A550 – Les puissances de 2 à la fête
Q1 : Trouver toutes les puissances de 2 qui sont encore des puissances de 2 lorsqu’on supprime
a) le premier chiffre de gauche. Nota : 4096 devient 96.
b) le dernier chiffre de droite.
Q2 : Existe-t-il une puissance de 2 telle qu’en réarrangeant ses chiffres on obtienne une autre puissance de 2 ?
Nota : les entiers commençant par un zéro sont exclus dans les réarrangements de la puissance de 2.
Solution proposée par Patrick Gordon Q1
On considère le nombre N = 2n écrit en base dix : "abc…z".
Q1 a)
Supposons tout d'abord b ≠ 0
On demande à quelle condition N' = "bc…z" est une puissance de 2, soit : 2p.
Soit k le nombre de chiffres de N' = 2p (et donc k+1 le nombre de chiffres de N= 2n).
À toute valeur de p correspond une "longueur" k de 2p (nombre de ses chiffres) définie par : 1) 10k-1 ≤ 2p < 10k
ce qui peut s'écrire, au besoin : k = ENT [p log10(2)] +1
Par définition : N' = N – a 10k et, par conséquent, on cherche n, p et k tels que : 2p = 2n – a 10k
soit encore (car naturellement n > p) : 2) 2p (2n-p –1) = a 10k
Selon que a (qui est compris entre 1 et 9) est ou non divisible par 2 ou 5, la relation (2) prendra des formes différentes.
si a n'est divisible ni par 2 ni par 5 (a = 1, 3, 7, 9) La relation (2) s'écrit :
3) 2p-k (2n-p – 1) = a 5k
Or ni a ni 5 ne sont divisibles par 2p-k, donc p = k. Mais k est la "longueur" de 2p et il existe une seule valeur de p qui satisfasse cette condition, c'est p = 1 (21 = 2 est un nombre à 1 chiffre). En reportant p = k = 1 dans (3), il vient :
(2n-1 – 1) = a × 5
Mais a ne peut prendre par hypothèse que les valeurs 1, 3, 7, 9, ce qui ne donne qu'une solution pour a = 3 et n = 5.
On a bien, en effet, la solution :
N = 25 = 32; N' = 21 = 2
si a = 5
La relation (2) s'écrit :
4) 2p-k (2n-p – 1) = 5k+1
Or 5 n'est pas divisible par 2p-k, donc p = k. Mais k est la "longueur" de 2p et donc, comme au cas ci-dessus : p = k = 1, ce qui, en reportant dans (4), donne :
(2n-1 – 1) = 52
Mais 26 n'est pas une puissance de 2 et il n'y a donc pas de solution pour a = 5.
si a est une puissance de 2 (a = 2, 4, 8)
On procède de même que pour a = 5, à savoir que l'on divisera les deux membres de (2) par 2 à la puissance k + 1, 2 ou 3, selon que a = 2, 4, 8.
On trouvera respectivement les conditions :
k = p–1, d'où p = 2, k = 1
k = p–2, d'où p = 3, k = 1 ou p = 4, k = 2 k = p–3, d'où p = 5, k = 2
dont aucune ne donne de solutions car il faudrait que (2n-p – 1) = 5k avec k = 1 ou 2; or ni 6 ni 26 ne sont des puissances de 2
si a = 6
En procédant comme ci-dessus, on trouve une unique solution : p =2, k = 1, n = 6 qui correspond bien à la solution :
N = 26 = 64; N' = 22 = 4 Nous avons ainsi épuisé le cas b ≠ 0.
Supposons maintenant b = 0.
Cette fois, N' = 2p ne s'écrit plus : "bc…z" car b et d'éventuels suivants sont nuls. N devra donc être écrit : "a00…0tu…z" et N' s'écrira : "tu…z"
En notant q le nombre de zéros qui suivent a, et toujours k le nombre de chiffres de N' = 2p (soit au total q + k + 1 chiffres pour N), on a :
N = 2n = a 10k+q + 2p ce qui s'écrit encore :
5) 2p (2n-p –1) = a 10k+q
Formellement, cette relation est la même que (2) avec k' = k + q. Attention toutefois : c'est bien k, et non k', qui est le nombre de chiffres de 2p.
Cela dit, la même discussion que dans le cas b ≠ 0 peut être faite sur la divisibilité de a par 2 et 5 et donc les mêmes divisions des deux membres par 5 et/ou des puissances de 2.
Reprenons donc cette discussion.
si a n'est divisible ni par 2 ni par 5 (a = 1, 3, 7, 9) La relation (5) s'écrit :
6) 2p-k-q (2n-p – 1) = a 5k+q
Ni a ni 5 ne sont divisibles par 2, donc 2p-k-q = 1, donc p = k + q.
Mais k est le nombre de chiffres de 2p et (k + q) = p, est le nombre de chiffres moins 1 de 2n.
On peut donc dresser un tableau qui, pour tout n (colonne 1), donnera (colonne 2) : 2n puis (colonne 3) : p = nombre de chiffres de 2n moins 1. Dans une quatrième colonne, on calculera 2p, dans une cinquième : k, nombre de chiffres de 2p, d'où (colonne 6) : q = p – k.
