Lycée Benjamin Franklin PTSI−2014-2015
D. Blottière Mathématiques
Chapitre XV Limites et continuité
Table des matières
1 Les 15 définitions de la notion de limite pour une fonction 1
2 Définition du symbolelim 7
3 La notion de propriété locale 7
4 Opérations sur les limites 8
5 Limites de suites et limites de fonctions 8
6 Limites et inégalités 8
7 Théorème d’existence de limites 8
8 Continuité ponctuelle 10
9 Fonctions continues sur un intervalle 12
1 Les 15 définitions de la notion de limite pour une fonction
Objectif :Étant donnée une fonctionf, on cherche à donner un sens précis à l’assertion :
« la fonctionf admet pour limitelquandxtend versx0»
oùx0∈{a,a+,a−,+∞,−∞} (a∈R) etl∈{b,+∞,−∞} (b∈R). Il y a donc 15 définitions à donner.
Définitions fondamentales (les 15 définitions de la notion de limite) Soitf:Df →Rune fonction, oùDf est une partie non vide deR.
1. On suppose queIcontient un intervalle du type ]?,+∞[ avec ?∈R. Intuitivement, cette hypothèse per- met d’avoir « de la place dansDf pour se rapprocher de+∞».
(a) On dit quef admet pour limitel∈Ren+∞si :
∀ε>0 ∃A>0 ∀x∈Df x≥A⇒ |f(x)−l| ≤ε.
l l+ǫ
l−ǫ
A ǫ
Cf
(b) On dit quela fonctionf admet pour limite+∞en+∞si :
∀B>0 ∃A>0 ∀x∈Df x≥A⇒f(x)≥B.
A B
Cf
(c) On dit quela fonctionf admet pour limite−∞en+∞si :
∀B<0 ∃A>0 ∀x∈Df x≥A⇒f(x)≤B.
A
B Cf
2. On suppose queIcontient un intervalle du type ]− ∞,?[ avec ?∈R. Intuitivement, cette hypothèse per- met d’avoir « de la place dansDf pour se rapprocher de−∞».
(a) On dit quela fonctionf admet pour limitel∈Ren−∞si :
∀ε>0 ∃A<0 ∀x∈Df x≤A⇒ |f(x)−l| ≤ε.
l l+ǫ
l−ǫ
A
ǫ Cf
(b) On dit quela fonctionf admet pour limite+∞en−∞si :
∀B>0 ∃A<0 ∀x∈Df x≤A⇒f(x)≥B.
A
B
Cf
(c) On dit quela fonctionf admet pour limite−∞en−∞si :
∀B<0 ∃A<0 ∀x∈I x≤A⇒f(x)≤B.
A
B Cf
3. Soita∈R. On suppose queDf contient un intervalle du type ]a−?,a[ ou un intervalle du type ]a,a+?[
avec ?>0. Intuitivement, cette hypothèse permet d’avoir « de la place dansDf pour se rapprocher dea, par la gauche, par la droite, ou par la gauche et la droite. ».
(a) On dit quela fonctionf admet pour limitel∈Renasi :
∀ε>0 ∃δ>0 ∀x∈Df |x−a| ≤δ⇒ |f(x)−l| ≤ε.
δ a
a−δ a+δ
l l+ǫ
l−ǫ ǫ
Cf
(b) On dit quela fonctionf admet pour limite+∞enasi :
∀A>0 ∃δ>0 ∀x∈Df |x−a| ≤δ⇒f(x)≥A.
δ
a−δ a a+δ
A
Cf
(c) On dit quela fonctionf admet pour limite−∞enasi :
∀A<0 ∃δ>0 ∀x∈Df |x−a| ≤δ⇒f(x)≤A.
δ
a−δ a a+δ
A
Cf
4. Soita∈R. On suppose queDf contient un intervalle du type ]a−?,a[ avec ?>0, ou ce qui revient au même queDf∩]− ∞,a[6= ;. Intuitivement, cette hypothèse permet d’avoir « de la place dansDf pour se rapprocher dea, par la gauche ».
