• Aucun résultat trouvé

Géographie Économie Société: Article pp.73-100 of Vol.14 n°1 (2012)

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Géographie Économie Société: Article pp.73-100 of Vol.14 n°1 (2012)"

Copied!
28
0
0

Texte intégral

(1)

Géographie, économie, Société 14 (2012) 73-100

doi:10.3166/ges.14.73-100 © 2012 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

économie société économie société

Entreprises industrielles et sociétés de services aux entreprises :

une proximité physique est-elle nécessaire ? Industrial and business services firms: is physical

proximity necessary?

Fabienne Picard* et Nathalie Rodet-Kroichvili*

Maîtres de Conférences en Sciences économiques

Université de Technologie de Belfort Montbéliard, Laboratoire IRTES-RECITS 90010 Belfort Cedex

Résumé

Cet article cherche à évaluer la nécessité de la proximité physique entre industrie et services aux entreprises, en analysant la situation des territoires industriels en matière de développement de services aux entreprises. Une analyse statistique comparative des régions métropolitaines fran- çaises indique que les territoires industriels français sont relativement bien dotés en services opérationnels mais pauvres en services avancés. La question se pose donc de la nécessité de la co-localisation sur un même territoire des clients et des prestataires. Cette question possède d’im- portants enjeux en termes de politique publique. Une revue de la littérature sur les déterminants de la localisation des services aux entreprises, centrée sur les facteurs influençant la contrainte de proximité au client, montre que pour les services opérationnels, ces facteurs favorisent fré- quemment la proximité physique client/prestataire ; pour les services avancés d’autres formes de proximité que la co-localisation semblent déterminantes et la proximité physique doit davantage être considérée comme complémentaire plutôt qu’exclusive de relations distantes. Notre étude de la localisation des entreprises de services avancés dans la filière automobile de la région Franche-

*Adresses email : fabienne.picard@utbm.fr, nathalie.kroichvili@utbm.fr

(2)

Comté permet de souligner que dans une région industrielle dotée de villes de taille moyenne, la localisation des services avancés aux entreprises se fait davantage sur la proximité aux clients industriels qu’en réponse à un effet métropolitain.

© 2012 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

Summary

Our article aims at ascertaining the necessity of physical proximity between industry and business services by analyzing the situation of industrial territories with respect to business services. A comparative statistical analysis carried on the different regions in metropolitan France shows that operational services are relatively well developed but knowledge intensive business services under-developed in French industrial territories. We may ask if a co-location of clients and ser- vice providers is necessary on each particular industrial territory. A literature review on location factors of business services focused on factors influencing the constraint of physical proximity to clients leads to the conclusion that such factors generally strengthen physical proximity to clients for operational business services whereas they do not have unequivocal influence as for knowle- dge intensive business services. For the latter, other forms of proximity than co-location seem to be determinant and physical proximity should be considered as complementary rather than subs- titutable to remote interactions. Our automotive industry study of knowledge intensive business services location emphasizes that physical proximity to industrial clients is more important than metropolitan effects in industrialized territories where there are only medium-sized cities, such as the Franche-Comté region.

© 2012 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

Mots clés : territoires industriels, services aux entreprises, proximité Keywords: industrial territories, business services, proximity

Introduction

Les territoires industriels sont aujourd’hui confrontés à un processus conjoint de mondialisation et de désindustrialisation qui se traduit par une diminution de la part de l’activité industrielle dans la valeur ajoutée et dans l’emploi et conduit à la pré- dominance d’une économie servicielle. De fait, les activités de service occupent une part sans cesse croissante de la valeur ajoutée et de l’emploi et participent très lar- gement à la croissance des économies développées : rappelons qu’aux États-Unis les services atteignent 79 % de l’emploi, 76 % au Canada et au Royaume-Uni, 68 % en Allemagne et au Japon, 66 % en Espagne et en Italie (Mouhoud et al. 2010). Ces ser- vices ne peuvent pas être considérés uniquement comme des activités compensatoires des faiblesses des activités industrielles : les services aux entreprises, en particulier, exercent bien une influence sur la structure et le développement économique d’un ter- ritoire. Ils favorisent et accompagnent les transformations profondes dans lesquelles l’industrie est actuellement engagée. Ces mutations structurelles interrogent le rôle de l’acteur public et on peut se demander si la redynamisation d’un territoire industriel peut se faire sans une politique de développement des services aux entreprises. Ces

(3)

services aux entreprises sont ici définis comme des services achetés par les entreprises industrielles ou d’autres sociétés de services pour réaliser leur activité. Jusqu’en 2007, l’INSEE les considérait comme une catégorie distincte correspondant au code EN de la nomenclature NES (postes et télécommunications ; conseils et assistance ; services opérationnels ; recherche et développement). Cette distinction n’a cependant pas été conservée dans la nomenclature actuelle, NAF rév2, dans laquelle l’INSEE classe les services marchands en fonction de leur contenu (information et communication, activi- tés financières et d’assurances, activités spécialisées scientifiques et techniques, etc.).

Deux grandes questions structurent les débats sur la relation industrie / services aux entreprises dans un territoire. La spécialisation industrielle d’un territoire peut-elle frei- ner l’implantation d’activités de services aux entreprises, comme le laisserait penser une approche post-industrielle (Bell 1973, Touraine 1969) ? La présence d’une industrie forte peut-elle favoriser le développement et l’ancrage des services comme tend à le laisser penser l’approche néo-industrialiste (Gallouj et al. 2006) ? Cette lecture purement secto- rielle des territoires laisse dans l’ombre l’analyse de l’évolution de la nature même des activités industrielles et des métiers qui s’y déploient, ainsi que l’analyse des interactions et des processus de renforcement mutuel qui se tissent entre les activités industrielles et de services. S’il ne fait pas de doute que le développement des services aux entreprises constitue une condition sine qua non sinon de la survie de l’industrie, au moins de son dynamisme, la question se pose de la localisation de ces services relativement aux acti- vités industrielles et in fine de la spécialisation des territoires. Ceci est loin d’être tri- vial lorsque l’on sait que les activités de services sont, elles aussi, délocalisables (Barlet et al. 2008, 2011) et que la répartition géographique de ces entreprises n’est pas neutre et peut influencer non seulement la pérennité mais aussi la distribution géographique de l’ensemble des activités économiques (François 1990, Catin et Ghio 1999, Jennequin 2003, 2007). Cet article propose une approche intégratrice de l’ensemble des activités constitutives de la chaîne de valeur des territoires et pose la question de l’implantation des services aux entreprises dans les territoires traditionnellement industriels. Cette question est abordée sous l’angle de la nécessaire territorialité de la relation que nouent les entre- prises de services avec leurs clients industriels, territorialité construite sur la base d’une combinaison, à géométrie variable, des différentes formes de proximité.

Afin d’explorer cette question, nous proposons dans un premier temps d’examiner la situation des territoires industriels en matière de développement des services aux entreprises.