Restera ensuite à voir pour quelles valeurs de n, p, k, q on a : 7) (2n-p – 1) = a 5p
On calculera donc (2n-p – 1) dans une septième colonne.
Voici un extrait du tableau :
n 2n p 2p k q (2n-p – 1)
1 2 0 1 1 -1 1
2 4 0 1 1 -1 3
3 8 0 1 1 -1 7
4 16 1 2 1 0 7
5 32 1 2 1 0 15
6 64 1 2 1 0 31
7 128 2 4 1 1 31
8 256 2 4 1 1 63
9 512 2 4 1 1 127
10 1 024 3 8 1 2 127 11 2 048 3 8 1 2 255 12 4 096 3 8 1 2 511 13 8 192 3 8 1 2 1 023 14 16 384 4 16 2 2 1 023
15 32 768 4 16 2 2 2 047 16 65 536 4 16 2 2 4 095
On n'y trouve que la solution n = 5, p = 1, a = 3 avec 0 zéro (q = 0), que nous connaissions déjà. En poussant les calculs jusqu'à n = 50 (limite pratique du tableur : N = 250 est un nombre à 16 chiffres), on n'en trouve pas d'autre. Il est donc raisonnable de penser que le cas b = 0 n'apporte pas de nouvelles solutions pour a = 1, 3, 7, 9.
si a = 5
La relation (5) s'écrit :
8) 2p-k-q (2n-p – 1) = 5k+q+1
Les raisonnements et les calculs sur n, p, k, q sont les mêmes qu'au cas précédent jusqu'à la colonne 6. Ensuite, il faut voir pour quelles valeurs de n, p, k, q on a :
9) (2n-p – 1) = 5p+1
Le même tableau peut être utilisé tel quel et, cette fois, il n'y a pas de solution du tout.
si a est une puissance de 2 (a = 2, 4, 8) Soit a = 2 (avec = 1, 2, 3).
La relation (5) s'écrit
10) 2p (2n-p –1) = 2 10k+q
soit, en divisant les deux membres de (5) par 2 à la puissance k + q + :
11) 2p-k-q- (2n-p –1) = 5k+q
Comme 5 n'est pas divisible par 2, on a 2p-k-q- = 1, donc p = k+ q+ , ou encore :q = p–k–.
Mais le problème est toujours d'examiner pour quelles valeurs de n, p, k, q, on a : 12) (2n-p – 1) = 5k+q
Le même tableau peut être utilisé tel quel et l'on constate qu'il ne comporte pas de puissance de 5 en colonne 7 – jusqu'à la limite pratique du tableur (n = 50) – et ne donne donc pas de nouvelle solution pour des valeurs "raisonnables" de n.
si a = 6
La relation (5) s'écrit, après division des deux membres par 2 à la puissance k + q + :
13) 2p-k-q-1 (2n-p – 1) = 3 × 5k+q
Comme ni 3 ni 5 ne sont divisibles par 2, on a 2p-k-q- = 1, donc p = k + q + , ou encore :q = p – k – .
Mais le problème est toujours d'examiner pour quelles valeurs de n, p, k, q, on a :
14) (2n-p – 1) = 3 × 5k+q
Le même tableau peut être utilisé tel quel et l'on constate qu'il ne comporte pas en colonne 7 d'autre puissance de 5 multipliée par 3 que 15 – jusqu'à la limite pratique du tableur (n = 50) – et ne donne donc pas de nouvelle solution pour des valeurs "raisonnables" de n.
Conclusion
Les deux seules solutions à la question Q1 a) sont 32 et 64.
Q1 b)
On considère cette fois encore le nombre N = 2n écrit en base dix : "abc…yz".
On demande à quelle condition N' = "ac…y" est une puissance de 2, soit : 2p. Si l'on note z le chiffre de droite, on a :
N' = (N – z) / 10.
On veut donc que : 10 × 2p = 2n – z Soit encore :
15) z = 2n – 5 × 2p+1 = 2p+1 (2n-p-1 – 5)
Traitons tout d'abord le cas singulier p = 0, qui correspond à N = 16 et N' = 1 = 20
Pour p ≥ 1, donc z = 4 ou 8, la relation (1) impose :
ou bien p = 1, z = 4 et (2n-p-1 – 5) = 1, ce qui est impossible car 6 n'est pas une puissance de 2
ou bien p = 1, z = 8 et (2n-p-1 – 5) = 2, ce qui est impossible car 7 n'est pas une puissance de 2
ou bien p = 2, z = 8 et (2n-p-1 – 5) = 1, ce qui est impossible car 6 n'est pas une puissance de 2.
Il n'y a donc pas d'autre solution que le cas singulier p = 0, qui correspond à N = 16 et N' = 1 = 20
Q2
Compte tenu du nota, les solutions sont à rechercher au sein de chacune des tranches dans lesquelles les puissances de 2 ont un nombre de chiffres donné. La taille d'une tranche ne peut être que de 3 ou 4 puissances de 2 consécutives (on peut même préciser que ces tailles varient cycliquement : 4 3 3, 4 3 3, etc.).
L'examen peut donc se faire aisément "à l'œil nu". Jusqu'à la limite pratique du tableur (n = 50), on ne trouve pas de solution.