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Structures géométriques holomorphes sur les variétés complexes compactes

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4 série, t. 34, 2001, p. 557 à 571.

STRUCTURES GÉOMÉTRIQUES HOLOMORPHES SUR LES VARIÉTÉS COMPLEXES COMPACTES

P

AR

S

ORIN

DUMITRESCU

ABSTRACT. – We study holomorphic geometric structures on compact complex manifolds. We show that, contrary to the situation in the real domain, a holomorphic geometric structure on a compact complex manifold usually admits a “big” pseudogroup of local isometries. We exhibit very general conditions which imply that the pseudogroup of local isometries acts transitively.

2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS

RÉSUMÉ. – Nous étudions les structures géométriques holomorphes sur les variétés complexes compactes. Nous montrons que, contrairement au cas réel, une telle structure possède souvent un « grand » pseudogroupe d’isométries locales. Nous exhibons des conditions très générales qui garantissent l’existence d’une action transitive du pseudogroupe des isométries locales.

2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS

1. Introduction

L’étude des structures géométriques sur les variétés différentiables doit beaucoup de son développement actuel à l’immense œuvre d’Élie Cartan.

Avant d’introduire la définition rigoureuse du concept de structure géométrique, précisons qu’un champ de tenseurs holomorphe, un champ de plans holomorphe, une connexion affine holomorphe, ou encore une structure symplectique holomorphe sont des cas particuliers (mais importants) de structures géométriques holomorphes.

Contrairement à la géométrie réelle, l’hypothèse de l’existence d’une structure géométrique holomorphe sur une variété complexe compacte est une condition très restrictive pour la variété.

Le but de cet article est de montrer que, contrairement au cas réel, une structure géométrique holomorphe sur une variété complexe compacte possède souvent un « grand » pseudogroupe d’isométries locales. Dans ce sens, nous exhibons des conditions très générales qui garantissent l’existence d’une action transitive du pseudogroupe des isométries locales.

Le sujet de cet article nous a été proposé par Étienne Ghys. Nous tenons à le remercier ici pour son aide précieuse et pour ses encouragements constants.

1.1. Cadre géométrique

Pour définir rigoureusement le concept plutôt abstrait de structure géométrique, il est agréable de se placer dans le cadre des structures infinitésimales créé par Charles Ehresmann à cet effet.

Associons à une variété complexeM de dimensionnl’espace des germes en0 de tous les biholomorphismes d’un ouvert deCn qui contient0à valeurs dans un ouvert deM. Identifions

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deux éléments de cet espace s’ils ont le mêmer-jet en0(i.e. même polynôme de Taylor à l’ordre r en 0). La légitimité de cette opération est assurée par le fait que la relation d’équivalence

« avoir le même développement de Taylor en 0» ne dépend pas du choix d’un système de coordonnées locales). Nous admettrons que les éléments du quotient précédent s’organisent en un fibré principal au-dessus deM : le fibré desr-repères. Désignons-le parRr(M)et précisons que le fibré desr-repères est un fibré principal au-dessus deM de groupe structuralDr(Cn), oùDr(Cn)est le groupe desr-jets en0des biholomorphismes locaux deCnqui préservent0.

Ce groupe porte une structure naturelle de groupe algébrique. Par exemple, le fibré des1-repères s’identifie avec l’ensemble des bases de tous les espaces tangents à la variété etD1(Cn)n’est rien d’autre queGL(n,C).

Par la suite nous allons considérer aussi l’espace desr-jets en0d’applications holomorphes d’un ouvert deCpqui contient0à valeurs dans la variétéM. Il s’agit d’une variétéJr,p(M)qui fibre surM, la projection étant simplement l’évaluation en0.

Pour des précisions supplémentaires sur la théorie des fibrés des jets nous référons à [21] et à [3].

La définition suivante coïncide avec le concept de A-structure introduit dans [13] par M. Gromov.

DÉFINITION 1.1. – SoitZune variété quasiprojective (i.e. un ouvert de Zariski d’une variété projective) munie d’une action algébrique de Dr(Cn). Une structure géométrique de type Z et d’ordre rsur la variété complexeM est une application holomorpheDr(Cn)-équivariante φ:Rr(M)→Z, i.e.φ(s·g) =g1·φ(s),∀s∈Rr(M)et∀g∈Dr(Cn).

Une structure géométrique s’interprète également comme une section d’un fibré naturel construit au-dessus de la variété.

Une structure géométrique est dite de type algébrique affine si la variété Z est affine (par exemple, un champ de vecteurs est une structure géométrique de type algébrique affine, un champ de droites ne l’est pas).

Dans l’esprit de la définition précédente un champ holomorphe de formes quadratiques complexes sur l’espace tangent à M est une application holomorpheGL(n,C)-équivariante du fibré des 1-repères à valeurs dans l’espace vectoriel Z formée par les formes bilinéaires symétriques surCn. L’action deGL(n,C)surZest l’action usuelle obtenue par changement de base.

Plus généralement, un champ de tenseurs holomorphe de type (p, q)sur la variété M, qui est par définition une section holomorphe du fibré vectorielTMp(TM)q, se présente à la lumière de la définition 1.1 comme une structure géométrique d’ordre 1dont le type est la représentation(Cn)p(Cn)q deGL(n,C)(oùCn désigne la représentation duale de la représentation canonique).

Une connexion affine holomorphe sur une variété complexe de dimensionns’exprime dans une carte locale parn3 fonctions holomorphes à valeurs dans C: les célèbres coefficients de ChristoffelΓkij. Le type de cette structure est l’ensemble des0-jets de germes de connexion : Z =kij(0)|1i, j, kn} Cn3.La variétéZ est munie de l’action du groupeD2(Cn) obtenue de la manière suivante : l’image d’un germe de connexion en 0 par le germe d’un biholomorphisme local de Cn qui préserve0 est un autre germe de connexion en 0 dont le 0-jet ne dépend que du0-jet de la connexion de départ et du2-jet en0du biholomorphisme de transport. Pour plus de détails nous renvoyons à [3], [8].

