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Rayons cosmiques et rayonnement du cosmos

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Rayons cosmiques et rayonnement du cosmos

Etienne Parizot

To cite this version:

Etienne Parizot. Rayons cosmiques et rayonnement du cosmos. Cosmologie et astrophysique

extra-galactique [astro-ph.CO]. Université Paris-Diderot - Paris VII, 2005. �tel-00011476�

(2)

emoire d’Habilitation `

a diriger des recherches

– Universit´e Paris 7 –

Rayons cosmiques et rayonnement du cosmos

´

Etienne Parizot

Institut de Physique Nucl´

eaire d’Orsay

(CNRS/Universit´

e Paris-Sud)

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Comme un rayonnement s’´el`eve

Un autre vient `a sa rencontre –

ˆ

O s`eve illuminant les mondes ! Et dans le secret des lumi`eres Un unique destin se fonde... H. Co. Zar

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Petite introduction en forme

de plaidoyer partisan...

Que l’astrophysique soit une discipline vaste et diverse, riche de branches et de

ra-meaux parfois presque ´etrangers les uns aux autres, il suffit de parcourir les titres des

dizaines d’articles propos´es chaque jour sur les serveurs ´electroniques d´edi´es pour s’en

rendre compte. De la cosmologie `a la m´ecanique c´eleste, de la radioastronomie `a la

physique stellaire, `a l’astrophysique des plasmas, la nucl´eosynth`ese ou l’astrobiologie, la

gamme des sujets abord´es s’enrichit chaque ann´ee de nuances in´edites et d’harmoniques

nouvelles, engageant le chercheur `a accorder son instrument th´eorique `a des donn´ees

observationnelles toujours plus d´etaill´ees, souvent `a peine envisageables quelques ann´ees plus tˆot.

L’histoire des sciences nous l’a montr´e abondamment : la diversification et la

mul-tiplication des faits alimentant une discipline, si elles t´emoignent souvent d’une vitalit´e

ind´eniable, sont rarement en elles-mˆemes le signe d’une avanc´ee scientifique majeure.

C’est « l’esprit de synth`ese » qui op`ere in fine la cristallisation des faits en th´eories et des th´eories en vision ordonn´ee du monde, pour conduire finalement `a une repr´esentation intelligible ´elargie et affin´ee. La compr´ehension des ph´enom`enes ayant cours dans le cos-mos – il faut entendre ici l’int´egralit´e spatio-temporelle de l’univers physique – implique certes la description rationnelle pr´ecise des processus en jeu, mais elle resterait vaine, au niveau personnel comme sur le plan de la culture humaine et de l’essor des civilisations, si elle n’engendrait pas chez ceux qui s’y ´el`event un regard nouveau ou renouvel´e sur le

monde, une perception enrichie de sa relation `a son environnement, et finalement une

pr´esence plus directe et plus intense aux aspects les plus fondamentaux, peut-ˆetre aussi

les plus secrets de notre univers.

Face `a l’´etendue consid´erable de la recherche en astrophysique, il est pertinent de

tenter de d´egager un th`eme suffisamment g´en´eral et transversal pour agr´eger `a son

sillage un grand nombre de faits et ph´enom`enes apparemment disjoints, mais trouvant

sous son ´eclairage une coloration commune, comme refl´etant divers aspects d’un mˆeme

ph´enom`ene plus global et plus universel, et permettant r´eciproquement d’en donner une

image plus juste et plus compl`ete.

La cause que nous souhaitons plaider ici, c’est que le rayonnement cosmique offre toutes les qualit´es d’un tel th`eme f´ed´erateur en astrophysique. Sa position singuli`ere est attest´ee par la long´evit´e du questionnement qui s’y rapporte et la grande vitalit´e exp´erimentale qui continue de l’accompagner, pr`es d’un si`ecle apr`es la d´ecouverte for-tuite, au d´ebut des ann´ees 1910, de ces particules ionisantes et hautement p´en´etrantes venues du cosmos. Les sources du rayonnement cosmique, nous y insisterons plus loin, demeurent incertaines, voire inconnues. Mais si la question de l’origine apparaˆıt aujour-d’hui encore si brˆulante, c’est que les rayons cosmiques jouent un rˆole primordial dans ce

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iv

qu’il y aurait lieu d’appeler l’´ecologie g´en´erale des galaxies, et notamment du milieu in-terstellaire. En effet, compte tenu du poids de la composante de rayons cosmiques dans le bilan ´energ´etique galactique et de la diversit´e de leurs interactions avec le milieu ambiant, on ne saurait aborder valablement la question du chauffage, de l’ionisation ou encore de l’´equilibre chimique du milieu interstellaire sans consid´erer explicitement le rˆole de ces particules, et s’int´eresser au d´etail de leur distribution, dans l’espace g´eom´etrique comme dans l’espace des ´energies. Il n’est pas jusque dans la r´egulation de la formation d’´etoiles

au sein des galaxies – si importante pour l’astrophysique dans son l’ensemble – o`u les

rayons cosmiques n’interviennent de mani`ere capitale, par leur capacit´e `a p´en´etrer, bien

plus que le rayonnement UV ´emis par les ´etoiles, jusqu’au cœur des nuages mol´eculaires

denses. Si l’on consid`ere en outre que la formation de ces nuages d´epend de l’´equilibre des phases du milieu interstellaire, et que l’acc´el´eration des particules ´energ´etiques dans l’univers est `a son tour li´ee `a l’activit´e des ´etoiles, on comprend que c’est au cœur d’un

syst`eme de couplages et de r´etroactions multiples que prend place en ses divers aspects

le rayonnement cosmique.

Il serait int´eressant d’examiner plus en d´etail les nombreuses situations o`u les rayons cosmiques assument une position d´eterminante, afin d’appr´ecier `a la fois la diversit´e et l’originalit´e du rˆole qu’ils jouent en astrophysique et au del`a. Sans entrer dans des

d´eveloppements qui d´epasseraient le cadre de ce m´emoire (a fortiori de son

introduc-tion !), on ne peut manquer d’insister ici sur ce qui les caract´erise au premier chef et fait leur particularit´e dans l’environnement scientifique singulier que repr´esente l’astrophy-sique, o`u tout repose sur l’observation, par opposition `a l’exp´erimentation commune `a la

plupart des sciences : les rayons cosmiques se composent de noyaux atomiques ionis´es et

ne sont donc pas `a proprement parler des « rayons », comme l’avait cru Robert Millikan

qui leur donna leur nom en 1925, soutenant qu’il s’agissait de photons tr`es ´energ´etiques en lesquels il voyait alors le « cri de naissance des atomes » aux confins de l’univers.

Alors que toute connaissance en astrophysique, masses, vitesses, temp´eratures, champs

magn´etiques, degr´es d’ionisation, densit´es, composition mol´eculaire des environnements les plus divers, tout ce que l’on sait provient de l’´etude exclusive et attentive de la lumi`ere re¸cue, le rayonnement cosmique nous offre en quelque sorte – ˆo pr´ecieuse aumˆone c´eleste !

– quelques grammes de mati`ere dans un monde lumineux !

Cette singularit´e, `a elle seule, m´erite amplement le prix que nous accordons ici aux

rayons cosmiques. Qu’on y songe encore seulement : c’est de la mati`ere, au sens le plus

commun, qui nous parvient avec eux des r´egions les plus ´eloign´ees de la Voie Lact´ee,

et pour une part infime, bien au-del`a, des confins tourment´es de l’univers ! Si la Terre

ne s’alourdit ainsi chaque ann´ee que d’un petit kilogramme d’une mati`ere lointaine aux

origines encore obscures, quel tr´esor le chercheur assidu n’en pourra-t-il pas cependant

d´egager s’il parvient `a valoriser, dans leur richesse et leur compl´ementarit´e, les informa-tions contenues dans les trois dimensions spectrales – angulaire, ´energ´etique et massique – que le rayonnement cosmique met en œuvre et dont il sera abondamment question par la suite ? Car avec lui, et particuli`erement en cette p´eriode de multiplication et de diversification des moyens observationnels, c’est bien une astronomie nouvelle qui se pr´esente, non pas parall`ele ou superpos´ee `a la premi`ere, historique, celle de la lumi`ere,

mais ´epousant en creux et en relief chacun de ses contours, comme nos sens se conjuguent

pour offrir de la r´ealit´e objective une perception plus pr´ecise et plus pleine. Cette astro-nomie dite « multimessager », qui se propose l’´etude des ph´enom`enes cosmiques sous le

jour des multiples rayonnements qui nous en portent t´emoignage, promet `a la discipline

un avenir des plus florissants ; et les rayons cosmiques, avec encore les neutrinos ou les ondes gravitationnelles, y tiendront `a l’´evidence une place de choix.

