LES CONSTITUANTS AZOTÉS DU LAIT DE TRUIE :
ÉVOLUTION AU COURS DE LA LACTATION ET INFLUENCE DU RÉGIME ALIMENTAIRE
E. SALMON-LEGAGNEUR
Michelle NOCART, M. GUICHARD J. RETTAGLIATI Station de Recherches sur
l’Élevage
des Porcs,Centre national de Recherches
zootechniques, Jouy-en-Josas (Seine-et-Oise)
SOMMAIRE
L’étude de la
répartition
des constituants azotés du lait de Truie,entreprise
au cours de122 lactations de truies Large White, a fait ressortir les
points
suivants : 11
°) Le lait de Truie, bien que considérablement
plus
riche que le lait de Vache en tous les cons-tituants azotés, contient en valeur relative moins de caséine
( 54
P. 100) et dep-lactoglobuline
(2p. 100), mais
plus
de lactalbumine(i 4
p. 100), deglobuline ( 1 8
p.100 )
et de protéoses peptones.Par contre, les différentes fractions de l’azote non
protéique
diffèrent assez peu dans les deux laits.2
°) Au cours de la lactation, les teneurs de la
plupart
des fractions, sauf l’urée et la créatine, baissent considérablement au début de la lactation et remontentlégèrement
en fin de lactation.Il s’ensuit que les
quantités journalières
secrétées varient peu, surtout en cequi
concerne la caséine.En valeur relative, la matière azotée du lait s’enrichit en caséine, en
p-lactoglobuline
et en azotenon
protéique
au début de la lactation ets’appauvrit
en toutes les autres fractions ;après
la pre- mière semaine, cette évolution se stabilise, sauf pour la lactalbuminequi
continue à diminuerlégè-
rement.
3
°)
Unsupplément
alimentaire de 30 p. 100 d’azote, par rapport à unrégime
normal a pour effet une légère augmentation de la concentration en azote du lait, celle-ci porteprincipalement
sur les teneurs en albumine et en urée et, à moindre
degré,
en caséine et englobuline.
INTRODUCTION
La
composition
du lait de Truie revêt uneimportance particulière
pour la crois-sance du
porcelet.
Dans un travail récent(S ALMON -L EGAGNEUR
etAuMaîTR!, 19 6 2 ),
nous avons attiré l’attention sur le rôle que
pouvait jouer
la richesse du lait en ma-tière azotée comme facteur de cette croissance. Mais la
composition
du lait de Truievarie
beaucoup
et nous avonsmontré, qu’à
côté d’autres modifications on observeune évolution très
rapide
au cours despremiers jours
de lactation de certains consti- tuants azotés et notamment de la caséine(S ALMO . N -1,E GAGN E UR , z 9 62). Or,
on saitmaintenant que les différentes
protéines
du lait neprésentent
pas la même valeur nutritionnelle. Parexemple,
HENRY(r 977 ) rapporte
que la caséine a pour le Raten croissance et le Chien des valeurs
biologiques
très inférieures à celles des pro- téines du lactosérum par suite d’un déficit en acides aminés soufrés.Il
pouvait
doncparaître
intéressant d’examinerplus
en détail dansquelle
me-sure le lait de Truie
pouvait présenter
des variations decomposition
azotée propres à en modifier la valeur nutritionnelle.Or,
si les variations de lacomposition globale
du lait de Truie sont maintenant mieux connues
(N EUHAUS , y 6i),
on nedispose
que de très peu d’informations sur la
répartition
des constituants azotés. Seuls SH E
FFY et al.
(r g 52) etTRnvmcEx ( 19 6 0 )
ontapporté quelques précisions
à cesujet.
