lafon. Après son ordination, le père Guy Lafon se lance dans différentes activités sur le plan aussi bien académique que pastoral.

1.2 Engagement académique

Dès 1961, juste après son ordination sacerdotale, Guy Lafon est nommé aumônier-adjoint puis il devient titulaire des Khâgnes parisiennes et au secrétariat de Mgr Veuillot, évêque-coadjuteur de Paris. Par la suite, au cours de l’année 1965, soit quatre ans après son ordination sacerdotale, il est tour à tour nommé aumônier à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (fonction qu’il assumera jusqu’en 1979) et de Sèvres (à partir de 1968). Il aura aussi la charge d’enseignant au séminaire Saint-Sulpice d’Issy-les-Moulineaux jusqu’en 1968.

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En cette même année, Guy Lafon devint professeur de théologie dogmatique à l’Institut Catholique de Paris. Une fonction qu’il exercera pendant 28 ans, soit de 1968 jusqu’à son départ à la retraite en 1996. En réponse aux vœux formulés par le second concile du Vatican, Guy Lafon crée un enseignement nommé « Introduction au Mystère chrétien » en théologie dogmatique, à la Faculté de Théologie de l’Institut catholique de Paris. Il le fait sur l’initiative et l’instruction du Cardinal Jean Daniélou. Ainsi, pendant une année universitaire, Guy Lafon proposait une vue d’ensemble de la théologie à des étudiants qui, tout en poursuivant un parcours philosophique, souhaiteraient consacrer cinq années de formation en théologie. Cette activité lui a donné une opportunité de s’engager davantage au niveau universitaire. C’est ainsi que, une année plus tard, soit en 1969, il soutient sa thèse de doctorat en théologie qui portait le titre: Le Temps, le Christ et Dieu.

Introduction à une christologie réflexive, sous la direction du professeur et théologien

jésuite français Henri Bouillard.

Par ailleurs, au moment où il enseigne à l’Institut catholique de Paris, responsabilité qu’il assume en parallèle avec l’exercice de son ministère sacerdotal comme vicaire à la paroisse Saint Marcel du 13ème arrondissement de Paris, Guy Lafon s’engage à nouveau dans l’enseignement des lettres. Tout d’abord en classes préparatoires du secondaire, dans le lycée parisien Fénelon-Sainte-Marie en 1981, ensuite en tant que professeur au collège Stanislas du 6ème arrondissement de Paris en 1984. Il convient de souligner aussi qu’il fut directeur de cet établissement parisien en 1996 et 1997.

Avec la collaboration de Jean Lavergnat, collaborateur à la revue Esprit, et du père Antoine Delzant, ancien élève de l’École normale (Rue d’Ulm) et enseignant à l’Institut catholique de Paris, Guy Lafon fonde en 1980 l’Association Libre d’Études Théologiques (ALETHE)2. Elle fut ouverte à tous et avait pour objectif la promotion de la libre

2 Pour l’Association libre d’Études Théologiques (ALETHE), « la théologie intéresse tout le monde,

c’est-à-dire ne se pratique pas nécessairement entre adeptes d’une même confession ou entre croyants. Elle doit se comprendre comme une pratique consistant à penser et réfléchir l’expérience et le discours religieux et

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13 recherche en théologie. En tant que professeur, faut-il ajouter, Guy Lafon a rendu de grands services à la faculté de théologie de l’université catholique de Louvain (ou Louvain-la-Neuve) de Belgique, à titre de professeur visiteur. Ce qui ne l’a pas empêché d’exercer ses activités tant ministérielles que sacerdotales.

1.3 Activités ministérielles et sacerdotales

Guy Lafon n’a pas seulement passé toute sa vie dans l’enseignement mais, comme prêtre, il a aussi exercé et continue d’exercer de nombreux ministères liés à son état clérical dans plusieurs paroisses du diocèse de Paris. En 1981, il fut nommé vicaire de la paroisse Saint Michel du 13ème arrondissement de Paris. Quelques années plus tard, soit de 1994 à 1997, il exercera son ministère en tant que chapelain à la paroisse Saint Marcel, située dans les sous-sols de l’une des grandes et populaires gares de la ville de Paris, la gare Montparnasse dans le 14ème arrondissement.

Faut-il ajouter que, dans son activité ministérielle, Guy Lafon anima quelques conférences et récollections à différents endroits. Il y a par exemple la conférence du 06 au 07 novembre 1992 à la Maison du Séminaire de Nice, de la paroisse Saint-Philippe, sous le thème de « La laïcité ou la liberté de choisir ». Aussi, en mars 1993, il donna une autre conférence sur « Le Miserere, un exercice de lecture », à la même paroisse. Et, en Janvier-Février-Mars 1986 il fera quelques interventions sur « La fin de la religion », à propos du livre de Marcel Gauchet intitulé Le désenchantement du monde3.

plus largement les grandes questions qu’on se pose à propos de notre vie et de son sens. C’est grâce à elle que des croyants de différentes obédiences se rencontrent et s’enrichissent de cette rencontre ».

