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L ES TS AU PAYS IMAGINAIRE
L ES TS AU PAYS IMAGINAIRE
L'esprit divin s'est manifesté de façon sublime dans cette merveille de l'analyse, ce prodige d'un monde idéal, cet intermédiaire entre l'être et le non-être, que nous appelons la racine imaginaire de l'unité négative.
Gottfried Leibniz
1 I
NTRODUCTION1.1 Un nouveau décor
Les nombres réels peuvent se représenter sur une droite : la droite réelle. Forts de notre nouvel ensemble C qui contient R, la question se pose naturellement : comment représenter géométri- quement l'ensemble des nombres complexes ?
La nature même des nombres complexes, écrits de manière unique sous la forme x+iy où x et y sont des réels, nous invite à utiliser un repère à deux dimensions cette fois pour les représenter : un nombre complexe z =x+iy peut se représenter par un unique pointM, dans un plan muni d'un repère (que l'on choisira orthonormé an d'éviter les problèmes concernant les calculs de distances ou d'angles), en prenant (x;y) pour coordonnées. La partie réelle de z correspond à l'abscisse de M, la partie imaginaire à l'ordonnée, et en quelques sortes le +i joue le rôle du séparateur ; . Réciproquement par ce procédé, à tout point M(x;y) du plan on associe un unique nombre complexe z=x+iy.
Pour être précis dans notre discours, ce nouveau décor nécessite un nouveau vocabulaire :
LYCÉEBLAISEPASCAL
1
S.DELOBEL M.LUITAUD
Le plan muni d'un repère orthonormé direct(O;~u , ~v)s'appelle le plan complexe.
Le nombre complexez=x+iyest appelé axe deM(x;y)etM(x;y) est l'image dez=x+iy. Souvent on note zM ou m(en minuscule) l'axe de M.
L'axe(O;~u)est appelé axe réel et l'axe (O;~v) est appelé axe des imaginaires purs.
Dénition 1.
Ainsi, dire par exemple le point A a pour coordonnées (2 ; 3) est synonyme de le pointA a pour axe2 + 3i.
On peut voir l'axez=x+iycomme une sorte de coordonnées améliorées où l'abscisse xet l'ordonnéey sont résumées en un seul nombre. On dispose alors de toute la théorie des nombres complexes, et cela va entre autres faciliter les calculs avec des coordonnées...
Même si dans ce chapitre on identie des points et des nombres complexes, attention cependant au vocabulaire : on dit le point d'axe2 + 3i, et non pas le point2 + 3i...
L'identication faite ci-dessus entre un nombre complexe et un point peut se faire également avec un vecteur :
Le nombre complexez=x+iy est appelé axe du vecteurw~ xy
et souvent noté zw~. Le vecteur w~ xy
est le vecteur image dez=x+iy. Dénition 2.
Exercice 1
Dans le plan complexe :
1. Représenter le pointA d'axe2−3i; le point B(−1 + 2i); le point C tel que zC = 2i. 2. Tracer un représentant du vecteur−→w(1 + 3i); un représentant du vecteur −→
t d'axe 2−i. 3. Représenter −→s le vecteur somme de −→w et−→
t. Quelle est l'axe de−→s ? 1.2 Premières propriétés
Toutes les propriétés des coordonnées vues dans les classes antérieures se reformulent avec notre nouveau vocabulaire :
Le vecteur −−→
AB a pour axezB−zA. Propriété 3 (Axe d'un vecteur).
Soient −w→1 un vecteur d'axez−w→1 et−w→2 un vecteur d'axez−w→2, etλun nombre réel.
1. L'axe de −w→1+−w→2 estz−w→1+z−w→2. 2. L'axe de λ−w→1 est λz−w→1.
Proposition 4 (Axe d'une somme, d'un produit d'un vecteur par un réel).
Le milieuI du segment [AB] a pour axe zI = zA+zB 2 .
Le centre de gravité G d'un triangle ABC a pour axe zG= zA+zB+zC
3 .
Propriété 5 (Axe d'un milieu, axe du centre de gravité).
Exercice 2
Dans le plan complexe muni du repère orthonormé direct(O;~u , ~v), on considère les points A,B, C et D d'axeszA= 3 +i,zB =−1−i,zC = 2ietzD = 4 + 4i.
1. Faire une gure.
2. Démontrer de deux façons diérentes que ABCD est un parallélogramme.
3. Montrer que les points B, O et D sont alignés.
2 D
ISTANCES ET ANGLES2.1 Repérage polaire, module et arguments
On le sait depuis longtemps : tout point M du plan peut être repéré par ses coordonnées carté- siennes (x;y). Un autre repérage est possible : à l'aide des coordonnées polaires1 [r;θ].
r est le rayon polaire (c'est la distance OM) et θ est l'angle polaire (c'est l'angle −→u ;−−→
OM , déni à 2π près).
Le lien est le suivant :
x=rcosθ et y=rsinθ r se calcule facilement :r=OM =p
x2+y2.