Le jet d’ordre s d’une structure géométrique φ d’ordre r est une nouvelle structure géométrique d’ordre s+r. Si dans une carte locale de la variété φ est déterminée par une application à valeurs dans la variétéZ, son jet d’ordres, que nous notonsφ(s), s’exprime dans la même carte par les-jet de l’application initiale. Formellementφ(s)est une structure de type

e

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Js,n(Z), oùndésigne la dimension de la variété. Pour se convaincre que ceci se formalise bien et que le jet d’une structure de type algébrique affine est encore une structure de type algébrique affine nous référons à [3], [8].

Dans le cas particulier où la structure géométriqueφest telle que l’image deφdansZ est exactement uneDr(Cn)-orbite, nous avons aussi la terminologie deG-structure, le groupeG étant le stabilisateur dansDr(Cn)de l’orbite en question. Dans ce casGest un groupe structural pour le fibréRr(M).

Par exemple, un champ de formes quadratiques complexes sur l’espace tangent àM est une G-structure si le rang ne dépend pas du point.

Quand ce rang est en tout point maximal nous avons une métrique riemannienne holomorphe, qu’il convient d’envisager comme l’analogue complexe d’une métrique pseudo-riemannienne.

En effet, de manière analogue à la géométrie pseudo-riemannienne, à une métrique riemannienne holomorphe il est associé une unique connexion (holomorphe) de Levi-Civita, des courbes géodésiques (les géodésiques sont des courbes holomorphes dont le vecteur tangent est parallèle) et un tenseur de courbure.

Parmi les structures géométriques nous allons parfois distinguer celles qui sont rigides dans le sens de M. Gromov [13] : une structure géométriqueφd’ordrerest dite rigide s’il existe un entierltel que tout(r+l+ 1)-jet de biholomorphisme local deMqui préserve le(l+ 1)-jet de φest entièrement détérminé par sa partie d’ordrer+l.

Exemples : une connexion affine holomorphe ou bien une métrique riemannienne holomorphe sont des structures géométriques holomorphes rigides (l’explication réside essentiellement dans le fait que, pour ces deux structures géométriques, une isométrie locale qui fixe un point est entièrement détérminée par sa différentielle au point fixe).

Si la variété M est munie d’une structure géométrique φ, nous conviendrons d’appeler isométrie locale deφun biholomorphisme entre deux ouverts de M qui préserve la structure φ. L’ensemble des isométries localesIslocest un pseudogroupe pour la composition.

Deux points deM sont dans la même orbite du pseudogroupe des isométries locales s’il existe des systèmes de coordonnées centrés en ces points dans lesquels les expressions deφsont les mêmes.

Quand le pseudogroupeIsloc agit transitivement surM, la structure géométriqueφest dite localement homogène. Cela veut dire qu’il existe une unique forme locale pour la structure.

1.2. Exemples et motivations

Si le théorème classique de Darboux assure, dans le cas d’une structure symplectique, l’existence d’une action transitive du pseudogroupe des isométries locales, ceci est entièrement faux lorsqu’il s’agit d’une métrique riemannienne holomorphe. Dans ce dernier cas nous disposons d’un invariant local fort qui est la courbure.

Pour la suite de cet article, nous nous plaçons sur une variété complexe compacte connexeM munie d’une structure géométrique holomorpheφ(en général, l’existence d’une telle structure n’est nullement assurée, mais impose des conditions restrictives surM). Remarquons que tout invariant scalaire de la structureφest constant surM en tant que fonction holomorphe définie sur une variété compacte.

Ceci suffit dans certains cas pour conclure à l’homogénéité locale de la structure. Considérons, par exemple, une métrique riemannienne holomorphe sur une surface complexe compacteS. Il n’est pas difficile de définir la notion de courbure sectionnelle (voir [8]) qui est une fonction holomorphe surS. La compacité deSimplique que cette courbure sectionnelle est constante et, par conséquent, un argument classique montre que la métrique est localement homogène.

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Le théorème suivant, dû à Wang, constitue un deuxième exemple où la remarque précédente permet de classifier toutes les variétés complexes compactes dont le fibré tangent est holomor- phiquement trivial (une trivialisation holomorphe du fibré tangent est un exemple particulier de G-structure holomorphe oùGvautId) :

THÉORÈME 1.2 (Wang). – SoitM une variété complexe compacte de dimensionn dont le fibré tangent est holomorphiquement trivial (i.e. il existensections holomorphes du fibré tangent, en chaque point linéairement indépendentes). Alors M est nécessairement un quotient d’un groupe de Lie complexeGpar un réseau cocompactΓ.

Le théorème précédent affirme, en particulier, qu’une trivialisation holomorphe du fibré tangent d’une variété complexe compacte est une structure géométrique localement homogène.

La preuve du théorème de Wang est facile, mais instructive. Considérons une famille X1, . . . , Xn,de champs de vecteurs holomorphes surM qui forment en chaque point une base de l’espace tangent. Les crochets de Lie de ces champs, pris deux à deux, sont :

[Xi, Xj] =

n

k=1

ckijXk.

Les fonctionsckij ainsi définies sont holomorphes et, par conséquent, constantes. Ceci montre que les champsXiforment une algèbre de Lie de dimension finie. D’après un résultat classique, dû à S. Lie, il s’agit de l’algèbre de Lie G des champs de vecteurs invariants à droite d’un groupe de Lie complexe connexe et simplement connexe G agissant à gauche sur M. Cette action est nécessairement transitive etM s’identifie au quotient deGpar un réseau cocompact Γ. Les translations à gauche de Gsont des biholomorphismes globaux de G/Γ qui agissent surG par la représentation adjointe. Ce qui montre qu’en général l’action précédente n’est pas isométrique. En revanche, dans une carte locale de M, donnée par une section locale de la projectionG→G/Γ, les translations à droite définissent des isométries locales. Le parallélisme est donc une structure localement homogène, qui n’est pas globalement homogène. Le lecteur habitué au langage des G-structures remarquera que dans le cas où G n’est pas abélien la structure n’est pas intégrable.

