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Géographie Économie Société : Article pp.369-391 du Vol.14 n°4 (2012)

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Géographie, économie, Société 14 (2012) 369-391

doi:10.3166/ges.14.369-391 © 2012 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

géographie économie société géographie économie société

Les plages du littoral languedocien face au risque de submersion : définir des politiques de gestion

tenant compte de la perception des usagers Languedoc beaches in the face of coastal flooding

risk: defining management policies whilst taking into consideration users’ perceptions

Hélène Rey-Valette

a*

, Bénédicte Rulleau

b

,

Catherine Meur-Férec

c

, Hervé Flanquart

d

, Anne-Peggy Hellequin

d

et Emmanuelle Sourisseau

a

a LAMETA, Université Montpellier 1, Faculté d’Économie. Av R. Dugrand CS 79606.

34960 Montpellier Cedex 2

b REEDS, Université de Versailles Saint Quentin en Yvelines, Rambouillet

c Géomer – LETG, Institut universitaire Européen de la Mer, Université de Bretagne Occidentale, Plouzané

d TVES, Université Lille Nord de France, Lille et Dunkerque

Résumé

Cet article repose sur trois enquêtes relatives aux plages de Palavas-les-Flots et Mauguio-Carnon (Hérault). Il s’agit d’analyser et de comparer les perceptions du risque de submersion marine, en lien avec la montée attendue du niveau de la mer, et les préférences relatives aux méthodes de ges- tion de ce risque. En plus des acteurs gestionnaires, professionnels ou associatifs, concernés par la gestion du littoral, quatre sous-populations d’usagers ont été enquêtées : les résidents principaux,

*Adresse email : helene.rey-valette@univ-montp1.fr

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les résidents secondaires, les touristes, les excursionnistes, pour un total de 881 questionnaires.

L’objectif est d’identifier dans quelle mesure ces sous-populations constituent des groupes dis- tincts qui justifieraient des politiques et des formes d’incitations spécifiques. Après avoir rappelé les caractéristiques des enquêtes, l’article passe en revue de façon systématique les liaisons en fonction des types d’usagers avant de comparer leurs perceptions avec celles des acteurs gestionnaires et associatifs concernés par les risques de submersion côtière, Enfin l’article propose quelques axes de recommandations pour les politiques de gestion des risques de submersion marine, en tenant compte des résultats obtenus.

© 2012 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

Summary

This paper is based on three surveys concerning the beaches of Palavas les Flots and Mauguio-Carnon in the Hérault department. It compares the perceptions of marine submersion risk and the preferences for risk management methods of several types of beach users and of managers, and industry and asso- ciation representatives involved in coastal management. Four categories of users were interviewed:

full-time and secondary residents, tourists and day trippers; 881 questionnaires were completed. The objective was to identify to what extent these sub-populations comprised distinct groups which would justify specific policies and incentives. The paper begins by outlining the characteristics of the sur- veys. It then presents a systematic review of the correlations by user categories before comparing users’ perceptions with those of managers and association representatives concerned with coastal submersion risk, especially in relation to the expected sea level rise. Finally the paper presents some axes on marine submersion risk management and decision making, taking into account the results.

© 2012 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

Mots clés : submersion marine, changement climatique, perceptions sociales, protection des plages, recul stratégique

Keywords: marine submersion risk, climatic change, social perceptions, beach protection, strategic retreat

Introduction

Le changement climatique, et la montée du niveau de la mer qui en découlerait, accroissent la vulnérabilité des plages, dont beaucoup sont déjà fortement contraintes par les phénomènes d’érosion. Avec 130 kilomètres de plages sableuses, le golfe du Lion, une des baies ouvertes les plus importantes d’Europe, est particulièrement exposé au risque de submersion. Les plages ont une faible capacité d’adaptation de par leur morphologie et leur dynamique particulière (très faibles marnages), mais aussi parce qu’elles sont sou- vent figées par des digues et des enrochements visant à protéger les enjeux touristiques et récréatifs. Elles constituent donc un terrain d’étude privilégié des perceptions du risque de montée du niveau marin et des politiques d’intervention et de prévention. La régionali- sation des hypothèses du Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) au cas du Languedoc-Roussillon permet d’estimer que l’amplitude de cette montée du niveau marin se situerait entre 35 cm et 1 mètre à l’horizon 2100. Les hauteurs d’eau de

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tempête augmenteraient en conséquence d’autant, rendant plus fréquents des évènements de probabilité actuellement centennale. Et ce, même si la fréquence et l’intensité des tempêtes ne changeaient pas (Lecacheux et al., 2011). Cette aggravation attendue des aléas liée au changement climatique devrait être progressive, et véritablement sensible uniquement après 2050 (Lecacheux et al., 2011). L’importance de ce risque conduit à revoir les politiques de gestion du trait de côte. Celle qui apparaît la plus logique et effi- cace est certainement une adaptation raisonnée, qui serait le plus possible fondée sur des logiques de recul avec restauration des écosystèmes. Cela permettrait de bénéficier de l’effet « tampon » fourni par les plages (logique climate proofing). En effet la réhabili- tation de zones humides et de dunes restaurerait les processus naturels et permettrait un recul progressif des plages plutôt que leur disparition (MEDDEM, 2010 ; Commission Européenne, 2004 ; Paskoff, 2005).