Prenant appui sur une analyse statistique comparative de la situation des territoires indus- triels de la France métropolitaine au cours de la période 1990-2009 et au moyen des résultats d’une enquête portant sur les services aux entreprises industrielles dans un territoire particu- lier, la Franche-Comté, nous proposons de mettre en exergue une série d’heuristiques. Dans un second temps, ces résultats empiriques sont éclairés par les conclusions de la littérature traitant des facteurs de localisation des sociétés prestataires de services aux entreprises. Nous examinons plus précisément les travaux portant sur les facteurs qui renforcent ou desserrent la contrainte de proximité physique entre prestataires de services et clients industriels. Enfin, dans une troisième section, nous affinons l’analyse en présentant une étude de cas portant sur la localisation des entreprises industrielles et de services avancés aux entreprises dans la filière automobile de la région Franche-Comté, territoire industriel par excellence au regard de la part la valeur ajoutée réalisée et des effectifs salariés employés dans l’industrie.

(4)

1. Développement des services aux entreprises dans les régions industrielles françaises : retour sur quelques faits stylisés

L’objectif de cette première partie est de mettre en évidence les caractéristiques des terri- toires industriels en matière de développement des services aux entreprises. Pour cela, nous allons développer une analyse comparative des régions industrielles relativement aux régions tertiaires en France métropolitaine. Sous le terme régions industrielles, nous regroupons les régions de France métropolitaine pour lesquelles le poids relatif de la valeur ajoutée de l’indus- trie manufacturière dans la valeur ajoutée totale en valeur est supérieur à la médiane. En France, celles-ci sont au nombre de onze. Il s’agit en 2009, par ordre décroissant d’importance, de la Franche-Comté (17,62 %), de l’Alsace (16,22 %), de la Picardie (15,53 %), de la Champagne Ardennes (15,07 %), de la Haute Normandie (14,75 %), de la Bourgogne (14,42 %), des Pays de la Loire (14,17 %), de l’Auvergne (14,11 %), du Centre (14,10 %), du Nord-Pas-de-Calais (13,95 %) et de la Lorraine (13,52 %) (Tableau 1)1. La prédominance d’un secteur d’activité dans une région ne doit cependant pas conduire à nier la présence ou le dynamisme d’autres activités. Une précaution terminologique nous conduirait plus justement à traiter de régions relativement industrielles et de régions relativement tertiaires, la dynamique tertiaire étant plus développée encore que la dynamique industrielle dans ces dernières.

Les services aux entreprises ne représentent pas un bloc monolithique. Non seulement les sta- tistiques distinguent parfois services opérationnels et services avancés, mais la nécessité de proxi- mité physique au client varie selon ces deux catégories, qu’il s’agit donc de préciser. Les services opérationnels regroupent des activités faiblement créatrices de valeur ajoutée, standardisables (sécurité, nettoyage, assainissement, voirie, gestion des déchets, etc.) ou de mise à disposition de ressources existantes (intérim), qui requièrent des compétences assez élémentaires. Les services opérationnels correspondent en grande partie2 à la catégorie N3 de la NES (nommée d’ailleurs services opérationnels). Les services avancés3, quant à eux, regroupent des activités requérant des compétences plus pointues et intensives en connaissances (conseil, ingénierie, conception, R&D) et qui répondent à une volonté de prise de recul sur l’activité de l’entreprise, de gestion de problèmes complexes, d’accompagnement de la stratégie et du développement futur de l’entre- prise, de production de connaissances nouvelles. La question du développement des services avancés trouve un écho tout particulier dans le contexte d’une économie de la connaissance (Foray 2004), voire d’évolution vers un capitalisme cognitif (Azaïs et al. 2001) puisque les ser- vices avancés sont des vecteurs importants de l’innovation en tant que catalyseurs, supports et sources d’innovation (Den Hertog 2000). De fait, la place des services avancés dans un secteur d’activité constitue un marqueur clé de sa capacité d’adaptation aux nouvelles conditions pro- ductives (Djellal et Gallouj 2009). Dans la plupart des études, les services avancés correspondent aux catégories N2 (Conseil et assistance) et N4 (Recherche et développement) de la NES4.

1 Le classement en 1990 est sensiblement le même, mais la région Rhône-Alpes apparaît dans les régions industrielles, tandis que les Pays de la Loire n’apparaissaient pas encore. Le constat est sensiblement le même si l’on retient la part que représentent les salariés de l’industrie dans l’emploi salarié régional.

2 Il existe des débats sur le classement de certains services, tels que la maintenance de premier niveau.

3 On considère comme synonymes les expressions services avancés aux entreprises, services à forte valeur ajoutée, services élaborés, services intensifs en connaissances.

4 Il existe vraisemblablement des interactions entre services opérationnels et services avancés, ainsi que des stratégies spécifiques de recours à l’une ou l’autre forme de services mais cette question n’est pas l’objet de cet

(5)

1.1. évolution de la valeur ajoutée de l’industrie et des services aux entreprises dans les régions industrielles métropolitaines françaises

De façon à caractériser l’évolution des services aux entreprises dans les régions indus- trielles, nous avons comparé l’évolution conjointe de la part de l’industrie manufacturière et des services aux entreprises dans la valeur ajoutée régionale pour les onze régions industrielles précédemment identifiées.

article. Nous ferons l’hypothèse que les comportements des acteurs pour et dans ces deux catégories de services aux entreprises ne sont pas corrélés : une analyse économétrique serait nécessaire pour confirmer cette hypothèse.

Figure 1 : Evolution de la part de l’industrie et des services aux entreprises dans la valeur ajoutée à prix courants des régions industrielles françaises de 1990 à 2009

6,00 8,00 10,00 12,00 14,00 16,00 18,00

0,00 5,00 10,00 15,00 20,00 25,00 30,00 35,00

VA services aux entreprises (% de la VA régionale)

VA industrie (% de la VA régionale)

1990 2009 Métropole

Métropole Nord-Pas de Calais

Nord-Pas de Calais

Franche-Comté Franche-Comté

Picardie Picardie

Auvergne Champagne-Ardennes

Champagne-Ardennes Bourgogne

Pays de la Loire Lorraine Centre

Haute Normandie Alsace Alsace

Auvergne

Bourgogne

Lorraine Haute Normandie Centre

Pays de la Loire

Source : Insee (Comptes régionaux annuels, base 2000) ; valeurs 1990-2007 définitives, 2008 semi-définitives et 2009 provisoires.

(6)

Source : Insee (Comptes régionaux annuels, base 2000) ; valeurs 1990-2007 définitives, 2008 semi-définitives et 2009 provisoires. Calculs des auteures.