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v sp´ecifiquement `a tr`es haute ´energie, o`u les trajectoires des particules charg´ees qui le

composent sont le moins affect´ees par les champs magn´etiques ambiants, c’est sur la

pr´esence sous-jacente des rayons cosmiques dans un tr`es grand nombre de situations

relevant de l’astronomie photonique que nous souhaitons attirer l’attention. En effet, et

c’est ce qui motive ici notre parti pris pour une observation du cosmos `a la lumi`ere du

rayonnement cosmique, une part essentielle du corpus astrophysique observationnel tire en r´ealit´e sa source lumineuse de ces particules ´energ´etiques, via leurs interactions avec

le milieu interstellaire, le champ magn´etique ou le champ photonique environnant, qu’il

provienne d’un disque d’accr´etion, du rayonnement des ´etoiles, du fond diffus

cosmolo-gique ou souvent mˆeme du rayonnement produit par les rayons cosmiques eux-mˆemes.

C’est l`a certes une ´evidence, et la radioastronomie existe depuis bien trop longtemps

pour qu’il soit mˆeme utile de le rappeler. L’univers a deux vies : une vie thermique, dont

l’embl`eme reste sans doute le rayonnement stellaire, avec toute la physique subtile qui

s’y rattache, mais qui s’´etend aussi de l’´emission infrarouge des poussi`eres interstellaires au rayonnement X du gaz chaud des amas de galaxies, pour culminer sans doute au cœur

mˆeme de la cosmologie, avec l’importance que l’on sait, par l’entremise du rayonnement

fossile et jusqu’en le locus absconditus des ˆages pr´elumineux, dans le flamboiement secret mais d´ecisif de la nucl´eosynth`ese primordiale ; et puis il y a une vie non-thermique, plus riche encore, par bien des ´egards, et plus intense aussi puisque c’est elle qui voit briller les cieux les plus violents et les plus anim´es, se manifestant `a toutes les ´echelles dans les sites les plus ´energ´etiques de l’univers, des ´etoiles `a neutrons aux restes de supernova, des

trous noirs suraliment´es aux ´etoiles en formation, des sursauts gamma aux noyaux actifs

de galaxie... Toute cette « astrophysique des hautes ´energies » imprime aujourd’hui une impulsion nouvelle `a cette discipline mill´enaire que pratiquaient d´ej`a, `a leur mani`ere, les

babyloniens, et alimente jusqu’`a la physique la plus fondamentale en questionnements

in´edits et en ´enigmes stimulantes. Or, au coeur de cette vie non thermique, si ardente

et encore myst´erieuse, ce sont toujours les mˆemes processus qui donnent `a voir tout

ce qui peut ˆetre vu, `a savoir des rayonnements ´electromagn´etiques couvrant la gamme

compl`ete des fr´equences, des ondes radio du rayonnement synchrotron aux rayons X et

gamma les plus durs, mais aussi, justement, ces nouveaux messagers dont l’astronomie balbutiante rejoint celle, plus mature, du rayonnement cosmique, laquelle n’en voit pas

moins, elle aussi, ses capacit´es ´etendues en finesse (que l’on pense aux capacit´es du

spectrom`etre d’AMS) comme en puissance (avec les trois mille kilom`etres carr´es de

l’Observatoire Pierre Auger !). Ces processus, quel que soit le contexte particulier dans lequel ils se mettent en œuvre, impliquent toujours des particules ´energ´etiques, acc´el´er´ees

d’une mani`ere ou d’une autre par des champs ´electromagn´etiques, ordonn´es ou non, et

interagissant avec l’environnement local par les divers m´ecanismes physiques qu’´etudie

en propre, et en toute g´en´eralit´e, la science du rayonnement cosmique.

C’est donc bien au cœur de toute l’astrophysique des hautes ´energies, mais aussi,

nous l’avons rappel´e, de la physique du milieu interstellaire, que nous introduisent et

nous guident les rayons cosmiques, se r´ev´elant tantˆot directement, comme sources de

rayonnement, tantˆot en filigrane, comme m´ediateurs privil´egi´es des complexes ´echanges qui constituent ce que nous avons appel´e plus haut l’´ecologie galactique g´en´erale. Car s’ils sont, par essence, les protagonistes, les t´emoins et pour ainsi dire les garants de l’as-tronomie non-thermique, ils n’apparaissent pas moins au confluent de ces deux mondes

que l’on vient ´evoquer : le passage du thermique au non-thermique, souvent li´e `a des

ph´enom`enes violents, se pr´esente bien ´evidemment comme la cl´e de l’origine du

rayon-nement cosmique, et plus g´en´eralement des particules ´energ´etiques qui se manifestent

dans tant de sources `a travers l’univers, mais inversement la thermalisation de ces

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vi

milieu interstellaire mais aussi, par exemple, la production et l’amplification de champs magn´etiques turbulents, dont les propri´et´es et les implications restent encore largement `

a d´ecouvrir.

Ainsi, sans vouloir r´eduire le vaste paysage de la science du cosmos `a l’image, aussi

riche soit-elle, qu’en peut donner le point de vue d´efendu ici, il semble que le rayonnement

cosmique soit en effet `a mˆeme de configurer un large espace au sein de l’astrophysique,

de guider notre progression `a travers ses aspects les plus divers, et de satisfaire au moins partiellement `a l’exigence, ´evoqu´ee d`es l’exorde, d’une organisation globale des faits et

ph´enom`enes cosmiques, donnant `a saisir quelque chose de plus qu’une juxtaposition de

r´eponses `a des questions purement techniques, dont l’´elucidation ne saurait ´epuiser le

questionnement profond que l’homme adresse `a la Nature. Il s’agit bien au contraire de

mettre en perspective et en rapport chacun des ph´enom`ene physiques entrevus sous telle

ou telle manifestation observationnelle pour en percevoir le dessin d’ensemble, comme des perles enfil´ees patiemment sur un collier se r´ev`elent soudain en un motif ornemental qui justifie et donne sens `a la collecte parfois erratique des joyaux dispers´es...

L’approche par les rayons cosmiques, n’en doutons pas, reste tr`es largement

par-tielle et partiale. Mais n’est-ce pas finalement aussi l’une des tˆaches du chercheur que

de prendre parti pour une orientation privil´egi´ee, susceptible de valoriser

significati-vement les diff´erents domaines qu’il explore, d’y faire apparaˆıtre une coh´erence

ini-tialement cach´ee ? On ne reculera donc pas ici devant le risque d’ˆetre partisan, ´etant

bien entendu que le choix de l’´eclairage propos´e – celui du rayonnement cosmique –

ne se veut nullement exclusif. D’autres approches, d’autres perspectives unificatrices, ´

egalement pertinentes, sont incontestablement possibles et souhaitables : c’est dans

la consid´eration conjointe, mieux encore dans la perception simultan´ee des diff´erents

points de vue synth´etiques que l’on peut esp´erer donner un sens `a l’ensemble de ces

recherches men´ees en parall`ele, mais souvent ind´ependamment les unes des autres. Alors

parviendrons-nous peut-ˆetre `a gagner le rivage, mˆeme meuble, mˆeme provisoire, d’o`u un

regard panoramique et englobant pourra se porter sur la portion d’oc´ean parcourue, afin

d’en mesurer l’´etendue, et peut-ˆetre aussi de rep´erer les ´ecueils affleurants qui seront nos prochaines ´etapes, les ˆıles de nos recherches futures, l’horizon de nos quˆetes `a venir.

Tenter ce rassemblement des faits dispers´es en une vision, en des visions

globali-santes, c’est tendre assur´ement `a une appropriation et une transposition des donn´ees de l’exp´erience `a un niveau intelligible, et c’est finalement, dans le cas qui nous concerne,

conjoindre la physique du cosmos `a notre repr´esentation du monde, l’agr´eger en quelque

sorte `a la culture humaine.

Cette tˆache, il va sans dire, ne saurait ˆetre autre chose qu’un id´eal offert `a une d´emarche collective, perp´etuellement soumise `a r´eactualisation et reformulation `a la lumi`ere des progr`es qu’elle aura justement favoris´es. Si nous la mentionnons ici, c’est

pour tenter de fixer par avance une direction, une orientation `a l’ensemble des

tra-vaux qui seront ´evoqu´es dans ces pages, tout en appelant le lecteur `a l’indulgence

de-vant ce qui ne sera gu`ere plus qu’une ´ebauche du programme ´enonc´e. Nous nous

li-miterons souvent `a sugg´erer des prolongements, proposer quelques pistes permettant

d’´elargir la probl´ematique et visant `a souligner la g´en´eralit´e des probl`emes ´etudi´es, ou les liens sp´ecifiques qu’ils entretiennent avec d’autres branches de la discipline. Et comme l’exigent d’ailleurs les r`egles de l’exercice, nous n’´evoquerons dans ce m´emoire que les as-pects de la science du rayonnement cosmique que le fil de nos recherches nous a conduits `

a consid´erer avec suffisamment d’attention pour y apporter une contribution personnelle.

Encore ne d´evelopperons-nous que quelques uns des th`emes qui nous ont le plus sollicit´es au cours de ces derni`eres ann´ees. Ces contributions, loin de couvrir l’ensemble de la dis-cipline, ne repr´esentent que quelques pierres jet´ees ´eparses au gr´e du vent tourbillonnant

(10)

vii de la recherche. Nous esp´erons, au fil des chapitres, parvenir `a leur apporter un ´eclairage qui en valorisera la diversit´e et en facilitera l’acc`es `a ceux qui, `a la suite de g´en´erations

de chercheurs, auront le goˆut de s’engager dans le sillage du rayonnement cosmique et

voudront bien joindre leur r´eflexion `a l’effort collectif pour en percer les maints myst`eres,

et notamment lever un voile sur son origine et la place – que nous pressentons ´eminente

– qu’il occupe sur la sc`ene grandiose de l’astrophysique et dans l’´ecologie si riche et

fascinante de l’univers.