Dans le cadre de l’étude
plus générale
des facteurs de variation de laproduction
laitière chez la
Truie,
nous avons voulu chercher à connaîtrequelle
était larépar-
tition des
principaux
constituants azotés du lait de Truie et comment celle-ci évo- luait. Deuxaspects
ontparticulièrement
retenu notre attention : l’influence du stade de lactation et l’effet d’unesurcharge
alimentaire enprotéines
parrapport
à unrégime
normal.MATÉRIEL
ETMÉTHODES
.A. - Animaux
12truies de race Yorkshire
Large
Il’hite ayant déjà effectué une ouplusieurs
lactations, ontété utilisées dans cette étude. Ces truies, fécondées au cours de l’été 1962, étaient conservées pen- dant toute la durée de
l’expérience
enporcherie
conditionnée(zo°C ;
E = 65 p. 100).Elles recevaient pendant leur
gestation
z,5 kg parjour
d’un alimentcomplet équilibré
d’untype courant, permettant la couverture de tous les besoins, ou 5 kg d’un aliment enrichi en pro- téines
(régime hyperprotidique).
A cet effet, les animaux étaientrépartis
en deux lots A et B rece- vant l’un ou l’autrerégime.
Lacomposition
des différents aliments estindiquée
au tableau I.Suivant le lot, les truies recevaient donc au cours de la lactation, compte tenu de leur con- sommation réelle, 700 g de matières azotées par
jour
dans le lot normal et 893g, soit environ 30 p. 100de
plus,
dans le lot suralimenté.Les lactations duraient 8 semaines
pendant lesquelles
lesproductions
laitières étaient déter- minées defaçon
hebdomadaire (SALMON-LEGAGNEUR, i956).L’analyse
des constituants azotés étaitpratiquée
sur des échantillons individuels de laitprélevés
surchaque
truie à l’aide d’une machine à trairespéciale
etaprès injection
intraveineuse à la truie de 4 UId’ocytocine (SALMON-LEGA-
GN EUR,
1959).
Les échantillons étaient
prélevés
aux dates suivantes par rapport au moment de laparturition :
o heure, 24heures, 48 heures, jours, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8 semaines. Au total Iéchantillons par truie étaient donc récoltés et donnaient lieu aux déterminations suivantes : azote total, caséine, globuline,
!-lactoglobuline,
albumines résiduelles, protéoses-peptones, azote nonprotidique,
urée, ammoniac acides aminés libres, créatine et créatinine. Les échantillons étaient stockés sans conservateur à o°C à mesure de leur récolte etanalysés
par séries hebdomadaires.On suivait, en outre, les variations de
poids
des truies et desporcelets
au cours del’expérience.
B. - Méthodes
d’analyse
Toutes les fractions, sauf la créatine et la créatinine ont été dosées par leur azote suivant la méthode KJELDAHLet les résultats étaient
exprimés
enmilligrammes
d’azote pour 100 g de lait.Pour les fractions
protéiques,
nous avons utilisé, en lesadaptant
à nos conditions, les tech-niques
deprécipitation
sélective utilisées pour le lait de vache par RowLAND( 193 8),
SHAHANi(z 95 i)
et ASCHAFFENBURGH
(1959).
Ces
techniques
sont conventionnelles et ne permettent pastoujours
de doser les constituantsvrais, mais seulement des fractions ainsi dénommées et elles sont en
général
moinsprécises
que lestechniques d’électrophorèse
ou dechromatographie.
Toutefois, elles présententl’avantage
de nécessi- ter peu de matériel, d’être aisémentreproductibles
et, dans notre cas, de permettre descomparai-
sons avec les résultats d’autres auteurs. Nous avons ainsi dosé :
- la caséine par
précipitation
àpH
4,6(ROWLAND, 193 8),
- les
globulines
parprécipitation
par le méthanol à o°C(SHAHANI, 1951 ),
- la
p-lactoglobuline après précipitation
àpII
2 desprotéines
du sérum( lscHAFFENBURG,
1959), _ , _
- l’albumine totale
après précipitation
à 20°C des autresprotéines
par le sulfate de soude à 20 p. 100(ASCHAFFENBURG,
i959),- les proteoses-peptones par
précipitation
àpli
4,6 par le sulfate de soude à 12 p. 100(As-
C H A FFENBURG,
1 959),
- l’azote non
protéique
total, parprécipitation
à o°C des protéines par l’acidetrichloracétique
à 15 p. 100 (ROWLAND, 1938).