Tableau 1 : Valeur ajoutée dans les services aux entreprises, régions métropolitaines françaises, 1990-2009

Régions

Valeur ajoutée des services aux

entreprises (millions €)1990

Part de la valeur ajoutée

des services aux entreprises

dans la VA régionale ( %)

1990

Valeur ajoutée des services aux entreprises 2009

(millions €)

Part de la valeur ajoutée des services aux entreprises dans la VA régionale

( %) 2009

Taux de croissance de la valeur ajoutée dans les services aux entreprises ( %)

1990-2009

Alsace 3 294 12,45 6 139 13,42 86,34

Aquitaine 4 260 10,94 10 369 13,41 143,39

Auvergne 1 495 8,48 3 613 12,07 141,63

Basse-Normandie 1 727 9,38 3 623 11,52 109,82

Bourgogne 2 161 9,54 4 084 10,83 89,00

Bretagne 3 278 9,22 10 277 13,95 213,49

Centre 3 695 10,59 7 914 13,46 114,20

Champagne-

Ardennes 1 814 9,18 3 245 10,05 78,90

Corse 310 10,25 694 10,57 124,00

Franche-Comté 1 318 8,66 2 899 11,44 120,00

Haute-Normandie 2 916 11,37 5 506 12,57 88,80

Ile-de-France 53 201 20,32 121 744 24,44 128,84

Languedoc-

Roussillon 3 317 12,55 7 106 13,01 114,23

Limousin 829 8,78 1 624 10,28 95,79

Lorraine 3 134 10,16 6 140 12,28 95,92

Midi-Pyrénées 4 429 13,17 11 077 16,04 150,12

Nord — Pas-de-

Calais 5 240 10,63 13 336 15,26 154,52

Pays de la Loire 4 012 9,70 12 040 14,19 200,10

Picardie 2 145 8,78 4 550 11,53 112,08

Poitou-Charentes 1 734 8,51 3 916 10,24 125,80

Provence-Alpes-

Côte d’Azur 8 381 13,36 17 149 13,77 104,62

Rhône-Alpes 11 827 13,60 25 526 15,56 115,83

Province 71 316 11,08 160 827 13,51 125,51

France

métropolitaine 124 517 13,75 282 571 16,73 126,93

(7)

Une tendance, bien connue, est partagée par toutes ces régions, à savoir que la part de l’industrie manufacturière dans la valeur ajoutée régionale diminue sur la période consi- dérée, tandis que la contribution des services aux entreprises à la valeur ajoutée régionale augmente. Si en 2009 la part de la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière tend à se situer autour de 13-14 % pour la plupart des régions industrielles (à l’exception notable de la Franche-Comté et de l’Alsace pour lesquelles cette part avoisine les 16-17 %), l’écart type est plus élevé pour la part des services aux entreprises dans la valeur ajoutée régio- nale. Cela contribue à définir des profils différents de régions industrielles, qui ne se différencient pas sensiblement du comportement des autres régions métropolitaines fran- çaises, si l’on exclut l’Ile-de-France (Tableau 1). Ainsi, le profil de la région Champagne- Ardennes (dont la valeur ajoutée dans les services aux entreprises est de 10,05 % de la valeur ajoutée régionale) se rapproche-t-il de celui du Poitou-Charente (10,24 %) et celui du Nord-Pas-de-Calais (15,26 %) est-il proche de celui de la région Rhône-Alpes (15,56 %) ou de la région Midi-Pyrénées (16,04 %).

La dynamique de développement5 des services aux entreprises semble par ailleurs plu- tôt plus forte en moyenne dans les régions tertiaires que dans les régions industrielles : seules trois régions, l’Auvergne, le Nord-Pas-de-Calais et les Pays de la Loire se dis- tinguent par un taux de croissance de la valeur ajoutée produite dans le secteur des ser- vices aux entreprises supérieur à la moyenne nationale en Province (+125,51 %) ; les régions Nord-Pas-de-Calais et Pays de la Loire présentent d’ailleurs la part de la valeur ajoutée régionale produite par le secteur des services aux entreprises la plus importante des régions industrielles.

1.2. évolution de l’emploi dans les différents services aux entreprises dans les régions industrielles françaises

Si l’on saisit l’importance des services aux entreprises dans les régions industrielles à travers le prisme de l’emploi, le constat n’est guère modifié. Les statistiques de l’em- ploi autorisent cependant une analyse plus fine, distinguant services opérationnels et services avancés. L’Ile-de-France se situe loin devant les autres régions, concentrant plus d’un tiers des emplois de services aux entreprises de la France métropolitaine (Tableau 2). Cependant, si cette supériorité est évidente pour la part des services avan- cés dans l’emploi salarié régional, l’Ile-de-France est distancée par trois régions indus- trielles pour la part des services opérationnels : le Nord-Pas-de-Calais, les Pays de la Loire et la Haute Normandie (Figure 2). Le Nord-Pas-de-Calais et les Pays de la Loire apparaissent d’ailleurs dans les cinq premières régions métropolitaines pour le déve- loppement des services aux entreprises. La seule différence significative entre régions industrielles et autres régions françaises (hors Ile-de-France) apparaît non pas dans le poids des services aux entreprises dans l’emploi salarié régional (sensiblement iden- tique en moyenne) mais dans la part des services opérationnels toujours plus élevée que celle des services avancés dans les régions industrielles. Parmi les régions tertiaires, six présentent au contraire une part des services avancés supérieure à celle des services opérationnels dans l’emploi salarié régional.

5 Mesurée ici par le taux de croissance de la valeur ajoutée des services aux entreprises en euros courants.

(8)

Tableau 2 : Ratios comparés de l’emploi salarié et de l’emploi dans les services aux entreprises dans les régions métropolitaines françaises, 2007

Régions Part emploi salarié régional/

emploi total ( %)

Part emploi Services aux entreprises régional/

emploi total Services aux entreprises ( %)

Part emploi Services opérationnels régional/ emploi total

Services opérationnels ( %)

Part emploi Services avancés régional/ emploi total

Services avancés ( %)

Alsace 2,96 2,56 3,07 2,18

Aquitaine 4,71 4,10 4,48 3,44

Auvergne 1,99 1,44 1,61 1,10

Basse-

Normandie 2,20 1,63 1,97 1,42

Bourgogne 2,51 1,77 2,14 1,22

Bretagne 4,81 3,98 4,40 3,33

Centre 3,91 3,44 4,03 2,90

Champagne-

Ardenne 2,05 1,46 1,89 1,03

Corse 0,40 0,25 0,20 0,19

Franche-Comté 1,78 1,41 1,81 1,01

Haute-

Normandie 2,86 2,45 3,25 1,81

Ile-de-France 22,61 32,97 24,83 41,10

Languedoc-

Roussillon 3,39 2,80 2,63 2,89

Limousin 1,09 0,81 0,90 0,51

Lorraine 3,36 2,72 3,42 1,99

Midi-Pyrénées 4,26 4,21 3,44 4,94

Nord-

Pas-de-Calais 5,85 5,66 7,07 4,53

Pays de la Loire 5,66 5,17 6,42 4,08

Picardie 2,66 2,05 2,89 1,31

Poitou-Charentes 2,57 1,76 2,08 1,33

Provence-Alpes-

Côte ďAzur 7,21 6,53 6,25 6,60

Rhône-Alpes 9,86 9,65 9,97 9,77

Province 77,39 67,03 75,17 58,90

France

métropolitaine 100,00 % 100,00 % 100,00 % 100,00 %

Source : Insee — Estimations annuelles d’emploi au 31/12 (estimations provisoires pour ľannée 2007).

Calculs des auteures.

