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Les remplaçants : acteurs invisibles de l'enseignement

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Academic year: 2022

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Master

Reference

Les remplaçants : acteurs invisibles de l'enseignement

KELAY, Kenza

Abstract

Le choix d'une telle étude se justifie par mon intérêt face à tout ce qui concerne le rôle des remplaçants, et surtout, est lié à ma curiosité de savoir comment ce statut de remplaçant est appréhendé par les principaux concernés. Mon objectif est d'explorer cette activité de remplaçant pour mieux comprendre cette situation d'intervenants qui évoluent et exercent dans un contexte plus au moins agité, une situation qui attire selon moi de nouvelles interrogations et connaissances par rapport à l'objet d'analyse, sans a priori de généralisation ni de définition de l'identité professionnelle du remplaçant.

KELAY, Kenza. Les remplaçants : acteurs invisibles de l'enseignement. Master : Univ.

Genève, 2013

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:30671

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L ES REMPLAÇANTS : ACTEURS

INVISIBLES DE L ’ ENSEIGNEMENT

MEMOIRE REALISE EN VUE DE L’OBTENTION DU MASTER AISE

Kenza Kelay

DIRECTEUR DU MEMOIRE

Maryvonne Charmillot,

JURY

Marion Dutrévis Michèle Chilla

GENEVE, SEPTEMBRE 2013

UNIVERSITE DE GENEVE

FACULTE DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L'EDUCATION SECTION SCIENCES DE L'EDUCATION

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RESUME

Le choix d’une telle étude se justifie par mon intérêt face à tout ce qui concerne le rôle des remplaçants, et surtout, est lié à ma curiosité de savoir comment ce statut de remplaçant est appréhendé par les principaux concernés. Mon objectif est d’explorer cette activité de rempla- çant pour mieux comprendre cette situation d’intervenants qui évoluent et exercent dans un contexte plus au moins agité, une situation qui attire selon moi de nouvelles interrogations et connaissances par rapport à l’objet d’analyse, sans a priori de généralisation ni de définition de l’identité professionnelle du remplaçant.

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T

ABLES DES MATIÈRES

Introduction

Chapitre 1 :

Contexte et enjeux de la pratique des remplaçants 1.1 Contexte

1.2 Enjeux

Chapitre 2 :

Pôle épistémologique 2.1 Démarche

2.2 Théories de l’action

Chapitre 3 :

Pôle morphologique : problématique 3.1 Questions de recherches 3.2 Hypothèses

Chapitre 4 :

Pôle Théorique: statut, rôle et activité des remplaçants 4.1 Revue de la littérature

4.2Analyse de l'activité du remplaçant : système de régulation et transition

4.3 Analyse de l'activité enseignante

Chapitre 5 :

Pôle technique

5.1 Production des données 5.2 Analyses des données

5.3 Cadre interprétatif : la Roue, modèle d’analyse sphérique

Chapitre 6 :

Analyse des discours des remplaçants

6.1 Portraits des remplaçants interviewés 6.2 Analyses transversales des récits

Synthèses et conclusion Références bibliographiques

Annexes : 1.

Canevas d’entretien

2.

Exemple de retranscription d’entretien

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I

NTRODUCTION

Depuis quelques années, j’ai pu observer à travers mon expérience professionnelle en tant que remplaçante des écoles primaires du canton de Genève, une réalité encore méconnue et longtemps absente du discours de la recherche dans le domaine de l’éducation et de la formation: la nécessité de la fonction de remplaçant. Le rôle de remplaçant me paraît absent des références actuelles en tant qu’instrument de régulation qui permet de maintenir ou rétablir l’équilibre du système éducatif durant la période d’absence de l’enseignant titulaire.

Ce dispositif de remplacement et plus particulièrement la place du remplaçant retient toute mon attention et suscite l’envie de soulever de nombreuses questions que je souhaite traiter dans le cadre de mon travail de mémoire.

D'un point de vue personnel, j’ai eu la chance de pouvoir tirer avantage de nombreuses expériences professionnelles, notamment en réalisant un nombre important de remplacements à long et à court termes dans différentes écoles primaires du Département de l’instruction publique. Mon expérience en tant que remplaçante m’a donné la potentialité de développer des aptitudes professionnelles et pratiques, particulièrement d’assumer dans un premier temps la dimension éducative de l’enseignement, puis de concevoir, construire et gérer des situations d’apprentissage et d’enseignement.

La pratique et le terrain m’ont rendu consciente des différentes postures que joue le remplaçant1, puisque chaque remplacement étant différent, les attentes et les besoins de chacun d'eux le sont aussi et il faut s'y adapter, donc se diversifier. C’est pourquoi mes différentes expériences professionnelles m’ont conféré une grande adaptabilité et une multitude de rôles déterminés par la diversité du public à qui je me suis adressée.

Cependant, en me penchant davantage sur la question, je me suis rendue compte que le rôle des remplaçants au sein des écoles primaires et secondaires est un domaine encore mal connu et rarement décrit, voire mal perçu. On ne sait rien ou très peu de ce que les remplaçants déploient au cours de leur activité au sein des établissements scolaires du canton. Il existe néanmoins quelques recherches où articles qui apportent des informations sur les remplaçants notamment en France et au Canada, mais qui ne rejoignent pas l’orientation de ma recherche.

1 La lecture des descriptions de professions de l’intégralité de mon mémoire ne font pas l’objet des règles d’écriture du langage épicène. Seul le genre masculin est employé et recouvre de façon générique les personnes des deux sexes.

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Pourtant malgré un manque conséquent de reconnaissance professionnelle, chaque jour lorsqu’un un enseignant pour une raison ou une autre se voit contraint de s’absenter, le remplaçant est sollicité au pied levé pour assurer sa fonction pendant son absence. Le remplaçant passe par une phase d’intégration rapide et complexe, où la mobilisation de savoirs et de savoir-faire sont à la fois source d’expertise, d’approfondissement et de questionnement.

Compte tenu de l’absence de recherche sur les pratiques réelles des remplaçants, ma recherche s’est organisée selon une double perspective : d’une part comprendre, à partir des récits d’expériences la signification attribuée au « métier » de remplaçant, et d’une autre part analyser les pratiques des remplaçants au travers de leurs réflexions, de leurs descriptions et des significations qu'ils attribuent à leur activité

Ma problématique porte donc sur l’activité des remplaçants dans leur dynamique de travail.

Je souhaite mettre l'accent sur l’hétérogénéité du profil de ces acteurs. Les remplaçants n'ont quasi aucun dénominateur commun à l'exception de leurs pré-requis (avoir accompli un cursus de niveau secondaire II). Les différences de profils entre les remplaçants sont nombreuses. Cette hétérogénéité de profils, si peu mise en avant dans les discours scientifiques, apparaît comme une composante intégrée dans les représentations du métier de remplaçant et me paraît être un élément important dans l’analyse des contextes sociaux et d’apprentissage.

Pour alimenter la réflexion sur le sujet, je souhaite explorer cet objet de recherche sous l’angle de l’expérience, autrement dit en partant des questions que se posent les remplaçants concernant leur activité, de leurs perceptions, de leurs gestes et pratiques professionnels, de leurs sentiments, de leurs motivations. En d’autres termes, je souhaite analyser l’activité des remplaçants à partir de leurs témoignages.

Je suis partie de l'hypothèse de départ selon laquelle travailler dans des contextes très hétérogènes et de manière sporadique a comme conséquence que les remplaçants connaissent des besoins spécifiques en termes de structuration lorsqu’ils sont à la recherche d’outils pour mieux comprendre et interagir avec leur environnement professionnel, institutionnel et social, en constante évolution. Je m’appuie, dans cette hypothèse, entre autres sur des témoignages mais également sur ma propre expérience.