(a) On dit quela fonctionf admet pour limitel∈Rena−si :
la fonctionf|Df∩]−∞,a[admet pour limitel∈Rena i.e. si :
∀ε>0 ∃δ>0 ∀x∈Df∩]− ∞,a[ |x−a| ≤δ⇒ |f(x)−l| ≤ε.
ou bien encore :
∀ε>0 ∃δ>0 ∀x∈Df a−δ≤x<a⇒ |f(x)−l| ≤ε.
(b) On dit quela fonctionf admet pour limite+∞ena−si :
la fonctionf|Df∩]−∞,a[admet pour limite+∞ena i.e. si :
∀A>0 ∃δ>0 ∀x∈Df∩]− ∞,a[ |x−a| ≤δ⇒f(x)≥A.
ou bien encore :
∀A>0 ∃δ>0 ∀x∈Df a−δ≤x<a⇒f(x)≥A.
(c) On dit quela fonctionf admet pour limite−∞ena−si :
la fonctionf|Df∩]−∞,a[admet pour limite−∞ena i.e. si :
∀A<0 ∃δ>0 ∀x∈Df∩]− ∞,a[ |x−a| ≤δ⇒f(x)≤A.
ou bien encore :
∀A<0 ∃δ>0 ∀x∈Df a−δ≤x<a⇒f(x)≤A.
5. Soita∈R. On suppose queDf contient un intervalle du type ]a,a+?[ avec ?>0, ou ce qui revient au même queDf∩]a,+∞[6= ;. Intuitivement, cette hypothèse permet d’avoir « de la place dansDf pour se rapprocher dea, par la droite ».
(a) On dit quela fonctionf admet pour limitel∈Rena+si :
la fonctionf|Df∩]a,+∞[admet pour limitel∈Rena i.e. si :
∀ε>0 ∃δ>0 ∀x∈Df∩]a,+∞[ |x−a| ≤δ⇒ |f(x)−l| ≤ε.
ou bien encore :
∀ε>0 ∃δ>0 ∀x∈Df a<x≤a+δ⇒ |f(x)−l| ≤ε.
(b) On dit quela fonctionf admet pour limite+∞ena+si :
la fonctionf|Df∩]a,+∞[admet pour limite+∞ena i.e. si :
∀A>0 ∃δ>0 ∀x∈Df∩]a,+∞[ |x−a| ≤δ⇒f(x)≥A.
ou bien encore :
∀A>0 ∃δ>0 ∀x∈Df a<x≤a+δ⇒f(x)≥A.
(c) On dit quela fonctionf admet pour limite−∞ena+si :
la fonctionf|Df∩]a,+∞[admet pour limite−∞ena i.e. si :
∀A<0 ∃δ>0 ∀x∈Df∩]a,+∞[ |x−a| ≤δ⇒f(x)≤A.
ou bien encore :
∀A<0 ∃δ>0 ∀x∈Df a<x≤a+δ⇒f(x)≤A.
Remarque 1 (Caractère local de la notion de limite).
La notion de limite ena∈R:=R∪{−∞,+∞} pour une fonction dépend uniquement du comportement de la fonction « autour dea». C’est une notion locale.
Exercice d’application 1.
Soit la fonctionf définie par :
¯¯
¯¯
¯¯
¯
f : R\ {2} → R
x 7→ x
x−2
1. Démontrer quef(x) tend vers 1 quandxtend vers+∞et interpréter graphiquement ce résultat.
2. Démontrer quef(x) tend vers+∞quandxtend vers 2+et interpréter graphiquement ce résultat.
2 Définition du symbole lim
Notations :adésigne un nombre réel,x0un élément de {a,a+,a−,+∞,−∞},l,l1etl2des éléments deR.
Théorème 1 (Unicité de la limite).
Soitf une fonction. Si
f(x)x→
→x0l1 et f(x)x→
→x0l2
alorsl1=l2.
Définition 1 (Symbolelim).
Soitf une fonction. Sif(x)x→
→x0l, alors celest unique. On l’appelle limite def enx0et on le note lim
x→x0f(x) ou limx0 f.
Exemple 1.
On considère à nouveau la fonction f de l’exemple précédent. Nous avons démontré que les limites def en +∞et 2+existent et que leurs valeurs sont données par :
x→+∞lim f(x)=1 et lim
x→2+f(x)= +∞. Remarque 2.