En revanche, il existe des structures géométriques holomorphes sur des variétés compactes qui ne sont pas localement homogènes (même pas sur un ouvert dense) : la droite projective P1(C)munie de deux champs de vecteurs holomorphes linéairement indépendants fournit un exemple de variété complexe compacte qui possède une structure géométrique holomorphe non localement homogène. En effet, nous pouvons fabriquer l’invariant scalaire qui, au pointmde P1(C), vaut la valeur enmde la fraction rationnelle « quotient » des sections en question. Cette fraction rationnelle n’est pas constante et elle sépare les orbites du pseudogroupeIsloc.

1.3. Énoncés des résultats

Nous pouvons à présent énoncer nos principaux résultats. Un premier théorème que nous avons obtenu se situe dans le cadre kählérien :

THÉORÈME 1. – SoitM une variété kählérienne compacte connexe dont la première classe de Chern est nulle. Alors toute structure géométrique holomorphe de type algébrique affine sur M est localement homogène.

L’hypothèse faite sur le type de la structure ne peut pas être évitée. Ceci devient entièrement clair si nous considérons un plongement holomorphe d’un tore algébrique dans un espace

e

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projectif. Ce plongement est une structure géométrique rigide non localement homogène (car non constante).

En revanche, toute application holomorphe d’une variété compacte dans une variété affine est constante et donc localement homogène en tant que structure géométrique.

Un exemple plus élaboré de structure géométrique holomorphe (de type non affine) non localement homogène sur un tore est inspiré par la construction suivante due à E. Ghys [11].

Considérons un toreT =C2et supposons qu’il existe une forme linéaire π:C2C qui envoieΛsur un réseauΛ deC. Par abus de notation nous désignons aussi parπla projection deT sur la courbe elliptiqueC/Λ. Soitf une fonction méromorphe non constante surC/Λ; considérons surT la forme différentielle méromorpheω˜=ω+π(f dz), oùω est une forme holomorphe globale surT. Il n’est pas difficile de s’assurer queω˜est fermée et que le feuilletage holomorophe défini parω˜ en dehors de ses pôles se prolonge en un feuilletage holomorphe non singulier surTqui s’exprime en coordonnées locales :

f(z1)dz1+dz2= 0.

Contrairement au feuilletage linéaire défini parω, le feuilletage donné parω˜n’est pas homogène : il n’est pas invariant par les translations deT dans la direction∂z

1. Ceci montre que la structure géométriqueφobtenue par la juxtaposition de ce feuilletage et de la métrique plate héritée parT de la métrique canoniquedz21+dz22n’est pas localement homogène.

Le corollaire 4 que nous allons voir un peu plus loin affirme que de telles structures ne peuvent exister sur des tores complexes qui n’admettent pas de fonctions méromorphes non constantes.

Remarquons aussi que la structure géométrique φ n’est pas une G-structure car la droite tangente au feuilletage deω˜est isotrope (pour la métrique) en certains points deTet non isotrope en d’autres.

Un complément intéressant au théorème précédent est le résultat récent de J.-M. Hwang et N. Mok qui montrent dans [17] que sur les variétés projectives unirationnelles toutes les G-structures d’ordre1 holomorphes réductives et irréductibles sont plates (en particulier, localement homogènes).

En ce qui concerne les structures rigides notre résultat se précise de la manière suivante : THÉORÈME 2. – SoitM une variété kählérienne compacte connexe dont la première classe de Chern est nulle. Si M possède une structure géométrique holomorphe rigide de type algébrique affineφ, alorsM a un revêtement fini qui est un tore.

Exemple d’application : il n’existe pas de structure géométrique holomorphe rigide de type algébrique affine sur une surfaceK3.

Ces variétés supportent en revanche des structures symplectiques holomorphes ou bien des formes volumes holomorphes [2].

Le résultat 2 généralise un théorème de M. Inoue, S. Kobayashi et T. Ochiai [18] valable dans le cas particulier des connexions affines. Il importe de mentionner ici que la présence d’une connexion affine holomorphe ou (à plus forte raison) d’une métrique riemannienne holomorphe sur une variété kählérienne compacte entraîne automatiquement l’annulation de la première classe de Chern de la variété [18]. Le résultat de [18] règle entièrement le cas des connexions affines holomorphes et celui des métriques riemanniennes holomorphes sur les variétés kählériennes compactes : seuls les tores admettent des telles structures et celles-ci sont nécessairement localement homogènes (plates dans le cas des métriques).

Pour ce qui est des structures géométriques rigides, un théorème de M. Gromov [13] montre qu’il existe un ouvert denseU deM invariant par le pseudogroupe des isométries locales deφ

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dans lequel les orbites de ce pseudogroupe sont les fibres d’une fibration holomorphe localement triviale. Nous avons le résultat suivant :

THÉORÈME 3. – Soit φ une structure géométrique holomorphe rigide sur une variété complexe compacteM de dimensionn. Sipest la dimension des orbites du pseudogroupe des isométries locales deφsur un ouvert dense invariantU deM etdest la dimension algébrique deM, alorsp+dn.

Pour d= 0, nous avons le corollaire suivant qui nous permet, dans le cas particulier des tenseurs holomorphes rigides, de retrouver un résultat de F.A. Bogomolov [4].

COROLLAIRE 4. – SiMest une variété complexe compacte sans fonctions méromorphes non constantes, alors toute structure géométrique holomorphe rigide surMest localement homogène en dehors d’un sous-ensemble analytique deM.

La suite de ce papier s’organise selon le plan suivant. La section 2 est exclusivement technique et explique le passage d’une isométrie formelle à une isométrie locale convergente. La section 3 traite du cadre kählérien et contient la preuve des théorèmes 1 et 2. La section 4 étudie les liens entre le pseudogroupe des isométries locales d’une structure géométrique holomorphe et le corps des fonctions méromorphes de la variété. Nous y trouverons les démonstrations des théorèmes 3 et 4. La dernière section aborde quelques conjectures et de nouvelles directions d’étude.