Alors que ces espaces ont été pendant longtemps uniquement vus comme un facteur d’attractivité récréative et touristique, l’importance du service de régulation et de rési- lience sédimentaire fourni par les plages dans la gestion de l’érosion est à présent reconnue (Paskoff, 2005 ; Pinot, 1998). Parallèlement, la philosophie des méthodes de protection a évolué. Dans un premier temps, des années soixante-dix aux années et quatre-vingt-dix, il s’agissait uniquement d’aménagements « en dur » de type épis ou digues. Puis, compte tenu de leurs effets pervers (transfert latéral de l’érosion, amaigrissement de la plage), des politiques de rechargement en sable ont été mises en œuvre, avec des durées d’amortisse- ment très variables. Aujourd’hui, l’État et les scientifiques préconisent plutôt de réduire la vulnérabilité en limitant l’exposition des enjeux à travers des pratiques de recul (Cousin, 2011). Néanmoins, il est nécessaire d’étudier l’acceptabilité sociale de telles mesures, voire leur faisabilité économique, ce qui suppose une connaissance fine des perceptions, attentes, préférences et comportements des usagers et des résidents locaux (usagers ou non usagers des plages1).

Afin d’évaluer la vulnérabilité du littoral du Languedoc-Roussillon à la submersion marine dans un contexte de changement climatique, des enquêtes de perception de ce risque de submersion ont été réalisées auprès des usagers des plages de Palavas-les-Flots, Pérols et Mauguio-Carnon (Hérault), ainsi qu’auprès d’acteurs gestionnaires et associatifs. L’intérêt du site choisi tient à la fragilité du lido sableux, très exposé à l’érosion ainsi qu’à la sub- mersion, et à la présence d’enjeux urbains et touristiques importants (d’Ercole et Metzger, 2011). Ces plages sont en effet très fréquentées du fait de leur proximité avec la commu- nauté d’agglomération de Montpellier (près de 400 000 habitants). L’objectif de cet article est de comparer les résultats des enquêtes réalisées auprès des différentes sous-populations d’usagers : résidents principaux, résidents secondaires, excursionnistes, touristes et de les confronter aux positions des acteurs parties prenantes. Ont-ils des points communs ou au contraire constituent-t-ils des groupes distincts, dont l’existence justifierait alors des poli- tiques et des incitations spécifiques ?2 Cette recherche de récurrences à partir de traitements de données multivariées doit permettre de construire des idéaux-types et de caractériser les variables déterminantes des comportements et des avis ou positions.

1 Pour simplifier le propos, ces sous-populations seront ci-après regroupées sous l’appellation « usagers ».

2 Sachant que nous avons exclu des segments particuliers comme le naturisme ou les rencontres sexuelles, importants pour quelques plages spécifiques (Jaurand et Leroy, 2008).

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Après avoir rappelé dans une première partie l’intérêt de l’étude des perceptions pour l’aménagement des territoires et la gestion des risques, nous présentons dans la deuxième partie les objectifs et protocoles méthodologiques des enquêtes. La troisième partie étudie de façon systématique l’impact de l’appartenance à une sous-population d’usagers sur les réponses (matrice des liaisons entre les variables). La quatrième partie compare les percep- tions des usagers avec celles des acteurs gestionnaires et associatifs concernés par les risques de submersion côtière. Nous proposons enfin dans une cinquième partie une discussion de ces résultats en vue d’éclairer les politiques d’adaptation à ces risques de submersion.

1. Utilité de l’étude des perceptions pour les politiques publiques de gestion des risques et d’adaptation

De multiples facteurs ont renouvelé ces dernières décennies les problématiques et les outils de l’ingénierie territoriale. En particulier la prise en compte des contraintes liées aux risques, puis au changement climatique, a introduit des Plans de Prévention des Risques (PPR), des plans climats territoriaux et des études de la vulnérabilité socio- économique des territoires au changement climatique (CGDD, 2011). Le Languedoc- Roussillon a élaboré un PPR spécifique à la submersion marine dès 2008 (DRE-LR, 2008). En effet les questions d’érosion et de submersion font l’objet d’une attention particulière dans cette région depuis plus de dix ans, en relation notamment avec la mission interministérielle d’aménagement du littoral (Mission Littoral) mise en place en 2000 (Rey-Valette et al., 2010). Ce PPR submersion marine, qui relève des Plans de Prévention des Risques Naturels (PPRN) vise à règlementer l’extension urbaine en tenant compte des risques de submersion.

Ces politiques de gestion des risques et d’adaptation au changement climatique introduisent une gestion concertée aux échelles locales nécessitant des besoins d’infor- mation quant aux attentes et représentations des populations. La présence de risques naturels sur un territoire conduit à s’intéresser à l’existence d’une proximité environ- nementale vis-à-vis du processus qui génère l’aléa (Longuépée, 2003  ; Beaurain et Longuépée, 2006). S’agissant de risques et/ou d’externalités négatives, la proximité est subie (Beaurain et Longuépée, 2006), et Tiberghein (2009) va même jusqu'à évoquer la notion de « maux communs » qui relève du registre des « désaménités ». Les effets organisationnels de ces contraintes sont proches mais inverses de la problématique des biens communs. Cette notion de proximité environnementale marque l’extension des approches du courant de la proximité (Torre et Zuindeau, 2006 ; 2009) à la protection des actifs environnementaux et aux risques naturels. Elle permet de bénéficier d’un cadre d’analyse opératoire des interactions entre risques naturels et territoire du point de vue des dynamiques collectives d’aménagement, analysées en termes de proximité organisationnelle et institutionnelle. Comme le soulignent Torre et Zuindeau (2009) « la gestion des problèmes environnementaux fait fréquemment appel à ce qui constitue les ingrédients d’une proximité organisée ». En effet, la proximité géographique subie par les populations vis-à-vis du risque, s’accompagne d’une logique d’appartenance au ter- ritoire. Cette composante de la proximité organisée facilite la mise en œuvre concertée de dispositifs de régulation. La proximité environnementale créée par la vulnérabilité à des risques naturels nécessite et favorise la mise en place d’un dispositif de coordina-