Soitf une fonction telle quef admet une limite ena−et une limite ena+, oùa∈R. Que dire du comportement def enasi lim
x→a−f(x)= lim
x→a+f(x) ?
1. Sia∉Df, alorsf admet une limite enaet l’on a :
xlim→a−f(x)= lim
x→a+f(x)=lim
x→af(x).
2. Sia∈Df, alorsf n’admet pas nécéssairement de limite ena, comme on peut le voir avec la fonction :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
f : R → R
x 7→
1 six<0
−1 six=0 1 six>0
.
En fait,f admet une limite enasi et seulement si :
xlim→a−f(x)= lim
x→a+f(x)=f(a) et dans ce cas lim
x→af(x)=f(a).
Exercice d’application 2.
Étudier les limites éventuelles de la fonction partie entière en un pointa∈R.
3 La notion de propriété locale
Définition 2 (Propriété vraie localement enapour une fonction).
Soit f une fonction définie sur un intervalle non videI deR. Soitaun point ou une extrémité deI. On dit qu’une propriété portant surf est vraie localement enasi cette propriété est vérifiée pour toutxdeI∩Vaoù :
Va=
]a−δ,a+δ[ pour un certainδ>0 sia∈R ]A,+∞[ pour un certainA∈Rsia= +∞
]− ∞,A[ pour un certainA∈Rsia= −∞
.
Exemple 2.
La fonction cosinus est localement strictement positive en 0.
Théorème 2 (Avoir une limite finie implique être localement bornée).
Soitf une fonction. Soitx0∈R. On suppose quef admet une limite finie enx0, i.e. que : f admet une limite enx0et lim
x→x0f(x)∈R.
Alors la fonctionf est localement bornée enx0.
Démonstration. Nous démontrons ce résultat, dans le cas oùx0∈R.
4 Opérations sur les limites
Théorème 3 (Opérations sur les limites).
Les opérations sur les limites vues pour les suites se généralisentmutatismutandis aux fonctions.
Exercice d’application 3.
Démontrer que 1 →
x→11 et quex →
x→11. En déduire le comportement de 3x2−5x+7 quandxtend vers 1.
5 Limites de suites et limites de fonctions
Théorème 4 (Limites de suites et limites de fonctions).
Soitf une fonction et (un)n∈Nune suite réelle. On suppose queun∈Df pour toutn∈N, ainsi la suite (f(un))n∈N
est-elle bien définie.
unn→
→+∞x0
f(x)x→
→x0l
¯¯
¯¯
¯¯
¯
⇒ f(un)n→
→+∞l
oùx0∈{a,a−,a+,−∞,+∞} (a∈R) etl∈R.
Démonstration. Nous démontrons ce résultat, dans le cas oùx0=a∈R.
Exercice d’application 4.
Démontrer que la fonction cosinus n’admet aucune limite en+∞. Exercice d’application 5.
Étudier du comportement asymptotique de la suite µ¹
1−1 n
º¶
n∈N∗
.
6 Limites et inégalités
Théorème 5 (Passage à la limite dans une inégalité large).
Soientf etgdeux fonctions admettant une limite enx0∈R. Sif ≤glocalement enx0, alors :
xlim→x0f ≤ lim
x→x0g. Exercice d’application 6.
Soitf une fonction admettant une limite finie en 0.
1. Que dire du signe lim
x→0f(x) s’il existeα>0 tel quef >αlocalement en 0 ? 2. Que dire du signe lim
x→0f(x) sif(x)>x2localement en 0 ?
7 Théorème d’existence de limites
Théorème 6 (Théorème d’encadrement pour les fonctions).
Soientf,g,htrois fonctions. On suppose que :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
¯
(a) f ethadmettent des limites finies enx0; (b) lim
x→x0f(x)= lim
x→x0h(x);
(c) f ≤g≤hlocalement enx0;
oùx0∈R. Alors : ¯¯¯
¯¯
(a) gadmet une limite finie enx0; (b) lim
x→x0f(x)= lim
x→x0g(x)= lim
x→x0h(x).
Exercice d’application 7.
1. Étudier la limite éventuelle de la fonction :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
f : R∗ → R
x 7→ xsin µ1
x
¶
en 0.