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A partir de là, je souhaite comprendre et comparer les différentes postures et orientations des remplaçants dans le but de caractériser cette activité qui demeure jusqu’à maintenant mal connue, voire inconnue. La difficulté de cette observation est de produire progressivement une interprétation qui nous informe sur le vécu des remplaçants, autant que sur leurs pratiques.

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Chapitre 1 :

C

ONTEXTE ET ENJEUX DE LA PRATIQUE DES REMPLAÇANTS 1.1 Contexte

Lorsqu'un enseignant ou chargé de cours d'un établissement scolaire primaire ou secondaire est absent, il fait appel à un remplaçant qui par conséquent devient la personne en charge de la classe. Il participe donc aux activités d'enseignement, qui se déroulent sur le temps scolaire.

Le remplaçant assure la responsabilité pédagogique durant la période d’absence de l’enseignant titulaire ainsi que de l'organisation de la classe. Ce dernier n’est pas un employé bénévole, est rémunéré par le Service des Remplacements du Département de l’Instruction Publique dans le cadre de la mission de remplacement qui lui est confiée. Il doit par ailleurs utiliser ses compétences et être capable de faire face à une demande immédiate. Ce type de recours aux remplaçants permet aux écoles d'être davantage ouverts sur le monde extérieur tout en confortant les apprentissages.

Afin de garantir à chaque enseignant un remplacement de courte ou de longue durée lors de son absence, selon le rapport de l'état du Département de l’instruction publique (DIP), le DIP comble et régule ces manques par le biais des différents services des remplacements primaires et secondaires. Selon les sources officielles de la direction de l'instruction publique de Genève, les services de remplacement comptent actuellement 2200 remplaçants inscrits2. Le personnel enseignant quant à lui représente aujourd'hui 2183 enseignants nommés (généralistes, spécialistes) et 139 chargés d’enseignement (enseignants non-nommés en période probatoire).

D'un point de vue institutionnel, l'action du remplaçant doit nécessairement s'intégrer au projet d'école. Celui-ci peut se voir confier différentes charges au sein d’une classe. Sans se substituer à l'enseignant, il peut prendre des initiatives lorsqu'elles s'inscrivent dans le cadre de ses fonctions. Si un groupe d'élèves lui est confié, c'est à lui par exemple en cas d’accident ou autres imprévus de prendre les mesures d'urgence qui s'imposent.

2 Le nombre de femmes exerçant l’activité de remplaçantes est considérablement majoritaire au nombre d’hommes.

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Lors d'un remplacement de longue durée, le remplaçant est contractualisé. Pour toute question, le directeur d'établissement est le premier interlocuteur hiérarchique des remplaçants. Par ailleurs le ScoP (Service de la coordination Pédagogique) a pour mission d'accompagner les établissements en leur mettant à disposition des coordinateurs pédagogiques (36 au total). Ceux-ci travaillent en collaboration avec des enseignants et des remplaçants, en leur proposant différentes mesures d'accompagnement tels que des outils pédagogiques, des moyens d'organiser leurs activités tout comme le pilotage de la formation continue. L'objectif principal de ce dispositif d'accompagnement est d’offrir les conditions nécessaires pour que chaque remplaçant dispose de ressources relatives à sa construction professionnelle.

1.2 Enjeux

L'environnement professionnel des remplaçants exprime une perplexité en révélant la réalité d'un milieu très peu exploré jusqu'à aujourd'hui. L'expérience des remplaçants met en exergue des aspects différents de l’enseignement à l’allure « traditionnelle ». Les remplaçants me paraissent ainsi être des acteurs essentiels à la vie de l’établissement scolaire et intrigants dans la mesure où ils sont à la fois des acteurs présents qui participent activement à la vie scolaire, mais demeurent néanmoins des acteurs « invisibles ». L'existence des remplaçants n'apparaît en effet que d'un point de vue administratif. Les remplaçants sont officiellement enregistrés et rémunérés en tant que remplaçants et ne régissent d'aucun statut pédagogique.

Leur champ d'action se limite à l'enseignement en tant que remplaçant et ne déborde pas sur le territoire des « enseignants », sauf exception faite. Cette absence de reconnaissance me laisse à penser que de nombreux remplaçants contractualisés pour des remplacements de longues durées doivent accomplir et mener à bien leur activité dans un contexte identique à celui des enseignants attitrés, mais avec un pouvoir d'action limité.

La possibilité de leur donner la parole afin qu’ils racontent leur expérience, qu’ils puissent aussi discuter, dialoguer, et partager des critiques me paraît une condition nécessaire à la construction d’une cohésion professionnelle. Instaurer des structures de type collaboratif entre les chercheurs et tous les acteurs concernés par l’éducation peut globalement contribuer à une meilleure compréhension de la place et du rôle de chacun.

Le système d'enseignement mis en place et la recherche ne prennent pas suffisamment en

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compte l’expérience des remplaçants. Les études récentes ne relèvent quasi aucune recherche conséquente à leurs propos. Cet état de fait qui sera développé plus longuement dans la suite de mon mémoire à travers la revue de la littérature, motive ma recherche qui se propose d'éclairer et de soumettre à discussion non seulement les modalités d'analyse de l'expérience des remplaçant-e-s mais également de contribuer à une reconnaissance de leur activité et des problèmes qu'elle soulève. Mieux connaître les remplaçants encouragerait à mieux les considérer dans les établissements scolaires.

L’objectif de ce mémoire est de produire de nouveaux savoirs, de prendre en considération de nouvelles interprétations et expériences du métier de remplaçant et de comprendre le sens de leurs actions partagées ou singulières. Cela consiste-t-il à mesurer l'implication humaine et sociale dans leur activité et d'en comprendre la dimension? L' activité d' un remplaçant telle que l'activité d'un enseignant ne se réduit pas qu'à des pratiques pédagogiques, d'apprentissage et d'éducation mais également à des pratiques sociales, qui comportent un ensemble d'implicites. Certaines faces du métier de remplaçant ne sont pas visibles mais pourtant décisives et indispensables.

L'enjeu est de mettre en lumière l'expérience des remplaçants par leurs discours et par le sens qu'ils donnent à leur expérience. La compréhension de leurs pratiques et de leurs expériences comprend un ensemble de dynamiques auxquelles mon modèle d'analyse devra être confronté, c'est pourquoi elle implique une démarche méthodologique (et systématisée) qui permette de mettre en exergue l'expérience des remplaçant-e-s et tous les implicites qu'elle implique tels que les attentes des remplaçants dans leur dynamique professionnelle, les comportements qu'ils adoptent, les compétences spécifiques qu’ils développent, leurs attitudes professionnelles, le recul sur eux-mêmes, etc. Sachant que les remplaçants sont souvent livrés à eux-mêmes pour évaluer et améliorer leurs pratiques pédagogiques en classe, l’intérêt d’une analyse de type compréhensif peut introduire dans les systèmes éducatifs un modèle innovant de soutien par les pairs, fondé sur la collaboration et la concertation entre éducateurs et chercheurs.

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POLE TECHNIQUE POLE

THEORIQUE

POLE

MORPHOLOGIQUE

Chapitre 2 :

P

ÔLE EPISTEMOLOGIQUE

2.1 Démarche

La réflexion épistémologique permet d’expliciter ma démarche de recherche, au regard des principales orientations paradigmatiques existantes. Ce chapitre a pour objet d’exposer les cadres épistémologique, théorique et conceptuel qui sous-tendent ma recherche. Dans un pre- mier temps, je décrirai le paradigme compréhensif et développerai la raison pour laquelle je privilégie cette posture. Ma préoccupation est d'assurer la cohérence entre les objectifs de la recherche, la démarche adoptée, les choix théoriques opérés ainsi que les méthodes de produc- tion et d'analyse retenues.