***

Puisque le d´eveloppement ne nous en sera donc gu`ere possible dans la suite, qu’on

nous permette seulement pour finir d’´evoquer les nombreux aspects qui font du

rayon-nement cosmique bien plus encore qu’une voie royale d’excursion `a travers toute

l’astro-physique. Il y a tout d’abord les circonstances exceptionnelles qui font qu’il est possible

d’affirmer, historiquement et ´epist´emologiquement, que ce sont les rayons cosmiques qui

ont donn´e naissance, tout au long du deuxi`eme quart du XXe si`ecle, `a une science nou-velle qui devait par la suite devenir le point focal de toute la physique : la physique des particules ! C’est en effet l’´etude syst´ematique des interactions des rayons cosmiques

avec l’atmosph`ere terrestre et les instruments de mesures sp´ecialement con¸cus qui

per-mit, en 1932, la d´ecouverte sensationnelle du positon, pr´edit par Dirac deux ann´ees plus

tˆot, et avec lui du monde encore inconnu de l’antimati`ere. Ensuite suivirent

notam-ment, en 1936, la d´ecouverte du muon, double massif insoup¸conn´e de l’´electron, puis en 1947 celle des pions, charg´es et neutres, avant que les observations ne r´ev`elent l’exis-tence de toutes ces particules – kaons, lambda, xi, sigma... – qu’il fallut bien appeler « particules ´etranges » tant leurs propri´et´es laissaient alors les chercheurs incr´edules.

Ainsi r´egn`erent en maˆıtres les rayons cosmiques sur la physique subatomique jusqu’au

d´ebut des ann´ees 1950, lorsque les physiciens apprirent `a fabriquer leurs propres fais-ceaux de particules ´energ´etiques au sein d’acc´el´erateurs g´eants, comme celui du CERN `

a Gen`eve, qui les dispens`erent progressivement de s’en remettre au ciel pour mettre

en œuvre leurs exp´eriences. Une scission se fit alors jour entre ceux qui s’int´eressaient

aux rayons cosmiques comme outils indispensables `a la physique des particules, et ceux

qui s’y int´eressaient pour eux-mˆemes, anticipant peut-ˆetre la place qu’ils allaient occu-per au sein de l’astrophysique, et qui pr´ef´er`erent l’exaltation verticale et cristalline des observatoires astronomiques de haute montagne au remugle des sombres des sous-sols horizontaux des acc´el´erateurs artificiels... Qu’on nous pardonne ici cette note faussement incisive, mais il y a en effet quelque ironie subtile `a observer aujourd’hui, un demi si`ecle

plus tard, la communaut´e des physiciens des particules et celle des astrophysiciens du

rayonnement cosmique s’assembler `a nouveau dans un effort commun, et contribuer `a

d´egager les contours d’une discipline nouvelle effectuant la jonction entre certaines de

leurs pr´eoccupations essentielles : il s’agit, on l’aura compris, de la science des astropar-ticules, au sein de laquelle les rayons cosmiques ultra-´energ´etiques dont il sera question plus loin occupent une place importante.

Mais notre parti pris pour le rayonnement cosmique trouve encore des appuis bien au del`a du terrain privil´egi´e de la physique des hautes ´energies. De nombreuses recherches

interdisciplinaires, parfois des plus inattendues, invitent aujourd’hui `a une table

com-mune des astrophysiciens, plan´etologues, biologistes, glaciologues, arch´eologues,

bota-nistes, m´edecins... jusqu’`a des assureurs ! C’est dire si la sc`ene est ouverte ! Toute cette

activit´e passionnante qui s’organise avec bonheur autour du rayonnement cosmique

(11)

viii

Aussi est-ce sans craindre de pousser trop loin notre inclinaison partisane que nous

sugg´ererons enfin que c’est jusqu’au cœur de nos vies mˆemes que les rayons cosmiques

dissimulent leur influence.

De plus en plus ´etudi´es par les sp´ecialistes des m´et´eorites, qui voient en leurs pro-pri´et´es la cl´e potentielle de diverses ´enigmes relatives aux grains pr´esolaires ou proto-solaires, les rayons cosmiques int´eressent aussi tout particuli`erement les biologistes et les exobiologistes qui, avec les physiciens du milieu interstellaire, mesurent tout le prix d’une telle source d’irradiation distribu´ee `a grande ´echelle pour la mise en œuvre ou, au

contraire, l’alt´eration de processus chimiques complexes. Qu’il nous suffise de mentionner

la toute r´ecente ´etude europ´eenne sur l’´evolution des acides amin´es dans des conditions

d’irradiation repr´esentatives du milieu interstellaire, qui a permis de montrer comment

un rayonnement polaris´e circulairement (comme en induisent les rayons cosmiques au

voisinage d’une ´etoile `a neutrons, par exemple) ´etait capable de conduire `a un enrichis-sement d’´echantillons initialement rac´emiques en l’un seulement des deux ´enantiom`eres d’un acide amin´e, reproduisant ainsi l’´enigmatique asym´etrie bio-mol´eculaire d´ej`a

ob-serv´ee en son temps par Pasteur, et ouvrant donc une voie vers la compr´ehension

de l’homo-chiralit´e fondamentale des constituants ´el´ementaires de toute vie sur notre

plan`ete. Un tel r´esultat, on le devine, renforce consid´erablement la th`ese qui fait du

d´eveloppement de la vie sur Terre une des phases d’un long processus initi´e dans le

mi-lieu interstellaire, sous le regard et avec la participation active du rayonnement cosmique, alors que se formaient d´ej`a les fameuses mol´ecules pr´e-biotiques destin´ees `a cheminer, via les m´et´eorites, com`etes et autres vaisseaux spatiaux de fortune, jusqu’aux innombrables

milieux plan´etaires de notre galaxie, parmi lesquels, l’un au moins – nous en sommes les

t´emoins formels ! – allait bien vouloir se montrer propice `a leur ´epanouissement.

Mais cinquante ans tout juste apr`es l’explosion de la premi`ere bombe atomique `a

Hiroshima, nous ne le savons que trop : l’irradiation n’a pas que des effets positifs sur

la vie ! Les m´edecins du travail impliqu´es dans le traitement des personnels navigants

des compagnies a´eriennes ont suffisamment de recul `a pr´esent pour constater

l’augmen-tation du taux de cancers chez cette population particuli`erement expos´ee aux rayons

cosmiques, du fait de leurs s´ejours r´ep´et´es en haute altitude. C’est que l’atmosph`ere terrestre nous offre d’ordinaire une protection salutaire contre ces radiations. Protection qui est cependant imparfaite, et c’est d’ailleurs heureux : `a cˆot´e de la radioactivit´e

na-turelle, le rayonnement cosmique a contribu´e, dans une mesure qu’il reste `a d´eterminer

avec pr´ecision, aux mutations g´en´etiques sur lesquelles s’est appuy´ee l’´evolution de la vie sur Terre. Des chercheurs rel`event d’ailleurs une certaine corr´elation entre les p´eriodes de grande activit´e biologique et d’accroissement rapide de la biodiversit´e, sur des ´echelles de temps g´eologiques, et les passages de notre syst`eme solaire `a travers les bras spiraux

de la Galaxie, dont on s’attend `a ce qu’ils s’accompagnent d’une augmentation sensible

du flux local de rayons cosmiques ! Que de telles voies de recherches soient seulement propos´ees, quelle qu’en puisse ˆetre finalement l’issue, t´emoigne de l’int´erˆet grandissant

qui se porte, de toute part, sur ce ph´enom`ene astrophysique singulier dont on aurait

d´ecid´ement bien tort de sous-estimer la port´ee.