2. Passage d’une isométrie formelle à une isométrie convergente

Considérons une structure géométrique holomorpheφsur une variété complexeM. Sim, m sont deux points deM, le problème de l’existence d’une isométrie localef qui envoiemsur mcomporte d’abord un nombre dénombrable d’obstacles algébriques : pour tout entiersnous devons trouver une transformation localefsqui envoiemsurm et qui préserve les-jet de la structure :Js(fsφ)(m) =Jsφ(m).

Comme la structure est d’ordrer, les solutions de cette équation aux dérivées partielles doivent être cherchées dans l’ensemble des s+r-jets de biholomorphismes locaux. Une solution de l’équation ci-dessus s’appelle un s+r-jet isométrique. Il s’agit dus+r-jet en un point d’un biholomorphisme local deM dansM qui préserve les-jet de la structure au point considéré. La question de l’existence d’uns+r-jet isométrique constitue un problème purement algébrique.

Avoir résolu ce problème pour toutes les valeurs desapporte une solution formelle. Pour trouver une isométrie locale il faut encore s’attaquer à un problème d’analyse : trouver une solution formelle qui converge.

L’ensemble dess+r-jets isométriques (pour tous les couples(m, m)) forme un pseudogroupe pour la composition noté Iss+r. Deux points de M se trouvent dans la même orbite du pseudogroupe Iss+r s’il existe des systèmes de coordonnées dans lesquelles la structure géométrique admet le même développement de Taylor à l’ordres, aux deux points en question.

Si le pseudogroupe dess+r-jets isométriques agit transitivement surM, pour touts∈N, nous disons que la structure géométrique φest formellement localement homogène. Ceci est équivalent au fait que le s-jet de la structure φ a la propriété que Imφ(s) ⊂Js,n(Z) est formée d’une seule orbite de Js,n(Z)sous l’action deDs+r(Cn). Autrement dit,φ(s)est une G-structure pour tout entiers. En particulier une structure géométrique localement homogène est nécessairement uneG-structure.

Le but de cette section est de montrer qu’une structure géométrique holomorphe est formellement localement homogène si et seulement si elle est localement homogène. Ce résultat est une conséquence du théorème de Cartan–Kähler [6].

e

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Précisons avant tout ce que nous entendons par système d’équations aux dérivées partielles.

ConsidéronsJr(N, M)→N le fibré desr-jets d’applications d’une variétéN à valeurs dans une variétéM.

DÉFINITION 2.1. – Un système d’équations aux dérivées partielles est une partie fermée P deJr(N, M). Une solution deP est une application deN dansM dont ler-jet en tout point appartient àP.

Pour une introduction aux notions de prolongement et d’intégrabilité formelle d’un système d’équations aux dérivées partielles nous référons à [6].

THÉORÈME 2.2 (Cartan–Kähler). – SoitP⊂Jr(N, M)un système formellement intégrable d’équations aux dérivées partielles analytiques. Alors pour tout p∈P il existe une solution locale analytique deP, dont ler-jet en un point vautp.

Siφest une structure géométrique holomorphe d’ordrersur une variété complexeM, nous rappelons que l’ensembleIss+r⊂Js+r(M, M)dess+r-jets isométriques est formé par les jets d’applications deM dansM qui préservent les-jet deφ. Trouver une isométrie locale de φrevient à résoudre une équation aux dérivées partielles, dans le sens qu’il faut construire un biholomorphisme local deM dansM tel que en tout point de son domaine de définition son r-jet appartient àIsr.

Dans la preuve du lemme suivant, nous expliquons que le système d’équations aux dérivées partielles qui caractérise une isométrie d’une structure géométrique holomorphe formellement localement homogène devient formellement intégrable après un nombre fini de prolongements.

La conclusion du lemme sera alors une conséquence du théorème de Cartan–Kähler.

LEMME 2.3. – Si φ est une structure géométrique holomorphe formellement localement homogène sur une variété complexeM, alorsφest localement homogène.

Démonstration. – Commeφest formellement localement homogène, tous sess-jetsφ(s)sont des G-structures. Nous pouvons donc identifier la structureφ(s) à un sous-fibré principal du fibré des repèresRs+r(M)de groupe structuralIss+r(m), le groupeIss+r(m)étant formé par les s+r-jets isométriques qui fixent un point deM (ceci ne dépend pas du point car φ est formellement localement homogène). Il s’agit d’un sous-groupe algébrique deDs+r. Il est donc vrai queIss+r⊂Js+r(M, M)est une sous-variété complexe qui fibre surM ×M avec fibre Iss+r(m).

Considérons les images successives des projectionsIss+r→Isr, pours0. Il s’agit d’une suite décroissante de fibrés principaux au-dessus deM ×M dont les groupes structuraux sont des sous-groupes algébriques deIsr(m). Cette suite stabilise. NotonsFrle fibré minimal ainsi obtenu. Il s’agit d’un sous-fibré principal deIsr.

De manière similaire, en considérant les projections minimales sur tous les fibrésIss+r, nous construisons une suite de fibrés principaux

· · · →Fr+1→Fr,

qui se projettent surjectivement les uns sur les autres. Chaque fibré Fs+r est un sous-fibré principal deIss+r.

Nous venons de prouver que touts+r-jet isométrique se relève en uns+r+ 1-jet isométrique.

Ceci est une condition plus faible que l’intégrabilité formelle du système d’équations aux dérivées partiellesPdonné parIsr. Pour avoir l’intégrabilité formelle dePil suffit de démontrer que pourssuffisament grand le fibréIss+rreprésente exactement le prolongement d’ordresde P. Ceci résulte, par exemple, d’un théorème dû à A. Grothendieck et D. Mumford [6] (chap.

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8 prop. 3.10). Nous pouvons aussi appliquer le résultat conjecturé par E. Cartan et démontré récemment par B. Malgrange [23] qui affirme que tout système différentiel analytique devient involutif au point générique après un nombre fini de prolongements.