Pour caractériser la compréhension, je me réfère au cadre épistémique que Charmillot &

Dayer (2007) adoptent dans leurs recherches. Charmillot & Dayer recourent à un schéma arti- culé autour de quatre pôles - épistémologique, théorique, morphologique et technique pour illustrer la compréhension. Ce schéma reproduit ci-dessous permet la mise en relation perma- nente des quatre pôles par un lien réciproque et interdépendant. Dans le cadre de la compré- hension, la démarche met l’accent sur une logique anti-déterministe, propre aux processus d’interprétation empirico-inductifs qui s’appuient sur une observation de la réalité. Par la construction de ce type de processus de recherche, mon rapport au terrain, ma pratique d’entretien tout comme l’analyse des informations s’articulent autour d’un contexte d’interactions, soit d’échanges d’éléments au sein d’un même système (Schurmans et al., 2008).

Figure 1 Posture épistémologique (Chamillot & Dayer, 2008) en référence au schéma de de Bruyne, Herman &

de Schoutheete (1974, p.5)

POLE

EPISTEMOLOGIQUE

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2.2 Théories de l’action

Ma réflexion s’inscrit ici dans un cadre théorique de type compréhensif qui étudie les mécanismes par lesquels l'acteur évolue et attribue des postures significatives à son champ d’action. Schurmans (2003), dans ses écrits, insiste sur le fait que l'approche compréhensive se focalise principalement sur le sens : « d’une part, les êtres humains réagissent par rapport aux déterminismes qui pèsent sur eux; d’autre part, ils sont les propres créateurs d’une partie de ces déterminismes » (p. 57). L’expérience singulière des remplaçants va permettre de comprendre la collectivité d’acteurs de l’enseignement. En d'autres termes cette orientation théorique m’amène à comprendre l’activité collective à la lumière des actions individuelles tels en est le cas des objets qui occupent l’expérience des remplaçants en tant que construit d'actions complexes au sein même d'une collectivité d'acteurs de l'enseignement.

L'approche compréhensive s’appuie sur des postulats qui laissent place à l’action. Dans la mesure où l’objet de mon travail porte directement sur la compréhension des éléments contribuant aux comportements, interactions sociales, représentations, conceptualisations et discours des acteurs, cette perspective semble pertinente. L'approche compréhensive renvoie à une approche qui selon Schurmans (2008) « tend à minimiser, voire réfuter, l'idée d'accéder à une réalité « objective » par un processus de confrontation des intersubjectivités des acteurs.

Dès lors, la démarche de recherche ne vise pas à rendre compte du réel, mais à construire un modèle de la réalité dans lequel les acteurs se reconnaissent. » (p. 53) Cette dimension subjective de la réalité sociale est appréhendée à partir du discours des remplaçants et du sens qu'ils donnent à leurs actions. Cette approche est étroitement liée aux notions d'empirisme et d'esprit critique, qui évitent tout excès d'objectivation et présuppose une vigilance ou plutôt, une critique des valeurs dominantes. L’importance de la subjectivité pour expliquer et comprendre les comportements humains a inspiré de nombreux philosophes et sociologues (de façon pragmatique) tels que James (1890), Dewey (1940), Cooley (1902), Thomas (1937), Max Weber (1904) qui, par exemple, considère que le monde social est constitué par l'agrégation des actions produites par l'ensemble des agents qui le composent. Selon lui, le fondement de la sociologie est l'action sociale d'un agent. Il entend par action un comportement humain quand et pour autant que l'agent lui attribue un sens subjectif, autrement dit qu'il agisse en fonction de sa compréhension du monde et de ses intentions qu'il a. Mead (1963) affirme à ce même propos que: « Les choses deviennent des objets

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lorsqu’elles prennent une signification et que ces significations sont établies personnellement » (2006, p.23). Ces différentes postures me donnent la possibilité d'explorer la diversité des significations attribuées à l'activité de remplaçant, par la passation d'un sentiment à un autre et d'accroître mes informations et mon étonnement. L’approche compréhensive place l’acteur au cœur même de la démarche épistémologique.

Il va s’agir de comprendre les interactions sociales et les comportements des remplaçants en tant qu'acteurs et à centrer l'analyse sur la dialectique individuel/collectif. Comme le soulignent Charmillot et Dayer (2007), « cette posture soutient, en s’appuyant sur l’interactionnisme historico-social, que chacun d’entre nous produit du sens autour de ce qu’il fait et autour de ce que font les autres. Elle dégage la logique des conduites individuelles et collectives en ce qu’elle centre sur la mise au jour des significations attribuées à l’agir ainsi que sur la mise au jour de la logique collective que constitue l’activité sociale. » (p.126). Les actions individuelles et collectives générées par l'activité sont fonction du sens que les acteurs impliqués lui attribuent. Selon Schurmans, citée par Charmillot & Dayer (2007), « Cette activité génère, à travers l’échange langagier, des représentations portant sur les modalités de fonctionnement du collectif, et elle engage par conséquent, la constitution de normes actionnelles, ainsi que, par appropriation, la construction des représentations individuelles. C’est sur cette toile de fond que sont évaluées les actions singulières, et c’est donc à partir de cette évaluation que s’oriente l’action individuelle »(p.133).

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Chapitre 3 :

P

ÔLE MORPHOLOGIQUE

,

PROBLEMATIQUE 3.1 Questions de recherches

Une dynamique de travail implique un processus d’adaptation et d’évolution et conduit à l’acquisition de nouvelles connaissances professionnelles. Rendre compte et analyser les expériences des remplaçants ne peut faire l'économie d'un questionnement sur le contexte dans lequel se déroule ma recherche. Ici diverses logiques entrent en interaction : Comment les remplaçants mettent-ils en mots leurs expériences? Comment les remplaçants perçoivent- ils leur environnement ? Comment donnent-ils du sens aux interactions qui s’y déroulent?

Comment expliquent-ils, ressentent-ils, jugent-ils ce qui s’y passe? Comment se familiarisent- ils avec leur milieu professionnel, quelles sont leurs habitudes, leurs modes de fonctionnement, leurs rouages ? Ma recherche se veut une exploration de cette problématique de l’activité des remplaçants.

Je m’adresse en partie aux formateurs, aux chercheurs, aux agents scolaires et à tout public qui cherche à prendre appui sur l’expérience des remplaçants pour construire des connaissances et des compétences professionnelles. Une telle problématique n’est pas réductible au simple fait qu’il faut s’informer, réfléchir, et débattre pour résoudre l’ensemble des éléments recherchés. L’obstacle auquel je me réfère est d’ordre épistémique : le manque de concepts, de connaissances théoriques et d’analyse de compétences dans le domaine de l’activité des remplaçants. C’est pourquoi toute nouvelle réflexion sur ce thème pose la question de la relation entre recherche et formation.