Il n’est pas jusque dans l’´enigme de la sup´eriorit´e sonore des Stradivarius au tournant du XVIIIe si`ecle que les rayons cosmiques ne soient ´evoqu´es ! L’affaire est peu banale,

et nous permettra de finir sur une note musicale. Il faut noter d’abord que les rayons

cosmiques ´eveillent aujourd’hui la curiosit´e d’un nombre croissant de climatologues, qui

ont mis en lumi`ere leur rˆole jusqu’alors inconnu dans la formation des nuages de basse

altitude. Ces derniers s’av`erent remarquablement corr´el´es aux cycles solaires, identifi´es depuis des si`ecles par les variations du nombre de tˆaches sombres visibles `a la surface du Soleil, et dont on sait maintenant qu’elles sont directement li´ees `a l’activit´e magn´etique

(12)

ix de notre ´etoile. Or les cycles solaires sont ´egalement connus pour contrˆoler l’intensit´e

du rayonnement cosmique de basse ´energie, qui parvient d’autant plus facilement `a

se frayer un chemin jusqu’aux r´egions internes de l’h´eliosph`ere que le vent solaire est

moins intense, et que la barri`ere de potentiel qu’il induit entre le milieu interstellaire

local et la Terre est plus faible. Ainsi, lorsque le vent solaire forcit, le flux de rayons

cosmiques d´ecroˆıt et les nuages se forment en moins grand nombre, affectant de mani`ere

souvent difficile `a pr´edire les divers ph´enom`enes qui, dans l’´ecosyst`eme complexe de

notre plan`ete, d´ependent plus ou moins directement de la couverture nuageuse. C’est

ainsi que le cycle solaire de onze ans se retrouve en certaines r´egions du globe dans la

modulation de l’´epaisseur des cernes de croissance des arbres. C’est aussi ce qu’on eˆut

aim´e que Sir William Herschel, le g´enial astronome d´ecouvreur de la plan`ete Uranus,

pˆut r´epliquer au parterre hilare de l’acad´emie royale des sciences lorsqu’en 1801, ayant expos´e son ´etonnante d´ecouverte d’une corr´elation entre le prix du bl´e sur le march´e anglais et le nombre de taches sombres `a la surface du soleil, il ne recueillit en r´eponse `

a son inspiration visionnaire, que franche moquerie et diffuse perplexit´e.

Or ces cycles solaires n’ont pas la perfection r´egl´ee du papier `a musique – c’est

le cas de le dire –, et l’on sait que les tˆaches solaires se montr`erent beaucoup moins

nombreuses, voire inexistantes au cours de vastes p´eriodes r´epertori´ees soigneusement par

les observateurs. La p´eriode la plus significative est celle du « minimum de Maunder »,

s’´etendant de 1645 `a 1715, au cours de laquelle pratiquement aucun tˆache ne fut observ´ee, et qu’il est bien tentant d’associer aujourd’hui, `a la lumi`ere des connaissances acquises

sur le rayonnement cosmique, `a l’´ev´enement climatique remarquable ressenti dans toute

l’Europe et auquel on se r´ef`ere comme `a un mini-ˆage glaciaire (cf. Figure 1). Or 1645, c’est aussi, `a un ou deux ans pr`es, le moment o`u naissait pour le bonheur de nos oreilles

et de notre ˆame, l’illustre luthier de Cr´emone, Antonio Stradivarius, dont le secret des

instruments aux qualit´es acoustiques si exceptionnelles ´echappa depuis lors `a toutes nos

analyses, et qui r´ealisa ses plus belles œuvres entre 1700 et 1720, `a maturit´e de son

art, mais aussi... de son bois ! Car aujourd’hui, ce n’est plus dans un vernis qui serait

impossible `a reproduire, ou dans une technique singuli`ere d’assemblage qu’on semble

percevoir le cœur mˆeme du prodige, mais c’est dans la qualit´e incomparable du bois,

fond´ee par un climat unique sous le contrˆole insoup¸conn´e du rayonnement cosmique,

dont il y a tout lieu de penser, en effet, qu’il ne se repr´esentera jamais.

Devant ordonnance si magistrale, il n’est plus que de s’incliner... et se r´ejouir enfin

qu’en le don d´elicat de ces rayons cosmiques `a l’origine `a peine ´elucid´ee, c’est bien un

peu de Ciel qui descend parmi nous jusqu’`a Terre...

(13)

x

Fig. 1 – Œuvre du peintre Abraham Hondius repr´esentant une foire tenue sur la Tamise

gel´ee `a Temple Stairs, au d´ebut de l’ann´ee 1684 (Museum of London). L’´epaisseur de

glace sur la Tamise en plein cœur de Londres ´etait si ´epaisse en ces longs hivers

maun-deriens, qu’il s’y d´eroulait toutes sortes de festivit´es, foires hivernales, carnavals, parties de patinage, regroupant des milliers de personnes. Pendant ce temps, au nord de l’Italie, croissaient les arbres dont Antonio Stradivarius allait tirer le meilleur de son art, et faire entendre `a des g´en´erations de m´elomanes un peu de la musique des sph`eres orchestr´ee en silence par les rayons cosmiques...

(14)

Table des mati`

eres

I

Le rayonnement cosmique en ses trois dimensions

spec-trales

1

1 Auto-pr´esentation du rayonnement cosmique 5

1.1 Parmi les sept merveilles du monde physique... . . 5

1.2 Sous la plage, les pav´es ! . . . 7

1.3 Physique et astrophysique `a tous les ´etages . . . 11

1.3.1 Basse ´energie et modulation solaire . . . 11

1.3.2 Energies interm´´ ediaires . . . 12

1.3.3 Contribution de sources individuelles . . . 13

1.3.4 Le genou . . . 15

1.3.5 Transition galactique/extragalactique . . . 17

1.3.6 Le domaine GZK . . . 19

1.4 Et pourtant, il est plat ! . . . 31

2 Sur le spectre d’´energie du rayonnement cosmique 33 2.1 Acc´el´eration des particules dans l’univers . . . 33

2.1.1 Acc´el´eration et processus ´electromagn´etiques . . . 33

2.1.2 Energie maximale´ . . . 35

2.1.3 Equipartition . . . .´ 37

2.1.4 Energ´´ etique . . . 38

2.2 Propagation des particules ´energ´etiques . . . 40

2.2.1 R´eflexions g´en´erales sur le transport des particules . . . 41

2.2.2 Pertes d’´energie . . . 43

2.2.3 Destruction des noyaux primaires et production de noyaux secon-daires . . . 46

2.2.4 Echappement des particules . . . .´ 47

2.3 Traitement num´erique de la propagation . . . 49

2.3.1 Int´egration formelle des ´equations de transport en r´egime non-stationnaire . . . 49

2.3.2 Approche stochastique et mod`eles Monte-Carlo . . . 56

2.4 Application aux RCUEs : les coupures GZK . . . 61

2.4.1 Sur la coupure GZK « standard » . . . 63

2.4.2 Influence de la distribution des sources . . . 64

2.4.3 Influence du spectre source des rayons cosmiques . . . 66

2.4.4 Remarque finale . . . 68 xi

(15)

xii TABLE DES MATI `ERES

3 Le spectre de masse des rayons cosmiques 71

3.1 Abondances nucl´eaires et richesse du RCG . . . 71

3.2 Propagation des noyaux ultra-´energ´etiques . . . 74

3.2.1 Photo-dissociation et pertes d’´energie . . . 74

3.2.2 Nouvelles sections efficaces de photo-dissociation . . . 77

3.2.3 Longueurs d’interaction et longueurs de pertes d’´energie . . . 79

3.2.4 Devenir des noyaux de fer ultra-´energ´etiques . . . 81

3.3 Ph´enom´enologie des rayons cosmiques extragalactiques . . . 84

3.3.1 Une composition qui change tout ! . . . 84

3.3.2 Mod`eles `a protons seuls vs. mod`eles avec noyaux . . . 86

3.4 Conclusion . . . 89

4 Le spectre angulaire des rayons cosmiques 91 4.1 Champs magn´etiques et particules charg´ees . . . 91

4.1.1 Isotropisation vs astronomie proton . . . 91

4.1.2 Interactions r´esonantes avec les champs magn´etiques . . . 92

4.1.3 Diffusion des particules . . . 93

4.1.4 Anisotropie du rayonnement cosmique . . . 95

4.2 Etablissement du r´´ egime diffusif . . . 96

4.2.1 Exp´erience de diffusion num´erique . . . 96

4.2.2 D´ependance en ´energie du coefficient de diffusion . . . 99

4.2.3 Propagation diffusive `a tr`es haute ´energie ? . . . 100

4.3 Horizon magn´etique et spectre `a haute ´energie . . . 102

4.3.1 Co¨ıncidence des ´echelles . . . 102

4.3.2 Horizon magn´etique . . . 103

4.3.3 Modification du spectre . . . 104

4.3.4 Une remarque . . . 105

4.4 G´en´eration de champs magn´etiques par les RCEGs . . . 106

4.5 Ombres magn´etiques et autres effets s´eduisants . . . 109

4.6 Observation de sources individuelles . . . 111

4.6.1 Multiplets d’´ev´enements et sources individuelles . . . 111

4.6.2 Isotropisation progressive des rayons cosmiques non-r´esonants . . . 112

4.6.3 Spectres de sources individuelles et param`etres astrophysiques . . 114

4.7 Derniers commentaires . . . 117

II

Ph´

enom´

enologie g´

en´

erale du rayonnement cosmique

119

5 Le « mod`ele standard » en question 123 5.1 Douter et faire douter... . . 123

5.2 Arguments en faveur de l’hypoth`ese SNR . . . 124

5.3 Probl`emes li´es `a la propagation des rayons cosmiques . . . 125

5.4 Probl`emes li´es `a l’acc´el´eration des particules . . . 127

5.5 Probl`emes li´es `a la ph´enom´enologie et `a l’observation . . . 129

(16)