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tion entre acteurs institutionnels pour gérer et réduire cette vulnérabilité. Les interac- tions entre risques et territoire sont alors multiples. Ce dernier ne doit pas être consi- déré comme un simple support du premier (November, 2002). Au contraire il interagit avec la vulnérabilité, illustrant le caractère socialement construit des risques (Lupton, 1999) qui résulte des perceptions, individuelles et collectives, ainsi que de l’histoire et des logiques institutionnelles et territoriales. Il est alors important de mettre en œuvre des apprentissages spécifiques pour éviter les logiques traditionnellement défensives, souvent sources d’irréversibilité (Tiberghein, 2009). Ces dimensions sociales et territo- riales obligent à étudier les représentations que les populations ont des risques de façon à adapter les apprentissages collectifs, moduler les politiques territoriales et au final pouvoir gérer la vulnérabilité des territoires et des populations. Ainsi, outre les facteurs traditionnels d'exposition aux risques, la grille d’évaluation de la vulnérabilité côtière proposée par Meur-Férec et al. (2006 ; 2008) prend en compte les modalités de gestion des risques en fonction notamment des types de politiques publiques de prévention et de la perception du risque par les sociétés exposées. Ces dernières jouent un rôle déter- minant sur les comportements tant individuels que collectifs.

Soulignons que la seconde propriété de la proximité organisée, à savoir la logique de similitude qui suppose une communauté de valeurs propice à une représentation collective partagée, n’est pas systématique, en particulier à l’échelle des territoires littoraux. En effet, outre la diversité des sous-populations d’usagers, la population résidente du littoral et en particulier dans l’Hérault et à proximité de Montpellier, est constituée d’une part impor- tante de personnes issues d’autres régions, notamment en ce qui concerne les retraités.

L’existence de cette logique de similitude doit donc être étudiée en analysant les repré- sentations et renforcée par des actions de sensibilisation. L’analyse des représentations des risques sera abordée ici à travers l’exemple des risques de submersion marine liés au chan- gement climatique et leurs effets sur les plages et les territoires littoraux.

2. Objectifs, méthodologie et type d’information collectée 2.1. Objectifs et articulation des différentes enquêtes

L’étude des perceptions des usagers du littoral languedocien prend ici principa- lement appui sur le paradigme culturaliste, essentiellement développé par l’anthro- pologue Mary Douglas (1992 ; Douglas et Wildavski, 1984), et que Lupton (1999) qualifie de « cultural/symbolic perspectives ». L’idée essentielle de cette approche du risque est que les individus sont influencés par le cadre mental propre à leur milieu culturel et social et à leurs conditions de vie. Ainsi, pour ce qui est du risque de submersion, de ses explications et des solutions envisagées, peut-on supposer que les visions différeront selon que l’on réside en permanence sur la côte ou qu’on n’y est que de passage, que l’on est jeune ou au contraire plus âgé, que l’on ait suivi des études plus ou moins longues, etc.

Cette approche de la perception des risques nous a conduits à mener trois enquêtes complémentaires auprès de l’ensemble des personnes potentiellement affectées par la disparition ou le rétrécissement des plages, à partir d’un questionnaire construit conjoin- tement par des géographes, sociologues et économistes. Les enquêtes ont concerné :

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1. Les habitants principaux et secondaires3 de Palavas-les-Flots, Pérols et Mauguio- Carnon qui bénéficient d’un éventail élargi de services rendus par les plages, qu’ils soient récréatifs, esthétiques (vue sur mer) et de régulation contre les tempêtes (enquête notée E1) ;

2. Les touristes et excursionnistes4 fréquentant les plages qui sont principalement concernés par la fonction récréative5 (enquête notée E2) ;

3. Des acteurs publics et privés impliqués dans la gestion du littoral (enquête notée E3).

Les enquêtes auprès des résidents (E1) ont été réalisées sur une zone correspondant à trois communes fortement urbanisées et représentatives à la fois des stations balnéaires traditionnelles (Palavas-les-Flots), de stations plus récentes construites dans les années 1970 (Carnon-Plage) et des communes résidentielles du littoral (Pérols). Les enquêtes auprès des touristes et excursionnistes ont été réalisées directement sur les plages à proxi- mité de ces communes c’est-à-dire sur une portion du littoral de 12,2 kilomètres composé de plages très fréquentées du fait de leur proximité de Montpellier (Fig. 1).

Ces enquêtes ont permis d’appréhender les usages des plages, les perceptions du risque, les méthodes de protection des plages souhaitées et les logiques de protection des enjeux en fonction de différents biens exposés (construction individuelle, équipements collectifs, patrimoine naturel, patrimoine culturel et infrastructures touristiques), le consentement à payer pour lutter contre l’érosion liée à la montée du niveau de la mer6 et des informa- tions relatives aux caractéristiques sociales des enquêtés. Tandis que pour les touristes et les excursionnistes quelques questions complémentaires ont concerné l’origine géogra- phique, pour les résidents, qu’ils soient permanents ou secondaires, des informations sur leur expérience du risque, leur attachement au lieu, leur capacité de mobilisation ont été collectées. Au total, ces enquêtes E1 et E2 ont concerné 881 personnes (tableau 1).

L’enquête E3, essentiellement qualitative, a été menée à partir d’entretiens semi- direc- tifs qui comprenaient aussi sept questions fermées communes avec E1 et E2 (perception du risque, méthodes de protection préférées des plages et logique de protection selon les enjeux).