Voir le site : [http://www.temoin.com/reflexions/alethe-association-libre-d’etudes-theologiques.html] ou [http://alethe.fr], (consulté le 13 mai 2013).

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Le père Guy Lafon donnera également une récollection en 1998 à l’association des amis de Madeleine Delbrel sous le thème : « La Parole et l’événement, une lecture de Madeleine Delbrel ». Toujours dans la dynamique pastorale, Guy Lafon propose un texte pour la catéchèse de carême : « Le Dieu en qui nous croyons : quatre méditations sur la foi en la Trinité ». C’est une lecture des premiers articles du symbole des Apôtres. Tous ces textes présentent l’univers de Guy Lafon, penché sur la méditation et la lecture. Deux mouvements qui s’enracinent dans la foi en la Trinité.

Depuis sa retraite, le père Guy Lafon continue à exercer divers ministères en paroisse. De 1998 à 2004, il assuma d’importantes responsabilités de pasteur comme curé de la paroisse Saint Michel du 13ème arrondissement de Paris. Depuis lors et jusqu’à ce jour, il est dans la paroisse Saint-Jean-des-deux-Moulins. C’est là qu’il habite actuellement. Soulignons également que Guy Lafon tient ouverte la « Table de l’Évangile », l’une de ses œuvres que nous aurons l’occasion de présenter un peu plus loin. C’est de cette manière qu’il pratique sa démarche théologique à travers la méditation des textes bibliques et la lecture de l’Écriture Sainte tous les jeudis de 19h00 à 20h00 à la paroisse Saint-Germain-des-Prés.

2.

L’œuvre de Guy Lafon

Après avoir présenté sommairement la biographie de Guy Lafon, nous allons dans cette section évoquer sa pensée et à son projet intellectuel. Il sera notamment question de présenter les œuvres les plus marquantes de son parcours. Cette démarche nous aidera, croyons-nous, à comprendre sa pensée et ses convictions théologiques. À cet effet, nous allons présenter son parcours bibliographique en trois principales périodes qui, à notre analyse, ont caractérisé son itinéraire intellectuel. Nous ferons correspondre à chacune d’elles des œuvres produites durant toute sa carrière théologique. Cette répartition nous a

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15 semblé utile dans la mesure où elle nous permet non seulement d’identifier mais surtout de déterminer la période la plus marquante ou intense du rayonnement de ses activités intellectuelles et académiques.

Premièrement il y a la période que nous pourrons nous permettre de qualifier d’ascension. C’est la période comprise entre les années 1955 et 1968. Cette période correspond à une étape pendant laquelle Guy Lafon prenait tout son élan en s’exerçant à publier ses premiers articles, principalement dans la revue La Vie spirituelle et, en même temps, à animer quelques conférences. En seconde position nous indiquerons une deuxième période, la plus importante et riche d’activités littéraires qui va de 1968 à 1996, soit 28 ans essentiellement consacrés à la vie active dans l’enseignement et la recherche. Elle est principalement caractérisée par une abondante publication d’œuvres. Enfin, la troisième période est celle qui correspond aux activités accomplies pendant sa retraite. Elle va de 1996 à nos jours.

2.1 Avant sa carrière universitaire : 1955-1968

En réalité, le début de l’itinéraire de la vie intellectuelle de Guy Lafon peut être situé autour de l’année 1955. Cette année marque non seulement son agrégation de Lettres classiques et son engagement dans l’enseignement4, mais aussi et surtout la publication

de son premier article intitulé « Pour une Église sans rivages5 ». C’est durant cette période qu’il s’est inscrit dans la logique de la pensée théologique de son époque comme

4 Tous ces renseignements sur Guy Lafon on les retrouves dans l’ouvrage collectif sont accessibles sur le

site internet de KTO [http://www.ktotv.com]. On peut aussi les retrouver sur le lien ci-après : [http://www.collegedesbernardins.fr/index.php/rencontres-a-debats/mardis-des-bernardins/archives-mardis-des-bernardins/la-verite-au-risque-de-la-parole-et-de-la-foi-autour-de-livre-de-guy-lafon.html], (consulté le 19 mai 2013). Il s’agit de l’émission intitulé : Les Mardis des Bernardins. Elle a été enregistrée le 3 mai 2011 au Collège des Bernardins.

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16

lui-même l’a fait remarquer lors de l’émission des Mardis des Bernardins diffusée le 3 mai 20116.