TABLE DES MATI `ERES xiii

6 Limites objectives des restes de supernova 135

6.1 L’espoir des champs magn´etiques amplifi´es . . . 135

6.2 Transport des ´electrons au voisinage du choc . . . 137

6.2.1 Les croissants X et leur ´epaisseur . . . 137

6.2.2 Temps de pertes synchrotron . . . 138

6.2.3 Advection en aval du choc . . . 139

6.2.4 Diffusion en aval du choc . . . 140

6.2.5 Diffusion vs advection . . . 141

6.3 Contraintes sur les param`etres d’acc´el´eration . . . 142

6.3.1 Echelle de temps d’acc´´ el´eration . . . 142

6.3.2 Coupure X et coefficient de diffusion . . . 143

6.3.3 Epaisseur des croissants et r´´ egime de diffusion . . . 144

6.3.4 Champ magn´etique auto-consistant et ´energie maximale des ´ electrons . . . 145

6.4 Energie maximale des protons acc´´ el´er´es . . . 147

6.5 R´esum´e et commentaires . . . 150

7 La nucl´eosynth`ese des ´el´ements l´egers 153 7.1 Nucl´eosynth`ese spallative et rayons cosmiques . . . 153

7.2 Des observations inattendues . . . 155

7.3 Comportement primaire et spallation inverse . . . 157

7.4 Echec irr´´ em´ediable du mod`ele standard . . . 158

7.5 La solution des superbulles . . . 159

7.6 Cons´equences du mod`ele et r´eflexions g´en´erales . . . 161

7.7 Un heureux bonus : l’abondance du22Ne . . . 162

8 Les superbulles et le rayonnement cosmique 165 8.1 Une variante mineure, mais qui change tout ! . . . 165

8.2 Abstract . . . 167

8.3 Introduction . . . 167

8.4 OB associations and superbubbles . . . 169

8.4.1 Distribution of massive stars and SNe in the Galaxy . . . 169

8.4.2 The formation of a ‘super wind bubble’ . . . 170

8.4.3 Inhomogeneities and clumps . . . 170

8.5 Stellar winds inside superbubbles . . . 171

8.5.1 Typical physical conditions in SB interiors . . . 172

8.5.2 Wind-wind interaction . . . 173

8.5.3 Strong turbulence generation in SB core . . . 174

8.6 Supernovæ inside superbubbles . . . 175

8.6.1 Distortion of the shock front . . . 175

8.6.2 SNR evolution . . . 176

8.6.3 Energy balance . . . 177

8.7 Shock acceleration inside SBs . . . 178

8.7.1 Modification of diffusive shock acceleration . . . 178

8.7.2 Repeated shock acceleration . . . 180

8.8 Turbulent acceleration inside SBs . . . 184

8.9 Conclusion . . . 185

(17)

xiv TABLE DES MATI `ERES

9 Sur la viabilit´e des mod`eles holistiques 191

9.1 Oublier tout... . . 191

9.2 Une seule source pour tous les rayons cosmiques . . . 192

9.3 Hypoth`eses g´en´erales . . . 193

9.4 Normalisation relative des composantes . . . 194

9.5 Un r´esultat saisissant ! . . . 196

9.6 Perspectives ph´enom´enologiques . . . 197

III

Rayonnement du cosmos

201

10 Particules ´energ´etiques et raies gamma 207 10.1 Excitation nucl´eaire et raies gamma : sections efficaces effectives . . . 207

10.2 Standard gamma-ray line calculations . . . 208

10.3 Approached EP propagation universality . . . 210

10.3.1 Energy loss rates . . . 211

10.3.2 Total inelastic cross sections and survival probabilities . . . 212

10.4 Gamma-ray yields of individual EPs . . . 213

10.5 Results and emission rates reconstruction . . . 217

10.5.1 Nuclear excitation cross sections . . . 217

10.5.2 Photon yields for the12C,14N,16O,20Ne and56Fe γ-ray lines. . . 218

10.5.3 Gamma-ray line emission synthesis . . . 219

10.6 Analytical estimates . . . 220

10.6.1 Low energy limit . . . 221

10.6.2 High energy limit . . . 222

10.6.3 Accuracy of the analytical formulæ . . . 222

10.7 Summary . . . 223

11 Rayonnement non-thermique des superbulles 227 11.1 Rayonnement gamma-nucl´eaire des superbulles . . . 227

11.1.1 Le cas des nuages d’Orion . . . 228

11.1.2 Le cas de Per OB2 . . . 228

11.2 Pr´ediction de flux gamma en provenance d’Orion . . . 229

11.2.1 Introduction . . . 229

11.2.2 Basic ingredients of the model . . . 230

11.2.3 Application to Orion and discussion . . . 231

11.3 Pr´ediction de flux en provenance de Per OB2 . . . 232

11.3.1 Abstract . . . 233

11.3.2 Introduction . . . 233

11.3.3 Source modelling . . . 234

11.3.4 Quantitative model and flux expectations . . . 235

11.3.5 Technical feasibility . . . 238

11.3.6 Implications . . . 239

12 Des positrons dans le bulbe galactique 243 12.1 Introduction . . . 244

12.2 Diffuse emission and positron transport . . . 245

12.2.1 Relevant timescales . . . 245

12.2.2 Diffusion coefficients . . . 245

(18)

TABLE DES MATI `ERES xv

12.3.1 Bulge-to-disk ratio and intermittency . . . 247

12.3.2 The origin of the positrons . . . 248

12.3.3 Nuclear starbursts and positron injection . . . 249

12.4 Conclusion . . . 251

13 Traˆın´ee Compton des sursauts gamma 253 13.1 Introduction . . . 254

13.2 Compton scattering of GRB photons . . . 255

13.2.1 Order of magnitude estimate . . . 255

13.2.2 The shape of the Compton trail . . . 255

13.2.3 Scattered gamma-ray fluxes . . . 256

13.3 Results . . . 257

13.4 Conclusion . . . 259

13.5 Appendix : Volume integration . . . 261

IV

L’Observatoire Pierre Auger

263

14 Sur l’acceptance de l’OPA 267 14.1 De l’int´erˆet majeur des calculs d’acceptance . . . 267

14.2 Choix des triggers de « haut niveau » . . . 269

14.3 D´efinition des LTPs . . . 270

14.4 Efficacit´e de d´etection ´el´ementaire . . . 272

14.5 Aperture instantan´ee et acceptance int´egr´ee . . . 273

14.6 Commentaire g´en´eral, et plaidoyer pour la cheville ! . . . 275

15 D´etection de sursauts gammas `a l’OPA 277 15.1 Bruit de fond coh´erent `a basse ´energie . . . 277

15.2 Gerbes de photons de basse ´energie dans l’atmosph`ere . . . 278

15.3 R´eponse des d´etecteurs . . . 279

15.4 Sensibilit´e de l’OPA aux sursauts gamma . . . 280

15.5 Comparaison avec d’autres d´etecteurs . . . 282

16 M´ethode g´en´erale de mesure d’anisotropies 285 16.1 Aper¸cu g´en´eral . . . 285

16.2 Abstract . . . 286

16.3 Introduction . . . 287

16.4 Dipole reconstruction procedure . . . 288

16.4.1 Anisotropy in right ascension : the Rayleigh analysis . . . 288

16.4.2 Complete dipole reconstruction with full sky coverage . . . 289

16.4.3 Generalisation to the case of partial sky coverage . . . 290

16.5 Reconstruction accuracy . . . 293

16.5.1 Monte-Carlo technique . . . 293

16.5.2 Reconstruction of the dipole amplitude and direction . . . 294

16.5.3 Comparison with the standard Rayleigh analysis . . . 295

(19)

xvi TABLE DES MATI `ERES

17 Contrainte sur les mod`eles top-down 301

17.1 D´etectera-t-on un jour des multiplets ? . . . 301

17.2 Abstract . . . 302

17.3 Introduction . . . 302

17.4 Multiple UHECR events : the basic idea . . . 304

17.5 Timescale of multiple event detection . . . 305

17.5.1 The distribution of source distances . . . 305

17.5.2 Multiple event probability . . . 307

17.5.3 Multiple event detection timescales . . . 307

17.6 Numerical estimates for a toy jet model . . . 308

17.6.1 The photon multiplicity in a jet . . . 308

17.6.2 The jet opening angle . . . 309

17.6.3 Observability of multiple events with the PAO and EUSO . . . 310

17.7 Strong upper limit on the double detection timescale . . . 311

17.8 Conclusion . . . 312

(20)

Liste des abr´

eviations

courantes

CMB fond de rayonnement cosmologique dans le domaine des micro-ondes

(cosmologi-cal microwave background ) : spectre thermique de temp´erature ∼ 2.73 K, encore

appel´e rayonnement fossile, ´emis environ 300 000 ans apr`es l’instant z´ero, lorsque

l’univers a ´et´e rendu transparent par la combinaison des noyaux et des ´electrons

en atomes neutres.

CNO Groupe des ´el´ements C, N et O. Ils sont les p`eres spallatifs des ´el´ements l´egers.

EeV Exa electron-volt (= 1018 eV).

GDR R´esonance dipolaire g´eante d’un noyau excit´e par exemple par l’absorption d’un

photon ´energ´etique.

LiBeB Ensemble des trois ´el´ements l´egers, Li, Be et B. L’acronyme d´esigne ´egalement l’ensemble des isotopes de ces ´el´ements.

Myr Million d’ann´ees (1 Myr = 106yr).