(9)

Si l’on compare le poids relatif de l’emploi dans les services aux entreprises (tous ser- vices confondus ou décomposés en services opérationnels et avancés) dans les régions de France métropolitaine avec le poids relatif de l’emploi salarié régional global (Tableau 2), on rend compte de la sur ou sous-représentation des services aux entreprises dans telle ou telle région. Sans surprise, on observe une sur-représentation des services aux entreprises en général mais également des services opérationnels et des services avancés en Ile-de- France. Par ailleurs, l’analyse confirme que les services opérationnels sont relativement plus développés dans les régions industrielles (c’est le cas dans huit régions industrielles sur onze), tout comme dans la région Rhône-Alpes. Pour les services avancés, outre la région parisienne, seule la région Midi-Pyrénées affiche un poids relatif dans ce secteur supérieur au poids relatif de l’emploi salarié dans l’emploi total. Au final, aucune région  

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22

Services  aux entreprises Services opérationnels Services avancés

Régions  industrielles   Régions  tertiaires  

Figure 2 : Part de l’emploi salarié de la France métropolitaine dans les services aux entreprises, les services opérationnels et les services avancés pour les onze régions industrielles françaises et les onze régions tertiaires, 2007 ( %)

Source : Insee — Estimations annuelles d’emploi au 31/12 (estimations provisoires pour l’année 2007).

Calculs des auteures.

(10)

industrielle, pas même le Nord-Pas-de-Calais ou les Pays de la Loire, qui apparaissaient comme des régions porteuses pour les services aux entreprises, ne semble sur-dotée en services avancés aux entreprises.

1.3. Enseignements d’une enquête auprès des clients de services aux entreprises dans une région industrielle, la Franche-Comté

Des études plus approfondies des comportements et attentes des usagers en matière de services aux entreprises ont été conduites dans différents territoires industriels. À titre d’exemple, nous présentons ici les résultats de l’enquête menée dans la première région industrielle de France, la Franche-Comté (INSEE Franche- Comté-Chambre Régionale de Commerce et d’Industrie 2003). Elle porte sur les comportements des établissements (privés et publics, industriels ou de services) franc-comtois en matière d’externalisation et d’usage des services, ainsi que sur leurs attentes en matière de développement régional des services aux entreprises.

Trois résultats méritent d’être rapportés.

Tout d’abord, les établissements franc-comtois ont davantage recours à des presta- taires franc-comtois qu’à des prestataires hors-région : c’est le cas, selon les services, pour 40 % à 98 % des établissements. Cela est particulièrement vrai des services opé- rationnels, pour lesquels les auteurs de la synthèse indiquent que « (…) le prestataire doit être proche géographiquement » (INSEE-Chambre Régionale de Commerce et d’Industrie 2003: 8). Pour des services plus élaborés en revanche, les clients franc- comtois font plus facilement appel à des prestataires hors-région, principalement situés dans la région parisienne ou dans le Rhône. Ainsi, 60 % des établissements interrogés se fournissent hors de la région pour la veille stratégique et concurrentielle et 57 % pour la R&D, pour bénéficier de compétences plus spécifiques. Pour le choix d’un prestataire de services avancés, le recours à un prestataire à proximité du siège social (donc souvent hors région pour les grandes entreprises) est plus fréquent.

Par ailleurs, quatre motivations principales sont évoquées pour le choix de presta- taires de services : la conformité aux besoins, le savoir-faire spécifique, la proximité et le coût. La proximité et les coûts sont déterminants pour le nettoyage, l’immobilier et la restauration, importants pour la sécurité, la location, le traitement des déchets. En revanche, le savoir-faire, la conformité aux besoins voire la notoriété sont essentiels pour le choix d’un prestataire de services avancés et la proximité physique apparaît comme un argument moins déterminant.

Ceci dit, on peut aussi penser que les établissements franc-comtois se fournissent peu en services avancés dans la région parce que l’offre est limitée en quantité et en qualité. Quand les services sont disponibles, les établissements ont plus fréquemment recours aux services en région. Ainsi, les services aux entreprises sont plus déve- loppés dans la capitale régionale, Besançon, et les établissements situés dans cette zone font davantage appel à ces prestataires proches géographiquement. De plus, les clients de services aux entreprises estiment qu’en 2002 cinq besoins sont insuffi- samment couverts dans la région, soit parce que la catégorie de services est en émer- gence (correspondant à des besoins nouveaux), soit parce que les prestataires ne sont pas assez nombreux ou pas assez compétents en région. Il s’agit du traitement des

(11)

déchets, de la formation continue, de la maintenance, du conseil en matière de qua- lité, sécurité, environnement et risque, et du conseil et de la conception informatique.

Pour conclure, notre analyse statistique comparative des régions françaises indique que globalement et malgré une diversité de situations, les services aux entreprises ne sont pas particulièrement développés dans les régions industrielles françaises. Certes, les services opérationnels sont plutôt bien représentés dans ces régions industrielles, mais en revanche, on observe une sous-représentation des services avancés et une polarisation de leur dévelop- pement dans la région parisienne ou autour de l’agglomération toulousaine principalement.

L’enquête auprès des clients de sociétés de services aux entreprises en Franche-Comté confirme qu’au début de la décennie 2000, les établissements de la région se fournissaient plus volontiers en services opérationnels en région et en services avancés hors-région. Ainsi voit-on apparaître l’existence d’un ancrage territorial différencié d’une part selon la nature de l’activité de service aux entreprises considérée et d’autre part selon la nature du lien entre services et territoire. Ces faits stylisés sont-ils éclairés par les travaux théoriques portant sur la localisation des services aux entreprises ? Plus généralement que nous apprennent ces travaux sur les facteurs de localisation des services aux entreprises ?

2. Localisation des sociétés de services aux entreprises et rôle de la proximité aux sites industriels : les apports des recherches théoriques et empiriques contemporaines

2.1. Facteurs de localisation des entreprises de services aux entreprises

Dans quelle mesure les entreprises industrielles ont-elles besoin, pour asseoir leur acti- vité, de services aux entreprises de proximité ? La pérennisation des territoires industriels passe-t-elle par un développement joint, une co-présence dans un même espace, des ser- vices aux entreprises — et notamment des services avancés — ou les entreprises de ces territoires industriels peuvent-elles prendre appui sur des services localisés en dehors de l’espace local, urbain voire régional ? Ces questions ne sont pas anodines, et l’enjeu de politique publique est bien ici d’identifier la nécessité et la nature des services à dévelop- per à proximité des entreprises industrielles pour soutenir le développement économique d’un territoire industriel dans une perspective de spécialisation intelligente.

Depuis les années 90, de nombreuses recherches se sont intéressées à la compréhen- sion et à l’analyse des facteurs de localisation des services aux entreprises. L’analyse empirique met en lumière une hétérogénéité des déterminants de la localisation des ser- vices aux entreprises selon leur nature. Ainsi, certaines activités de services aux entre- prises sont-elles dispersées spatialement, telles que les activités financières, immobilières ou logistiques, quand d’autres sont concentrées géographiquement, notamment dans les métropoles, telles que les activités de R&D (Mouhoud et al. 2010). Au-delà, les travaux de recherche montrent que la localisation des activités de services aux entreprises est multifactorielle et résulte d’un arbitrage ou d’une combinaison entre trois grands types de facteurs (Gallouj et al. 2006, Mouhoud et al. 2010) : les facteurs liés à l’offre, aux ressources présentes sur un territoire donné, aux infrastructures ; les facteurs liés à la spatialité ou l’organisation des activités dans l’espace (hiérarchie, agglomération, disper- sion) ; les facteurs liés à la demande, à l’existence d’un marché, à la présence de clients autorisant un échange, une transaction économique.