À la question de savoir si le débat du rapport entre la raison et la foi avait eu de l’impact sur sa pensée théologique, Guy Lafon fait savoir qu’à son époque, la question de l’existentialisme et de son versant phénoménologique était mise au premier plan. Le débat théologique était plus centré sur l’existence et sur le vécu. Il s’agissait de savoir comment vivre, comment se situer, comment se décider, quelles options faut-il prendre. Ainsi, comme souligne François Weiser, « sur le plan du contexte intellectuel, Guy Lafon rappelle souvent la force des premières années de l’existentialisme : on était amené, aime-t-il à raconter, à décider comment on vivrait. Non plus à faire un tableau du monde, de ce qui était connaissable ou inconnaissable, mais à s’engager dans le monde7 ». C’est dans cet univers que Guy Lafon a commencé son parcours intellectuel et théologique. Un nouvel horizon qui se dessinait par rapport au courant théologique de l’époque basé essentiellement sur le néothomisme. Cet univers lui permettra de nourrir ses inspirations théologiques sur l’existence et le fait de vivre ensemble.

La question du rapport entre la raison et la foi lui paraissait secondaire. D’après lui, il s’agissait d’une question de l’ordre de la connaissance et du savoir. Cependant, avec un peu de recul, il a été amené à réfléchir sur la problématique de la foi. Il n’était pas question, pour lui, de rapport de la foi avec la raison, mais plutôt, de réfléchir sur le rapport entre la foi et la grâce (ou la foi et la gratuité). Sa vision était plus portée sur le fait de « se fier à », de « croire en quelqu’un », sur ces attitudes de désintéressement. On voit qu’à cette époque, Guy Lafon portait son attention sur la foi et la grâce (ou la foi et la gratuité) ; et aussi sur ce qui constitue l’essentiel de la vie chrétienne. C’est sous cet angle

6 Les mardis des Bernardins :

[http://www.collegedesbernardins.fr/index.php/rencontres-a-debats/mardis- des-bernardins/archives-mardis-des-bernardins/la-verite-au-risque-de-la-parole-et-de-la-foi-autour-de-livre-de-guy-lafon.html], (consulté le 13 mai 2013).

7 François Weiser, « La surface avant la profondeur… », dans Guy Basset et François Weisser (dir.), Chemins de liberté. Mélanges en l’honneur de Guy Lafon, Paris, Nouvelle Alliance, 2011, p. 2.

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17 qu’il a écrit, avant même de commencer sa tâche professorale, un Essai sur la

signification du salut8.

Guy Lafon a publié de nombreux autres articles ou études dans d’importantes revues du catholicisme francophone. Il y a par exemple la revue Recherches de science religieuse. Il s’agit d’une revue trimestrielle de type scientifique destinée aux chercheurs en sciences religieuses, en histoire des religions et en théologie. Aussi, les revues comme Études et

Christus qui sont toutes liées à la Compagnie de Jésus en France. On nommera également

d’autres revues comme Lumen vitae, liée à l’Institut international de Pastorale et de catéchèse Lumen vitae de la Compagnie de Jésus en Belgique ; La vie spirituelle9 et

Lumière & Vie, liées à l’ordre des Prêcheurs. Nous nous limiterons sur ces différentes

revues ayant marqué sa période d’ascension intellectuelle.

2.2 Pendant sa carrière universitaire : 1968-

Vingt-huit ans ont suffi pour voir l’œuvre du théologien et prêtre Guy Lafon se répandre dans la sphère théologique. Cette période constitue la période d’intenses activités pendant laquelle Guy Lafon a publié le gros de ses œuvres. Aussi, c’est à cette même période qu’il a vu sa pensée émerger dans le monde des théologiens. Sa préoccupation était de vouloir penser autrement le christianisme.

Notons que les grandes lignes de sa réflexion se trouvent dans son grand ouvrage intitulé

Esquisse pour le christianisme10. À la lecture de cet ouvrage, on voit s’opérer un

8 Guy Lafon, Essai sur la signification du salut, Paris, Cerf, 1964.

9 Les nombreux articles publiés dans cette revue lui donnèrent le goût de l’écriture au point de préfacer en

1968 un ouvrage de Madeleine Delbrel, intitulé La joie de croire et une édition des épitres de Paul aux Romains. Il s’agit notamment des articles comme : « le romancier et les théologiens » en février 1957; « Ténèbres et certitudes. Dieu dans la vie » en février 1962; « Vivre avec le Christ dès ce monde » en octobre 1962; « Déchirez votre cœur » en février 1963 et « Il accueille les pécheurs » en février 1964.