L’implication de l’institution par rapport au risque et au changement climatique, les modalités d’anticipation et les référentiels de gestion, ainsi que la hiérarchisation des risques côtiers par rapport à l’ensemble des effets du changement climatique constituaient des questions spéci- fiques à ces entretiens. Cette enquête E3 a concerné 36 acteurs, principalement des gestion- naires et des chercheurs (cf. tableau 9).

3 La résidence principale est le « logement occupé de façon habituelle » par le ménage, alors que la résidence secondaire est « utilisé[e] pour les week-ends, les loisirs ou les vacances » (définitions de l’INSEE).

4 Les excursionnistes sont les « visiteurs de la journée », au contraire des touristes qui « passent au moins une nuit dans un établissement d’hébergement collectif ou privé du lieu visité » (définitions de la décision de la Commission européenne n° C1998-3950).

5 Les touristes qui choisissent un logement avec vue sur mer peuvent aussi être concernés par une fonction esthétique liée au paysage. Cependant les résultats de l’enquête montrent que seuls 2,9 % de l’échantillon ont un hébergement avec vue sur mer et 12,5 % avec vue sur la lagune. Au contraire, la vue sur la mer constitue un atout recherché par la population résidente en particulier les résidents secondaires.

6 La présentation du scénario avant le choix des consentements à payer était la suivante : « Les modèles des scien- tifiques du Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (2007) évaluent que, d’ici à vingt ans, la montée du niveau de la mer pourrait être de sept centimètres en Languedoc-Roussillon. Cela entrainerait une accélération de l’érosion des côtes, donc une diminution de la taille des plages voire la disparition de certaines d’entre-elles ».

Le niveau de sept centimètres avait été évalué antérieurement par la modélisation physique (Lecacheux et al., 2011).

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MAUGUIO PEROLS PALAVAS-LES-FLOTS

FRANCE Océan Atlantique

Manche Mer Méditerranée 01 0002 000500 tres

limite de commune bâtizone enquêe (ilôts INSEE) limite des 2 km depuis la côte route trait de côte

chemin étangs

Etang de l'Or Etang de Pérols Etang du Grec

Etang de Méjean Etang de l'Arnel Etang du Prévost

Fig. 1 : Présentation de la zone d’enquête

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Tableau 1 : Principales caractéristiques des enquêtes réalisées

Enquête 1 (E1) Enquête 2 (E2) Enquête 3 (E3)

Caractéristiques Résidents

permanents Résidents

secondaires Touristes Excursionnistes Acteurs gestionnaires

et associatifs

Méthode Par questionnaire Par entretiens

Effectifs 318 163 301 99 36

Lieu Au domicile du répondant Sur les plages Sur le lieu de travail

Durée 30 à 45 mn 20 mn 1 h 30 mn

Période Avril et Juillet 2009 Juillet et Août 2009 Année 2010

Mode

d’échantillonnage

Méthode des quotas (genre et proportion de

résidents principaux et secondaires) à l’échelle des îlots INSEE sur une bande de 2 km du trait de côte

Méthode des quotas par rapport à la taille des plages et à une proportion de référence1

touristes-excursionnistes

Sélection raisonnée au sein

des institutions concernées par les risques de

submersion

Type de

questionnaire Fermé et semi ouvert

(158 questions) Fermé et semi ouvert (94 questions)

Principalement semi directif (30 questions)

et fermé (15 questions)

Catégories de questions communes

Perceptions du risque, méthodes de protection préférées et logiques de protection du littoral en fonction des catégories d’enjeux (construction individuelle, équipements

collectifs, patrimoine naturel, patrimoine culturel et infrastructures touristiques) Usages des plages, Consentement à payer pour lutter contre

l’érosion ; caractéristiques sociales des enquêtés Hiérarchisation des effets du changement climatique pour la région Conséquences de la submersion

pour l’économie et l’attractivité

de la région, Connaissance et prise en compte du risque de submersion dans

les institutions, Conséquences, capacité et contrainte d’anticipation Catégories

de questions spécifiques

Perception du risque de submersion par rapport aux

autres risques, Expérience du risque, attachement au lieu, capacité de mobilisation

Consentement à payer pour des aménagements visant à

protéger les habitations

Origine géographique, plages de substitution (distance et durée de transport) en cas de réduction de la taille ou disparition des plages à

proximité, Perception des nouveaux attributs des pages si recul des

constructions en 1re ligne Uniquement pour les touristes : Type et coût de

l’hébergement, Durée de séjour, nombre d’année de

vacances dans la région,

1 Cette proportion a été estimée à partir de comptages précédents réalisés par le CETE Méditerranée à partir de l’immatriculation des voitures garées à proximité des principales plages du Languedoc-Roussillon (Chauvetière, 2001) et par les données de la mission littoral (Rulleau et al., 2011).

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2.2. Constitution d’une base de données des questions communes pour l’approche comparative

Les trois enquêtes ont donné lieu, dans un premier temps, à la constitution de trois bases de données (saisies sous SPHINX) rassemblant l’ensemble des modalités de façon à produire des analyses détaillées. Une nouvelle base réunissant les variables communes aux trois enquêtes a ensuite été construite. Elle rassemble la trentaine de questions com- munes aux enquêtes E1 et E2 (dont 7 questions également posées dans l’enquête E3), qui génèrent une vingtaine de variables (tableau 2). Les principales variables structurantes ont été sélectionnées et recodées en regroupant des modalités de façon à avoir des classes d’effectifs homogènes pour les traitements statistiques. Cette base a été convertie sous format Excel puis traitée avec le logiciel SPAD (Version 5).

