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Farce

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Submitted on 16 May 2017

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Farce

Benoît Barut

To cite this version:

Benoît Barut. Farce. Jeanyves Guérin (dir.). Dictionnaire Eugène Ionesco, Honoré Champion, pp.238-

240, 2012, 978-2-7453-2379-8. �hal-01523224�

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Farce

Benoît BARUT (Polen EA4710 – Cepoc)

(Notice du

Dictionnaire Eugène Ionesco, Jeanyves Guérin (dir.), Paris, Honoré

Champion, coll. « Dictionnaires et références », 2012, p. 238-240.)

[238] À partir de la Renaissance, le genre de la farce s’altère et se dissout progressivement. Au XX

e

siècle, elle n’existe plus que de manière éparse, sous la forme de bribes ou d’échos, comme un modèle incomplet et flexible se réduisant à une poignée de modalités toujours vivaces. En premier lieu, elle est un genre exubérant, démesuré, fondé sur le grossissement caricatural, la disproportion bouffonne tant physique que psychologique. Les personnages y sont des types visuellement caractéristiques et monovalents jusqu’à la superficialité. Ionesco fait son miel de cette esthétique extrême. Il met volontiers souvent en scène des personnages visuellement archétypiques – le Peintre et le Gros Monsieur dans Le Tableau, le Professeur de La Leçon, l’Académicien de La Lacune… – ainsi que des types familiaux et sociaux hérités ou dérivés de la farce (la virago, la concierge bavarde, le grand- père égrillard…), tous personnages suffisamment grossis pour créer un sûr comique de contraste : « Gros rire du Gros Monsieur ; maigre rire du Peintre maigre » (Le Tableau).

La farce est également un genre littéralement ignoble, qui choque le bon goût et assume crânement son manque de dignité. Elle se caractérise par une importance du bas corporel qu’il s’agisse des fonctions digestives (anus, estomac et, à la limite, bouche) ou reproductrices (sexe). Ce fond rabelaisien est assez peu présent chez Ionesco. Certes, dès la cinquième réplique de La Cantatrice chauve, M

me

Smith parle du poisson qui la fait aller aux cabinets et une des premières phrases de Mary concerne son achat d’un pot de chambre. De même, la fin de la pièce est marquée par les « variations du caca » (kakatoès, cascade de cacades, cacaoyers…). Mais, après cette première œuvre pétaradante et quelques célèbres figurations du gavage – les pommes de terre au lard de Jacques ou la soumission et L’Avenir est dans les œufs ou le « mastique ! avale ! » de Victimes du devoir – la part du ventre baisse drastiquement. En comparaison, Beckett va plus loin dans le vil. Il n’y a pas de personnage nommé « Merde » chez Ionesco ; il y a au contraire une famille Krap dans Eleutheria et un Krapp dans La Dernière Bande, lequel souffre d’ailleurs d’occlusion intestinale (le jeu reposant sur les bruits de bouchon en off relève de l’équivoque scatologique comique).

Contrairement au ventre, la part du sexe stagne tout au long de la carrière de Ionesco.

Pourtant, à de rares exceptions près, le sexe n’est pas convoqué dans une perspective

farcesque. Contrairement à Vian, son confrère au Collège de ’Pataphysique, Ionesco donne

peu dans la gauloiserie. Pour lui, le sexe est moins une ressource comique qu’un objet

inquiétant sinon repoussant (voir la dégoulante Roberte dans Jacques). L’obscène s’expose de

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manière décomplexée dans la farce ; c’est loin d’être le cas chez Ionesco, le rire ne jouant pas son rôle protecteur de mise à distance.