2. Étudier la limite éventuelle de la fonction :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
f : R∗ → R
x 7→ cos(x) px
en+∞.
Théorème 7 (Théorème de domination pour les fonctions).
Soientf,gdeux fonctions telles que :
f ≤glocalement enx0; oùx0∈R. Alors :
1. Sif(x)x→
→x0+∞, alorsg(x)x→
→x0+∞. 2. Sig(x)x→
→x0−∞, alorsf(x)x→
→x0−∞. Exercice d’application 8.
1. Étudier la limite éventuelle de la fonction :
¯¯
¯¯
¯¯
f : R → R
x 7→ x2+cos(4x) en+∞, puis en−∞.
2. Que dire d’une fonctionf telle que :
f ≤ln localement en 0 ?
Théorème 8 (Théorème de la limite monotone).
SoientI un intervalle non vide deRdont les bornes sont notéesaetbdansR, aveca<betf une fonction définie surI.
1. Sif est monotone surIalorsf admet une limite finie ou infinie ena+et enb−. 2. On supposef croissante surI. On peut alors préciser les limites ena+et enb−.
(a) Sif est majorée alors
f(x) →
x→b−sup
x∈I
f(x)∈R sinon
f(x) →
x→b−+∞. (b) Sif est minorée alors
f(x) →
x→a+inf
x∈If(x)∈R sinon
f(x)x→
→a−−∞.
3. On supposef décroissante surI. On peut alors préciser les limites ena+et enb−. (a) Sif est majorée alors
f(x) →
x→a+sup
x∈I
f(x)∈R sinon
f(x) →
x→a++∞. (b) Sif est minorée alors
f(x) →
x→b−inf
x∈If(x)∈R sinon
f(x) →
x→b−−∞. Exercice d’application 9.
Étudier la limite éventuelle de la fonctionϕdéfinie par :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
ϕ : [1,+∞[ → R
x 7→
Zx 1 e−t
2 2 d t
en+∞.
8 Continuité ponctuelle
Définition 3 (Définition de la continuité en un point (resp. à gauche, à droite)).
Soitf une fonction définie sur un intervalleI(ou une réunion d’intervalles). Soitaun point deI.
1. f est continue enasif(x)x→
→af(a).
2. f est continue enaà gauche sif(x)x→→a−f(a).
3. f est continue enaà droite sif(x) →
x→a+f(a).
Remarque 3.
On conserve les notations de la définition précédente.
1. f est continue enasi et seulement sif est continue enaà droite et à gauche.
2. f est continue enasi et seulement sif admet une limite finie ena.
⇒ Sif est continue ena, alors il est clair quef admet une limite finie ena, puisquef(a)∈R.
⇐ Supposons quef admette une limite finie, notéel, ena. Alors pour toutε>0, il existeδ>0 tel que pour toutx∈I∩]a−δ,a+δ[,|f(x)−l| ≤ε. Commea∈I∩]a−δ,a+δ[, on en déduit :
(⋆) ∀ε>0 |f(a)−l| ≤ε.
Si|f(a)−l| >0, alors on obtient une absurdité en appliquant (⋆) avecε=|f(a)−l| 2 >0.
Donc|f(a)−l| =0 et par suitel=f(a).
Exercice d’application 10.
1. Étudier la continuité en 1 de la fonction f définie par :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
f : R → R
x 7→
−2 si x<1 0 si x=1 3 si x>1
.
2. Étudier la continuité en 0 de la fonctiongdéfinie par :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
g : R → R
x 7→
x+1 si x≤0 1−x
2 si x>0 .
Définition 4 (Prolongement par continuité d’une fonction).
SoitIun intervalle réel possédant une extrémitéa∈R\I. Soitf une fonction définie surI. 1. On dit quef est prolongeable par continuité enasif admet une limite finie ena.
2. Si f est prolongeable par continuité ena, alors le prolongement par continuité def surI∪{a} est la fonctionfedéfinie par :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
¯
fe : R → R
x 7→
f(x) si x∈I lima f si x=a
.
La fonctionfeest, par construction, continue ena, d’où la terminologie.
Exercice d’application 11.