(12)

Nous proposons d’approfondir cette dernière catégorie de facteurs, en évaluant la nécessité pour les sociétés de services aux entreprises d’être présentes à proximité de leurs clients, en particulier industriels. Il est vrai que les enquêtes existantes montrent que les sociétés de ser- vices aux entreprises servent principalement d’autres entreprises de services, voire des entre- prises de services aux entreprises6. Cela explique que l’on observe une localisation plus forte en moyenne des services aux entreprises dans les régions dont le profil est tertiaire. Mais cela ne prouve nullement que les entreprises de services aux entreprises n’assurent aucune présence auprès de leurs clients industriels quand elles en ont. Ceci d’autant plus que, dans les années 1990, l’essor de la stratégie d’externalisation d’activités liée au recentrage sur le cœur de métier des entreprises industrielles a fait émerger nombre de spin-off, qui naturellement dans un premier temps se localisaient à proximité de leur principal client. Ces entreprises ont ensuite pu avoir des stratégies propres et quitter le « giron maternel » en s’éloignant géographiquement de la firme originelle. D’autres entreprises de services aux entreprises ont également pu naître ex-nihilo près de clients industriels. Examiner les conclusions de la lit- térature qui s’interroge sur les facteurs de la proximité physique entre entreprises de services aux entreprises et clients7 permettrait de comprendre si cette proximité de circonstance est également une proximité de nécessité ou non. Il apparaît que la littérature contemporaine montre que le besoin de proximité physique (généralement évaluée par le biais de distances mesurées en kilomètres ou en temps) varie selon les modalités de la production du service et notamment selon la nature et les caractéristiques du service (Mérenne-Schoumaker et Moyart 2006). Elle distingue donc les différents facteurs qui influent positivement ou négativement sur la contrainte de proximité aux clients mais, à notre connaissance, la littérature n’offre pas de vision synthétique permettant de proposer une réponse à la question de la nécessité de la proximité physique clients industriels/prestataires de services aux entreprises.

2.2. Des conclusions ambiguës sur la nécessité d’une proximité physique client/prestataire de services aux entreprises

L’analyse de la contrainte de proximité physique varie dans la littérature tout d’abord selon la nature des services étudiés. Services opérationnels et services avancés ne présen- tent pas le même profil eu égard à la contrainte de proximité. Si la contrainte de proxi- mité physique avec le client industriel est prioritaire pour les services opérationnels, elle varie en fonction de différents paramètres pour les services avancés, notamment selon le contenu en savoir incorporé dans la relation ou selon les facteurs d’environnement.

2.2.1. Les services opérationnels et les services avancés aux entreprises face à la proximité physique

La nécessité d’une proximité physique avec le client apparaît très clairement pour la plu- part des services opérationnels traditionnels (maintenance, nettoyage, entretien des espaces

6 Le tableau des entrées intermédiaires produit par la comptabilité nationale pour l’économie française en 2009 montre que l’industrie (toutes branches confondues, hors énergie) n’utilise qu’environ 20 % de la valeur produite par les sociétés de services aux entreprises (calculs des auteures).

7 La littérature ne distingue pas à notre connaissance les clients des sociétés de services aux entreprises selon leur nature, tertiaire ou industrielle. Nous ne retiendrons pas dans les développements suivants les conclusions qui ne peuvent s’appliquer à des clients industriels.

(13)

verts, gestion des déchets…). En effet, cette catégorie de services sert d’abord un marché local voire régional. Les facteurs de proximité physique au client sont ici fondamentaux et plusieurs éléments permettent de le justifier : nécessité de réactivité, fréquence des interac- tions pour la réalisation de la prestation, déplacement du prestataire chez le client pour réali- ser la prestation, moindres coûts, partage des mêmes références locales, réduction du risque lié à l’achat du service par l’effet de réputation… Par ailleurs, certains auteurs soulignent que le développement de ces services opérationnels renvoie au processus bien connu d’ex- ternalisation (Rajan 1987) et se trouve donc pour partie lié à l’évolution organisationnelle de la base industrielle. De fait, ils se localisent assez naturellement à proximité des entreprises qui leur ont donné naissance et qui les utilisent, voire parfois les contrôlent.

Pour autant, certains services opérationnels non traditionnels, que Mouhoud et Jennequin (2010) désignent comme « services informationnels associés à la fonction sup- port » (tels que la maintenance informatique8 ou les centres d’appels), ne nécessitent pas de proximité physique immédiate avec le client et peuvent être réalisés à distance. Les auteurs affirment que les deux autres facteurs de localisation des activités de services (accès aux ressources et économies d’agglomération) ne jouent pas davantage et que ces services sont volatils, leur localisation étant influencée surtout par les coûts. Ces deux logiques de localisation des services opérationnels concourent à une large dispersion géo- graphique de ce genre de services (Zuliani 2004).

En revanche, la problématique de la localisation des services avancés s’avère nettement plus complexe et requiert une analyse multifactorielle. Nous nous focalisons maintenant sur l’intérêt pour les fournisseurs de ces services d’être à proximité de leurs clients indus- triels et pour les firmes clientes de pouvoir disposer de tels services localement. Pour le dire autrement, nous examinons les facteurs qui, dans la littérature, rendent nécessaire la proximité physique client/fournisseur de services avancés et les facteurs qui contribuent à assouplir cette contrainte. Notons tout d’abord que la littérature a connu une évolution relative à l’importance de la proximité aux clients dans la localisation des services avan- cés, en arguant que l’émergence et la diffusion des technologies de l’information et de la communication (NTIC) contribuent à distendre l’impératif de proximité physique pour les entreprises de services avancés (Illeris 1989, 1996, Hitchens et al. 1996, Antonelli 1999, Aguilera et Lethiais 2011). Pourtant l’impact des NTIC reste ambigu et des travaux plus récents ont tenté de montrer la nécessité d’une analyse plus fine distinguant les ser- vices avancés selon leur nature et leur contenu en savoir.

2.2.2. Contenu en savoir de la relation de service : vers une relativisation de la nécessité de proximité physique

Les services avancés jouent un rôle majeur dans la création, le transfert et la diffusion du savoir entre firmes (Antonelli 1999, Miles et al. 1995, Simmie et Strambach 2006).

À l’instar des services opérationnels, la proximité aux clients est l’un des facteurs expli- quant la localisation des services avancés compte tenu de la nature des savoirs mobilisés (Daniels 1993, Wood 1997, Bennett et al. 1999). Selon Mouhoud et al. (2010), les ser-

8 Il existe des débats relatifs au classement de la maintenance informatique en « services opérationnels » ou en « services avancés » (comme le fait la NES) dans la mesure où la maintenance informatique recouvre des services différenciés, plus ou moins intensifs en connaissances.