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18

déplacement important dans sa démarche théologique. C’est dans cet ouvrage qu’il « propose une parole chrétienne à l’intérieur de la communauté intellectuelle que la modernité a instituée parmi nous11 ». Au fait, dans cette approche, Guy Lafon parle du désir de parler. Il oriente sa réflexion vers le langage et la lecture. Celle-ci devra être faite, non pas d’une manière isolée, mais avec les autres. Car, pour lui, « le désir avec le langage sont déjà là, et c’est nous-mêmes et tous ensembles qui advenons dans le désir de parler. De ce fait, le texte est toujours aussi notre corps commun12 ». D’une certaine façon, Guy Lafon réfléchit sur le fait de parler. Cet aspect est important par le fait qu’il nous permettra de bien cerner, par la suite, sa conception de la révélation. Pour lui, parler c’est donc advenir, faire naître, ou encore c’est exister. C’est la raison pour laquelle il précise que « [p]arler c’est construire13 » ; c’est construire la société à travers le lien qui unit les hommes. On voit dès le départ, la signification et le rôle donné à la parole. Ainsi, Guy Lafon veut souligner qu’il n’y a « pas de langage sans qu’il y ait aussi société, sans société liée, sans alliance. Le langage est l’ordre où nous pouvons nous rencontrer14. »

Par ailleurs, l’essentiel de sa pensée théologique porte sur le concept clé d’« entretien » principalement développé dans on ouvrage Le Dieu commun15. Par rapport à Esquisses

pour un christianisme de 1979, Guy Lafon veut aller plus loin. Il opère, en trois ans, un

autre dépassement dans son raisonnement. Il part de l’explication de la parole à ce qui lie les hommes entre eux, c’est-à-dire à l’entretien. On voit qu’il y a un lien et une logique dans son cheminement théologique. Car, il va de ce qui est constructif, c’est-a-dire de la parole ou du fait de parler (« Parler c’est construire16 »), au concept d’entretien qui, pour lui, devient une règle transcendantale : « rien en humanité n’échappe sans qu’elle soit la cause ni la fin de rien17 ». En y exposant clairement sa pensée et sa compréhension autour du concept « d’entretien », Guy Lafon devint ainsi le théologien de l’entretien. Dans un langage simple, il parle de ce qui est essentiel entre les hommes. C’est ainsi qu’il lie

11 Lafon, Esquisses pour un christianisme, voir la page de couverture. 12 Lafon, Esquisses pour un christianisme, p. 116.

13 Lafon, Esquisses pour un christianisme, p. 61. 14 Lafon, Esquisses pour un christianisme, p.64. 15 Guy Lafon, Le Dieu commun, Paris, Seuil, 1982. 16 Lafon, Esquisses pour un christianisme, p.61. 17 Lafon, Le Dieu commun, p. 15.

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19 l’anthropologie, la philosophie et la théologie. C’est pour cela qu’il écrit ce qui suit à propos de son livre Le Dieu commun : « en définitive, à quel genre appartient ce livre ? À la philosophie ? À l’épistémologie ? À la théologie ? C’est au lecteur lui-même d’en décider18. »

En 1983, Guy Lafon publie un autre ouvrage intitulé Croire, espérer, aimer. Approche de

la raison religieuse19. Il s’agit de la réflexion sur le christianisme et le rapport théologal. Son point de départ c’est toujours le rapport à Dieu et le rapport entre les humains. Il parle du langage, de l’Écriture, de la lecture et de la vérité. D’une certaine manière, Guy Lafon se maintient dans sa pensée qui met le lien entre la communication, le langage et la société. Il va même plus loin en précisant que la « communication des hommes entre eux est un fait religieux20 ». Pour lui, « c’est dans la poursuite de l’entretien [des] hommes religieux entre eux et avec tous les autres que s’inscrit, dans l’histoire sociale de l’humanité, le fait que Dieu parle à l’humanité21 ». Guy Lafon, à travers cet ouvrage, témoigne d’une réflexion permanente sur le rapport théologal, sur la portée et le sens de l’acte de croire, inséparable de ceux d’espérer et d’aimer.

Plus tard, en 1987, Guy Lafon abordera le thème de la fraternité et la communion lorsqu’il écrit un ouvrage intitulé : L’Autre Roi ou la religion fraternelle22. Lors de l’émission « Les Mardis des Bernardins » à laquelle nous avons précédemment fait allusion, il a tenu à souligner que cet ouvrage est le fruit de sa réflexion sur quelques événements qui avaient marqué sa vie après la guerre. Il considère ces événements comme une attitude contraire à la fraternité, en faisant allusion plus particulièrement à la discrimination. C’est la raison pour laquelle cet ouvrage s’ouvre par une évocation de la mort. Il s’agit, pour lui, de la mort comprise, non pas comme quelque chose qui conduit vers la fin de la vie, mais comme une rupture d’une fraternité toujours possible. Ainsi,

18 Lafon, Le Dieu commun, p. 14.

19 Guy Lafon, Croire, espérer, aimer, Paris, Cerf, 1983. 20 Lafon, Croire, espérer, aimer, p. 91 (voir le sous-titre). 21 Lafon, Croire, espérer, aimer, p. 93.