Les différentes fractions de l’azote soluble ont été dosées sur les filtrats
déprotéinisés,
selonles
techniques
de DENIS( 1919 ), adaptées
par SIIAHANI( 1951 ),
à savoir :- l’ammoniac par distillation en présence de
magnésie,
- l’urée par distillation de l’ammoniac
après hydrolyse uréasique
et incubationpendant
8 h à 40°C,
- la créatine et la créatinine, par réaction colorée, avant ou après
hydrolyse,
à l’acidepicrique
et lecture au
spectrophotomètre
à 520 m[.L,- les acides aminés libres ont été dosés par la
technique
au formol de Sorensen. Bien que relativement peuprécise,
cette méthode offrel’avantage
d’unegrande simplicité
et nous a donnédes résultats très
reproductibles
en accord avec les données de SIIEFFY( 1952 ),
- enfin, la fraction restante, ou indéterminée, a été
appréciée
par différence. Cet azote indé- terminé représente essentiellement les nucléotides et certains déchets du métabolisme azoté(acide urique, purines, glutathion).
R!SUI,TATS
A. -
Répartition
moyenne des constituants azotésNous avons calculé pour
chaque
truie la teneur moyenne du lait en ses consti- tuants azotés àpartir
des résultatsd’analyse
des différentsprélèvements,
abstrac-tion faite du
premier
échantillon ou colostrum.Puis,
àpartir
de ces moyennes indi-viduelles,
nous avons calculé les moyennes etécart-types
pour l’ensemble des animaux.Compte
tenu du peu de différences rencontrées dans les résultats des 2 lots A etB,
ceux-ci ont été réunis et considérés ensemble. Les valeurs ainsi obtenuesfigurent
au tableau 2.Ces résultats nous
permettent
de faire les commentaires suivants :1
°)
Comme dansbeaucoup d’espèces,
la caséine est leprincipal
des constituants azotés dulait,
sans toutefoisatteindre,
en valeurrelative,
une teneur aussi élevée que dans les autres laits. Ilfaut,
par contre,souligner
les teneurs élevées atteintesen valeur absolue et relative par les
protéines
du sérum.2
°)
Lesécarts-types
sont assezélevés,
mais comme pour les autres constituants dulait,
les variabilités sont très différentes suivant les fractions azotées. Les élé- ments lesplus
variables sont, avecl’ammoniac,
lesprotéines
dusérum, globulines
et
albumines, qui
sont les fractions lesplus
difficiles àdoser,
et les moins variables sont la caséine et l’azote nonprotéique.
3
°)
Il faut surtout noter la trèsremarquable
constance durapport caséine/azote total, qui
varie donc très peu d’un individu à l’autre(coefficient
de variation : 4,9 p.100 ).
B. -
Évolution
au cours de la tactationLes teneurs moyennes de
chaque
constituant aux différentes dates deprélè-
vement ont été calculées à
partir
de chacun des 12 résultats individuels.Ces moyennes sont
rapportées
dans les tableaux 3 et 4 et dans lesfigures
i,2 , 3 et 4.
- la
caséine, principal constituant,
évolue sensiblement comme l’azote total :on observe une chute
importante
du taux au début et une remontée en fin de lactation.C’est avec l’azote non
protéique,
la seule fractionqui augmente
enpourcentage
de l’azote total au début de la lactation. Cetteaugmentation
estrapide
et, dès la fin de lapremière semaine, l’équilibre
est atteint. Lepourcentage
de caséine reste ensuiterigoureusement
constantjusqu’à
la fin de la lactation.- Les
globulines présentent,
en valeur absolue etrelative,
la baisse de teneur laplus importante pendant
lespremiers jours
de la lactation. Par contre, leur taux remonte moins en fin de lactation que celui de la caséine.Pour tous les
constituants,
l’évolution est surtoutimportante
au début ou enfin de
lactation,
mais elleprésente
desaspects particuliers qu’il
convient desouligner
pour certains constituants :
- Les albumines constituent la seule fraction
qui
diminue du début à la fin de la lactation.- Les constituants non
protéiques
serépartissent
en deux groupesqui pré-
sentent des évolutions
opposées :
les uns commel’urée, l’ammoniac,
lacréatine,
et la créatinineaugmentent
au début de la lactation et diminuent à lafin ;
les autrescomme les acides aminés et l’azote non déterminé suivent les variations des pro- téines : il en résulte
qu’au
total l’azote nonprotéique
varie peu en valeur absolue etrelative,
Compte
tenu desquantités journalières
de laitproduites,
il résulte de l’évolution des teneurs, que lesquantités
dechaque
constituant secrétées parjour présentent
elles-mêmes des variations. Le tableau 5
rapporte quelques-unes
des évolutions desquantités
sécrétées. Onpeut
ainsi constater que laquantité
de caséine varie très peuau cours de la
lactation,
alors que les albumines sont en diminution constante et que l’azote nonprotéique
a tendance àaugmenter.