(14)

vices avancés ou services cognitifs et d’investissements immatériels sont des services très ancrés territorialement car non seulement ils mobilisent des ressources immatérielles spécifiques, mais ils s’appuient également sur l’obtention d’économie d’agglomération et sur un besoin de proximité client/prestataire fort en phase de co-production du service.

L’approche cognitive du contenu de la relation de service repose sur une reconnais- sance de la nature plus ou moins tacite ou codifiée du savoir créé. Elle constitue un élé- ment essentiel pour expliquer la nécessité d’une proximité physique entre les entreprises.

Muller et Doloreux (2009) distinguent une vision traditionnelle des services avancés comme transférant de manière unidirectionnelle de l’information spécialisée à leurs clients, d’une approche contemporaine de la co-production du savoir entre services avan- cés et entreprises clientes. La co-production de savoirs avec leurs clients est favorisée par la proximité physique (Garcia Velasco 2005). Cette co-production conduit de fait à poser la question de la co-localisation : les connaissances dont il s’agit sont certes codifiées pour partie mais elles restent pour l’essentiel tacites, notamment pour ce qui concerne leur processus d’appropriation. Comme le rappellent Maskell et al. (1998), Asheim (1999), Roberts et al. (2000), Foray (2007), le savoir codifié ne peut être transféré efficacement que combiné à du savoir tacite. Cet élément tacite de la connaissance co-produite rend donc nécessaire la proximité physique, la relation de face-à-face entre client et prestataire.

Cette approche cognitive de la relation de service entre en résonance avec une autre tradition de recherche : celle de l’analyse stratégique qui attire, quant à elle, l’attention sur le rôle joué par la stratégie de l’entreprise et son modèle économique. Trois postures stratégiques ont été identifiées (Hansen et al. 1999, Landry et al. 2008). Une stratégie d’échange de savoirs principalement codifiés (stratégie de codification ou de standardisa- tion), une stratégie d’échange de savoirs principalement tacites (stratégie de personnali- sation ou d’individualisation) et une stratégie complémentaire mixte. Les stratégies per- sonnalisées ou d’individualisation requièrent une forte proximité physique. À l’opposé, les stratégies de codification ou d’adaptation de savoirs codifiés tendent à desserrer la contrainte de co-localisation grâce à un processus de standardisation du service et de duplication de l’offre. Quant aux stratégies mixtes, elles sont dans une position intermé- diaire. Le choix de localisation pour ces entreprises et pour celles qui adoptent des stra- tégies de codification va être le résultat d’un arbitrage entre des facteurs qui concourent à éloigner l’entreprise de son client (présence d’autres clients distants, recherche d’exter- nalités de connaissances, accès à des fonctions métropolitaines supérieures, etc.) et des facteurs qui favorisent une proximité physique (fréquence des affaires, importance du client dans le portefeuille de l’entreprise, coûts et difficultés de transport, etc.).

La relativisation de la nécessité de la proximité physique dans la production de savoirs qu’opère l’approche stratégique est relayée par le courant évolutionniste de la création de connaissances et de l’innovation. Les auteurs de cette tradition montrent que le modèle

« tacite=local » versus « codifié=global » est trop simpliste et qu’on peut notamment échanger du savoir tacite entre partenaires distants (Bathelt et  al. 2004). Les espaces de la création de savoirs ne sont pas bornés par les espaces physiques : « (…) we define spaces of knowledge as organized spaces of varied length, shape, and duration, in which knowing, depending on circumstances can involve all manner of spatial mobilizations (…) » (Amin et Cohendet 2004: 12). Des dispositifs existent qui apparaissent comme des substituts efficaces à la proximité physique, tels que les routines établies par les com-

(15)

munautés de pratiques ou les « clusters temporaires » (Maskell et al. 2005) ou encore les réseaux « trans-locaux ». Ces dispositifs supportent la construction d’une proximité organisationnelle ou relationnelle qui peut s’avérer supérieure à la proximité physique pour la production, l’identification, l’appropriation et la circulation du savoir tacite (Allen 2000, Amin 2000, Amin et Cohendet 2004, Asheim et Gertler 2005, Maskell et al. 2005).

Enfin, une analyse plus fine du cycle de la production du service et l’introduction de la dimension temporelle de ce processus met en lumière une variation de la contrainte de proximité au client en fonction de la maturation de la production du service (Muller et Zenker 2001) ou encore selon le stade de développement des services (Koch et Stahlecker 2006). Par exemple, pour des activités de services intensives en connaissances, les phases amont du cycle de l’innovation, plus risquées, plus incertaines requièrent davantage de proximité physique que les phases aval, plus structurées. Ainsi, dans les activités de R&D, qui en sont l’archétype, les besoins de proximité physique ne seront pas aussi fortement marqués en phase de développement qu’en phase de recherche : « la proximité est un critère primordial pour le déploiement de la recherche et bien moindre pour le déve- loppement des produits. Il en résulte un ancrage sur le territoire plus important pour la recherche que pour le développement » (Mouhoud et al. 2010: 45).

2.2.3. Influence des variables propres au contexte et existence de formes alternatives de proximité

La nature du savoir incorporé dans la relation de service influe sur la contrainte de proximité. Cependant d’autres facteurs, périphériques relativement au contenu de la prestation de service et que l’on peut considérer comme des facteurs d’environnement, impactent également la contrainte de proximité physique client/prestataire pour la fourni- ture de services aux entreprises. Les études portant sur ces autres facteurs ne mettent plus en avant le choix de localisation par le prestataire de services, mais adoptent une approche centrée sur le client qui sélectionne le prestataire, proche ou distant. L’imperfection du marché, le réseau de relations sociales, le coût (Bryson 1997, Beyers et Lindahl 1996, Bryson et  al. 2004), mais également la « proximité sociale » des partenaires (apparte- nance à un même réseau de relations) ou même la « fibre patriotique » (Rusten et  al.

2005) peuvent être de puissants vecteurs de proximité physique. En particulier, plusieurs études montrent que les PME recourent principalement, pour ces différentes raisons, à des fournisseurs de services avancés locaux (Monnoyer et Philippe 1985, Bryson et Daniels 1998, Rusten 2000). À l’inverse, pour échapper au contexte local, certaines entreprises choisiront volontairement des formes distantes de savoir ou d’expertise (« dislocated knowledge ») comme le montre l’étude de Rusten et al. (2005) portant sur l’importance de la géographie dans les relations entre clients et entreprises de consultance en Norvège.

C’est le cas par exemple d’une firme qui souhaite bénéficier d’une expertise extérieure à la communauté locale, censée ouvrir de nouveaux horizons, ou pour accompagner des décisions difficiles (plans sociaux). Notons que même quand le besoin de proximité phy- sique est avéré, celui-ci n’implique pas nécessairement l’implantation d’une unité près du client. Il existe des formes alternatives à la co-localisation ou temporaires de proximité, telles que le détachement d’un salarié d’une firme de services aux entreprises chez son client (Hyypiä et Kautonen 2005), phénomène particulièrement fréquent dans les sociétés de services en ingénierie informatique.