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précise-t-il, « "la religion fraternel", sous-titre de l’ouvrage, renvoie à la visée d’une pensée qui entend proposer au monde contemporain un christianisme fraternel23 ». C’est dans cette vision du christianisme qu’il a voulu s’engager.

Au début de sa carrière universitaire, Guy Lafon a écrit ses ouvrages et les a publiés à tous les 3 ou 5 ans. Cependant, cela ne fut pas le cas lorsqu’il approchait vers la fin de sa carrière universitaire. Son premier ouvrage il l’avait écrit lorsqu’il avait 49 ans et le dernier en 1996, lorsqu’il avait 66 ans. C’est durant cette dernière année de sa carrière que Guy Lafon publia Abraham ou l’invention de la foi24. Vu son importance, cet ouvrage a été traduit dans plusieurs langues25. Et, François Weiser suggère qu’« on peut […] l’utiliser d’une certaine manière comme une grille de lecture de l’ensemble des livres publiés26 ». Sa réflexion part de l’universalité de la figure d’Abraham. C’est sous cet aspect universel de la foi que Guy Lafon termine sa carrière universitaire.

Guy Lafon a écrit la majorité de ses ouvrages au début des années 80. Il y a consacré toute une réflexion sur l’entretien et le rapport théologale d’une part, sur la vie chrétienne et le fait de la société, d’autre part. Vers l’âge de 25 ans, il a commencé son itinéraire intellectuel en réfléchissant sur la question de la foi et de la gratuité. Il a terminé sa carrière universitaire à l’âge de 66 ans, en réfléchissant sur ce même thème de la foi. On pourra ainsi dire que, chez lui tout part de la foi et se termine par la foi. Comme le dira le théologien Mari Joze, Osredkar, « Guy Lafon part de la foi et, en même temps, met la foi au centre de sa considération. La foi est le commencement et le cœur de sa pensée27 ». Par ailleurs, d’autres ouvrages non de moindre importance, mais qui ne sont pas

23 Weiser, « La surface avant la profondeur », p. 5.

24 Guy Lafon, Abraham ou l’invention de la foi, Paris, Seuil, 1996.

25 Cet ouvrage a été traduit et publié dans plusieurs langues. En italien en 1998 dont le titre correspondant

fut : « Abramo o l'invenzionedellafede, aux Éditions Gribaudi de Milan, en espagnol en 2000; titre correspondant: «Abrahano el descubrimiento de la fe », aux Éditions PPC de la ville de Madrid; en portugais sous le titre « Abraão: ainvençãoda Fé »; en Bauru (Brésil), Editora da Universidade do SagradoCoração en 2001.

26 Weiser, « La surface avant la profondeur », p. 6.

27 Mari Joze, Osredkar, « La théologie de Guy Lafon », Nouvelle revue théologique, tome 129, no 1,

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21 directement à mettre en rapport avec notre étude, ont été publiés pendant cette période d’intense activité intellectuelle de Guy Lafon28.

Dans le cadre de notre travail et plus précisément en rapport avec la problématique de la Révélation, nous signalons deux importants articles publiés pendant cette période d’intense activité intellectuelle. Il s’agit des articles sur « Christianisme et Révélation » et « Communication et Révélation29. » Ce sont les premiers textes de Guy Lafon consacrés essentiellement à la Révélation. Ces textes seront repris, quelques années plus tard, dans son ouvrage Croire, espérer, aimer.

2.3 La période de sa retraite : de 1996 à nos jours

À partir de cette période de sa retraite jusqu’à ce jour, Guy Lafon n’a pas beaucoup écrit ni publié. Il s’est plus consacré aux lectures des textes bibliques. En revanche, il tient ouvert une école de lecture qui existe depuis 1994. À cet effet, Il a publié quelques-unes de ses lectures :

Les textes rassemblés ici ont été parlés et écoutés en des circonstances identiques avant d’être écrits et lus. Hormis le temps des vacances scolaires et les jours fériés, chaque jeudi entre 19heures et 20 heures, depuis le mois de juin 1994, d’abord dans la salle d’accueil de la chapelle Saint-Bernard de Montparnasse, ensuite au palais abbatial de Saint-Germain-des-Prés, j’ai lu un fragment de la Bible et, notamment, des quatre Évangiles. J’ai pu travailler sur l’enregistrement de ces lectures. Leur texte conserve quelque ton de l’entretien qui leur a donné naissance30.

28 Sans commentaires, nous citerons en passant : La laïcité ou la liberté de choisir, Nice, Paroisse

Saint-Philippe, 1993; Il n’y a pas deux amours, Nice, Paroisse Saint-Saint-Philippe, 1994; L’origine de Jésus-Christ,

introduction à la lecture de Matthieu I, 18-25, Nice, Paroisse Saint-Philippe, 1994.