3.2 Hypothèses

Comme je l’ai mentionné précédemment, ma recherche est construite sur une démarche compréhensive qui invite le chercheur à ne pas poser des hypothèses trop hâtives, mais à faire émerger des hypothèses par un mouvement de va-et-vient entre la théorie et le terrain (Charmillot & Dayer, 2008). Il est difficile à ce stade préliminaire de mon étude de formuler des hypothèses compréhensives relativement à des réalités éducatives complexes telle que l’activité des remplaçants. C’est pourquoi je cherche à faire accroître mon étonnement au fil de l’avancement de mon mémoire, faisant ainsi apparaître d’éventuelles hypothèses à l’issue

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de ma phase exploratoire. Mon approche se distingue en tant qu’approche anti-déterministe et valorise le fait de mettre l’accent sur une logique propre à chaque trajectoire. Je souhaite aborder l’expérience des remplaçants en prenant en compte la notion de « trajectoire professionnelle et identitaire » (Merhan, 2010), considérée en tant que processus dynamique faisant appel à des changements, des discontinuités, des ruptures, des régulations, et autres actions singulières que j’illustrerai dans la suite de mon mémoire.

Ma problématique est donc la suivante. Dans cette perspective exploratoire, je cherche à comprendre les caractéristiques individuelles d’un intervenant remplaçant de manière à mettre en évidence les différentes modalités de son engagement dans sa construction identitaire et professionnelle, ainsi que la compréhension des tensions et des changements identitaires et professionnels vécus par l’acteur en question à travers son expérience.

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Chapitre 4 :

P

ÔLE THÉORIQUE

:

STATUT

,

RÔLE ET ACTIVITÉ DES REMPLAÇANTS

4.1 Revue de la littérature

Ce chapitre a pour objectif de présenter une revue de la littérature et des actions existantes autour de la problématique de l’expérience et de l'activité des remplaçants. C’est ici tout l’intérêt de la démarche d’une revue de la littérature en tant que phase exploratoire qui vise à synthétiser les données de seconde main et les résultats des principales recherches entreprises ces dernières années. Cela constitue un élément essentiel du bilan de l’action des remplaçants mais également de l’examen critique des stratégies actuellement en cours. La réalisation de cette revue de la littérature me permet de définir les concepts fondamentaux abordés dans le cadre de la rédaction de mon mémoire à l'aide du travail déjà mené par d'autres auteurs sur les thèmes principaux et sous-jacents. Cette étude approfondie, en tant que phase exploratoire des concepts inhérents à la problématique de mon mémoire me donne également une vision des recherches non produites, qui sous-entend des possibles futures pistes de recherches à soumettre aux chercheurs et principaux intéressés.

Ma revue se penche sur la manière dont les chercheurs ont schématisé les modèles d'action des remplaçants, sur les éléments auxquels ils pensent et mettent en oeuvre quand ils donnent leurs cours et sur les facteurs qui influencent cette réflexion.

Mes recherches en littérature sur la question ont été principalement orientées sur des mots et concepts clés tels que « expérience », « remplaçant », « enseignement », etc. Les ouvrages et articles découverts à partir de ces mots clés portent essentiellement sur l'expérience des enseignants, et très peu sur l'expérience des remplaçants, à l'exception d’une recherche et quelques articles. Il s’agit en premier lieu d’une étude de type macro-sociologique, réalisée en 2006 par Xavière Lanéelle, de l'IUFM des Pays de la Loire, qui vise les Titulaires de Zones de Remplacement (TZR). Cette recherche offre une vision des stratégies, des contraintes et des ressources mises en place dans le système éducatif français. La question de la nécessité de la fonction de remplacement est abordée en tant qu'instrument de régulation du système éducatif sous un angle historique et économique. La recherche met l'accent sur la notion de flexibilité quantitative et fonctionnelle du statut de remplaçant d'un point de vue institutionnel. Dans une

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autre étude de même type macro-sociologique Gabriele Gottelmann-Duret (2007) présente une réflexion sur le recrutement des enseignants sans formation initiale et la possible conversion de personnel non-titulaires tels que des remplaçants en personnel enseignant. Elle signale que les besoins en enseignants sont croissants d’années en années et ce phénomène touche de nombreux pays. Mobiliser des nouveaux enseignants non-titulaires tels que des remplaçants pourrait dans cette mesure contribuer à combler un manque effectif d’enseignants. Elle soulève cependant de nombreuses critiques quant aux risques de l’affectation d’enseignants sans formation initiale et à la qualité de l’enseignement. Cette stratégie est censée contribuer à relever un défi auquel de nombreux pays sont confrontés face au manque d’enseignants formés. Les politiques éducatives du canton de Genève traitent les besoins de professionnalisation des enseignants à travers différentes alternatives. L’option de recruter des remplaçants a été proposée tout récemment et a suscité de nombreuses critiques.

Les stratégies de formation des enseignants sont en discussion, afin de comprendre comment elles pourraient répondre au mieux aux besoins et aux contraintes actuelles du développement professionnel du personnel enseignant.

Les notions d’expérience et d’identité professionnelle des remplaçants sont des concepts absents des recherches existantes au niveau national et international. L’analyse de l’activité des remplaçants n’ayant pour ainsi dire aucun modèle d’analyse illustrant avec pertinence leur activité, j’ai pris en considération deux dimensions complémentaires issues des courants d’analyse de l’activité. Je me suis penchée, dans un premier temps sur : a) la notion de remplacement en tant que système de régulation et de transition au sein d'une structure professionnelle et une seconde dimension : b) l’analyse du travail du travail de l'enseignant et des modèles d’analyses qui en découlent qui me paraissent être des modèles d’analyse plus proches de la pratique des remplaçants en tant que modalités de pratiques d’organisation collectives et individuelles.

a) Analyse de l'activité du remplaçant : système de régulation et transition

La particularité de l’activité du remplaçant est de faire face à une demande immédiate comme instrument de régulation pour maintenir ou rétablir l’équilibre dynamique du système éducatif (Canghuilhem, 2001). Le choix de ce système de régulation fait appel à des stratégies de transition. Par conséquent, les transitions émergent des nécessités et contraintes et obligent à des stratégies professionnelles de régulation. L'activité d'un remplaçant est au cœur d'un système de régulation et garantit à l'enseignant durant son absence le bon déroulement des

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leçons et de la surveillance des élèves en classe. En d’autres termes, le cadre professionnel dans lequel les remplaçants évoluent se caractérise par des conduites de régulation immédiate de la part des acteurs, ce qui demande une flexibilité et une mobilité plus importante que pour les enseignants titulaires. Le remplaçant doit développer une conduite de réorganisation permanente dans son entrée dans l’activité et dans sa pratique. Des processus internes accompagnent les remplaçants dans les changements. Ces processus comportent des éléments réflexifs et interactifs. C’est pourquoi je me rapporte aux processus de transitions qui intègrent des composantes identifiables et perceptibles dans l’activité de remplaçant. Ce type de transitions présente des composantes dynamiques qui provoquent des effets psychologiques et sociaux, structurels hétérogènes et discontinus. Ces transitions arborent des durées, des rythmes et des intensités variables. Elles se caractérisent par l’émergence plus au moins violente de nécessité et de contraintes, qui obligent à des stratégies de régulation (Celestino, 1987).

En psychologie, Elder (1994) considère les transitions comme des phases de court terme incluses dans des trajectoires de long terme, Allen (1989) perçoit le changement et les déséquilibres comme étant plus naturels que la stabilité et l’équilibre. « Pour survivre, il faut être capable de s’adapter et d’apprendre. » (p.95). Le changement signifie une apparition manifeste de nouvelles caractéristiques du système, de nouveaux systèmes de valeurs, principes, modalités de communication, normes de production, etc. Meleis et Trangenstein (1994) différencient également les concepts de transition et de changement. Les transitions sont des processus qui se développent dans le temps et qui ont une dynamique progressive et continue (écoulement, mouvement). Les changements surviennent dans l’identité, les rôles, relations, aptitudes, modes de comportements des individus (au niveau individuel et professionnel) et dans la structure, la fonction, les dynamiques de l’organisation (au niveau organisationnel). Les transitions représentent plutôt des processus internes (d’évaluation, d’anticipation, d’appropriation) tandis que les changements représentent plutôt des phénomènes externes (ex. : changements d’état).