1. Peut-on prolonger la fonctionf définie par :
¯¯
¯¯ f : ]0,+∞[ → R x 7→ xln(x) par continuité ? Si oui, donner son prolongement par continuité.
2. Peut-on prolonger la fonctiongdéfinie par :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
g : ]1,+∞[ → R
x 7→ x2−2 px−1
.
par continuité ? Si oui, donner son prolongement par continuité.
3. Peut-on prolonger la fonctionhdéfinie par :
¯¯
¯¯
¯¯
¯¯
h : R\ {1} → R
x 7→ x4−1 x−1 par continuité ? Si oui, donner son prolongement par continuité.
Théorème 9 (Image d’une suite de limiteapar une fonction continue ena).
Soitf une fonction définie sur un intervalleI continue en un pointadeI. Soit (un)n∈Nune suite d’éléments deItelle queun→a. Alorsf(un)→f(a).
Démonstration. On aun→aetf(x)x→
→af(a) carf est continue ena. On applique alors le théorème 4 pour obtenirf(un)→f(a).
Exercice d’application 12.
Soit (un)n∈Nune suite définie paru0=0 et la relation de récurrence : un+1=eun
valable pour toutn∈N.
1. Démontrer que la suite (un)n∈Nest bien définie.
2. Étudier le signe deex−x, pour toutx∈R.
3. En déduire que la suite (un)n∈Nest croissante et divergente vers+∞. Théorème 10 (Opérations sur les fonctions continues en un point).
1. Soientf etgdes fonctions définies sur le même intervalleIet continue en un pointadeI.
(a) Soientλ,µdes nombres réels. La fonctionλ.f +µ.g, définie surI, est continue ena.
(b) La fonctionf×g, définie surI, est continue ena.
(c) Si la fonctiongne s’annule pas surI, alors la fonction f
g, (bien) définie surI, est continue ena.
2. Soit f une fonction définie sur un intervalleIet continue ena∈I. Soitgune fonction définie sur un intervalleJtel quef(I)⊂J, continue enf(a)∈J.
La fonctiong◦f, (bien) définie surI, est continue ena.
Démonstration.
1. Les résultats 1.(a), 1.(b) et 1.(c) découlent des résultats sur les opérations sur les limites. Démontrons par exemple la propriété 1.(a) pour illustrer notre propos. Comme f etg sont continues ena, on a f(x)x→→af(a) etg(x)x→→ag(a). Par opération sur les limites (combinaison linéaire), on a donc :
(λ.f +µ.g)(x) :=λf(x)+µg(x)x→→aλf(a)+µg(a)=: (λ.f+µ.g)(a).
Et donc la fonctionλ.f +µ.gest continue ena.
2. Pour démonstration du résultat sur la composition, cf. prise de notes.
9 Fonctions continues sur un intervalle
Définition 5 (Fonction continue sur un intervalle).
Soitf une fonction définie sur un intervalleI(ou une réunion d’intervalles). On dit quef est continue surIsi f est continue en tout pointadeI.
Théorème 11 (Continuité des fonctions usuelles).
Les fonctions usuelles, à l’exception notable de la fonction partie entière, sont continues sur leurs domaines de définition.
Théorème 12 (Opérations sur les fonctions continues).
1. Soientf etgdes fonctions définies et continue sur le même intervalleI.
(a) Soientλ,µdes nombres réels. La fonctionλ.f +µ.g, définie surI, est continue surI.
(b) La fonctionf×g, définie surI, est continue surI. (c) Si la fonctiongne s’annule pas surI, alors la fonction f
g, (bien) définie surI, est continue surI. 2. Soitf une fonction définie sur un intervalleIet continue surI. Soitgune fonction définie sur un inter-
valleJtel quef(I)⊂J, continue surJ.
La fonctiong◦f, (bien) définie surI, est continue surI.
Démonstration. Ce théorème est une conséquence de sa version ponctuelle, i.e. du théorème 10.
Exercice d’application 13.
Justifier la continuité de la fonctionf définie par :
¯¯
¯¯ f : ]2,+∞[ → R
x 7→ ln(x−2)p
xcos2(x) est continue sur ]2,+∞[.
Théorème 13 (Cas particulier du théorème des valeurs intermédiaires).