29 Ces deux articles sont parus dans la revue Lumen vitae respectivement dans le second numéro de l’année

1980 et en 1981.

30 Guy Lafon, L’Esprit de la lettre. Lecture de l’Évangile selon saint Luc, Paris, Desclée de Brouwer, 2001,

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22

Au regard de tout ceci, Guy Lafon met en lien la parole et l’écoute, l’écriture et la lecture. Bien qu’il n’ait pas écrit d’importants ouvrages, il reste dans la logique de sa pensée théologique, celle de l’entretien. Pour lui, « tout est langage, tout est pris dans le langage. Entretien et alliance ne désignent pas seulement une façon de lire mais une manière d’être31 ». C’est dans ce mouvement qu’il livre à ses lecteurs ces différentes lectures des textes bibliques.

La Table de l’Évangile constitue une transcription (de 20 tomes) des lectures bibliques

qui couvre la période de 1995-200232. La nouvelle édition date de 2010 aux éditions de la Nouvelle Alliance. Elle comprend 300 lectures bibliques consacrées à la méditation et aux commentaires des textes bibliques.

Guy Lafon exprime les raisons l’ayant motivé à se lancer dans la lecture des textes. Il précise dans l’un de ses ouvrages que c’est l’attention et son attachement à la matérialité de la lettre qui lui a amené à se livrer à la lecture spirituelle des textes bibliques33. D’une certaine manière, on peut dire que sa réflexion théologique culmine vers la lecture de l’Écriture Sainte. C’est de cette manière qu’il essaye d’articuler ce travail de lecture avec l’entretien. Car, « dans l’entretien comme dans la lecture, c’est le sujet de langage qui est invité à laisser jaillir le sens et accéder au désir. En abordant par le biais du texte et de sa lecture le christianisme, c’est bien le même travail de la foi que Guy Lafon propose34 ».

Par ailleurs, outre la Table de l’Évangile, Guy Lafon s’adonne également à la publication de quelques textes, majoritairement axé sur la lecture des textes de l’Écriture Sainte. Ils

31 Lafon, L’Esprit de la lettre, p. 13.

32 Guy Lafon, La Table de l’Évangile-300 lectures bibliques (CD-Rom), Paris, Nouvelle Alliance, 2010. 33 Lafon, L’esprit de la lettre, p. 18 : « Qu’il me soit permis d’avouer ici la surprise qui me venait tandis

que je me livrais à un tel exercice de lecture. J’avoue donc été attentif, autant que possible, à la lettre même du texte. Certes, je le reconnais volontiers, mon attachement à cette lettre aurait pu être fidèle encore […]. En tout cas, je n’ai jamais manqué d’être récompensé de ce que certains tiendraient, bien légèrement à mon sens, pour un asservissement à la matérialité de la lettre. »

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23 permettent de mettre en évidence la pratique théologique dans laquelle il s’est engagé35. Il a aussi contribué à la publication de quelques ouvrages en collaboration avec d’autres auteurs. Il a également publié différents articles. Il y a tout d’abord : Genèse et structure

d’un texte du Nouveau Testament. Étude interdisciplinaire du chapitre 11 de l’évangile de Jean36. Ensuite, en 1986, Guy Lafon se consacra aux travaux de l’Unité d’Enseignement et de Recherche (U.E.R). Dans un ouvrage paru sous la direction de Joseph Doré, il publie une « éloge de la limite37 ». Aussi, quelques années plus tard, en 2001, en collaboration avec Marianne Alphant et Daniel Arasse, Lafon publie :

L’apparition à Marie-Madeleine38. Enfin en 2002, en collaboration avec Jean-Louis Chrétien (philosophe), Étienne Jollet (historien de l’art), Guy Lafon publie : Marthe et

Marie39. C’est un ouvrage de méditation sur l’une des scènes les plus connues de l’Évangile.

Voilà comment se présente cette période de la vie de Guy Lafon. C’est, principalement la période de sa mise en pratique de sa théologie d’entretien à travers la lecture et la méditation des textes bibliques.

3.

Influences

Comme nous l’avons signifié dans l’introduction du présent chapitre, pour nous engager dans un processus de compréhension de la pensée de Guy Lafon, il convenait de bien

35 Parmi ces textes, nous citerons : Pour lire l’évangile de Matthieu, Paris, Golias, 1998; L’Esprit de la lettre, Lectures de l’évangile selon saint Luc, Paris, Desclée de Brouwer, 2001; La Table de l’Évangile (20

tomes), Nice, École de lecture, 1995-2002; Le Temps de croire (Jean 11, 1-46), Bruxelles, Lumen Vitae, 2004 ; La Parole et la Vie, lectures de l’Évangile selon saint Jean, Bruxelles, Lumen vitae, 2005; Foi et

vérité, Bruxelles, Lumen Vitae, 2010.