C. -
Influence
durégime
alimentaireLe tableau 6
rapporte
les teneurs moyennes, pour l’ensemble de lalactation,
desprincipales
fractionsexprimées
enmilligrammes
d’azote et en p. 100 de l’azotetotal,
dans le lait de chacun des lots de truies.Vu le faible nombre d’animaux dans
chaque lot,
les différences observées nesont en
général
passignificatives,
sauf pour la lactalbumine et l’urée. On note cepen- dant une certaine tendance àl’augmentation
des teneurs en azote sous l’effet durégime
leplus
azoté pour les fractionsprotidiques,
àl’exception
de lap-lactoglo-
buline et des
protéoses peptones
et pour les fractions nonprotidiques,
àl’exception
de l’azote non déterminé.
On ne note, par
ailleurs,
aucune différencesignificative
entre les 2 lots en cequi
concerne lesquantités
de laitsécrétées,
les croissances desporcelets
et les varia-tions de
poids
des truies(tabl. 7 ).
DISCUSSION
A. -
Répartition
moyenneSauf en ce
qui
concerne larépartition
desprotéines
du sérum dont le total est toutefois lemême,
nos résultats concordent assez bien avec ceuxpubliés
avant nouspar SHEFFY
( 1952 ).
Les différences que nous observonss’expliquent
parl’emploi
detechniques
dedosage
un peudifférentes,
notamment en cequi
concerne les albumines et lesprotéoses-peptones.
Cesdernières,
enparticulier,
ont pu fairel’objet
d’unesurestimation dans le travail de
S HEFFY ,
car il semble bien que latechnique
deRowr,ArrD donne des résultats
trop
élevés pour cette fraction. Par contre, pour lesfractions non
protéiques,
où lestechniques
dedosage
ont été sensiblement lesmêmes,
les résultats de SHEFFY et les nôtres sontparticulièrement
semblables.Par
comparaison
avec le lait des autresespèces,
il fautsouligner
certaines diffé-rences, surtout en ce
qui
concerne lesproportions
relatives decaséine,
d’albumineet de
globuline.
Nous avonsrapporté
au tableau 8 les résultats obtenus parquelques
auteurs sur le lait de différentes
espèces.
On remarquera en
particulier
que lepourcentage
de caséine estbeaucoup
moinsélevé chez la Truie que chez les
Ruminants,
ou même que chez la Ratte. Par contre, il estplus élevé,
ou du mêmeordre,
que ceux des laits deFemme,
deJument,
d’Anesseet de
quelques espèces
sauvages comme la Baleine ou le Rhinocéros(GRZrM!x, ig5 7 ).
Le fait que le
rapport protéines
dusérum/caséine
du lait de Truie soitbeaucoup plus
élevé que celui de la Vache
pourrait
éventuellement avoir pourconséquence
unemeilleure valeur
biologique
desprotéines
du lait de Truie.Toutefois,
ceci n’a pu être démontréjusqu’à présent,
si l’on s’enrapporte
à uneexpérience
faite par BRAUDE etal., (ig 5 i)
sur desjeunes
rats.Il faut remarquer, par
ailleurs,
que larépartition
desprotéines
du sérum estassez différente de celle que l’on trouve dans le lait de Vache : c’est ainsi
qu’il
sembley avoir
davantage
deglobuline
que d’albumine dans le lait de Truie et surtout beau- coup moins de!-lactoglobuline
que delactalbumine,
alors que c’est le contraire chez la Vache.Il est vrai
cependant qu’une partie
de ces différencespeut
être inhérente aux méthodes dedosage, qui
nepermettent
pas d’isoler des fractions pures etpeuvent
convenir moins bien pour le lait de Truie que pour le lait de Vache.Il faut noter
enfin,
que le lait de Truie contientplus
d’azote nonprotéique,
envaleur absolue et
relative,
que le fait de Vache. Ceci est surtout dû aux fractions acides aminés et « azote indéterminé », car laquantité
d’urée est sensiblement la même dans les deux laits. Onpeut
remarquerqu’il
en va de même pour d’autresespèces (Femme, Anesse)
dont leslaits, malgré
des différences en azote nonprotéique total, présentent
en valeurabsolue,
mais non en valeurrelative,
des concentrations voisines en urée(il
en va de même pour la créatine et lacréatinine).