Soitf une fonction :
(a) définie sur un intervalle [a,b] ; (b) continue sur [a,b] ;
(c) telle quef(a)f(b)<0 (i.e.f(a) etf(b) sont de signes opposés).
Alorsf s’annule au moins une fois sur [a,b], i.e. il existex∈[a,b] tel quef(x)=0.
0.5 1.0 1.5
−0.5
−1.0
−1.5
−2.0
0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0
−0.5
−1.0
−1.5
Cf a
b
f(a) f(b)
× × ×
Démonstration. Quitte à changerf en−f, on peut supposer quef(a)<0 etf(b)>0.
On construit deux suites (an)n∈Net (bn)n∈N, par récurrence, comme suit.
• On posea0=aetb0=b. On a : . a≤a0≤b0≤b;
. f(a0)≤0 etf(b0)≥0 ; . b0−a0=b−a.
• Supposons construitsanetbntels que : . a≤an≤bn≤b;
. f(an)≤0 etf(bn)≥0 ; . bn−an=b2−na.
Soitcle milieu du segment [an,bn], i.e.c=an+2bn. Sif(c)≥0, alors on posean+1=anetbn+1=c. Sinon, on posean+1=cetbn+1=bn. Dans les deux cas on a :
. a≤an+1≤bn+1≤b; . f(an+1)≤0 etf(bn+1)≥0 ; . an≤an+1etbn+1≤bn; . bn+1−an+1=b2n+−a1.
Puisquean≤an+1etbn+1≤bn, pour toutn∈N, a suite (an)n∈Nest croissante et la suite (bn)n∈Nest décrois- sante. De plus comme pour toutn∈N,bn−an=(b2−na), nous avons :bn−an→0. Les suites (an)n∈Net (bn)n∈N
sont donc adjacentes.
Par le théorème des suites adjacentes, elles admettent toute deux une limite finie et liman=limbn. Notons l∈Rla limite commune des suites (an)n∈Net (bn)n∈N.
En passant à la limite dans l’inégalitéa≤an≤b, valable pour toutn∈N, il vienta≤l≤b. Doncl∈[a,b].
Comme f est continue sur [a,b], elle est continue enl. Ainsi commean→l,f(an)→f(l). En passant alors à la limite dans l’inégalité f(an)≤0, valable pour toutn∈N, il vient f(l)≤0. De manière analogue, en utilisant l’inégalitéf(bn)≥0, valable pour toutn∈N, on montref(l)≥0. Doncf(l)=0.
Doncl∈[a,b] etf(l)=0.
Remarque 4 (Algorithme de dichotomie).
L’algorithme de dichotomie, présenté dans le cours d’Informatique Pour Tous, repose sur la construction pré- cédente. Le fait qu’il livre une valeur approchée d’une solution de l’équation «f(x)=0 » considérée résulte de la précédente démonstration.
Exercice d’application 14.
1. Démontrer que l’équation
(E) :x2014=cos(x) d’inconnuex∈Rpossède une solution.
2. Démontrer que tout polynôme deR[X] de degré 3 possède une racine dansR. On pourra, tout d’abord, se ramener au cas unitaire.
Théorème 14 (Théorème des valeurs intermédiaires).
Soitf une fonction :
(a) définie sur un intervalleI; (b) continue surI.
1. Pour tout (x1,x2)∈I2, pour toutycompris entref(x1) etf(x2) il existex∈Itel quef(x)=y. 2. Tout nombre réel compris entre deux valeurs def surIest une valeur def surI.
3. f(I) est un intervalle.
Exercice d’application 15.
1. Illustrer le théorème des valeurs intermédiaires, tout spécialement la propriété 3, à l’aide d’un schéma.
2. En s’appuyant sur le précédent graphique, proposer une démarche pour démontrer le théorème 14, en appliquant le théorème 13 à une fonction auxiliaire.
Démonstration. Il est clair que les propriétés 2 et 3 découlent de la propriété 1. Montrons donc cette dernière.
Soit (x1,x2)∈I2et soitycompris entref(x1) etf(x2). Sans perte de généralité, on peut supposer quex1<x2. Soit la fonction : ¯¯¯¯ g : [x1,x2] → R
x 7→ f(x)−y.