(16)

Par ailleurs, la littérature en termes de dynamiques de proximités offre un éclairage essentiel sur le concept de proximité pour dépasser l’opposition proximité physique/

distance physique, appréhendée à travers une mesure euclidienne. Ce courant propose une analyse renouvelée de la proximité physique ou géographique et montre qu’elle renvoie à la distance itinéraire, fonctionnellement exprimée en coût et/ou temps (Rallet 2000). Loin de se réduire à une simple métrique, la proximité physique/géographique renvoie à la notion d’espace géonomique de Perroux. En d’autres termes, la référence aux contraintes naturelles et physiques, clairement inscrites dans sa définition, n’épuise pas son contenu, qui comprend également des aspects de construit social tels que les infrastructures de transport qui modifient les temps d’accès ou encore les moyens finan- ciers permettant l’utilisation de certaines technologies de communication. Ainsi, deux entreprises qui, compte tenu de l’état des moyens de transport et des infrastructures, peuvent se rencontrer physiquement et échanger à un coût faible et/ou rapidement, seront considérées comme proches.

Au-delà de cette densification du concept de proximité physique/géographique, l’éco- nomie de la proximité soutient que les interactions entre acteurs sont davantage portées par une proximité organisationnelle et/ou institutionnelle que par la proximité géogra- phique. Fondée sur la logique de l’appartenance (c’est-à-dire sur des règles et des codes de conduite partagés) et/ou sur la logique de la similarité (c’est-à-dire sur des systèmes de représentations partagées), la proximité organisationnelle et/ou institutionnelle est, d’après Torre et Rallet (2005), le seul moyen de faire interagir des partenaires quelle que soit leur localisation. La proximité physique/géographique peut, dans cette configura- tion, renforcer la proximité organisationnelle/institutionnelle (Hyypiä et Kautonen 2005) mais la proximité physique/géographique, seule, peut s’avérer inopérante. En cela, cette approche est cohérente avec les affirmations du courant évolutionniste de l’innovation développées ci-dessus. Reste à examiner l’origine de cette proximité organisationnelle/

institutionnelle. Pour des entreprises qui opèrent dans des secteurs différents (industrie, services aux entreprises), qui n’appartiennent pas à la même organisation ou au même réseau, elle n’est pas donnée a priori, mais à construire. Dans ce cas, des interactions fréquentes, fondées au moins provisoirement sur une proximité physique, peuvent être requises. La proximité physique et les autres formes de proximité apparaissent donc plus complémentaires qu’alternatives dans la création de connaissances au sein de la relation de service. Cette complémentarité peut se concevoir pour une même relation client/pres- tataire de services dans le temps (proximité physique qui sous-tend la génération d’une proximité organisationnelle et/ou institutionnelle ultérieure susceptible de distendre au moins partiellement l’impératif de proximité physique) ; elle peut s’entendre également dans l’espace. Pour le dire autrement, le recours à un prestataire de services proche n’est pas exclusif de relations avec d’autres prestataires de services distants. La littérature por- tant sur la création de connaissances au sein des clusters montre même que les interac- tions locales et globales sont complémentaires : le système local de création de connais- sances se nourrit et est une condition de l’absorption de connaissances externes, élément de sa survie (Bell et Albu 1999, Bathelt et al. 2004, Giuliani 2005, Glücker 2007)9.

9 Bathelt et al. (2004) développent la nécessité de combiner un milieu local dense (local buzz) et des sources distantes de savoirs (global pipelines). Glücker (2007) insiste sur la nécessité d’ouvrir les clusters (global brid-

(17)

En résumé, cette revue de la littérature nous permet d’éclairer la territorialité du lien entre prestataires de services aux entreprises et clients (notamment industriels) de ces services. Loin d’aboutir à des conclusions tranchées, elle montre que la question de la proximité physique dans les relations clients/prestataires de services aux entreprises s’avère complexe. La proximité physique est essentielle pour la plupart des services aux entreprises opérationnels. Pour les services avancés, la conclusion est plus ambiguë : la contrainte de proximité physique ne dépend pas de manière univoque du contenu en savoir incorporé dans la relation et des facteurs d’environnement (imperfections du mar- ché, coût, facteurs relationnels et sociaux), qui peuvent jouer, selon les circonstances, de manière différenciée. La proximité physique est elle-même plus subtile à appréhender qu’il n’y paraît : elle n’est pas donnée par les contraintes topographiques mais construite, donc évolutive. Enfin, et c’est là la conclusion la plus saillante de ce travail, envisager la proximité physique entre prestataires de services aux entreprises et clients utilisateurs de ces services comme alternative à la relation distante est une manière erronée de poser le problème. Que l’on se place du point de vue des entreprises utilisatrices ou des terri- toires — notamment industriels qui cherchent à assurer leur survie — maintenir/attirer des prestataires de services aux entreprises localement est une condition pour capter des ressources distantes/externes au territoire. Dans cette perspective, l’existence de terri- toires tertiaires ne saurait être considérée comme une menace par les territoires industriels (en tant que territoires plus dynamiques, captant ressources et activités et les condamnant à disparaître à moyen terme), mais comme une ressource potentielle ; l’enjeu serait alors de développer la capacité d’absorber les connaissances issues de ces territoires tertiaires pour asseoir les territoires industriels. Dans ce cas, il s’agit de repérer et d’attirer ou de renforcer les acteurs susceptibles de construire des ponts avec les autres territoires pour pérenniser les territoires industriels : comme le dit Malecki (2000: 431), « some places are able to create, attract, and keep economic activity (…) because people in those places

“make connections” with other places ». Ce rôle pourrait vraisemblablement être joué par des entreprises de services aux entreprises, plus mobiles que les entreprises indus- trielles et capables de développer des relations avec de multiples territoires sous des formes pérennes ou transitoires de localisation.

3 Développement des services avancés aux entreprises dans les territoires industriels : enseignements de l’analyse de la filière automobile en Franche-Comté

Les territoires industriels sont des territoires particuliers dont le caractère industriel a souvent été construit historiquement par les acteurs, en prenant, le cas échéant, appui sur des spécificités naturelles (présence d’une matière première, d’une voie de communica- tion fluviale…). Nous examinons ici de façon plus précise le cas de la Franche-Comté qui compte parmi les territoires les plus industrialisés de France, mais également parmi les territoires métropolitains en perte de vitesse au regard de l’évolution du PIB régional depuis le début des années 2000 : la région souffre de sa spécialisation sectorielle dans l’industrie automobile et les biens intermédiaires, secteurs marqués par la stagnation ou le recul de la valeur ajoutée depuis 2004 (INSEE-FC 2010b). Dans cette région, l’acti-

ging, local bridging, local brokering, mobile brokering).

(18)

vité industrielle alimente 26,9 % des emplois hors intérim (2005) contre 16,4 % pour la France métropolitaine. L’industrie automobile, très concentrée autour de la zone de Sochaux – Montbéliard représente 25 % de l’emploi industriel de la région (hors intérim).

Par ailleurs, contrairement aux territoires limitrophes tels que l’Alsace, la Bourgogne ou Rhône-Alpes, la Franche-Comté est longtemps restée un territoire enclavé dans lequel les contraintes des proximités physiques s'expriment aujourd'hui de façon spécifique.