Ceci semblerait montrer que chez toutes cesespèces
la teneur en urée et la teneur en azote total du lait sontindépendantes.
B. -
Évolution
au cours de la lactationNous
distinguerons
l’évolution des teneurs des constituants dans lelait,
de celledes
pourcentages rapportés
à l’azote total et de celle desquantités
totales sécrétées.1 0
)
L’évolution des teneurs des différentes fractions azotées du lait de Truie estassez conforme à celle que l’on observe chez les autres
espèces
et confirme les résul-tats que nous avions
déjà
trouvés sur la sécrétion despremiers jours
de lactation(Sn!,MOrr-I,EGaGrrEUx, 19 6 2 ).
Elle est en accordégalement
avec les conclusions de SHEFFY
( 1952 ), qui
trouve toutefois des teneurs un peuplus
élevées que les nôtres pour certaines fractionsaprès
unmois,
parexemple
pour l’azote nonprotéique.
Dans
l’ensemble,
l’évolutior, des différentes teneurs semble obéir à une loi com- mune : diminution des teneurs, oudilution,
au début de lalactation,
stabilité pen-dant la
période
deproduction
constante,puis augmentation
des teneurs, ou concen- tration en fin de lactation à mesure que laquantité
de lait sécrétée diminue.De telles observations
rejoignent
cellesqui
ont pu être faites chez la Vache par AZARM
E
( 193 8)
et parJ ARRIGE ( I g 57 ) ,
chez la Brebis par D!NAnzuR( 19 6 3 ),
chez laChèvre par BExGMA!r
( Ig 37 ) ,
chez la Femme par M.!c!-(ig6i)
et par ERrcxsorr(i934)!
Les seules fractions à
échapper
à cetterègle
semblent êtrel’urée, l’ammoniac,
la créatine et lacréatinine,
dont l’évolution suivent au contraire la courbe deproduc-
tion
laitière,
c’est-à-dire en fait celle de l’eau. Cephénomène
tendrait donc à appuyer la théorie suivantlaquelle
ces constituants ne sont pas sécrétés par lamamelle,
mais filtrent librement dans lelait,
paréquilibre
avec leur teneur dans les fluides extra- cellulaires.2
°)
L’évolution relative des différentes fractions montre que si la distribution desprotéines
dans le laitchange
très vite au cours despremiers jours
delactation,
iln’en est
plus
ainsi ensuite. C’est ainsi parexemple
que laproportion
de caséine augmente considérablement au cours de lapremière semaine, phénomène déjà
rap-porté
par TRAVNICEK(ig6o),
que nous avions nous-mêmes observé(Snt,MOtv-I,!GA-
G N E UR
,
I g 57 ) ,
etqui
a été aussisignalé
chez la Ratte par GLASS(ig5!).
Par contre,. Caséine
pendant
le reste de lalactation,
lerapport
1Azote total
Azote total a resteremarquablement
cons- tant, cequi
est àrapprocher
des observations deJ ARRIGE ( 1957 )
chez la Vache.Les
proportions
deglobulines
et d’azote nonprotéique
total suivent une évolu- tionidentique,
par contre, les albumines ont uncomportement
un peu différent : le taux de lactalbumine baisse relativement lentement au début de lalactation,
mais d’unefaçon
continuejusqu’à
la fin de la lactation. Ceci sembleraitindiquer qu’une partie
desalbumines, pourrait
avoir uneorigine
différente des autres pro- téines dulait, hypothèse généralement
admisepuisqu’on
pensequ’une
certainefraction de ces
protéines provient
directement du sérumsanguin (B ARRY , 19 6 1 ).