On ag(x1)=f(x1)−yetg(x2)=f(x2)−y. Commeyest compris entref(x1) etf(x2), on a :
f(x1)≤y≤f(x2) et doncg(x1)≤0 etg(x2)≥0 ou
f(x2)≤y≤f(x1) et doncg(x1)≥0 etg(x2)≤0.
Dans tous les cas,g(x1)g(x2)≤0.
• Siy=f(x1) ouy=f(x2), alorsx=x1oux=x2convient.
• Sinon,y6=f(x1) (i.e.g(x1)6=0) ety6=f(x2) (i.e.g(x2)6=0). On a alorsg(x1)g(x2)<0.
La fonctiong vérifie les conditions du cas particulier du théorème des valeurs intermédiaires. En lui appliquant, on obtient qu’il existexentrex1etx2tel queg(x)=0, i.e. tel quef(x)=y.
Remarque 5 (Toutes les hypothèses du théorème des valeurs intermédiaires comptent).
1. Donner un exemple graphique de fonction f définie sur un intervalleI, mais non continue surI tout entier, telle quef(I) n’est pas un intervalle.
2. Donner un exemple graphique de fonctionf définie sur un ensembleEqui n’est pas un intervalle deR, continue surE, telle quef(E) n’est pas un intervalle.
Théorème 15 (Calcul de l’image d’un intervalle par une fonction continue et strictement monotone).
Soitf une fonction telle que :
(a) f est définie sur un intervalleIdeR; (b) f est continue surI;
(c) f est strictement monotone surI.
On a alors les résultats suivants, qui permettent de calculerf(I) :=©
f(x) :x∈Iª . 1. Siaetbsont les extrémités deI(aveca<b), alors il existeA,B∈Rtels que :
f(x) →
x→a+A et f(x) →
x→b−B.
De plus, sia∈I(resp.b∈I), alorsA=f(a) (resp.B=f(b)).
2. L’intervallef(I) est donné par le tableau suivant.
f րրsurI f ցցsurI I=[a,b] f(I)=[A,B] f(I)=[B,A]
I=]a,b] f(I)=]A,B] f(I)=[B,A[
I=[a,b[ f(I)=[A,B[ f(I)=]B,A]
I=]a,b[ f(I)=]A,B[ f(I)=]B,A[
Démonstration.
1. L’existence de limite finie ou infinie pourf ena+etb−résulte du théorème de la limite monotone pour les fonctions (théorème 8). Le fait que sia∈I, lim
x→a+f(x)=f(a) est une conséquence de la continuité de f surI. De même on justifie que lim
x→b−f(x)=f(b) sib∈I.
2. On considère seulement un des cas, celui où :
¯¯
¯¯
¯¯
¯
I=]a,b] ;
f est strictement croissante surI;
xlim→a+f(x)= inf
x∈]a,b]f(x)=:A∈R.
On souhaite démontrer quef(]a,b])=]A,f(b)].
⊂ Soity0∈f(]a,b]). Alors il existex0∈]a,b] tel quef(x0)=y0.
. Commea<x0≤betf est (strictement) croissante surI=]a,b], on ay0=f(x0)≤f(b).
. A= inf
x∈]a,b]f(x) étant un minorant de {f(x)|x∈]a,b]}, on a : (⋆) ∀x∈]a,b] A≤f(x).
En particulierA≤f(x0)=y0.
. À ce stade on sait queA≤y0≤B. Il nous reste à prouver quey06=A. On raisonne par l’absurde.
Supposons y0=f(x0)=A. On considère le pointc:= a+2x0, qui est le milieu du segment [a,c].
Par croissance def sur ]a,b], on af(c)≤f(x0)=y0=A. D’autre part, on aA≤f(c) d’après (⋆).
Doncf(c)=A=f(x0), ce qui contredit la stricte croissance def (carc<x0).
⊃ Soity0∈]A,f(b)].
. On ay0≤f(b).
. CommeA= inf
x∈]a,b]f(x)<y0,y0n’est pas un minorant de {f(x)|x∈]a,b]}. Doncf(x)<y0pour unx∈]a,b].