Tableau 2 : Présentation de la base de données spécifique à l’analyse comparative Thème ou rubrique du

questionnaire Nombre

de variables Sujets évoqués par les questions Caractéristiques

personnelles des enquêtés 5 Sexe, Age, Diplôme,

Structure des revenus, Taille du foyer Nature de l’usage des plages 3 Importance de l’usage, Activités pratiquées sur les plages,

Perception du risque 3 Sensibilité au risque de submersion, Institution de référence pour l’appréciation de ce risque,

Perception des conséquences Préférence vis-à-vis des

méthodes de protection de

plages 6 Types de méthodes,

Logique de protection des différents enjeux

L’objectif de cette approche comparative est de tester l’existence de spécificités en fonc- tion des types de populations et des caractéristiques socio-économiques. Selon le para- digme culturaliste dans lequel nous nous inscrivons, il s’agit de vérifier que les percep- tions des individus sont liées à des types d’usages ou à des facteurs sociodémographiques et d’identifier les variables qui sont les plus déterminantes. L’originalité de notre approche est d’utiliser deux classifications des populations concernées de façon à explorer une plus grande diversité de facteurs explicatifs, liés aux usages et, conformément au paradigme culturaliste, à l’influence des facteurs sociaux.

Dans un premier temps, des tris croisés systématiques ont été réalisés en vue d’iden- tifier les variables structurantes de la perception des risques selon les profils d’usagers et les sous populations. Parmi ces tris croisés, les liaisons entre la variable rendant compte des types de populations et les autres variables a fait l’objet d’une attention particulière de façon à tester dans quelle mesure les sous-populations d’usagers ont des perceptions spécifiques. Par la suite, il convenait de rendre compte du rôle des facteurs sociaux. Nous notons (cf. matrice en annexe) de nombreuses liaisons statistiquement significatives entre les facteurs sociaux et les perceptions du risque ou les préférences relatives aux méthodes et aux logiques de gestion. De façon à simplifier la prise en compte de ces facteurs sociaux dont les influences (en dehors de l’âge, très corrélé) étaient diversifiées, nous avons construit une typologie de synthèse se basant sur les caractéristiques socioéconomiques

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des enquêtés. Les variables sur lesquelles est fondée cette analyse se limitent aux facteurs traditionnels identifiés dans le talon sociodémographique de l’enquête. Cette typologie a été effectuée grâce à une Analyse en Correspondances Multiples (ACM) associée à une classification hiérarchique pour construire les classes7. Cette démarche de synthèse relative aux profils socio-économiques des enquêtés peut s’apparenter à la construction d’idéaux-types wébériens (Weber, 1992 ; Schnapper, 1996).

Nous avons ainsi créé quatre classes d’usagers8 : (1) une dite de « retraités », constituée presque exclusivement de retraités, le plus souvent en couple et plutôt peu diplômés, (2) une dite d’« actifs - » regroupant essentiellement des actifs avec une seule source de revenu, plutôt familles monoparentales (femmes célibataires) et quelques retraités veufs, (3) une composée de « jeunes actifs » diplômés, vivant généralement en famille et bénéficiant le plus souvent de deux revenus d’activité et enfin (4) une dite d’« actifs + », qui recouvre des individus d’âge mûr (89 % ont entre quarante et soixante ans), le plus souvent des hommes, qui vivent en couple avec en quasi-totalité deux revenus d’activité par foyer.

3. Comparaison des sous-populations et des idéaux-types d’usagers des plages : quelles ressemblances ? Quelles spécificités ?

L’objectif ici n’est pas de détailler l’ensemble des résultats mais de rechercher les spé- cificités des perceptions selon les types d’usagers ou de profils, de façon à identifier des sous-groupes pouvant justifier des mesures appropriées au niveau des politiques de ges- tion à mettre en œuvre. Nous ne mettrons donc l’accent que sur les ressemblances ou dif- férences qui nous paraissent structurantes. Comme nous l’avons souligné, les tris croisés systématiques (accompagnés du test de c²) ont permis d’identifier un grand nombre de liaisons significatives9 (cf. matrice des liaisons en annexe), dont certaines intéressantes à commenter.

3.1. Quelques liaisons notables montrant les caractéristiques spécifiques des sous populations d’usagers

L’analyse des liens entre sous populations d’usagers et caractéristiques sociales montre (cf. matrice en annexe) l’existence d’une forte liaison statistique (test du c² significatif à 1 %) suggérant que celles-ci correspondent à des types de ménages spécifiques. La matrice des liaisons fait apparaître que l’âge est fortement déterminant (corrélé avec onze variables sur un total de dix-sept) et lié au niveau de formation et de revenu d’activité. L’analyse des caractéristiques sociales des sous-populations d’usagers (tableau 3) montre en outre que, parmi les excursionnistes et les touristes, la proportion des moins de quarante ans est sensiblement plus marquée que dans les autres sous-populations, tandis qu’au contraire

7 Les trois premiers axes retenus pour l’analyse expliquent 57 % de la variance.

8 Pour bien distinguer ces classes (ou idéaux types) des sous-populations d’usagers, elles seront toujours identifiées sous les dénominations qui sont présentées ici.

9 41 % des croisements pour les liaisons fortes (test du χ² significatif à 1 %) et 55 % si nous associons aussi les variables plus faiblement liées (test du χ² significatif à 5 %). Les valeurs des tests attestant de ces liaisons sont notées dans la matrice des liaisons en annexe. La notation O rend compte d’un test de χ ² significatif à 5 % et O+ d’un test de χ² significatif à 1 %.