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b) Analyse de l'activité d'enseignant

La fonction enseignante concerne un type de communauté de professionnels de l'enseignement. L'enseignement est une activité qui se déroule dans un contexte caractérisé par des contraintes inhérentes à l'interaction humaine, aux relations de pouvoir, aux types de connaissances, (Gillet, 1987).L'enseignement est construit et façonné par les orientations, les techniques et outils spécifiques à ce travail, mais également par les compétences et l'environnement organisationnel des enseignants. L'identité professionnelle de l'enseignant est formée de manière générale par ses propres actions individuelles à travers son autonomie professionnelle et par les interactions qu'il entretient avec les autres acteurs scolaires.

L'enseignant ne reçoit pas une identité au moment de l'obtention d'un poste, mais il construit cette identité à partir de son expérience personnelle, (Revue des sciences de l'éducation, 2001). On peut alors supposer que les enseignants expérimentés ont davantage de chance d’avoir développé des compétences que ne possèdent pas le nouvel enseignant.

Selon Bourgeois (1998), la notion d’identité est un concept multifactoriel et multidimensionnel. En se référant aux composantes de l’identité de Lipianski et al., (1990), Bourgeois définit l’identité comme non-figée, donc sans cesse en mouvement. De fait, elle se transforme et se construit en tant que processus dynamique. Elle est définie comme faite d’interactions entre le sujet et son environnement social. Elle est multidimensionnelle, car plusieurs facettes de l’individu s’activent selon la situation. Toutes les composantes de l’individu façonnent non seulement son identité, mais en activent également plusieurs figures.

De plus, selon Bourgeois, les individus ont une maîtrise de leur groupe d’appartenance, et donc une emprise sur leur identité, ainsi ils développent des stratégies identitaires. Cette notion est fondamentale quant à l’analyse de l’identité professionnelle d’un remplaçant, car on se rend compte que la structure même des conceptions identitaires professionnelles, selon ce même auteur, comporte des enjeux qui peuvent mener les acteurs à vivre des tensions et crises identitaires.

Néanmoins, il est clair que si l’entrée en activité de remplacement est vécue comme un vecteur de changement plutôt positif par le remplaçant désireux de bousculer sa trajectoire de vie, il n’en résulte pas moins que ce dernier est un processus douloureux et complexe, souvent empreint de résistances. Selon Bourgeois et Nizet (1996), l’apprentissage d’une nouvelle activité favorise le conflit cognitif. En effet, l’apprentissage est un processus qui transforme les connaissances actuelles en connaissances nouvelles. Cette situation génère un conflit car la

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structure initiale de connaissances de l’apprenant ne permet pas l’appropriation de ces connaissances nouvelles. Ainsi, selon Piaget, il y a apprentissage ou accommodation lorsque la résolution du conflit a lieu, en transformant la structure initiale en structure nouvelle, plus apte à rendre compte de l’information, ou assimilation. C’est dans ce cas de figure précis que l’apprentissage se fait, et que l’apprenant-remplaçant apprend. Mais, et ceci est fondamental, l’apprenant possède également des mécanismes de résistance face à l’apprentissage de connaissances nouvelles.

Figure 2 : Processus de construction de l’identité professionnelle de l’enseignant (Revue des Science de l’éducation)

La figure 2 illustre le processus de construction de l’identité professionnelle de l’enseignant.

L’enseignant est un sujet actif, dont les caractéristiques psychologiques ne sont pas stables et immuables. Il détient une liberté d’action individuelle, il est capable de créer de nouveaux systèmes d’interaction avec l’environnement, inventer de nouvelles conditions d’existence professionnelle, choisir de s’orienter vers le changement. Il attribue sa singularité dans les modes de réponse à cette évolution. Cette singularité provient de la différence des objectifs, des réactions émotionnelles, des significations attribuées aux événements, des manières de faire face aux changements ainsi que des diverses formes de soutien que chaque individu

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reçoit ou pas. Dans la construction de son identité professionnelle, l’acteur met en place toute une série de processus intra et inter individuels (autoévaluation, comparaison sociale, valorisation /dévalorisation de soi, régulation émotionnelle des stress, blocages ou obstacles, réflexion sur les actions passées, anticipation d’identités futures désirées) pour pouvoir accéder à des nouvelles identités auto-valorisées et reconnues.

Synthèse intermédiaire

Suite à ce cadrage conceptuel, ma problématique se précise de la manière suivante. Les principales caractéristiques que je retiens du cadrage conceptuel sont les processus psycho-sociaux d’entrée et d’intégration dans l’activité de remplaçant. De cette intégration dans l’activité résultent des interactions entre l’histoire de vie particulière des remplaçants et l’existence de tensions entre différentes perceptions qu’ils se font d’eux-mêmes et de leur environnement. Je cherche à identifier comment ils se représentent dans leur activité.

J’explore les différents sentiments et comment ils évoquent leurs sentiments relatifs à leurs expériences.

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Chapitre 5 :

P

ÔLE TECHNIQUE 5.1 Production des données

La difficulté d'enquêter sur l'expérience des remplaçants réside dans la manière et le choix dont le dispositif et l'outil de recherche doivent être construits pour faire parler les remplaçants de leur vécu et de leurs représentations sur leur propre pratique. En relation et en cohérence à mon choix épistémologique de l’approche compréhensive, comme le développent Charmillot & Dayer, dans leurs études, l’entretien « permet de construire l’activité scientifique à partir des questions que se posent les acteurs en relation avec leurs savoirs concrets, plutôt qu’à partir des questions que le chercheur se pose». P.189 Dans cette perspective, j'ai choisi de mener des entretiens semi-directifs à caractère compréhensif (Kaufman, 1996). Malgré cette faible directivité, j'ai néanmoins élaboré un canevas qui me garantit un certain suivi lors de mes entretiens. De manière générale, je laissais parler aussi librement l'interviewé qu'il le souhaitait, souvent sur le récit du quotidien. Il construisait son discours au cours de l'entretien en interaction avec mes relances et questions. Il est à noter, que dans certains cas, l'interviewé s'exprimait peu facilement. J'ai dans ce cas essayé de questionner pour favoriser chez l'interviewé le travail de la pensée subjective en vue de se confier de plus en plus librement, et non en taisant ou évitant certains faits ou sentiments. J'ai profité des moments de silence qui ponctuent certains moments des entretiens pour faire préciser certains points que je jugeais intéressants d'introduire. Ces questions complémentaires n'ont pas systématiquement été posées, parfois elles ont été des outils d'approfondissement, et parfois l'interviewé parlait suffisamment spontanément sans avoir besoin de faire émerger certains éléments cachés. Ainsi la conduite de mon entretien se caractérise par le fait que mon attitude est d’encourager l’interviewé à exposer son point de vue, ses connaissances, ses opinions, ses comportements, ses jugements, ses motivations, les rapports qu’il entretient avec ses collègues ou sa hiérarchie, etc. A ce sujet, Laplantine (1995) s'accorde à dire que dans un cadre de recherche anthropologique il est fortuit de ne pas assujettir l'objet de recherche mais au contraire de « Chercher à faire advenir avec les autres ce qu’on ne pense pas plutôt que vérifier sur les autres ce qu’on pense » (1995, p186).

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L’entretien semi-directif à caractère compréhensif se distingue « par la mise en œuvre des processus fondamentaux de communication et d'interaction humaine » (Quivy L.