OPA Observatoire Pierre Auger.

PeV Peta electron-volt (= 1015eV).

RC Rayon cosmique, ou rayonnement cosmique suivant le contexte.

RCG Rayonnement cosmique Galactique ou rayons cosmiques Galactiques, suivant le contexte.

RCEG Rayonnement cosmique extragalactique ou rayons cosmiques extragalactiques, suivant le contexte.

RCUE Rayons cosmiques ultra-´energ´etiques. On d´esignera par cette expression, par

d´efinition, les rayons cosmiques susceptibles de subir des interactions avec les

pho-tons du CMB ou d’un fonds diffus quelconque (nous la pr´ef´erons `a « rayons

cos-miques d’ultra-haute ´energie). SN Supernova.

SNe Supernovæ. Pluriel de supernova.

SNR Reste de supernova (supernova remnant ). D´esigne indiff´eremment l’onde de choc,

en expansion dans le milieu interstellaire, cr´e´ee par les ejecta supersoniques d’une

supernova, ou l’ensemble de ce choc et de la bulle chaude de gaz choqu´e qu’il

contient.

yr Ann´ee (year), quand il s’agit de l’unit´e de temps.

ZeV Zetta electron-volt (= 1021 eV).

(21)
(22)

Premi`

ere partie

Le rayonnement cosmique en

ses trois dimensions spectrales

(23)
(24)

3

Le rayonnement cosmique demeure un des probl`emes centraux de l’astrophysique,

suscitant de nombreuses questions bien souvent interconnect´ees. Son ´etude, nous en

d´efendons ici l’id´ee, devrait permettre d’´etablir des liens tr`es riches entre diff´erentes par-ties des sciences de l’univers, touchant notamment `a l’´etude du milieu interstellaire, des champs magn´etiques ou de l’interaction des particules avec les plasmas, `a la mod´elisation des sources ´energ´etiques telles que les noyaux actifs de galaxie ou les sursauts gamma, `a l’astronomie gamma, la formation des ´etoiles, l’´equilibre d’ionisation des nuages interstel-laires, `a l’´evolution stellaire, l’´etude multi-longueur d’onde des restes de supernova, des superbulles, `a la nucl´eosynth`ese spallative, etc. `A cela s’ajoutent tous les aspects « as-troparticules » concern´es par la partie la plus extrˆeme du spectre d’´energie des rayons

cosmiques, notamment `a travers la mati`ere noire, les d´efauts topologiques ou encore

une possible violation de la sym´etrie de Lorentz et autres hypoth`eses au-del`a du mod`ele standard de la physique des particules.

La probl´ematique des rayons cosmiques se pr´esente `a la fois sous des aspects

th´eoriques, ph´enom´enologiques et observationnels. Certaines questions se rapportent

plus `a la physique qu’`a l’astrophysique proprement dite. Des travaux mettent l’accent sur

l’acc´el´eration des rayons cosmiques, tandis quand d’autres se focalisent sur leur

propa-gation, ou sur leurs interactions avec le milieu environnant, depuis leurs sources jusqu’`a

l’atmosph`ere terrestre. Diff´erentes gammes d’´energie sont ´egalement `a consid´erer, qui se

distinguent parfois par des probl´ematiques propres. Il est malheureusement difficile, sans

un recours syst´ematique aux liens hypertextuels, de faire ressortir comme nous le

sou-haiterions la compl´ementarit´e de ces diff´erents aspects, et l’avantage qu’il peut y avoir `a les consid´erer conjointement. Ne pouvant ´echapper `a la contrainte de l’´ecriture lin´eaire, nous avons choisi ici de diviser la pr´esentation de nos r´eflexions et travaux d’une mani`ere

quelque peu inhabituelle, en ne marquant aucune des distinctions logiques rappel´ees

ci-dessus, mais en traitant successivement les trois dimensions spectrales qui caract´erisent

le rayonnement cosmique : le spectre d’´energie, le spectre de masse (la composition) et

le spectre angulaire (la distribution sur le ciel). Ceci permettra d’aborder, au sein d’un mˆeme chapitre, des aspects `a la fois th´eoriques et ph´enom´enologiques, li´es aussi bien `

a l’acc´el´eration qu’`a la propagation, et se rapportant `a des domaines d’´energies divers, dans une tentative d’unifier, un peu plus qu’il n’est coutume de le faire, le rayonnement

cosmique comme ph´enom`ene physique et astrophysique global.

Au chapitre 1, une pr´esentation d’ensemble des rayons cosmiques nous donnera

l’oc-casion de discuter les principaux enjeux relatifs `a leurs diff´erents domaines d’´energie, et de d´egager une perspective g´en´erale mettant `a profit la compl´ementarit´e des aspects

phy-siques et astrophyphy-siques qui peuvent intervenir. Nous pr´esenterons ensuite, au chapitre 2,

quelques travaux ayant trait au spectre d’´energie des rayons cosmiques, en relation avec

l’acc´el´eration des particules, c’est-`a-dire de la constitution d’un spectre source, et avec

leur propagation dans le milieu ambiant, au cours de laquelle ce spectre est modifi´e et

prend l’allure que l’on observe.

Nous nous tournerons ensuite, au chapitre 3, vers le spectre de masse, c’est-`a-dire

la composition du rayonnement cosmique, caract´eristique exclusive sans ´equivalent dans

l’astronomie photonique. Un photon peut en effet avoir son ´energie propre, d’o`u les

spectres tant exploit´es en astrophysique et dont on tire toutes les informations que l’on

sait. Mais il reste toujours un photon. Le rayon cosmique, lui, se caract´erise toujours par son ´energie, mais ´egalement par sa nature, c’est-`a-dire l’identit´e de son noyau. C’est donc

v´eritablement une dimension spectrale suppl´ementaire qu’offre le rayonnement cosmique,

et quand on sait le parti exceptionnel qu’a su tirer l’astrophysique de l’acc`es qui lui

(25)

4

mill´enaires de l’astronomie de position et de magnitude, on comprend tout l’int´erˆet

qu’il peut y avoir `a ´etudier avec le plus grand soin les informations contenues dans

la composition du rayonnement cosmique, et dans ses variations avec l’´energie. Un tel

couplage des dimensions spectrales de la masse et de l’´energie a d’ailleurs d´ej`a port´e

de beaux fruits, notamment `a basse ´energie, et promet d’en porter de nouveaux, dans

d’autres domaines d’´energie.

Enfin, nous pr´esenterons au chapitre 4 quelques id´ees et travaux relatifs `a la troisi`eme dimension spectrale du rayonnement cosmique : le spectre angulaire. Cette dimension, on le sait, est extrˆemement r´eduite du fait de l’interaction des particules charg´ees avec

les champs magn´etiques interstellaires et intergalactiques, qui ont pour cons´equence de

rendre presque parfaitement isotrope leur distribution angulaire. On peut dire en quelque

sorte que la vision que nous avons du monde par les rayons cosmiques ´equivaut `a celle

qu’on acquiert par nos yeux au sein du plus ´epais brouillard : la mˆeme quantit´e de lumi`ere nous parvient ´egalement de toutes les directions, et on ne saurait avoir la moindre id´ee sur le lieu o`u se trouvent en r´ealit´e les sources. Mais il se pourrait qu’une sortie du brouillard soit possible, et si nous reviendrons sur le processus d’isotropisation du rayonnement

cosmique dans des champs magn´etiques turbulents, ce sera pour pr´esenter des r´esultats

qui permettront de mieux appr´ecier les espoirs que nous voulons fonder quant `a la

d´etection de structures angulaires `a tr`es haute ´energie, et mˆeme la distinction, `a terme, de sources individuelles. Une telle possibilit´e aurait des cons´equences extraordinaires sur

l’astronomie, et ouvrirait en son sein une dimension nouvelle en nous donnant acc`es `a ce

qu’il est naturel d’appeler « l’astronomie proton », premi`ere joyau de l’´edifice nouveau

que la science du cosmos envisage pour le XXIesi`ecle : l’astronomie multimessager, avec

encore, `a cˆot´e des photons, les neutrinos et les ondes gravitationnelles.

Au cours de ce voyage `a travers les dimensions spectrales du rayonnement

cos-mique, nous ne chercherons nullement `a donner des sujets abord´es une pr´esentation

syst´ematique, didactique et exhaustive, et nous omettrons mˆeme souvent des ´el´ements

int´eressants que le lecteur n’aura aucune difficult´e `a recueillir ailleurs. Nous tenterons au contraire de laisser percevoir une vision g´en´erale qui refl´etera peut-ˆetre mieux le regard

personnel que nous portons sur ces questions, et la compr´ehension que nous avons de

l’´etat actuel des recherches dans le domaine des rayons cosmiques.

Il y a fort `a parier, cependant, que ce point de vue ne sera ni original, ni singulier.