La structure industrielle de la Franche-Comté ne semble pas prédisposer cette région au développement des services aux entreprises. C’est ce que mettent en avant Léo et Philippe (2006) qui constatent une sous représentation des services avancés de conseil, études et de recherche sur la période 1982-1999. Selon ces auteurs, l’amorce récente d’une conver- sion de la région vers les services aux entreprises semble surtout résulter de l’exploitation d’opportunités locales de marché offertes par un secteur industriel important, car la capitale régionale, Besançon, peine à enclencher et à porter le processus de développement tertiaire.

Cette analyse, qui s’inspire du modèle de la base économique, les conduit à préconiser le renforcement de la capitale régionale et à jouer sur l’effet métropolitain afin de favoriser le développement des services aux entreprises, notamment les plus intensifs en connaissances.

Malgré un processus de rattrapage sur la période 1989-2005 (+ 73,8 %, INSEE-FC 2009), la Franche-Comté reste aujourd’hui encore une région sous-dotée en entreprises de services aux entreprises. Ce faisant, il nous semble que cette analyse purement sectorielle néglige la capacité du secteur industriel à faire évoluer ses structures productives et à impulser une dynamique nouvelle de services aux entreprises au sein de la filière.

Afin de cerner ce phénomène en Franche-Comté, nous proposons d’étudier la loca- lisation des entreprises de services avancés œuvrant comme prestataires des entreprises de l’industrie automobile. Nous nous focalisons ici sur les services intensifs en connais- sances, car comme le montre la littérature ci-dessus, la logique de localisation des ser- vices opérationnels est mieux connue. La majorité des entreprises franc-comtoises de la filière automobile a été recensée par le Pôle de compétitivité Véhicule du Futur (Hamza et al. 2011) et rendue accessible dans une base de données réactualisée périodiquement.

Rappelons que la vocation des pôles de compétitivité, instaurés par la circulaire gouver- nementale de novembre 2004, est d’organiser un réseau territorialisé d’acteurs hétéro- gènes travaillant sur des projets communs d’innovation, afin de soutenir le développement de la compétitivité de l’économie française. Les services aux entreprises recensés dans cette base de données sont ceux développés par des entreprises présentant un potentiel de contribution aux projets de R&D et d’innovation du pôle : il s’agit donc de sociétés de services avancés ou services intensifs en connaissances.

Selon ces données, la filière automobile et transports de Franche-Comté regroupe 498 entreprises industrielles et 111 sociétés de services aux entreprises (Tableau 3). À titre de comparaison, en Alsace, autre région automobile membre du pôle VdF10, la filière automo- bile regroupe 278 entreprises et la proportion d’entreprises de services avancés est légère- ment supérieure puisqu’elle s’établit à 22 % des entreprises (contre 18 % pour la Franche- Comté). On retrouve là une tendance plus globale, la région Alsace étant une région plus

10 Le Pôle de compétitivité Véhicule du Futur (VdF) se déploie sur deux régions, Alsace et Franche-Comté.

La vocation de cet article n’étant pas comparative mais analytique, nous ciblons notre analyse sur les entreprises présentes uniquement sur le territoire franc-comtois.

(19)

servicielle que la Franche-Comté, puisqu’en 2007, les services aux entreprises alimentent 13,42 % de la valeur ajoutée régionale, contre 11,44 % en Franche-Comté (Tableau 1).

Les entreprises franc-comtoises de cette filière sont très majoritairement, à 95 %, des petites et moyennes entreprises (PE et EM) qui s’organisent autour des grands groupes industriels, constructeurs et équipementiers (Tableau 4). Conformément aux données nationales, les établissements de services avancés aux entreprises se com- posent d’une proportion élevée (62 % des 111 entreprises de services avancés) de petites entreprises (moins de 20 salariés) et une proportion moyenne (36 %) d’éta- blissements de taille moyenne (EM — déclarant moins de 249 salariés). Les éta- blissements de taille intermédiaire (ETI) sont très rares et les grandes entreprises (GE) inexistantes dans ce secteur d’activité. Concernant l’activité industrielle, la dis- tribution des établissements est différente puisque l’essentiel des entreprises est de taille moyenne (62 %) ou petite (32 %). Les établissements de taille intermédiaire y sont davantage présents (4 %) et les grandes entreprises représentent près de 2 % des entreprises industrielles de la filière.

Tableau 3 : Répartition du nombre d’entreprises de la filière automobile par type et département franc-comtois

Doubs (25) Jura (39) Haute-Saône (70) Territoire

de Belfort (90) Total Entreprises

industrielles 267 120 56 55 498

54 % 24 % 11 % 11 100 %

Entreprises de services avancés aux entreprises

71 11 6 23 111

64 % 10 % 5 % 21 % 100 %

Total 338 131 62 78 609

55,5 % 21,5 % 10 % 13 % 100 %

Source : base pôle VdF2010-calcul des auteures

Les sociétés de services avancés aux entreprises de la filière automobile relèvent avant tout du domaine de l’ingénierie et des études techniques (Tableau 5). En effet, 75 % des établissements de services avancés sont des services d’ingénierie et d’études techniques. Ils regroupaient en 2005, 3 073 salariés, soit 10,7 % de l’effectif salarié franc-comtois, alors que cette catégorie représente 6,7 % de l’effectif salarié au niveau national11. La R&D privée est l’activité principale de 2 % des sociétés de services avancés et comptabilisait 302 salariés en 2005. Les autres activités, logiciels, conseils informatiques (782 salariés en 2005) d’une part, activités juridiques, comp- tables (2255 salariés en 2005) d’autre part, représentent chacune à peine 10 % des entreprises des services avancés localisées en région. La forte présence d’entreprises prestataires d’études techniques et d’ingénierie réalisant essentiellement des activi- tés de conception, de bureau d’études et la faible présence d’entreprises de R&D

11 Chiffres INSEE-CLAP 2005.

Références

Documents relatifs

En résumé sur cette première phase d’émergence de l’innovation sociale, au travers des mots qui lui sont associés, le territoire apparaît comme très intériorisé par

Dans un tel contexte, l’AOC apparaît comme un socle institutionnel commun a minima pour l’ensemble des producteurs du vignoble, qui ne suffit toutefois pas à assurer une

Mais encore aujourd’hui, je considère tout de même que travailler sur l’inégalité et la pauvreté en termes de revenu a un sens pourvu que l’on précise bien le contexte dans

Après  le  discours  du  vice-président  de  la  Région  Rhône-Alpes  en  charge  de  l’aménagement des territoires et des grands projets  et  du 

La complexification des différenciations sociospatiales dans les métropoles contemporaines, notamment sous les effets de la globalisation sur les villes, a suscité des

Le dessin de Morin (Fig. 3) montre le trafic automobile colossal induit par le sprawl, et la relation de cause à effet entre les deux phénomènes. Cette illustration donne non

Dans les espaces scolaires dévalorisés des quartiers nord, les établissements privés sont souvent des refuges pour des familles de classes moyennes et favorisées qui résident dans

• Des mobilités résidentielles potentiellement neutres ou circulaires dans le sens où elles sont internes à un même statut socio-résidentiel, s’agissant d’un changement