Voyons ce que cela donne dans le cadre des nombres complexes :
z=x+iy
z=rcosθ+irsinθ z=r(cosθ+isinθ)
O ~u
~v
M
x y
r θ
L'écriture de z sous la forme z =r(cosθ+isinθ) est appelée forme trigonométrique de z.
r est le module dez etθen est un argument.
Dénition 6.
Ainsi :
On appelle module dez=x+iy le nombre réel positif|z|=p
x2+y2.
On appelle argument de z (z 6= 0) et on note arg(z) toute mesure en radians de l'angle orienté(−→u ;−−→
OM), où M est le point d'axe z. Dénition 7.
1. sauf pour l'origine O. Mais cela n'a de toute façon pas grand intérêt. . .
Nous disposons donc maintenant de deux formes d'écriture pour un nombre complexe : la forme algébrique et la forme trigonométrique. Il s'agit de savoir aisément passer de l'une à l'autre.
Exercice 3 Passage de la forme trigonométrique à la forme algébrique Écrire sous forme algébrique :
1. z1= 2 cos 4π3
+isin 4π3 2. z2=√
3 cos −π6
+isin −π6
Exercice 4 Passage de la forme algébrique à la forme trigonométrique Calculer le module et un argument, et écrire sous forme trigonométrique :
1. z3= 1 +i√ 3 2. z4= 2−2i
2.2 Propriétés du module et de l’argument
On a vu dans le précédent chapitre sur les nombres complexes que zz = Re(z)2+ Im(z)2. On peut reformuler ainsi cette propriété :
Pour tout z∈C, on a :zz =|z|2. Proposition 8 (Déjà vu...).
Les deux résultats suivants découlent immédiatement des dénitions de module et arguments.
Pour tout nombre complexe non nul z, on a : 1. |z|=|z|etarg(z) =−arg(z) [2π]. 2. | −z|=|z|etarg(−z) = arg(z) +π [2π].
Propriété 9 (Conjugué et opposé). M(z)
r θ
M0(z) r
−θ
M00(−z) r
θ+π
Soit z un nombre complexe.
1. z est réel équivaut à arg(z) = 0 [2π]ou arg(z) =π[2π]ouz= 0. 2. z est imaginaire pur équivaut àargz= π
2[2π]ou argz=−π
2[2π]ou z= 0. Proposition 10 (Arguments d'un réel, d'un imaginaire pur).
Comment se comportent les modules et les arguments lorsqu'on multiplie, que l'on divise, ou que l'on ajoute des nombres complexes ?
C'est ce que nous allons voir maintenant :
Pour tous nombres complexesz etz0 :
1. |z×z0|=|z| × |z0|etarg(z×z0) = arg(z) + arg(z0) [2π].
2. Pour tout entier naturel non nuln, on a :|zn|=|z|netarg(zn) =narg(z) [2π]
Propriété 11 (Produit).
1. Piste :
on travaille avec les formes trigonométriques :z=r(cosθ+isinθ)etz0=r0(cosθ0+isinθ0); on calculez×z0, on l'exprime sous forme trigonométrique (Pour cela, on aura besoin des formules
d'addition2) ;
on lit les modules et arguments dezz0sur l'expression obtenue.
2. Utiliser le 1. et une récurrence.
Preuve
Pour tous nombres complexes non nuls z etz0 :
z z0 = |z|
|z0| et arg
z z0
= arg(z)−arg(z0) [2π]
Propriété 12 (Quotient).
Astuce : l'idée est d'utiliser le résultat obtenu pour le produit (proposition11). Pour cela, remarquer que z= z
z0 ×z0et passer au module...
Idem pour les arguments.
Preuve
Exercice 5
Soit z=z3×z4 (oùz3 etz4 sont les nombres de l'exercice4).
Calculer le module et un argument de z. Exercice 6
1. Calculer le module et un argument de (1 +i)8.
2. Soit zn= (1 +i)n. Existe-t-il des entiersn tels queznsoit réel ? Si oui, lesquels ?
Et que se passe-t-il pour la somme de deux nombres complexes ? En général :|z+z0| 6=|z|+|z0|etarg(z+z0)6= arg(z) + arg(z0). Pour le module, on a cependant la propriété suivante (que l'on admet).
2. À connaître :cos (a±b) = cosacosb∓sinasinb et sin (a±b) = sinacosb±sinbcosa.
Pour tous complexes zetz0 on a :|z+z0|6|z|+|z0|. Propriété 13 (Inégalité triangulaire).
2.3 Liens des modules et arguments avec le plan complexe, géométrie
A etB sont deux points d'axes respectiveszA etzB. On a : 1. AB=|zB−zA|.
2. SiA etB sont distincts, alors(−→u ;−−→
AB) = arg(zB−zA) [2π].
Proposition 14.
Pour démarrer : faire un schéma, et placer le pointM tel que−→
AB=−−→
OM...
Preuve
Soient A, B, C etDquatre points d'axes respectives zA, zB, zC etzD. Alors : CD
AB =
zD−zC
zB−zA et
(−−→ AB;−−→
CD) = arg
zD−zC
zB−zA
[2π]. Corollaire 15.