Le théorème de Cartan–Kähler permet alors de conclure queφest localement homogène. ✷

3. Variétés de Calabi–Yau

Nous nous intéressons dans cette section aux structures géométriques holomorphes sur les variétés complexes compactes admettant une métrique de Kähler à courbure de Ricci nulle (Ricci plate). D’après les travaux de S.T. Yau [28], il s’agit précisément des variétés complexes compactes kählériennes dont la première classe de Chern est nulle, les variétés dites de Calabi–

Yau. Pour des exemples intéressants de ce type de variétés nous référons à [2]. Dans ce contexte, notre principal résultat est le suivant :

THÉORÈME 1. – SoitM une variété kählérienne compacte connexe dont la première classe de Chern est nulle. Alors toute structure géométrique holomorphe de type algébrique affine sur M est localement homogène.

La preuve se fait en deux étapes. Dans la première étape il est montré que l’existence d’une métrique de Kähler–Ricci plate sur la variété force tous les champs de tenseurs holomorphes à être parallèles, c’est-à-dire invariants par le transport parallèle de la métrique en question. Il s’agit d’une technique classique due à S. Bochner et S. Kobayashi. Il importe de mentionner ici que cette même technique a été utilisée par S. Kobayashi [19] pour prouver que le fibré tangent d’une variété complexe compacte kählérienne dont la première classe de Chern est nulle n’est pas instable dans le sens de F. Bogomolov.

THÉORÈME 3.1 (Bochner, Kobayashi). – SoitMune variété complexe compacte kählérienne munie d’une métrique de Kähler dont la courbure de Ricci est nulle. Alors tout champ de tenseurs holomorphe surM est parallèle. En particulier, un champ de tenseurs holomorphe surM qui s’annule en au moins un point est identiquement nul.

Avant d’esquisser la preuve du théorème précédent il est utile de rappeler que la présence d’une métrique kählérienne permet de considérer la dérivée covariante d’un champ de tenseurs.

En particulier, si θ est un champ de tenseurs holomorphe et X est un champ de vecteurs holomorphe, la dérivée covariante Xθ du champ θ, dans la direction X, est un champ de tenseurs holomorphe du même type queθ. L’opération précédente étant tensorielle enX, elle fournit un champ de tenseurs holomorphe∇θqui n’est rien d’autre que la variation infinitésimale deθpar le transport parallèle (le champ de tenseursθest invariant par le transport parallèle de la métrique si et seulement si∇θ= 0).

Rappelons aussi qu’une métrique kählérienne induit des métriques hermitiennes canoniques sur tous les fibrés des tenseurs de la variété. Par la suite, la norme d’un tenseur sera prise par rapport à cette métrique hermitienne, après le choix préalable d’une métrique de Kähler.

La preuve du théorème de Bochner–Kobayashi repose sur la formule suivante, valable, dans le cas où la courbure de Ricci est nulle , pour tout champ de tenseursθ:

∆(||θ||2) =||∇θ||2,

∆étant le laplacien de la métrique agissant sur les fonctions (voir [14], chap. 5).

Nous en déduisons que le laplacien de la fonction||θ||2est en tout point positif. Or, pour toute fonctionf définie surM,∆f ·vol est une forme exacte de degré maximal. Par le théorème de Stokes

M∆||θ||2·vol= 0et donc∆||θ||2= 0. Ceci entraîne∇θ= 0.

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Dans les articles [19], [20] l’auteur utilise le théorème de Bochner pour démontrer l’inexis- tence de certain types de tenseurs holomorphes sur les variétés kählériennes compactes.

Le lemme suivant termine la preuve du théorème 1 :

LEMME 3.2. – SoitM une variété complexe qui a la propriété que tout champ de tenseurs holomorphe surMqui s’annule en au moins un point est identiquement nul. Alors toute structure géométrique holomorphe de type algébrique affine surM est localement homogène.

Nous faisons remarquer que le critère énoncé dans le lemme précédent est nécessaire et suffisant.

Démonstration. – La preuve se fait par l’absurde. Considérons surM une structure géomé- trique holomorphe d’ordreret de type algébrique affineφqui ne soit pas localement homogène.

Par définition, φest une application holomorpheDr(Cn)-équivariante du fibré desr-repères Rr(M)dans uneDr(Cn)-variété affineZ, oùndésigne la dimension complexe deM.

D’après le lemme 2.3 la structureφn’est pas formellement localement homogène et donc il existe un entierstel que le pseudogroupeIss+rdess+r-jets isométriques n’est pas transitif sur M. Il est équivalent de dire que les-jetφ(s):Rs+r(M)→Js,n(Z)de la structureφest tel que l’image deφ(s)dansJs,n(Z)contient au moins deuxDs+r-orbites.

D’après un résultat classique de théorie des invariants pour les groupes algébriques (voir, par exemple, [27]) il existe un plongement algébrique Ds+r(Cn)-équivariant de la variété affineJs,n(Z)dans un espace vectoriel complexe de dimension finie V(s) muni d’une action algébrique linéaire du groupeDs+r(Cn). Il est, par conséquent, légitime de remplacer la variété affineJs,n(Z)par un espace vectorielV(s)muni d’une action linéaire algébrique deDs+r(Cn).

Choisissons une orbite X de dimension minimale parmi les orbites incluses dans l’image Imφs. Désignons parXl’adhérence deXdansV(s)et parImφ(s)l’adhérence deImφ(s)dans V(s). Il n’y a pas d’ambiguïté car dans ce cas l’adhérence dans la topologie de Zariski coïncide avec l’adhérence dans la topologie usuelle (voir [25], ch. 10).

L’ensembleX est un ferméDs+r-invariant deImφ(s) tel queX∩Imφ(s)=∅,etImφ(s) n’est pas inclus dansX. La seule affirmation non triviale est la dernière. Elle est assurée par le choix deX puisque, d’après un résultat fondamental de la théorie des actions algébriques ([16], 8.3), l’ensembleX\Xest une union d’orbites de dimension strictement inférieure à la dimension deX.

Soit I l’idéal des fonctions régulières surImφ(s) qui s’annulent sur le ferméX. Il existe dansI un sous-espace vectoriel non trivial de dimension finieDs+r(Cn)-invariant ([16], 8.6).