36 Albert Deschamps, Jean, Ladrière, Guy, Lafon et coll., Genèse et structure d’un texte du Nouveau Testament. Étude interdisciplinaire du chapitre 11 de l’évangile de Jean, Paris, Cerf, (coll. Lectio Divina

104), 1981.

37 Guy Lafon, « Éloge de la limite. Sur un texte de saint Augustin », dans Joseph Dore, (dir.), Éthique, Religion, Foi, Paris, Beauchesne, 1985.

38 Guy Lafon, Marianne Alphant et Daniel Arasse, L’apparition à Marie-Madeleine, Paris, Desclée de

Brouwer, 2001.

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situer le contexte dans lequel il a évolué. Il fallait aussi et surtout déterminer si sa pensée théologique pouvait être rattachée à des auteurs qui l’avaient précédé. Autrement dit, nous avons annoncé que le chapitre premier tenterait d’établir ou de dégager l’existence des sources d’inspiration dont Guy Lafon se serait servi ou, mieux, d’éventuels liens avec ses prédécesseurs. De qui hérite-t-il sa pensée théologique ? Existe-il des sources intellectuelles qui ont eu une influence sur ses convictions ? A-t-il été influencé par quelqu’un ou quelque chose ? De qui détient-il sa pensée théologique ? Sa pensée théologique a-t-elle connu une influence extérieure ? Autant des questions que nous pouvons nous poser. Les réponses à ces questions pourront, sans nul doute, nous amener à parler de ses influences.

En effet, la difficulté à répondre à toutes les questions semble se dégager. Il faut préciser que Guy Lafon s’était déjà poser la même question lorsqu’il écrivait son ouvrage Le Dieu

commun : « De quelles pensées s’inspire la nôtre dans ce livre où les références et les

citations sont rares40 ? » À cette question, Guy Lafon affirme de lui-même qu’il s’est inspiré de plusieurs penseurs à qui il attribue le qualificatif de « créanciers ». Il précise ensuite que « s’il faut choisir parmi les créanciers les plus notoires, le nom de Kant, comme on peut s’en douter, vient avant tous les autres. La philosophie transcendantale n’est pas pour rien dans notre méfiance à l’égard d’une certaine métaphysique. Nous lui devons plus sans doute qu’aux réflexions de Kant sur la religion elle-même41 ». Aussi, parmi ceux qu’il appelle « des créanciers », Guy Lafon confirme d’une part, l’influence de Maurice Merleau-Ponty lorsqu’ « il met en garde contre un chauvinisme humain42 ». D’autre part, il se réclame également s’inspirer d’autres penseurs de son époque lorsqu’il déclare ce qui suit :

nous avons lu et médité les leçons de penseurs plus proches de nous dans le temps. On le reconnaitra facilement. Elles nous permettaient de mieux entendre, et d’entendre philosophiquement, ce que nous lisions des

40 Lafon, Le Dieu commun, p. 12. 41 Lafon, Le Dieu commun, p. 13. 42 Lafon, Le Dieu commun, p. 13.

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25 linguistiques et des praticiens des sciences de la société. Les auteurs que nous venons d’évoquer sont des points de repère, non des cautions. Nous ne prétendons pas nous autoriser d’eux pour achever leur propre démarche, comme si elle était imparfaite, en la prolongeant jusque dans le champ religieux et théologique43.

Mais, comme on vient de le lire, Guy Lafon précise qu’il ne prétend pas s’engager dans une poursuite des démarches de ces prédécesseurs. Ce qui laisse entendre que, tout en se référant à d’autres penseurs, Guy Lafon s’est tracé son propre chemin ou sa propre direction. Dans ce cas, la question demeure en quelque sorte : À quel auteur l’on pourrait se permettre de rattacher Guy Lafon ? Sa réponse à cette question est bien claire et précise : « C’est au lecteur lui-même d’en décider44 ». Alors, étant donné que l’ouvrage

Chemins de liberté. Mélanges en l’honneur de Guy Lafon est une œuvre collective,

constituée entre autres d’un groupe des lecteurs de Guy Lafon, il nous a semblé logique de nous y référer. Cet ouvrage aborde cette question de rattachement de Guy Lafon à ses prédécesseurs. Il commence par relever la difficulté liée à la rareté des références bibliographiques. En effet, cette difficulté relève du fait que Guy Lafon écrit « un texte dense, qui relève de la théologie, qui s’inscrit donc dans une tradition, et qui pourtant ne s’appuie sur aucune note de bas de page, aucune citation, ni aucune référence à d’autres penseurs. Voilà donc un auteur qui revendique d’être cru sur parole. Qui donne sa parole comme la seule garante d’elle-même45 ». De ce point de vue, Guy Lafon est identifié et considéré comme « un auteur sans notes de bas de page46. »

Dans l’ouvrage Chemins de liberté, Guy Lafon évoque différents auteurs philosophes qui l’auront marqué47. Il y a entre autres Jean Lacroix (1900-1986) avec son ouvrage sur Le

sens du dialogue48; Maurice Blanchot (1907-2003) de par les analyses de son ouvrage

43 Lafon, Le Dieu commun, p. 13. 44 Lafon, Le Dieu commun, p. 14.

45 Weiser, « La surface avant la profondeur … », p. 1. 46 Weiser, « La surface avant la profondeur … », p. 1. 47 Weiser, « La surface avant la profondeur … », p. 2.