À faire.
Pour le module, utiliser la compatibilité avec le quotient et la proposition précédente.
Pour l'argument, utiliser la relation de Chasles pour faire apparaître le vecteur~u, et pouvoir alors utiliser la proposition précédente.
Preuve
Exercice 7
Soient A(2−3i) etB(5−i) dans le plan complexe muni du repère(O;~u , ~v). On veut déterminer la nature du triangle OAB.
Méthode 1 : calculer les distancesOA,OB etAB. En déduire la nature du triangleOAB. Méthode 2 : déterminer le module et un argument du nombre complexezB−zA
zO−zA puis conclure.
Exercice 8
Déterminer et construire dans chaque cas l'ensemble des points M d'axez vériant : 1. |z−2−3i|= 5
2. |z−3|=|z−3i|
3. |iz+ 3|=|z+ 4 +i|
À l'aide du précédent chapitre sur les nombres complexes, et des propriétés vues dans ce chapitre, nous sommes maintenant en possession de diverses méthodes pour traduire le fait qu'un nombre complexe est réel ou imaginaire pur :
1. Pour traduire le fait qu'un nombre complexe Z est réel : Z réel ⇔Im(Z) = 0;
Z réel ⇔Z =Z;
Z réel ⇔arg(Z) = 0 [π]ou Z = 0.
2. Pour traduire le fait qu'un nombre complexe Z est imaginaire pur : Z imaginaire pur ⇔Re(Z) = 0;
Z imaginaire pur ⇔Z=−Z; Z imaginaire pur ⇔arg(Z) = π
2 [π]ou Z = 0. Méthode 16.
Exercice 9
Pour tout complexe z6= 1 +ion pose Z = z+ 1 + 3i z−1−i .
1. Déterminer et construire l'ensemble E des pointsM(z)du plan tels que Z soit imaginaire pur :
par une méthode algébrique ; par une méthode géométrique.
2. Vérier ensuite avec GeoGebra.
3 L
A NOTATION EXPONENTIELLEExercice 10
Soit f la fonction de RdansCdénie par f(θ) = cosθ+isinθ.
1. Montrer que, pour tous θ etθ0 dansR, on a :f(θ+θ0) =f(θ)×f(θ0). 2. Que vautf(0)?
3. À quelle fonction déjà rencontrée fait penser cette fonctionf?
D'après l'observation faite à l'exercice ci-dessus, il est commode de noter, pour tout réel θ :
eiθ = cosθ+isinθ.
Notation
Exercice 11
Placer dans le plan complexe et à l'aide du cercle trigonométrique ci-contre les points d'axes : ei0;ei2π;eiπ;eiπ2 ;ei2π3 .
Préciser la forme algébrique de chacun de ces nombres.
O ~u
~v
Avec cette notation, et à l'aide de toutes les propriétés du paragraphe2.2on obtient directement :
|eiθ|= 1 et arg eiθ
=θ eiθeiθ0 =ei(θ+θ0)
eiθ
eiθ0 =ei(θ−θ0) eiθ =e−iθ Pour tout n∈N:
eiθn
=einθ (Formule de Moivre) Proposition 17.
En version trigonométrique, remarquons que la formule de Moivre s'écrit également : (cosθ+isinθ)n= cos(nθ) +isin(nθ)
z est un nombre complexe non nul. L'écriture z =reiθ avec r = |z|et θ= arg(z) est appelée forme exponentielle de z.
Dénition 18 (Forme exponentielle).
Exercice 12 Lien entre la forme algébrique et la forme exponentielle
1. Écrire sous forme algébrique et représenter dans le plan complexe : z1 = 2ei5π6 . 2. Écrire sous forme exponentielle et représenter dans le plan complexe : z2 = 2−2i√
3. Exercice 13 Où l'on détermine de nouvelles valeurs remarquables de sinus et cosinus...
On considère les nombres complexes : z1 =eiπ3 ;z2=eiπ4 etZ = z1 z2. 1. Donner la forme exponentielle deZ.
2. Donner les formes algébriques de z1 etz2. En déduire la forme algébrique deZ. 3. En déduire les valeurs exactes decos12π etsin12π.
Exercice 14 Les formules d'Euler 1. Montrer quecosθ= eiθ+e−iθ
2 et quesinθ= eiθ−e−iθ
2i . Ce sont les formules d'Euler . 2. En déduire par exemple que cos2θ= 12(cos(2θ) + 1).
Exercice 15 Retrouver les formules d'addition
La notation exponentielle permet de mémoriser/retrouver facilement les formules de première : 1. En écrivant que eiaeib = ei(a+b), puis en prenant la partie réelle de chacun des deux
membres, retrouver la formule :cos(a+b) = cosacosb−sinasinb. 2. De même retrouver la formule donnantsin(a+b).
3. Grâce à la formule de Moivre, retrouver les formules donnantcos(2a) etsin(2a).