Sur le
plan
de la valeur nutritionnelle, et mise àpart
l’évolution despremiers jours,
laphysionomie
de la distribution desprotéines
du lait de Truie ne varie pra-tiquement
pas au cours de la lactation. Ilapparaît
donc fortimprobable
que le lait de Truiepuisse présenter
des variations suffisantes pour que sa valeurbiologique
en soitmodifiée. Il semble bien au
contraire, qu’en
dehors de lapériode colostrale,
les pro- téines du lait de Truie conservent une valeur nutritionnelleégale.
Les seules modi- ficationspossibles
sont cellesqui proviennent
soit d’uneaugmentation
de la teneur enazote
total,
soit d’une modification durapport azote%énergie
du lait.3
°)
L’examen desquantités
sécrétées aux différents stades fait aussiapparaître
des différences par
rapport
à cequi
est observé chez la Vache. Eneffet,
pour toutes les fractions azotées du lait deTruie,
sauf l’azote nonprotéique (urée),
lesquantités
sécrétées sont maximales dès le début de la lactation. Par la
suite,
cesquantités
nefont que baisser
plus
ou moinsvite,
avecmême, semble-t-il,
une certaine remontéeen fin de lactation pour les
globulines
et lesprotéoses-peptones.
La caséine est la fractionqui
varie le moins et lesglobulines
et les albumines cellesqui
varient leplus.
Chez la
Vache,
aucontraire,
LARSON( 1957 )
avait montré que la sécrétion de caséinepassait
par un maximum au bout dequelques jours puis
décroissait d’envi-ron 50p. 100 en trois mois. Il en était de même pour la
p-lactoglobuline
et la lactal-bumine. Par contre, la
globuline
et lesprotéoses suivent,
chez laVache,
une évolu-tion
identique
à celle que nous avonsrapportées (S AN G IOR G I , ig58).
Peut-on déduire que le mécanisme de la sécrétion de la caséine et des albumines diffèrent chez la Truie et chez la Vache? Certainement pas. Tout au
plus peut-on
penser que l’évolution des activités sécrétrices n’est pas la même chez ces deux
espèces
et que la
synthèse
de la caséine se maintient à son niveau leplus
élevéjusqu’à
lafin des huit semaines de lactation chez la Truie
(ce qui
n’est pas le cas pour la lactal-bumine) .
C. -
Influence
durégime
alimentaireLa distribution d’un
régime
enrichi en azote à des truies semble avoir eu peu d’effet : ni lesproductions laitières,
ni les variations depoids
n’ont été modifiées et la richesse azotée du lait n’a étéaugmentée
que de 4 p. 100(non significatif),
alorsque le
supplément
alimentaire était de 30 p. 100 parrapport
aurégime
normal. Cecitoutefois n’est pas tellement
surprenant, compte
tenu de ce que lerégime
normalapportait
apriori
suffisamment d’azote pour couvrir les besoins normaux de la lac- tation etqu’une
améliorationparaissait
donc peuprobable.
Ce résultat concordeégalement
avec ceuxqui
ont pu être obtenus en d’autrescirconstances,
ou sur d’autresespèces.
Il est àrapprocher
de ceux de BOWLAND( 1949 )
et SHEFFY( 195 2) également
sur la
Truie,
de ceux de DEB( 19 6 2 )
et de KARMARKAR( 1959 )
sur laFemme,
de ceux de PERRIN( 195 8)
sur la Brebis et des nombreux travaux réalisés sur cepoint
sur laVache,
comme ceux de PERKINS( 1940 ),
BxW R!M( 1949 ),
STEIN(1957),
WooDMnrr(1957),
Roox(1959)
et KIRMEIER( 19 6 0 ).
Tous ces travaux montrent, eneffet,
que toute modification du niveaualimentaire,
ou du niveauazoté,
n’entraîne pas engénéral
de variationimportante
de laquantité
d’azote sécrétée dans le lait.Par contre, il est assez
fréquent
que certains auteurssignalent
une modification de teneur de l’un ou l’autre des constituants azotés sous l’effet de certainsrégimes.