(36)

26

intitulé L’entretien infini49; Gabriel Marcel (1889-1973) avec Du refus à l’invocation50; Henry Bergson (1859-1941) à travers ses réflexions présentées dans son ouvrage Les

deux sources de la morale et de la religion51, et enfin de Maurice Merleau-Ponty (1908-1961) avec La phénoménologie de la perception, Éloge de la philosophie52. On pourra déduire que ces influences ont eu un impact important sur sa manière propre d’orienter sa pensée théologique. Il a aussi connu l’influence des certains théologiens comme saint Augustin, saint Jean de la Croix, saint François de Sales, Bultmann, etc. Toutes ses influences lui ont permis d’approfondir sa réflexion théologique sur l’entretien et le dialogue. Il reconnaît surtout l’impact de la simplicité de l’écriture de ces auteurs sur sa propre pensée, en particulier le style du philosophe Bergson.

De plus, Guy Lafon reconnaît l’impact de deux courants philosophique, l’existentialisme et le structuralisme, sur la pensée. François Weiser l’a bien dit lorsqu’il déclarait que le structuralisme est considéré « comme une discipline qui permettait de tenir au plus près le vif de l’existence – la communication […]. Le structuralisme a aidé Guy Lafon à formuler dans des termes contemporains ce sur quoi la foi tient […]53 ». En outre, c’est pendant toute la période de sa carrière d’enseignement que s’ajoutent, aux influences intellectuelles déjà mentionnées, celles qui lui venaient de sa réflexion sur les sciences humaines comme la linguistique.

L’autre aspect qui pourra attirer notre attention dans les écrits de Guy Lafon est cette dimension poétique qui est présente. À ce propos, il a été influencé par le poète français René Char (1907-1988). C’est ce que démontre François Weiser, dans les Chemins de

liberté. Il précise que Guy Lafon avait « le goût pour le poète, tels René Char, et le mode

49 Maurice Blanchot, L’entretien infini, Paris, Gallimard, 1983. 50 Gabriel Marcel, Du refus à l’invocation, Paris, Gallimard, 1940.

51 Henri Bergson, Les deux sources de la morale et de la religion, Paris, Presses Universitaires de France,

1982.

52 Maurice Merleau-Ponty, La phénoménologie de la perception, Éloge de la philosophie, Paris, Gallimard,

1952, 1945.

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27 de création que représente l’écriture poétique54 ». En effet, il ne serait vraiment pas surprenant de rencontrer un théologien qui soit en même tant poète, et se demander comment concilier les deux. Pourtant Guy Lafon l’a effectivement été. Voici les propos qu’il tient lui-même à ce sujet :

J’écris parfois ce qu’on appelle, communément, des poèmes. Pourquoi? Sans doute parce que je pense que la parole, toute parole, même la plus anodine, est toujours prononcée poétiquement. J’entends par là que nous parlons tous d’abord, mais sans bien l’apercevoir toujours, pour dire l’effet des choses et des événements sur nous et, aussi, notre alliance, heureuse ou néfaste, avec tous, alors que nous imaginons que nous parlons seulement pour rendre un compte exact du monde et de l’histoire aux autres et à nous-mêmes. Pour moi, le poème est l’occasion de me souvenir que nous ne vivons vraiment que d’une parole qui est la répercussion étonnée de notre rencontre. Oui, nous vivons poétiquement, et nous l’oublions. Le poème nous rappelle à la vérité de notre condition d’hommes qui parlent55.

C’est dans La Table de l’Évangile56 que se retrouve défini le poème exergue à la première page de chacun des tomes. Toute sa réflexion se déploie, avons-nous dit, dans un esprit de plein partage des interrogations et des préoccupations de la culture dans laquelle le christianisme s’inscrit et ce texte introductif – poème-prière - ci-après célèbre ce déploiement de sa pensée poétique :

«De ton livre Fais de la foi.

De ta foi Fais une parole.

De ta parole Fais de l'amour.

Comme du blé On fait du pain.»

54 Weiser, « La surface avant la profondeur … », p. 2.

55 [http://lafon.guy.free.fr/?page_id=32] (consulté le 20 mai 2013).

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