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les deux tiers des propriétaires de résidences secondaires ont plus de soixante ans. La dis- tribution des résidents principaux montre seulement une part plus importante de céliba- taires. Le niveau de formation est sensiblement plus faible pour les résidents secondaires, qui ont moins souvent continué leurs études au-delà du baccalauréat (43 %), contraire- ment aux excursionnistes (66 %). Enfin, les touristes, et dans une moindre mesure les excursionnistes, ont plus souvent des enfants (61 % et 49 %), donc une taille de ménage plus importante, et plus souvent deux revenus d’activité (61 % et 55 %), tandis que les rési- dents secondaires sont plus souvent en couple (64 %) et sans revenu d’activité (56 %) car ils sont aussi le plus souvent retraités.

Tableau 3 : Distribution des caractéristiques sociales des sous populations d’usagers

 

Excursionnistes Résidents

principaux Résidents

secondaires Touristes Total

N % . N % N % N % N %

Age

Age 40 et - 42 42% 93 29% 14 9% 135 45% 284 32%

Age 40-60 33 33% 109 34% 41 25% 151 50% 334 38%

Age 60 et + 24 24% 116 37% 108 66% 15 5% 263 30%

Total 99 100% 318 100% 163 100% 301 100% 881 100%

Formation

Bac ou moins 34 34% 154 48% 93 57% 129 43% 410 47%

Supérieur au Bac 65 66% 164 52% 70 43% 172 57% 471 54%

Total 99 100% 318 100% 163 100% 301 100% 881 100%

Revenus d’activité

1 revenu 18 18% 90 28% 40 25% 75 25% 223 25%

2 revenus 54 55% 96 30% 32 20% 184 61% 366 42%

Pas de revenu 27 27% 132 42% 91 56% 42 14% 292 33%

Total 99 100% 318 100% 163 100% 301 100% 881 100%

Taille du foyer

une personne 17 17% 82 26% 22 14% 50 17% 171 19%

2 personnes 34 34% 125 39% 105 64% 69 23% 333 38%

3 personnes et+ 48 49% 111 35% 36 22% 182 61% 377 43%

Total 99 100% 318 100% 163 100% 301 100% 881 100%

Source : enquêtes Miseeva 2009.

Les cases colorées soulignent des fréquences s’écartant sensiblement de la moyenne.

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3.2. Les spécificités des représentations du risque de submersion et des méthodes de protection

Il apparaît qu’il existe peu de représentations communes à l’ensemble des enquêtés, ce qui atteste du rôle discriminant des sous-populations d’usagers et des idéaux-types.

En premier lieu, nous constatons que les usages du littoral interviennent peu sur la perception du risque de montée du niveau de la mer, et que le rythme de fréquentation des plages n’a pas de lien avec cette variable. Par contre, les idéaux-types sont fortement corrélés à la perception de la temporalité du risque : les «  retraités  » sont beaucoup moins nombreux que la moyenne de l’échantillon à penser qu’il va falloir s’en préoc- cuper dans les dix ans à venir et les « actifs+ » moins nombreux à penser que le risque n’est pas prouvé (tableau 4). De même, les « retraités » ont une plus forte propension que les autres à considérer le risque comme non prouvé (test de c² significatif à 1 %), caractéristique que l’on retrouve pour les résidents secondaires largement constitués de retraités (Hellequin et al., 2012). Il est intéressant de noter que cette « minimisation du risque » par les « retraités » est assez différente de ce que la perception des risques montre en général, puisque le plus souvent, plus on vieillit plus on est sensible aux questions environnementales (Ifen, 2003 ; Hellequin et Zwarterook, 2010). Cependant, comme le notaient Chauvin et Hermand (2006), l’âge est une variable qui n’agit pas toujours dans le même sens selon les recherches menées et les risques envisagés. On peut avancer ici l’hypothèse que l’âge induit une moindre sensibilisation au changement climatique qui relève du long terme. Les idéaux-types influencent aussi la confiance que les usagers peuvent avoir dans les scientifiques pour apprécier les problèmes de submersion marine. Celle-ci est importante pour tous les idéaux-types (de 72 à 85 % de confiants) à l’exception des « retraités » pour qui elle est sensiblement plus faible (tableau 5). Cette confiance envers les scientifiques dans l’appréciation du risque est un résultat assez récurrent dans les enquêtes, comme le montre régulièrement le baromètre de l’Institut de Radioprotection et de Sécurité Nucléaire (2012). Nous observons aussi des spécificités, bien que plus faibles, entre les sous-populations d’usagers puisque les excursionnistes et les touristes sont plus nombreux à déclarer qu’il faut s’en préoccu- per dans les dix ans à venir, tandis qu’un quart des résidents secondaires considèrent qu’il est inutile de s’y intéresser, puisque les prévisions ne sont pas prouvées. Ce scep- ticisme des résidents secondaires peut être dû au fait qu’étant peu présents en hiver sur le littoral, ils sont moins sensibilisés aux effets des tempêtes. Rappelons aussi que cette catégorie inclut des personnes plutôt âgées et peu diplômées, certainement plus atta- chées aux observations issues de leur propre expérience10 ou plus fatalistes par rapport à l’avenir. On retrouve cette moindre confiance des retraités dans les résultats du sondage européen sur la perception du changement climatique (Eurobaromètre UE, 2011) ; les personnes âgées de plus de cinquante-cinq ans ne sont que 46 % à penser que c’est pré- occupant, contre 54 % à 56 % pour les autres classes d’âge. Cette enquête montre par ailleurs une forte corrélation avec le niveau d’éducation (Eurobaromètre UE, 2011).

10 Nous avons pu observer dans une autre étude réalisée en 2011 sur le même site une très grande fidélité dans le temps en ce qui concerne la fréquentation des plages puisque 26 % des enquêtés viennent depuis plus de vingt ans sur les mêmes plages (Rey-Valette et al., 2012).