Considérons(F1, . . . , Fl),une base de cet espace vectoriel et construisons le morphisme régulier Ds+r(Cn)-invariantT, donné par

T:v∈Imφ(s)

F1(v), . . . , Fl(v)

Cl.

L’application T s’annule surX. La compositionT ◦φ(s) fournit une application holomorphe non triviale Ds+r(Cn)-équivariante, du fibré Rs+r(M) dans Cl avec la propriété que 0∈Im(T◦φ(s)).

Montrons à présent que, quitte à modifier légèrement l’application T, elle descend en une application non triviale définie sur le fibré des1-repères.

Le groupe structural du fibré dess+r-repères estDs+r(Cn). Il existe une projection cano- niqueDs+r(Cn)→D1(Cn) =GL(n,C)qui associe à chaques+r-jet de biholomorphisme son1-jet sous-jacent. Le noyau de cette projection est un sous-groupe distinguéH.

Nous montrons à présent queH est un groupe unipotent (il s’agit d’un résultat classique).

Pour cela nous faisons agir H fidèlement sur un espace vectoriel de dimension finie, de sorte

(10)

que, dans une base judicieusement choisie, chaque élément deH sera représenté par une matrice triangulaire supérieure dont tous les coefficients diagonaux sont égaux à1. En effet, le groupe Ds+r(Cn)agit linéairement sur l’espace vectorielH,dess+r-jets en0de germes de fonctions holomorphes deCn à valeurs dansC. NotonsPil’espace vectoriel des polynômes homogènes ennvariables, de degréi. Alors

H=P1⊕ · · · ⊕ Ps+r.

Nous considérons le drapeau deHformé par les sous-espaces vectoriels Hi=Pi⊕ · · · ⊕ Ps+r.

L’action deDs+r(Cn)surH, induit une action algébrique linéaire deHsurH, qui laisse stables les sous-espaces vectorielsHi. De plusHagit trivialement surHs+ret sur les espaces quotients Hi/Hi+1,∀i, 1is+r−1.Ceci montre queHest unipotent.

Un résultat classique de la théorie des représentations algébriques des groupes unipo- tents ([16], 17.5) assure que l’action de H ⊂Ds+r(Cn) induit sur l’espace but Cl de l’ap- plicationT◦φ(s):Rs+r(M)Clune filtration

Cl=V0⊃V1⊃ · · · ⊃Vp={0},

avec la propriété queHagit trivialement sur les quotientsVi/Vi+1, pour touti∈ {1, . . . , p1}. Comme l’imageIm(T ◦φ(s))de l’applicationT◦φ(s)ne se réduit pas au point0,il existe au moins un indicei∈ {1, . . . , p−1}pour lequelIm(T◦φ(s))⊂Vi et l’image de l’ensemble Im(T◦φ(s))par la projectionpi:Vi→Vi/Vi+1n’est pas réduite au point0. Alors l’application pi◦T ◦φ(s):Rs+r(M)→Vi/Vi+1 a une image non triviale qui contient 0. Comme cette application est Ds+r(Cn)-équivariante et H agit par l’identité sur Vi/Vi+1, elle passe au quotient en une application

pi◦T◦φ(s):R1(M)→Vi/Vi+1,

Ds+r(Cn)/H=GL(n,C)-équivariante. L’image depi◦T◦φ(s)est non triviale et contient0.

CommeGL(n,C)est réductif, la représentationVi/Vi+1est une somme directe de représenta- tions irréductibles. Parmi ces représentations irréductibles il en existe au moins une dans laquelle l’image de l’applicationpi◦T◦φ(s)est non triviale (et contient0). Or, toute représentation irré- ductible deGL(n,C)est facteur direct d’une représentation(Cn)p((Cn))q. Ceci résulte, par exemple, de la description des représentations irréductibles du groupeGL(n,C)[9].

L’application GL(n,C)-équivariante de R1(M) dans(Cn)p((Cn))q est un champ holomorphe de tenseurs de type (p, q) sur M qui s’annule en au moins un point sans être identiquement nul. C’est la contradiction recherchée. ✷

Nous démontrons maintenant le théorème 2. – La preuve s’appuie essentiellement sur un théorème de décomposition dû à A. Beauville [2] (voir aussi [22]) qui affirme que toute variété kählérienne compacteM dont la première classe de Chern est nulle admet un revêtement fini M˜ qui est biholomorphe au produit d’un tore complexeTet d’une variété kählérienne compacte simplement connexeN dont la première classe de Chern est nulle.

Si la variété M est munie d’une structure géométrique holomorphe rigide φ, il en est de même du revêtement M˜ =T ×N qui hérite d’une structure rigide φ. Pour démontrer que le˜ facteurN est trivial nous commençons par munirN d’une structure géométrique holomorphe

e

(11)

rigide. Nous remarquons d’abord que le fibré des r-repères Rr( ˜M) admet Rr(T)×Rr(N) comme sous-fibré principal. OrRr(T)est le produitT ×Dr(Ct), oùtdésigne la dimension complexe du toreT. Ceci implique que le fibréRr( ˜M)contientRr(N)×T comme sous-fibré principal (le groupe structural admet une réduction au groupeDr(Cn), oùnest la dimension complexe de N). L’espace but étant une variété affine, la restriction de l’application φ˜ au produitRr(N)×T factorise en une applicationψdéfinie surRr(N). Il s’agit d’une structure géométrique holomorphe rigide de type algébrique affineψsurN.

La proposition suivante achève la preuve du théorème 2.

PROPOSITION 3.3. – Il n’existe pas de structure géométrique holomorphe rigide de type algébrique affine sur les variétés kählériennes compactes simplement connexes dont la première classe de Chern est nulle.

Démonstration. – Supposons par l’absurde qu’il existe une structure géométriqueψportée par une variété complexeN, le couple(N, ψ)ayant les propriétés requises par les hypothèses de la proposition.