Pour RooK
(ig5g),
KATMARKAR(195 9 )
et BOWLAND(rg 49 ),
les modificationsportent
surtout sur les
protéines
et notamment sur lacaséine ;
pour DEB( 19 6 2 ),
PERKINS(1930)
et STEIN( 1957 ),
seul l’azote nonprotéique
s’élèvelorsque
la teneur en azotedu
régime
croît. Dans notreexpérience,
deux fractions ont étéaugmentées
d’unefaçon significative
par lerégime hyperazoté :
la lactalbumine etl’urée ;
deux autresont montré une
légère
tendance àl’augmentation :
la caséine et laglobuline ;
lesautres ont été diminuées.
Ces
divergences
de résultatspeuvent, peut-être, s’expliquer
en fonction desniveaux alimentaires utilisés :
lorsque
le niveau de référence est bas, une amélio- ration durégime peut
stimuler la sécrétion laitière et donc favoriser laproduction
d’une
plus grande quantité
deprotéines spécifiques,
c’est-à-dire essentiellement de la caséine et desglobulines. Lorsque
le niveau estélevé,
lesupplément
azoté n’apas d’effet sur la
synthèse
de lacaséine,
mais ilpeut
en exercer une sur laprotéi-
némie du sang et donc sur les teneurs en albumine et en urée du
lait,
dans la mesure où celles-ciproviennent
directement du sang. Dans notre cas, le niveau alimentaire de référence étaithaut,
et c’est essentiellement ces fractionsqui
ont été affectées.Dans l’ensemble
donc,
il ne semble pasqu’on puisse
faire état ici de différencesquantitative
ouqualitative
liées àl’alimentation,
propres àl’espèce porcine,
alorsqu’il
n’en va pas de même dans d’autres secteurs, notamment celui deslipides (S AL -
MON-I,F;GAGN!UR,
1962).
Il ressort donc de cette étude que c’est
plus
par laphysionomie
de sesprotéines (teneurs
élevées en lactalbumine et surtout englobuline,
mais relativement faiblesen caséine et en
!-lactoglobuline)
et l’évolutionparticulière
de certaines fractionsau cours de la lactation
(caséine, lactalbumine, urée),
que semble se caractériser essentiellement la matière azotée du lait de Truie.Reçu
pourpublication
en décembre 1963.SUMMARY
NITROGEN CONSTITUENTS OF SOW’S MILK : EFFECT OF STAGE OF LACTATION AND LEVEL OF FEEDING
A detailed
study
of the mainprotein
andnon-protein nitrogen
fractions of sow’s milk has been carried outduring
the lactation of 12sows with 2levels ofdietary protein ( 14
and 19 p.100 ).
i o
)
The mean values for thenitrogen
distribution of sow’s milk,expressed
as mgnitrogenyoo
gmilk, were : total 1014, casein 545,
globulin
181,p-lactoglobuline
ig, lactalbumin r38, proteose- peptone 56, nonprotein nitrogen
68, urea 14, amino acids 22,NH 3
1,7, creatine 3,5, creatinine 1,9 and unaccounted 23. In terms ofproportion
of totalnitrogen,
sow’s milk is richer than cow’s milk in lactalbumin,globulin
and proteose-peptone, and less rich in casein,p-lactoglobuline
and urea.Individual variations were
considerably
lower for casein than for serumprotein.
2
°) Percentages of most of the constituents
dropped sharply
at thebeginning
of the lactation andslightly
increased towards the end (but it was the reverse for urea andcreatine).
Thereforethe
quantities
secreteddaily, particularly
of casein, werenearly
constantthroughout
the lactation.Casein,
(3-lactoglobulin
andnon-protein nitrogen
increased as aproportion
of totalnitrogen during
the first week of lactation but did not vary thereafter.
3
°) Increasing
thenitrogen
content of the ration hadonly
a small effect on milkcomposition.
Only
the lactalbumin and urea contents increasedsignificantly, by
about 20 p. 100.RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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