Campenhoud, 1995, p. 194). Un échange s'établit entre le chercheur et la personne interviewée, durant lequel ce dernier parle de ses ressentis, ses expériences, ses interprétations des situations vécues. Le chercheur « facilite cette expression, évite qu'elle s'éloigne des objectifs de la recherche et permet à son vis-à-vis d'accéder à un degré maximum d'authenticité et de profondeur » (ibidem). Ainsi, pour faire parler les remplaçants, je me suis tenue de manière générale à des entretiens très peu directifs qui m'ont permis d’explorer, le plus concrètement et spontanément possible, les différentes dimensions et phases de leur travail. Il s’agit d’utiliser aux mieux les diverses perceptions et significations des remplaçants sur des pratiques qu’eux connaissent et de les confronter les unes aux autres. En situation d’entretien, évaluer le comportement général de l’interviewé amène à le positionner simultanément dans un cadre qui l’invite à la confidence et au témoignage public. Le but étant d’amener l’interlocuteur à s’exprimer sur son vécu mais également sur la perception qu’il a du problème auquel je m’intéresse.

La principale difficulté méthodologique se situe au niveau du degré de connaissance et de familiarité que moi-même en tant qu’enquêtrice j’ai avec les remplaçants. Le langage employé par certains des interviewés fait référence à un genre de parler argot. Lors de la retranscription des entretiens, j'ai hésité à retravailler le vocabulaire utilisé, mais finalement j'ai préféré valoriser l'authenticité plutôt que la manipulation des mots. Le langage original révèle selon moi un ton, une personnalité et une force qui ne transparaîtraient pas dans la mesure où j'aurais modifié leur discours et retravaillé leur langage.

J’ai choisi de mener des entretiens semi-directifs à caractère compréhensif (Kaufmann, 1996) avec cinq remplaçantes. Je précise à ce sujet que l’activité de remplacement est majoritairement représentée par des femmes, c’est pourquoi la rencontre avec un remplaçant de sexe masculin n’a pas été libre et possible d’accès.

En première phase de mes entretiens, j’indiquais à chaque interviewé le sens général de mon travail, je précisais la modalité d’enregistrement et garantissais la règle déontologique d’anonymat du discours. Dans ce style d’entretiens très peu directifs, les remplaçants ont construit le sens de leurs discours au cours de l’entretien. En parallèle, je dois garder en mémoire ma problématique et obtenir des réponses à mes attentes et ce malgré la faible

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directivité de mes entretiens. C’est pourquoi j’ai néanmoins élaboré un canevas d’entretiens, (cf. Annexes). Les questions de mon canevas n’ont pas forcément été posées, dans le même ordre, dans la mesure où le remplaçant parlait spontanément. Parfois elles ont été des outils d’approfondissement. Je voulais davantage encourager la liberté du récit, de façon à saisir l’ambivalence des sentiments et des préoccupations du remplaçant.

5.2 Analyses des données

La première étape d’analyse a été la retranscription intégrale allégée des cinq entretiens.

La retranscription de l’un de ses entretiens figure en fin de mon travail de mémoire. (cf.

Annexe, retranscription entretien de SB).

La deuxième étape a été l’analyse des données langagières. Par l'analyse du contenu de mes données langagières, je souhaite déterminer de façon systémique et la plus objective possible les différentes caractéristiques de celles-ci. L'idée est ici d'analyser différents thèmes pertinents pour mon enquête, de les comparer en fonction des caractéristiques des individus puis dans un dernier lieu d'en tirer des conclusions au regard de mes questions de recherches.

Cette recherche se veut être une recherche qui donne du sens à la parole des intéressés et des constats considérant un cadre d’intelligibilité à des enjeux d’interactions sociales. Il s’agit en référence à Dubar (2006) : « Comprendre et expliquer comment et pourquoi les pratiques individuelles et leurs significations subjectives se construisent, en niveau micro social permettant de faciliter la réflexivité des sujets concernés et de faciliter la conversion de ces pratiques ainsi que des attitudes ou orientations qui les guident ou les justifient » (p. 20).

D'autre part, si l’on examine le travail de recherche de grands sociologues tels que Durkheim, Bourdieu, Weber, Boudon ou encore Touraine, on s’aperçoit que leurs ouvrages respectifs s’inspirent souvent de leurs propres expériences. C’est pourquoi, je pense que ma position n’est par conséquent pas un obstacle à la production de connaissances sociologiques mais au contraire un avantage. En effet je me sens parfaitement impliquée dans la construction de mon objet de recherche, grâce à la proximité du domaine étudié due à mes multiples immersions dans l’activité de remplaçante. Mon expérience et mes connaissances personnelles des remplacements me facilitent la compréhension de certaines informations flouées, voire implicites engendrées par les rapports amicaux ou distants avec les interviewés lors des entretiens. Cette approche paraît sans doute familière mais permet un regard complémentaire qui dévoile avec pertinence certains aspects et évite des situations périlleuses ou je me

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sentirais étrangère à la situation étudiée et qui m’empêcherait de repérer des éléments intéressants. Comme le souligne Muel-Dreyfus (1983) : « L’ignorance et/ou la mise à distance de cette proximité des expériences effectives du monde social risque de rendre impossible le travail d’objectivation sociologique, alors qu’en faisant un peu sa propre sociologie on peut au moins faire sentir la difficulté particulière du rapport à l’objet socialement proche : c’est du fait de cette proximité que les sujets enquêtés mettaient, en ce cas, l’enquêteur en question. (…) la réflexion socio-analytique sur soi-même aide aussi à comprendre pourquoi on entend mieux certaines paroles sur le monde social lorsqu’elles sont tenues, par exemple, à partir de positions où la manière d’occuper le poste l’emporte sur sa définition institutionnelle…» (p. 143).

La proximité avec le milieu que j'explore m'aide à entrer en contact sans aucune difficulté avec le public que je souhaite découvrir. «La capacité pour le sociologue de prendre en compte la relation qu'il entretient avec son objet constitue donc un moyen d'améliorer la qualité scientifique de son travail» (Corcuff, 1995, p.22). Le tutoiement est par ailleurs la marque de cette proximité. Ces types d'apports se démarquent des démarches traditionnelles puisque cette méthode de production de données s’enrichit par une proximité et familiarité qui minimisent quelconque ambiguïté de comportement interviewer-interviewé et facilitent la mise en confiance de l’interviewé.

La relation de communication dans son ensemble ignore particulièrement tout problème relationnel et confidentiel qui pourrait surgir lors d'une interaction où le rapport interviewer- interviewé serait davantage distant et étranger. L'entretien étant une situation de face à face particulière est rendue difficile dans sa gestion de par le fait que cette situation de communication est en quelque sorte artificielle, puisque l'on demande à une personne de donner sans rien lui rendre en retour, donc non réciproque. Néanmoins la relation amicale et respectueuse qui me lie aux interviewé(e)s est en d’autres termes la garantie de soulager les préoccupations relatives à la divulgation de propos personnels et confidentiels, tenue par le secret d’anonymat. Ainsi dans cette perspective relationnelle, j’espère avoir réussi à instaurer un sentiment de confiance qui a contribué à la confidence et au partage

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5.3 Cadre interprétatif : La Roue, modèle d’analyse sphérique

Le principe d'une analyse sphérique et systémique m'a été inspiré lors d'un cours académique en formation des adultes dispensé par M. Chistopher Parson qui fait référence à un programme de formation d'adulte Ecossais, développé par l’Agence gouvernementale écossaise, pour la maîtrise de l'écrit et du calcul. Ce programme propose un support visuel : La Roue, composée de cercles concentriques des différentes dimensions structurantes de la formation. La Roue est un outil utilisé en alphabétisation et en formation d’adultes pour déterminer et évaluer des objectifs individuels et de groupe. L'originalité ici est que la Roue place l’apprenant au cœur du dispositif car c’est lui qui évalue ses besoins, ses compétences et fixe ses objectifs. Cette centration sur l’apprenant met en évidence ses pratiques quotidiennes, ses appartenances sociales, ses apprentissages. Elle indique comment centrer l’apprentissage sur l’apprenant, le négocier avec lui et tirer parti de ses connaissances et compétences actuelles ainsi que des réalités de sa vie privée familiale et professionnelle. La Roue permet une réelle évaluation des progrès autour de l'apprenant et du chemin parcouru.