Les équivoques incursions sous ou derrière la ceinture ne suffisent pas à définir la farce. Celle-ci fait aussi une place au corps maltraité à travers le fameux motif de la bastonnade. Des coups sont parfois assénés chez Ionesco : dans une variante de Tueur sans gages, un sergent de ville tape avec son bâton blanc sur les têtes qui dépassent du mur, comme à la fête foraine. Le guignol, qui marqua si profondément l’enfant Ionesco, apparaît en transparence d’autant que la Mère Pipe – que l’on voit « à mi-corps » s’agiter au fond de la scène comme dans un castelet – lutte dans un « style guignol ». Le Tableau est, quant à lui, sous-titré « guignolade ». Le guignol est une catégorie opérante pour Ionesco. Mais contrairement à sa vocation première – où Guignol représente le peuple se vengeant ludiquement des instances qui l’oppressent – il n’est plus fondé sur le principe d’une violence paroxystique tournée en revanche et en rire. De fait, les œuvres de Ionesco ne reposent pas sur une euphorisation univoque du dysphorique mais proposent un comique plus mitigé. La scène des chutes du roi Bérenger « doit être jouée en guignol tragique » (Le Roi se meurt).

L’oxymore – que l’on retrouve dans le label « farce tragique » caractérisant [240] Les Chaises – prouve assez que la farce est débarrassée de sa superficialité. Elle qui n’était qu’un genre où les pulsions prenaient le pas sur les principes éthiques, qu’un genre tranquillement amoral fondé sur l’absence de profondeur des personnages et des enjeux, la voilà désormais outil conscient d’un creusement tonal. « Souligner par la farce le sens tragique d’une pièce », résume Ionesco dans Notes et contre-notes. Dans cette perspective, le Nouveau Théâtre en général et Ionesco en particulier reprennent et approfondissent un motif central de la farce médiévale : le bon tour joué à une dupe, c’est-à-dire la théâtralisation uniformément comique d’une victime (cocu ou benêt). Or, dans la farce ionescienne, qu’elle soit métaphysique ou ontologique, la dupe est à la fois pathétique et dérisoirement comique : c’est le cas de Bérenger à la fin de Tueur sans gages ou de Choubert dans Victimes du devoir. De surcroît, et contrairement à la tradition, la victime devient le héros de la farce. Contre le personnage central – qu’il s’appelle Amédée, Bérenger, Jean ou le Personnage – se liguent les éléments, la temporalité, les êtres, les institutions. Il devient le dindon d’une farce cosmique dont le caractère comique perd de son évidence. Au Moyen Âge, la farce servait de contrepoint léger à un spectacle sérieux (mystère ou moralité) ; elle est désormais un jeu sérieux en lui-même, assez éloigné du comique débridé qui la caractérisait. Elle n’est plus une soupape sans conséquence mais l’outil même de la manifestation du tragique. Les deux genres ne sont donc pas antithétiques mais conjoints dans la mesure où le tragique en question est inédit, non pas fondé sur des enjeux éthiques profonds mais au contraire sur ce défaut de profondeur même (la vacuité, l’absurdité de la condition humaine).

Il y a donc, chez Ionesco, une légitimation éthique et esthétique de la farce qui,

paradoxalement, l’éloigne voire la coupe de ses modalités originelles. S’il enrichit la farce,

peut-être jusqu’à la dénaturer, Ionesco reste pourtant un pataphysicien, c’est-à-dire un farceur,

au sens le plus léger du terme. Si sa pièce s’intitule L’Impromptu de l’Alma, c’est parce

qu’elle est créée au Studio des Champs-Élysées, à deux pas de l’avenue et du pont du même

nom. Mais n’est-ce pas aussi parce que le personnage nommé Ionesco, l’alter ego de l’auteur

réel, y fait le zouave ? En outre, avec La Cantatrice chauve, Ionesco a produit l’un des

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classiques les plus célèbres du XX

e

siècle à partir d’un canular, exactement comme l’avait fait Jarry avec Ubu.

Bibliographie

Rosette Lamont, « The metaphysical farce : Beckett and Ionesco », The French Review, n° 32, février 1959, p. 319-328.

Richard Coe, « La farce tragique », Cahiers Renaud-Barrault, n° 42, février 1963, p. 25-51.

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