Un sentiment personnel peut fort bien ˆetre partag´e – c’est heureux pour nos soci´et´es ! –

et demeure en tout ´etat de cause ouvert aux nombreuses modifications qu’exigeront ou

favoriseront les d´eveloppements ou les donn´ees nouvelles, ou simplement l’opinion d’un

coll`egue... Il est un fait que la pratique scientifique moderne privil´egie la publication de r´esultats “sonnants et tr´ebuchants”, inscrits dans le cours positif de l’accroissement du donn´e scientifique, devant toujours identifier ses sources et justifier de ses ´etats. La valeur de l’opinion s’en est trouv´ee subrepticement r´eduite, et si l’´echange informel se

maintient au sein de la communaut´e, en marge des conf´erences ou des ateliers, ou par

le biais des visites entre laboratoires, il n’en apparaˆıt pas de trace ´ecrite. Les occasions ´

etant ainsi de plus en plus rares d’exposer de mani`ere quelque peu formelle et organis´ee

un simple point de vue g´en´eral, un sentiment d’ensemble sur une probl´ematique donn´ee,

nous saisirons celle qui nous est donn´ee ici pour tenter de d´egager une compr´ehension

particuli`ere et provisoire d’un certain nombre de faits communs relatifs aux rayons

(26)

Chapitre 1

Auto-pr´

esentation du

rayonnement cosmique

Si vaste est la probl´ematique du rayonnement cosmique qu’il paraˆıt impossible de

l’orchestrer, d’en organiser les figures, et plus futile encore de tenter de la circonscrire. S’y aventurer est toujours hasardeux, car les chemins qu’on y emprunte semblent comme ob´eir `a leurs propres humeurs. On croit aborder un probl`eme, mais il nous m`ene vers un

autre. Tant d’aspects rejaillissent sans cesse les uns sur les autres qu’une pr´esentation

lin´eaire ne saurait aboutir. Les rayons cosmiques sont en quelque sorte inabordables,

n´ecessitant qu’on suive toutes les voies d’acc`es en une progression simultan´ee, superpos´ee. Ne pouvant choisir parmi elles, nous nous abandonnerons ici au rayonnement cosmique, le laissant lui-mˆeme nous guider, d´eployer ses atours tout au long de son spectre, et livrer `

a son gr´e ses diverses facettes, r´ev´eler ses enjeux, et poser ses questions...

1.1

Parmi les sept merveilles du monde physique...

Il est habituel de distinguer diff´erentes r´egions au sein du spectre des rayons

cos-miques : basse ´energie, GeV, TeV, « genou », « cheville », tr`es haute ´energie, ultra-haute

´energie... Mise `a part la distinction entre rayonnement cosmique galactique et

extraga-lactique, cela tient cependant surtout `a des raisons historiques et observationnelles. De

fait, la d´ecroissance rapide de leur flux avec l’´energie fait que les rayons cosmiques de tr`es haute ´energie n’ont pu ˆetre d´ecouverts que plus tardivement, et que des techniques d’ob-servation radicalement diff´erentes doivent leur ˆetre appliqu´ees. La d´emarcation la plus significative s’´etablit autour du PeV (1015eV) : au-dessous de cette limite, la d´etection

directe des RCs par satellite ou par ballon est possible, et conduit `a une identification

relativement fiable de l’´energie et de la composition, notamment de 0.1 `a ∼ 103GeV ; au

del`a du PeV, en revanche, c’est via les gerbes de particules secondaires qu’ils produisent

dans l’atmosph`ere que les rayons cosmiques sont d´etect´es. Essentiellement indirecte, cette technique est plus difficile `a contrˆoler : elle repose sur des hypoth`eses de physique

hadro-nique intervenant de mani`ere subtile dans le d´eveloppement des gerbes atmosph´eriques,

s’appliquant `a des domaines d’´energie encore inexplor´es en acc´el´erateur – et qui le

de-meureront encore longtemps dans le cas des rayons cosmiques d’´energie extrˆeme, vers

1020eV ou au del`a.

Mais quel que soit le d´ecoupage auquel nous a contraint l’histoire ou la technique,

la caract´eristique la plus frappante du rayonnement cosmique, `a la simple vue de la

(27)

6 CHAPITRE 1. AUTO-PR ´ESENTATION DU RAYONNEMENT COSMIQUE

Fig. 1.1 – Spectre d’´energie global des rayons cosmiques, donnant leur flux diff´erentiel

en fonction de l’´energie (donn´ees compil´ees par Simon Swordy).

d´esormais classique figure 1.1 (sur l’´elaboration de laquelle il y aurait toutefois `a revenir), reste l’extraordinaire r´egularit´e de son spectre d’´energie en loi de puissance, dN/dE ∝ E−α, sur au moins 12 ordres de grandeur en ´energie, et 32 ordres de grandeur en flux, `a peine marqu´e par de l´egers infl´echissements : vers 3–5 1015eV, o`u la pente logarithmique

passe de ∼ 2.7 `a ∼ 3.0 – c’est le fameux genou ; vers 5 1017eV, o`u la pente devient ∼ 3.3

– un second genou identifi´e plus r´ecemment ; et vers 3 1018 eV, o`u elle redevient moins

raide, probablement de l’ordre de 2.7–3.0 – c’est la cheville. Au del`a, les flux sont si faibles que les diff´erentes exp´eriences peinent `a fournir une vision coh´erente de la structure du spectre et `a lever les incertitudes sur la normalisation de l’´energie.

Trente deux ordres de grandeur ! C’est tout simplement l’ˆage de l’univers en

(28)

1.2. SOUS LA PLAGE, LES PAV ´ES ! 7 une gamme de flux aussi vaste, en une loi de puissance pratiquement uniforme ? On ne

prendrait probablement pas grand risque `a affirmer, sans plus ample examen des

ar-chives scientifiques, qu’il s’agit l`a d’une situation tout `a fait unique en physique. Car

il faut bien songer que le rayonnement cosmique est un ph´enom`ene fondamentalement

non-themique : son spectre en loi de puissance t´emoigne d’une r´ealit´e totalement hors

d’´equilibre, qui rend plus myst´erieuse encore sa r´egularit´e. Comment maintenir un tel spectre – jusqu’`a des ´energies macroscopiques ! – quand toute chose, en physique, tend `a

se thermaliser ? Quelle instabilit´e fondamentale, `a l’œuvre quelque part dans le cosmos,

peut-elle ˆetre assez stable, en quelque sorte, pour entretenir dynamiquement une telle

situation ? Je ne saurais dire quels autres joyaux m´eriteraient une place au sein des sept

merveilles du monde physique, mais le spectre du rayonnement cosmique, sans l’ombre d’un doute, devrait figurer parmi elles !

1.2

Deuxi`

eme regard sur le spectre : sous la plage,

les pav´

es !

Comme nous l’avons indiqu´e, la belle r´egularit´e du spectre des rayons cosmiques,

remarquable et probablement riche de sens, cache n´eanmoins des brisures significatives,

traditionnellement nomm´ees genou et cheville. Ces structures apparaissent plus

claire-ment lorsqu’on s’affranchit de la d´ecroissance rapide du flux en portant sur une figure

le spectre diff´erentiel redress´e, multipli´e par E3. Comme le montre la figure 1.2, on

distingue alors en r´ealit´e une troisi`eme structure, correspondant `a un nouveau

raidisse-ment du spectre, vers log10(EeV) ' 17.5, que l’on nomme le second genou. En ce qui

concerne le premier genou, citons simplement ici les derniers r´esultat de l’exp´erience

germano-italienne KASCADE, qui ´etudient cette structure avec le plus grand soin et

tout l’appareillage des exp´eriences de physique des particules : d’apr`es ces nouvelles

donn´ees, le genou se situerait `a une ´energie Eknee ' 5 1015 eV (KASCADE

Collabo-ration, 2005). Il faut ´egalement noter qu’aucun des mod`eles hadroniques utilis´es pour

analyser les gerbes de rayons cosmiques d´etect´ees par KASCADE n’est en mesure de

rendre compte de l’ensemble des donn´ees recueillies. Cette situation est particuli`erement

inconfortable pour l’exp´erimentateur, qui ne peut accorder qu’une confiance limit´ee aux

outils dont il use pour d´eduire l’´energie et la nature des rayons cosmiques primaires.

Il est en tout cas manifeste que les mod`eles actuels sont partiellement d´efectueux, soit

que le d´eveloppement – quasi m´ecanique – de la gerbe dans l’atmosph`ere soit trait´e de

mani`ere erron´ee (mˆeme si l’on voit mal comment pourraient subsister des erreurs

suffi-samment graves pour expliquer les d´esaccords), soit que la physique sous-jacente qui est

utilis´ee, et notamment la physique hadronique `a haute ´energie, soit encore incompl`ete ou imparfaitement maˆıtris´ee.