Figure 3 : La Roue développée par l’Agence gouvernementale écossaise, pour la maîtrise de l'écrit et du calcul

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J'ai choisi d'adapter ce modèle d'analyse aux données langagières, produites dans mes entretiens, dans le but de participer à une meilleure définition des composantes des expériences que les remplaçants m'ont relatées. Ce qui m'a particulièrement intéressé c'est d'une part la possibilité de pouvoir modifier ce type de dispositif d'analyse et de l'intégrer à un modèle que je recherche. Selon moi l'originalité de ce modèle des différentes dimensions structurant les dynamiques socioprofessionnelles des remplaçants nous offre la possibilité de ne pas perdre de vue les priorités, les contenus et les évolutions de ses différentes trajectoires et processus transitionnels dans les expériences des remplaçants. Les différents cercles rassemblent de manière générale les principaux aspects de l'expérience de l'enseignement en tant que combinés dans un processus dynamique socioprofessionnel. Il s'agit d'un modèle intrasystémique où l’acteur n’est plus considéré comme étant sous l’emprise forcément dominante du monde du travail mais comme placé au cœur d’un réseau conflictuel de significations qui dessine l’ensemble de son système d’activité.

Par ailleurs, la juxtaposition de plusieurs dimensions et dynamiques est rendue possible par la mobilité des cercles. A travers l’analyse de différents récits, l'avantage des sphères est de participer à mieux définir les composantes des expériences que les remplaçants ont pu effectuer et contribuer à la compréhension des liens entre la motivation à enseigner dans un contexte de remplacement et les caractéristiques individuelles qui ont été opérées. En d’autres termes, il s’agit de savoir de quoi est composée la motivation à remplacer et comment sont caractérisés les aspects qui ont permis aux remplaçants d’améliorer leurs compétences et d’accroître leur propre capacité professionnelle. L’accent est porté sur les pratiques concrètes et quotidiennes. C'est pourquoi j'ai fait le choix de réunir différentes sphères qui représentent les dimensions intégrantes et significatives de l'expérience des remplaçants.

Les notions d’expérience et d’identité professionnelle des remplaçants sont des concepts qui se prêtent à plusieurs interprétations, il est donc nécessaire pour moi de les clarifier dans le but de mieux les comprendre et de bien préciser le sens dans lequel ils seront employés dans le cadre de ma recherche. En m’appuyant sur les différents entretiens que les remplaçants m'ont accordés, ils ont accepté de me confier leurs expériences. Je note de manière générale qu’apprendre de l'expérience des autres me confronte à différents modèles de comportements professionnels avec de nombreuses variations et nuances. Je m’intéresse au rôle significatif et tente de cerner au cours des entretiens ce qui peut s’engager dans une nouvelle approche qui intègre la dimension indispensable des expériences des remplaçants.

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L

ES SOURCES ET SPÉCIFICITÉS DU MODÈLE D

'

ANALYSE SPHÉRIQUE

Les cercles en tant que sphères dimensionnelles et processus de construction et représentations socioprofessionnelles du remplaçant

Sphère 1: Portrait

Il s’agit d’une sphère qui présente le portrait du remplaçant et tout ce qui a trait à l'identité de mes interlocuteurs. Dans ce portrait il y a en même temps des informations factuelles et des informations plus approfondies telles l'âge, le sexe, le niveau de formation, les expériences professionnelles, associatives, etc. Il s'agit d'une centration sur l’intervenant et ses pratiques quotidiennes et appartenances sociales représentées par l'articulation de différents pôles de la vie privée, familiale, sociale et professionnelle. Ces pôles se rattachent à l'identité sociale et professionnelle. Cette dimension initiale d'identité socioprofessionnelle est négociée principalement en fonction des intérêts personnels de la personne et les contraintes de son environnement professionnel. Cette approche se rattache à un courant interactionniste, soit d'une interrelation entre le remplaçant et son environnement socioprofessionnel.

Sphère 1: Portrait (identité,famille, profession, privée, scolaire)

Shère 2 : Dimension significative (Aspects motivationnels, humain adaptation, valeurs,

significations)

Sphère 3 : Réflexivité (perturbations, conflits socio- cognitifs, pertes, blocages, ruptures, changements)

Sphère 4 : Sources d'actions individuelles

(Autonomisation, régulation, intégration)

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Sphère 2 : Dimension significative

Tout ce qui a trait à l'aspect humain en lien avec l’objet de recherche choisi. Quelles sont les motivations des remplaçants pour réaliser cette activité ? Cette dimension illustre la tension entre la pratique d'un remplaçant et les différentes dynamiques motivationnelles, affectivo-émotionnelles et psycho-sociales. Ici l'accent est mis sur les motivations à intégrer une activité professionnelle. Ce cercle représente le fait de s'engager dans une activité ou plutôt dans une situation et de s'y investir. Il s'agit de mettre en lumière les valorisations, significations et expériences que les remplaçants nous dévoilent dans leurs récits. Ce type de données se qualifie en tant que ressources conatives concernant principalement l'attitude, la motivation, l'intérêt, l'image de soi, les valeurs, etc.

Sphère 3 : Réflexivité

Tout ce qui a trait à l'aspect réflexif, ce que pense le remplaçant de l'activité, quelles difficultés a-t-il rencontrées ou peur de rencontrer. Il s’agit du réseau conflictuel de significations qui dessine l’ensemble de son système d’activité (effets de ruptures affectives individuelles ou collectives dans des types de transition très différents selon le type de sentiment de perte éprouvé, de perturbations, de blocages, de désillusion, etc.)

Sphère 4 : Sources d’actions individuelles

Cette dimension caractérise les ressources en tant que sources d'actions individuelles.

« Il s'agit d'un ensemble très vaste de ressources qu'une personne apprend à utiliser en situation à travers son expérience » (Jonnaert, 2004). Ces sources d'actions individuelles intègrent les principes d’autonomisation de régulation, d’intégration, de renforcement d’adaptation, mais également les processus psychologiques d’évaluation, de décision, de distanciation, d’invention de nouvelles conditions d’existence qui sont les sources d’actions individuelles et collectives de transformation.

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Chapitre 6 :

A

NALYSE DES DISCOURS DES REMPLAÇANTS 6.1 Portraits des remplaçants interviewés

Cette partie de mon travail délivre le portrait de chacun des remplaçants interrogés lors des entretiens. Le mode de traitement du portrait met en valeur le parcours individuel d'une personne, ses orientations et ses objectifs professionnels. Il faut donc que la revue des portraits contienne des éléments personnels faisant comprendre au lecteur la particularité des histoires de chacun.