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Tableau 4 : Perception du risque en fonction des idéaux types des usagers

« Actifs –» « Retraités » « Jeunes actifs» « Actifs +» Total

N % N % N % N % N %

Agir dans

les 10 ans 113 61% 107 41% 121 63% 158 64% 499 57%

Agir après

10 ans 44 24% 92 35% 39 20% 61 25% 236 27%

Risque non prouvé

27 15% 62 24% 31 16% 26 11% 146 17%

Total 184 100% 261 100% 191 100% 245 100% 881 100%

Source : enquêtes Miseeva 2009.

Tableau 5 : Importance de la confiance attribuée aux scientifiques selon les idéaux types

« Actifs –» « Retraités » « Jeunes actifs» « Actifs +» Total

N % N % N % N % N %

Faible

confiance 37 20% 73 28% 41 21% 36 15% 187 21%

Font

confiance 147 80% 188 72% 150 79% 209 85% 694 79%

Total 184 100% 261 100% 191 100% 245 100% 881 100%

Source : enquêtes Miseeva 2009.

Les cases colorées soulignent des fréquences s’écartant sensiblement de la moyenne.

La perception des conséquences du risque de submersion marine sur le territoire des trois communes enquêtées se répartit de façon relativement équilibrée11 entre les trois modalités que sont la disparition des plages (38 % des enquêtés en moyenne), l’aggravation des situations d’inondation (38 %)12 et la submersion marine des terrains à très faible altitude (24 %). Elle est indépendante des sous populations et des idéaux types. Ce n’est pas le cas pour la préférence exprimée en matière de méthodes de protection du littoral (tableau 6) (tests de c² significatifs à 1 %). Ainsi, côté sous-populations d‘usagers, les excursionnistes se détournent souvent des politiques de protection en dur (brise lame, épis, digues…) au profit du recul, alors que ce dernier est au contraire très peu cité par les résidents secondaires. En effet, les résidents secon- daires, qui sont plus souvent en première ligne, sont très attachés aux aménités offertes par la proximité des plages ainsi qu’à leur logement qui a le plus souvent une attache familiale et est lié à des souvenirs d’enfance (Hellequin et al., 2011). Côté idéaux-types, nous retrouvons cette préférence pour le recul chez les « jeunes actifs », tandis que les « actifs+ » sont plus attirés par le rechargement des plages en sable. On peut se demander s’il n’y a pas ici un effet génération-

11 Il s’agissait d’une question fermée avec trois choix maximum à hiérarchiser. Les résultats portent ici uni- quement sur le choix noté en première priorité.

12 Il s’agit des inondations en général sachant que de par les caractéristiques du climat méditerranéen (no- tamment épisodes cévenols) les submersions par les tempêtes sont fortement corrélées avec des épisodes de pluviométrie importante générant des débordements des étangs et des cours d’eau.

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nel lié à l’information diffusée par les politiques et relayée par les médias, qui ont successive- ment prôné ces deux méthodes (Kasperson, 2003)13. Rappelons que les travaux menés sur les inondations fluviales (Pottier, 2000 ; 2001) montrent une évolution significative récente des logiques des politiques publiques au bénéfice de mesures d’adaptation plutôt que les mesures structurelles de protection qui étaient jusqu’alors traditionnellement mises en œuvre.

Tableau 6 : Préférences pour les méthodes de protection en fonction des idéaux types et des sous populations d’usagers

« Actifs –» « Retraités » « Jeunes actifs» « Actifs +» Total

N % N % N % N % N %

Méthodes dures

(brise lame, épis) 83 45% 98 38% 86 45% 69 28% 336 38%

Méthodes souples

(rechargement) 62 34% 119 46% 51 27% 121 49% 353 40

Recul (et laisser faire) 39 21% 44 17% 54 28% 55 22% 192 22%

Total 184 100% 261 100% 191 100% 245 100% 881 100%

Excursionnistes Résidents

principaux Résidents

secondaires Touristes Total

N % N % N % N % N %

Méthodes dures

(brise lame, épis) 23 23% 123 39% 74 45% 133 44% 353 40%

Méthodes souples

(rechargement) 29 29% 143 45% 72 44% 92 31% 336 38%

Recul (et laisser faire) 47 48% 52 16% 17 11% 76 25% 192 22%

Total 99 100% 318 100% 163 100% 301 100% 881 100%

Source : enquêtes Miseeva 2009.

Les cases colorées soulignent des fréquences s’écartant sensiblement de la moyenne.

Enfin, nos enquêtes ont permis de mettre en évidence, pour les différents enjeux, l’intensité de la protection collective souhaitée (qui va de « quel qu’en soit le prix » à « il faut laisser faire et ne pas intervenir »). Les opinions exprimées, que l’on peut estimer issues d’une logique d’approche coût/avantage intuitive14, ont été appréhendées à propos de plusieurs types d’en-

13 Sur ce même site, nous avons pu observer par ailleurs l’absence d’impact négatif des aménagements en dur sur le paysage : ils sont très bien perçus par les usagers et totalement intégrés. Seuls 10 % des usagers souhaitent des plages sans rochers et sans épis et ils ne sont que 14 % à penser que cela dégrade le paysage. Au contraire, la majorité a une perception positive liée au fait que les épis permettent de pêcher ou de ramasser des crabes, facilitent la surveil- lance en découpant la plage et sont un lieu de jeu pour les enfants (Rey-Valette et al., 2012).