Cette deuxi`eme hypoth`ese, qui semble renforc´ee par les derni`eres analyses de

KAS-CADE, ne serait pas pour ´etonner tous ceux qui voient dans la structure du genou

les signes d’une physique nouvelle, au-del`a du mod`ele standard, pouvant notamment

se caract´eriser par l’ouverture d’un canal d’interaction nouveau, via lequel une

par-tie de l’´energie initiale du rayon cosmique entrant dans l’atmosph`ere serait dissimul´ee `

a nos instruments de mesure (e.g. Kazanas & Nicolaidis, 2001a,b). L’´energie

effective-ment mesur´ee serait ainsi plus faible, et le flux des rayons cosmiques attribu´e `a une

´energie donn´ee correspondrait en fait `a une ´energie plus grande, o`u un flux plus faible

est en effet attendu en raison de la d´ecroissance du spectre : d’o`u la rupture de pente

(29)

8 CHAPITRE 1. AUTO-PR ´ESENTATION DU RAYONNEMENT COSMIQUE

7

E. Parizot (IPN Orsay)

Orsay, 1-3 déc. 2003  Réunion du groupe RCUE (GDR PCHE) 

Deuxième genou

Fig. 1.2 – Spectre redress´e des rayons cosmiques, donnant le flux diff´erentiel multipli´e

par E3 (extrait de Nagano & Watson, 2000). Les genou, second genou et cheville y

apparaissent clairement, par ´energie croissante, de mˆeme que l’incertitude affligeante

des flux de rayons cosmiques au del`a de la dizaine de joules.

une telle hypoth`ese, notamment l’´etonnante nettet´e de la brisure du spectre, que les

diverses exp´eriences attribuent `a des ´energies quelque peu diff´erentes, mais dont elles rel`event toutes le caract`ere particuli`erement aigu, difficile `a comprendre dans le cadre traditionnel d’un ph´enom`ene astrophysique li´e `a l’acc´el´eration ou `a la propagation des

rayons cosmiques, qui devrait conduire `a des transitions s’´etalant au moins sur un demi

ordre de grandeur. Mais quoi qu’il en soit, il est int´eressant de noter que cette physique

autour du TeV (dans le r´ef´erentiel du centre de masse) repr´esente un objectif tr`es im-portant pour la physique des particules, prochainement accessible notamment au LHC.

Que l’astrophysique permette ainsi une incursion anticip´ee dans un domaine crucial de

la physique fondamentale, ce n’est certes pas une nouveaut´e...

Ce genou, qui fait l’objet de tant d’´etudes observationnelles et th´eoriques depuis des d´ecennies, nous offre ici l’occasion de faire une remarque un peu triviale mais importante,

qui sous-tend en quelque sorte cette approche holistique que nous souhaitons d´evelopper

pour le rayonnement cosmique : un probl`eme persistant est parfois un probl`eme mal

pos´e ! S’il s’av`ere si difficile de d´eterminer pr´ecis´ement l’origine astrophysique du genou, pourtant tr`es nettement visible dans les donn´ees, c’est peut-ˆetre tout simplement parce qu’il est d’origine physique.

Une autre proposition tr`es int´eressante pour expliquer cette structure ´evoque

l’in-fluence d’une source ponctuelle unique, par exemple une supernova r´ecente et proche,

(30)

1.2. SOUS LA PLAGE, LES PAV ´ES ! 9 24

E. Parizot (IPN Orsay) Lyon, 31 mai 2001 ! Restes de Supernova et Origine des Rayons Cosmiques "

E (genou)

E (genou)

E (cheville)

Fig. 1.3 – Gauche et centre : sch´ema d´emontrant la n´ecessit´e de recourir `a double

ajustement fin pour obtenir une transition entre deux composantes en loi de puissance dans une configuration de type « genou », c’est-`a-dire avec un raidissement du spectre.

La premi`ere composante doit s’arrˆeter exactement o`u commence la seconde, et elles

doivent en outre avec exactement le mˆeme flux `a cette ´energie pr´ecise. Droite : idem

pour une configuration de type « cheville », ne pr´esentant pas ces difficult´es

spectre (et l’´eventualit´e n’en semble nullement improbable), et qui ferait du genou non

plus l’empreinte significative d’une propri´et´e fondamentale du rayonnement cosmique,

mais la particularit´e tout `a fait contingente du spectre enregistr´e sur Terre `a une ´epoque

donn´ee. Ce qui int´eressant l`a encore pour nous, c’est que pour formuler une telle

hy-poth`ese (e.g. Erlykin & Wolfendale, 1997, 2004), il faut auparavant s’ˆetre affranchi d’un

pr´ejug´e important, largement r´epandu, nous le d´eplorons, parmi les cosmiciens, selon

lequel les sources du rayonnement cosmique de relativement basse ´energie sont les restes

de supernova isol´es – qui sont connus, il est vrai, pour acc´el´erer efficacement des parti-cules au voisinage de leur choc avant en expansion dans le milieu interstellaire (encore

que nous n’en ayons `a ce jour la preuve formelle que pour les seuls ´electrons). Comme

il fut rapidement ´evident pour tous que les restes de supernova (SNR) ne pouvaient pas

acc´el´erer des rayons cosmiques jusqu’`a des ´energies voisines de celle de la cheville, on

a imagin´e que le genou pourrait marquer la transition entre un type de sources – en

l’occurence les SNRs – et un autre, alors inconnu, mais que l’avenir ne manquerait pas de nous r´ev´eler. Il semblerait h´elas ! que l’avenir soit en retard...

Nous reviendrons plus loin, ainsi qu’au chapitre 5, sur le probl`eme sp´ecifique du

ge-nou, mais la difficult´e rencontr´ee par tous les sc´enarios proposant un changement de

composante du rayonnement cosmique `a cet endroit du spectre est de rendre compte

du raccord apparemment sans heurts des deux flux associ´es. Dans le cas d’un spectre

qui se durcit, comme au niveau de la cheville, il est ais´e d’imaginer une composante

de pente plus faible qui, de sous-dominante `a basse ´energie, deviendrait naturellement

dominante au-del`a d’un seuil qui n’aurait l`a encore qu’un caract`ere contingent, li´e `a la

normalisation relative des deux composantes (cf. Fig. 1.3c). Dans le cas d’un genou, `a

l’inverse, l’adoucissement du spectre (c’est-`a-dire le raidissement de sa pente) interdit

le sc´enario ci-dessus et exige que la composante de haute ´energie commence subitement

(tout du moins son son r´egime de loi de puissance) `a l’´energie mˆeme o`u la composante

de basse ´energie se termine – faute de quoi cette derni`ere continuerait de dominer

jus-qu’`a une ´energie plus grande, ou bien l’autre le ferait d`es une ´energie inf´erieure – et qu’en outre `a l’´energie `a peu pr`es identique o`u l’une se termine et o`u l’autre commence,

(31)

10 CHAPITRE 1. AUTO-PR ´ESENTATION DU RAYONNEMENT COSMIQUE 32

E. Parizot (IPN Orsay)  Prospective IN2P3/DAPNIA 

La Colle sur Loup

GZK

genou

propagation (A, E)

modulation solaire

transition G/EG

sources individuelles

?

Fig. 1.4 – R´egions particuli`erement int´eressantes du spectre des rayons cosmiques.

co¨ıncidence, dans l’attente d’une justification quantitative pr´ecise, paraˆıt bien

impro-bable. Aussi devrait-il ˆetre naturel, sur le plan ph´enom´enologique, de supposer qu’une

seule et mˆeme composante de rayons cosmiques compose le spectre observ´e jusqu’`a la

cheville, vers 3 1018. Quitte `a renoncer, au moins par hypoth`ese, au mod`eles tant choy´e

de l’acc´el´eration par les restes de supernova isol´es...1

Si l’on est prˆet `a prendre un tel recul et `a r´etablir l’unit´e de principe du spectre

des rayons cosmiques jusque bien au-del`a de l’´energie du genou, on peut alors, en effet,

proposer d’en expliquer l’apparition par un ph´enom`ene contingent qui ne viendrait que

moduler un spectre sous-jacent plus r´egulier et plus universel, ou au contraire par un

ph´enom`ene plus fondamental faisant intervenir une physique nouvelle autour du TeV,

dont la physique des particules nous dit qu’elle n’est pas si improbable. Mais quelle que

soit la fa¸con dont nous comprendrons cette structure dans l’avenir, on n’oubliera pas

que, de nombreuses ann´ees durant, le spectre du rayonnement cosmique a pr´esent´e un

genou particuli`erement douloureux !2

1Il est toutefois juste et important de dire que divers amendements au mod`ele d’acc´el´eration dans les

restes de supernova sont possibles, qui conduisent `a d’autres types de solutions des probl`emes mentionn´es ici. Nous y reviendrons plus loin.

2Que dire alors de la d´ecouverte r´ecente du second genou, en laquelle certains proposent de voir

la v´eritable transition entre les composantes galactique et extragalactique du rayonnement cosmique ? Rien pour le moment, mais nous y reviendrons au chapitre 3...

Figure

Fig. 1 – Œuvre du peintre Abraham Hondius repr´ esentant une foire tenue sur la Tamise gel´ ee ` a Temple Stairs, au d´ ebut de l’ann´ ee 1684 (Museum of London)
Fig. 1.1 – Spectre d’´ energie global des rayons cosmiques, donnant leur flux diff´ erentiel en fonction de l’´ energie (donn´ ees compil´ ees par Simon Swordy).
Fig. 1.2 – Spectre redress´ e des rayons cosmiques, donnant le flux diff´ erentiel multipli´ e par E 3 (extrait de Nagano & Watson, 2000)
Fig. 1.4 – R´ egions particuli` erement int´ eressantes du spectre des rayons cosmiques.
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