Un point important que je souhaite signaler en préambule, c’est qu’il s’agit ici de la présence d’une pratique du travail éducatif particulière. Lorsqu’un enseignant pour une raison ou une autre se voit contraint de s’absenter, le remplaçant est sollicité au pied levé pour assurer sa fonction pendant son absence. Les remplaçants sont en quelque sorte des instruments de régulation. « L’idée de régulation n’appelle pas d’emblée à celle d’un régulateur unique, mais bien d’une pluralité d’instances et de lieux de régulation » écrit Dutercq (2005).

Le tableau ci-dessous synthétise les caractéristiques individuelles de chacun des participants selon les rubriques indiquées : âge, diplômes/ Niveau d'études, Sexe3, Niveau scolaire concerné lors des remplacements, Niveau d'expérience dans les remplacements. La moyenne d'âge pour les cinq personnes est de 29 ans. Elles sont engagées dans une pratique attestée de remplaçants des écoles, mais dans des domaines de compétences différenciés.

Dans la typologie de mon modèle d’analyse, il s’agit dans cette première sphère de placer l’acteur au centre de l’analyse. Etant donné la diversité des parcours de chaque remplaçant interviewé, l’ambition de formuler une analyse individuelle des portraits permet d’illustrer des composantes personnelles des acteurs. L’analyse implique d’identifier des données factuelles tel que l’âge, le sexe, le niveau d’étude, etc. et des données complexes telles que le niveau d’expérience dans les remplacements.

3 L’activité de remplacement est majoritairement représentée par des femmes.

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Le niveau d’expérience dans les remplacements est relatif d’une part aux nombres de remplacements cumulés de courte et de longue durée, mais est également relatif aux conditions concrètes d’exercice des praticiens remplaçants. L’implication des remplaçants n’est pas la même lors d’un remplacement de longue durée que lors de remplacements ponctuels. Cette implication n’influence pas le niveau de compétence des remplaçants. Les remplacements ponctuels comportent de nombreuses spécificités qui conduisent le remplaçant à être capable de s’intégrer et de s’adapter aux exigences de l’activité de manière immédiate.

Cette grande flexibilité d’intégration et d’adaptation concerne toutes les dispositions qui sont prises par les remplaçants lors de chaque remplacement. Les remplacements de longue durée s’opèrent avec d’autres exigences dont les spécificités se rapprochent davantage des spécificités d’organisation du travail propres au travail des enseignants. Dans cette perspective, j’ai classé l’expérience en trois catégories : Grande expérience, Faible expérience, Très faible expérience.

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SB AB MJ AC MA

Age 25 ans 31 ans 22 ans 27 ans 41 ans

Diplômes/ Niveau d’étude

Master en Sciences de l’Education

Maturité professionnelle Etudes en Gestion d'entreprise en cours

Maturité professionnelle

En étude post grade en

communication Licence en Lettre

Sexe Féminin Féminin Féminin Féminin Féminin

Niveau scolaire concerné lors des

remplacements

Primaire Primaire Primaire Primaire Secondaire

Niveau d’expérience

dans les remplacements

Grande expérience, ponctuels et remplacements de

longue durée

Faible expérience, remplacements ponctuels et de longue

durée

Très faible expérience et de manière

ponctuelle

Faible expérience, remplacements ponctuels et de longue

durée

Grande expérience, de manière ponctuelle et

remplacements de longue durée

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Sphère 1 :

Portrait de SB

SB a 25 ans. Elle a acquis un Master en Sciences de l’Education et souhaite exercer dans un futur proche la fonction d’enseignante pour les divisions primaires. Elle occupe la place de remplaçante depuis plus de cinq ans : “maintenant j’ai mon master, je me sens capable d’assumer et de suivre une classe… Et c’est pour ça aussi qu’ils me traitent pas différemment que les autres.” (Entretien avec SB, l. 171-172). SB se sent très fortement intégrée dans le contexte professionnel des remplacements. Elle a effectué des remplacements de longue durée à plusieurs reprises dans différents établissements du canton. Pour elle, être remplaçante de longue durée se substitue parfaitement au métier d’enseignante titulaire, comme par exemple lorsqu’elle m’explique à travers ses paroles adressées à ses élèves : « J’ai commencé en tant que remplaçante (tu vois), alors ils avaient dans l’esprit que j’étais remplaçante, maintenant ils savent que je suis la nouvelle maîtresse, enfin toujours remplaçante mais de longue durée. ». l. 53-55. SB affirme clairement sa position dans son rôle de remplaçante et affiche une très haute ambition professionnelle : « Je suis remplaçante entre guillemets mais ça sera moi jusqu’à la fin de l’année et je lui ai dit que la maîtresse ne reviendra pas c’est moi la maîtresse maintenant on fera comme moi j’ai décidé de faire, pas comme l’ancienne maîtresse. » (l. 57-59).

On apprend également à travers son discours que SB se trouve dans une situation suffisamment habituelle pour qu’elle parvienne à maîtriser ses tâches sans recourir à une règle ou d’autres types de schèmes d’action. A force d’avoir cumulé de nombreux remplacements de longue et courte durée, elle a su intérioriser un certain nombre de compétences et les mettre en pratique. Ses préoccupations sont proches de celles d’une enseignante titulaire A cela s’ajoute le fait qu’elle justifie tant bien que mal ses connaissances théoriques en Sciences de l’éducation, par le fait qu’elle mentionne que maintenant qu’elle a eu son Master, ce n’est pas comme si elle n’était pas qualifiée. (l. 165)

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Portrait d’AB

AB est âgée de 31 ans. D’après les critères de niveau d’expérience, AB possède une faible expérience des remplacements. Elle exerce pour les établissements de niveau primaire. Elle détient une maturité professionnelle et a effectué trois années d'études supérieures à la Haute Ecole de Gestion. Elle n'a pas poursuivi son cursus, a cessé ses études à la HEG et s’est inscrite au CNAM (Centre National des Arts et des Métiers) dans le but d’acquérir une licence en gestion d’entreprise. Les cours au CNAM sont des cours du soir ou à distance, c’est pourquoi la journée elle entreprend des remplacements. La voie des remplacements est selon elle une voie professionnelle accessoire : « Je travaille avant tout pour gagner de l’argent...à côté de mes études...je prépare une licence en gestion d’entreprise » l. 18-20. Quant à ses projets professionnels, ils ne s'orientent pas dans le domaine de l'enseignement ni des remplacements puisqu'elle affirme : « J’ai d’autres projets aussi...mais j’aimerais postuler comme inspectrice de police » l. 22-23.

Portrait de MJ

MJ est âgée de 22 ans. Son parcours de formation n’est pas terminé, pour l’instant elle a en sa possession une maturité professionnelle et souhaiterait s'inscrire en Sciences de l'Education, pour l’obtention de la passerelle, programme d’un an de cours complémentaires suivi d’un examen lui permettant de rentrer à l'université. Son choix d’étude n’est clairement pas motivé

« Je me suis dit pourquoi pas Science de l’éduc’ parce que je sais vraiment pas dans quoi me diriger » l. 6-7 MJ n’a pas de réelle engouement à suivre un programme en Sciences de l’Education dans le domaine de l’enseignement, à l’exception du fait qu'elle apprécie les enfants et qu'elle décrit les vacances des enseignants comme avantageuses. l. 5-6

MJ est issue d’une famille nombreuse, ainée de cinq enfants, elle s’occupe régulièrement de ses frères et sœurs aussi bien dans les tâches domestiques que scolaires. MJ aide ses frères et sœurs dans leurs devoirs, les accompagne régulièrement à l’école et s’investit parfois dans d’autres types de tâche telles que les sorties de classes.

MJ se projette davantage dans un milieu professionnel de type humanitaire. Son souhait serait d'aider des enfants défavorisés à la construction d’une école et de leur apprendre les bases scolaires, l. 21-23.

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