. Le nombrey est donc compris entref(b) et f(x). En appliquant le théorème des valeurs inter- médiaires à la fonctionf, définie et continue surI=]a,b], on déduit qu’il existex0compris entre xetb, et donc appartenant à ]a,b], tel quey0=f(x0). Doncy0∈f(]a,b]).
Exercice d’application 16.
Soitf la fonction définie par :
¯¯
¯¯ f : R → R
x 7→ 1−e−x. Calculer f([0,+∞[).
Définition 6 (Segment).
On appelle segment deRtout intervalle réel de la forme [a,b] oùaetbsont des nombres réels tels quea≤b.
Exemple 3.
[1,2] est un segment, mais ]−1,2], [2,4[, ]− ∞,3] ne sont pas des segments.
Théorème 16 (Extrema d’une fonction continue sur un segment).
Soitf une fonction définie sur un segment [a,b]. Alorsf est bornée et atteint ses bornes, i.e. :
∃(m,M)∈R2 ∃(xm,xM)∈[a,b]2
¯¯
¯¯
¯¯
∀x∈[a,b] m≤f(x)≤M f(xm)=m
f(xM)=M.
.
1 2 3 4
−1
−2
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
a b
Cf M
m
× × ×
× × ×
Ce théorème est admis.
Remarque 6 (Toutes les hypothèses du théorème 16 comptent).
1. Donner deux exemples graphiques de fonction f définie sur un intervalleIqui n’est pas un segment, continue surImais ne vérifiant pas la propriété :f est bornée et atteint ses bornes.
2. Donner deux exemples graphiques de fonctionf définie sur un segment [a,b], non continue sur [a,b]
tout entier, mais ne vérifiant pas la propriété :f est bornée et atteint ses bornes.
Théorème 17 (Théorème de la bijection).
Soitf une fonction telle que :
(a) f est définie sur un intervalleIdeR; (b) f est continue surI;
(c) f est strictement monotone surI.
On a alors les résultats suivants.
1. f réalise une bijection deIsurf(I), i.e. la fonction
¯¯
¯¯
fe : I → f(I) x 7→ f(x) déduite def en restreignant son ensemble d’arrivée, est bijective.
2. La fonctionfeétant bijective, on peut considérer sa bijection réciproque (fe)−1définie par :
¯¯
¯¯
¯¯
¯
¡fe¢−1
: f(I) →I
y 7→
½ l’unique solution de l’équation f(x)=yd’inconnuex∈I
.
La fonction¡fe¢−1
est continue sur l’intervallef(I), de même stricte monotonie quef, bijective.
Démonstration.
1. L’application
¯¯
¯¯
fe : I → f(I) x 7→ f(x) est bien définie et, par construction, surjective.
Comme f est strictement monotone, elle est injective (cf. corrigé de l’exercice 56 de la feuille n°8). On en déduit que l’applicationfeest également injective.
2. • Le fait que la fonction (fe)−1soit bijective découle d’une propriété des applications réciproques éta- blie dans le chapitre 3 (cf. théorème 12 du chapitre 3).
• La continuité de (fe)−1surf(I) est admise.
• Pour la stricte monotonie de (fe)−1, on ne considère que le cas oùf est strictement croissante surI. Supposons donc f strictement croissante surIet démontrons que (fe)−1est strictement croissante surf(I).
Soit (y1,y2)∈f(I)2tel quey1<y2. On montre que (fe)−1(y1)<(fe)−1(y2) par l’absurde.
Supposons que (fe)−1(y1)≥(fe)−1(y2). alors commef est (strictement) croissante surI, on a : f((fe)−1(y1))
| {z }
fe◦(fe)−1(y1)
≥f((fe)−1(y2))
| {z }
fe◦(fe)−1(y2)
et doncy1≥y2. Contradiction.
Remarque 7.
Le théorème de la bijection joue un rôle crucial en mathématiques, par exemple :
1. pour construire de nouvelles fonctions, comme Arcsin, Arccos, Arctan (cf. chapitre 6) ; 2. pour compter le nombre de solutions d’une équation (cf. exemple suivant).
Exercice d’application 17.
Combien l’équation
(E) : ex=2−x d’inconnuex∈Rpossède-t-elle de solutions ?