D’après le théorème 1, la structureψest localement homogène. Un résultat classique démontré pour la première fois par K. Nomizu [26] dans le cas des métriques riemanniennes analytiques et généralisé par M. Gromov aux structures géométriques analytiques rigides [13], affirme que sur les variétés simplement connexes une isométrie locale proche de l’identité se prolonge en une isométrie globale. Par ailleurs, deux points suffisamment proches deM qui sont reliés par une isométrie locale sont aussi reliés par une isométrie locale proche de l’identité (voir, par exemple, [3]).

En résumé, le groupe (de Lie complexe) des isométries globales agit transitivement surN et la variétéNest, par conséquent, un espace homogène. Fixons un pointxdansNet considérons alors X1, . . . , Xn des champs de vecteurs holomorphes sur N tels que X1(x), . . . , Xn(x) forment une base deTxN (nest la dimension complexe deN). Par le théorème de Bochner–

Kobayashi le champ de tenseurs holomorphe X1∧ · · · ∧Xn est partout non nul. La variété N est donc une variété parallélisable quotient d’un groupe de Lie complexeGpar un réseau cocompactΓ. Ceci est absurde carNest simplement connexe. ✷

3.1. Applications dans un cadre non kählérien

Dans le travail [10], É. Ghys étudie des variétés complexes compactes obtenues par déformations des structures complexes sur les espaces homogènes deSL(2,C).

L’idée est de considérer un réseau cocompact Γ de SL(2,C) et de perturber l’action par translations à droite de Γ sur SL(2,C) de manière que le quotient soit toujours une variété.

L’auteur prouve qu’il existe des morphismes de groupe u: Γ→SL(2,C) tels que l’action à droite deΓsurSL(2,C)donnée par :

(m, γ)∈SL(2,C)×Γ→u(γ1)mγ∈SL(2,C)

soit libre et totalement discontinue. Le quotient est une variété complexe compacte M(u,Γ) sur laquelle la métrique de Killing de SL(2,C) induit une métrique holomorphe. Il existe des morphismesupour lesquels les variétésM(u,Γ)ne possèdent aucun champ de vecteurs holomorphe non nul. Il est prouvé dans [10] que tout tenseur holomorphe sur une variété de typeM(u,Γ)se relève en un tenseur holomorphe surSL(2,C)invariant par l’action à droite de SL(2,C)et par l’action à gauche deu(Γ). En particulier, tout tenseur holomorphe surM(u,Γ) est localement homogène. Nous montrons le même résultat pour les structures géométriques d’ordre supérieur :

(12)

PROPOSITION 3.4. – Toute structure géométrique holomorphe de type algébrique affine sur M(u,Γ)est localement homogène.

Démonstration. – Supposons par l’absurde qu’une variété M(u,Γ) possède une structure géométrique de type algébrique affine non localement homogène. Le lemme 3.2 implique alors l’existence d’un tenseur holomorphe surM(u,Γ)qui, sans être identiquement nul, s’annule en au moins un point. Ceci est absurde : ce tenseur devrait être localement homogène. ✷

4. Isométries locales et fonctions méromorphes

Nous étudions ici le rapport entre la dimension des orbites du pseudogroupe des isométries locales de φet la dimension algébriquedde la variété ambiante M. Dans cette section nous faisons l’hypothèse supplémentaire que la structure géométrique φ est rigide. Notre résultat s’énonce de la manière suivante :

THÉORÈME 3. – Soit φ une structure géométrique holomorphe rigide sur une variété complexe compacteM de dimensionn. Sipest la dimension des orbites du pseudogroupe des isométries locales deφsur un ouvert dense invariantU deM etdest la dimension algébrique deM alorsp+dn.

Démonstration. – Considérons une structure géométrique holomorphe rigideφ, d’ordreret de typeZ. Pour tout entier positifsnous considérons les-jet de la structureφ, donné par une application holomorpheD(r+s)(Cn)-équivarianteφ(s) deR(r+s)(M)dans uneD(r+s)(Cn)- variété quasiprojectiveZ(s). La rigidité de la structure géométriqueφimplique que, pour uns suffisamment grand, deux points deM sont dans la même orbite du pseudogroupe des isométries locales de φsi et seulement si les deux fibres de R(r+s)(M)situées au-dessus de ces points s’envoient parφ(s)sur une même orbite deZ(s).

Le théorème de Rosenlicht (voir [27]) affirme qu’il existe une stratification invariante sous l’action deD(r+s)(Cn)

Z(s)=Z0⊃ · · · ⊃Zl,

avec la propriété queZi+1 est un fermé deZi et que les fonctions rationnelles surZi qui sont D(r+s)(Cn)-invariantes séparent les orbites deZi\Zi+1.

L’ouvert dense invariantU sur lequel les orbites du pseudogroupe des isométries locales sont les fibres d’une fibration est construit de sorte queφ(s)soit de rang constant surR(r+s)(M)|U, l’image deR(r+s)(M)|U parφ(s)tombe dans unZi\Zi+1, tandis que l’image deR(r+s)(M) est incluse dansZi.

Considérons une petite bouleD, de dimension complexen−p, centrée en un point deU et transverse aux orbites du pseudogroupe des isométries locales. Deux pointsm, m de ce disque s’envoient parφ(s)sur des orbites différentes deZi\Zi+1.Il existe donc une fraction rationnelle invarianteF, surZi, qui sépare ces deux orbites deZi\Zi+1.La fonction méromorpheF◦φ(s) descend en une fonction méromorphe surMqui prend des valeurs distinctes et bien définies aux pointsmetm.

Les fonctions méromorphes sur M séparent donc les points de D. Cela montre que le corps des fonctions méromorphes sur M contient au moins n−p éléments algébriquement indépendants. ✷

Dans le cas particulier des variétés complexes qui n’admettent pas de fonctions méromorphes non constantes nous obtenons le corollaire important 4 qui affirme que toutes les structures géométriques holomorphes rigides sur ces variétés sont nécessairement localement homogènes en dehors d’un sous-ensemble analytique.

e

(13)

Si nous supposons en plus que la variété est simplement connexe nous avons le corollaire suivant :

PROPOSITION 4.1. – Soit M une variété complexe compacte simplement connexe et sans fonctions méromorphes non constantes. SiM possède une structure géométrique holomorphe rigide, alorsM est une variété presque homogène d’un groupe de Lie complexe, dont l’orbite dense est une variété parallélisable.

Démonstration. – Soit φ une structure holomorphe rigide sur une variété M complexe compacte simplement connexe et sans fonctions méromorphes non constantes. D’après le corollaire 4,φest localement homogène en dehors d’un sous-ensemble analytique deM.

Le théorème de prolongement des isométries locales utilisé dans la preuve de la proposition 3.3 implique que le groupeGdes isométries globales agit transitivement sur un ouvert denseU⊂M. La variétéM est donc un espace presque homogène du groupeG.

Montrons que l’orbite dense deGdansM est une variété parallélisable. Quitte à quotienter, il est possible de supposer que le stabilisateur d’un point de U n’est pas distingué dans G.

Désignons para:G×M→M l’action du groupeG. Nous imitons la construction de la fibration de Tits pour les variétés homogènes (voir, par exemple, [1]) et définissons, pour un pointmdans U, le noyau de l’application da(·, m). En effet, si G est l’algèbre de Lie de G, vue comme l’algèbre de Lie des champs de vecteurs deG, invariants à droite, le noyauHmdeda(·, m)est bien défini en tant que sous-algèbre de Lie deG.

Si m =g·m pour un certaing∈G, alors Hm =g· Hm, où l’action de Gsur les sous- algèbres de Lie deGse fait via la représentation adjointe deGsurG.

Supposons que Hm est de dimension d. Nous venons de construire une application holomorphe de U dans la grassmanienne Dd des sous-espaces vectoriels de dimensiond de G. Cette application holomorphe est la restriction d’une application méromorphe de M dans Dd. Comme M ne possède pas de fonction méromorphe non constante, l’image dansDd est nécessairement formée d’un seul point. Donc l’algèbre de LieHmdu stabilisateur dem∈U est stable par la représentation adjointe.

Or nous avons supposé que le stabilisateur d’un point deU n’est pas distingué dansG, ce qui implique queHm={0}. Par conséquent, le stabilisateur d’un point deUest discret. ✷

La proposition que nous venons de démontrer admet le corollaire suivant :

COROLLAIRE 4.2. – Si la sphèreS6admet une structure complexeM, alorsM ne porte pas de structure géométrique holomorphe rigide.

Démonstration. – D’après [7]M ne possède pas de fonction méromorphe non constante. Si, par l’absurde,M admettait une structure géométrique holomorphe rigide, elle serait une variété presque homogène par la proposition précédente. Ce cas de figure est exclu par le théorème principal de l’article [15]. ✷

À présent plaçons-nous dans la situation opposée et convenons d’appeler totalement hétéro- gène une structure géométrique telle que les orbites génériques du pseudogroupe des isométries locales sont discrètes. Le théorème 3 montre qu’une variété complexe compacte qui porte une structure géométrique rigide totalement hétérogène possède « autant » de fonctions méromorphes algébriquement indépendantes que sa dimension : c’est une variété de Moishezon.

Contrairement au cas réel, où beaucoup de structures géométriques sont génériquement totalement hétérogènes, les seules variétés qui peuvent « loger » des structures géométriques rigides totalement hétérogènes appartiennent à une classe très particulière : les variétés de Moishezon.

Les considérations précédentes nous conduisent naturellement aux applications suivantes :

(14)

PROPOSITION 4.3. – Il n’existe pas de connexion affine holomorphe totalement hétérogène sur les surfaces complexes compactes.

Démonstration. – Supposons par l’absurde que la connexion affine sur la surface S est totalement hétérogène. Alors S est nécessairement de Moishezon. Or, une surface complexe compacte est une variété de Moisheson si et seulement si elle est projective [24].

Comme la surfaceSadmet une connexion affine, sa première classe de Chern est nulle [18] et le théorème 1 implique queest localement homogène. ✷

Les arguments précédents combinés avec le théorème de Grauert-Remmert [12], qui affirme qu’une variété de Moishezon homogène compacte est projective, impliquent :

PROPOSITION 4.4. – Il n’existe pas de connexion affine holomorphe totalement hétérogène sur les espaces homogènes compacts.

5. Conjectures

La conjecture générale qui se précise derrière les résultats démontrés dans cet article est la suivante :

CONJECTURE 1. – Sur les variétés complexes compactes toutes lesG-structures holomorphes de type algébrique affine sont localement homogènes.

Pour mesurer l’étendue de cette conjecture soulignons que celle-ci implique les conjectures

« faibles » suivantes :

CONJECTURE 2. – Toute métrique riemannienne holomorphe sur une variété complexe compacte est localement homogène.

CONJECTURE 3. – Toute connexion affine holomorphe sans torsion sur une variété complexe compacte est localement homogène.

Nous rappelons que la preuve des deux derniers énoncés est connue dans le cadre kählé- rien [18] et que sur les variétés sans fonctions méromorphes nous avons le corollaire 4.

Pour ce qui est des métriques riemanniennes holomorphes, remarquons que si l’argument de la courbure sectionnelle règle le cas des surfaces, il est en revanche impuissant en dimension supérieure. En effet, de manière similaire à la géométrie pseudo-riemannienne, la courbure sectionnelle n’est pas définie sur les plans isotropes. Elle est une fonction méromorphe, en général non constante, sur la2-grassmannienne de la variété. Dans [8] nous avons réglé le cas de la dimension3sous l’hypothèse supplémentaire de simple connexité. Le cas des métriques riemanniennes holomorphes et celui des connexions affines holomorphes feront l’objet d’une publication ultérieure.

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(Manuscrit reçu le 27 janvier 2000.)

Sorin DUMITRESCU

Unité de mathématiques pures et appliquées, École normale supérieure de Lyon,

UMR 5669 du CNRS, 46, allée d’Italie, 69364 Lyon cedex 07, France E-mail : sdumitre@umpa.ens-lyon.fr

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