14 Il s’agissait d’une question fermée à choix unique où les enquêtés pour chaque enjeu devaient choisir entre les modalités suivantes : « Oui il faut protéger quel qu’en soit le coût » ; « Oui il faut protéger si le coût est raisonnable » (sans que la notion de raisonnable ne soit précisée) ; « Non car cela reviendrait trop cher » et « Non car c’est inévi- table à long terme ». Le choix de protection uniquement si le coût est raisonnable correspond au niveau de la logique de décision à une action qui ne serait menée qu’en fonction des résultats d’une analyse économique comparative des coûts et des avantages. Les choix des enquêtés ne prenaient donc pas en compte ici la question de qui doit financer les coûts de ces actions (Etat, collectivités, usagers…), question qui était posée par ailleurs.

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jeux collectifs (équipements publics, équipements touristiques, patrimoine culturel), privés (maison exposée en première ligne) ou environnementaux (protection du patrimoine naturel).

S’il apparaît que la logique de protection des équipements touristiques, du patrimoine culturel et des maisons est commune à l’ensemble des types d’usagers - qui choisissent la modalité

« si le coût en est raisonnable (tableau 7) »-, ce n’est pas le cas pour les souhaits exprimés pour la protection de l’environnement (au sens du paysage, de la nature et la biodiversité15) ou des équipements collectifs (tableau 8).

Tableau 7 : Logique de protection privilégiant une approche coût avantage quels que soient les types d’usagers

Infrastructures

touristiques Maison exposée

en première ligne Patrimoine culturel

N % N % N %

Protection quel que soit

le coût 191 22% 139 16% 299 34%

Uniquement

si coût raisonnable 500 57% 441 50% 435 49%

Ne pas protéger 190 22% 301 34% 147 17%

Total 881 100% 881 100% 881 100%

Source : enquêtes Miseeva 2009 Tableau 8 : Perceptions différentiées des logiques de protection en fonction des idéaux-types

« Actifs -» « Retraités » « Jeunes actifs» « Actifs +» Total

N % N % N % N % N %

Equipements collectifs (écoles, hôpitaux …)

Protection quel qu’en soit le coût 126 68% 133 51% 132 69% 146 60% 537 61%

Uniquement si coût raisonnable 32 17% 84 32% 43 23% 82 33% 241 27%

Ne pas protéger 26 14% 44 17% 16 8% 17 7% 103 12%

Total 184 100% 261 100% 191 100% 245 100% 881 100%

Nature / Environnement

Protection quel qu’en soit le coût 92 50% 86 33% 108 57% 125 51% 411 47%

Uniquement si coût raisonnable 58 32% 108 41% 65 34% 88 36% 319 36%

Ne pas protéger 34 18% 67 26% 18 9% 32 13% 151 17%

Total 184 100% 261 100% 191 100% 245 100% 881 100%

15 L’intitulé de la question portait sur l’environnement au sens large en précisant à titre d’exemple « le pay- sage, la nature et la biodiversité », c'est-à-dire plutôt des fonctions esthétique et de support des plages selon le référentiel des services écosystémiques (MEA, 2005).

Source : enquêtes Miseeva 2009.

Les cases colorées soulignent des fréquences s’écartant sensiblement de la moyenne.

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Il existe globalement une volonté plus forte de préserver les équipements collectifs par rapport à l’environnement, mais là encore les « retraités » se différencient des autres idéaux- types : ils sont proportionnellement plus nombreux à ne pas vouloir protéger à tout prix les équipements collectifs ou les espaces naturels. Inversement les « jeunes actifs » sont plus nom- breux à souhaiter protéger les espaces naturels. La distinction par sous-populations d’usagers témoigne quant à elle d’une propension plus forte des excursionnistes et des touristes à vouloir protéger les espaces naturels quel qu’en soit le prix, au contraire des résidents secondaires dont la logique se rapproche de celles des « retraités ». Globalement, nous observons des res- semblances entre « jeunes actifs », touristes et excursionnistes : ils ont en commun d’être plus favorables à la protection du patrimoine naturel contre la submersion.

4. Comparaison des perceptions des usagers avec celles des acteurs parties prenantes Sur la base des quelques questions communes aux trois enquêtes (7 questions), il est aussi possible de comparer les perceptions des usagers (enquêtes E1 et E2) avec celles des acteurs intervenant dans les politiques publiques de gestion de l’érosion et de la submer- sion (enquête E3), comme les gestionnaires publics, chercheurs, représentants associatifs ou professionnels (tableau 9).

Tableau 9 : Détail des types d’acteurs rencontrés (enquête E3)

  Effectif enquêté % / total % hommes

Gestionnaires public 11 31 64

Dont services de l'Etat 6 17 67

Dont Collectivités territoriales 5 14 60

Représentants Professionnels concernés 8 22 75

Chercheurs 5 14 100

Associations 5 14 60

Gestionnaires locaux 7 19 43

Total 36 100 86

Nous observons en premier lieu (tableau 10) une plus grande sensibilité des acteurs au risque de submersion, puisque 64 % d’entre eux (contre 57 % pour les usagers) pensent qu’il faut intervenir dans les dix ans qui viennent. De même, les acteurs sont très largement favorables au recul (61 % contre seulement 22 % en moyenne pour les usagers). Par ailleurs, les méthodes dures, de type épis ou brise-lame, dénoncées comme inadéquates par les textes de référence en matière de gestion du trait de côte (Cousin, 2011), sont très peu évoquées par les acteurs (16 %), alors qu’elles restent très prisées des usagers (niveau d’adhésion com- parable à celui du rechargement de la plage en sable). En effet les acteurs parties prenantes, constitués pour près de deux tiers de gestionnaires et de chercheurs (tableau 9), considèrent la submersion marine comme une question majeure. Ils se montrent très sensibilisés à cette problématique à laquelle ils avaient majoritairement (90 %) déjà eu l’occasion de réfléchir

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et de s’informer avant l’enquête. Néanmoins leur intérêt pour la mise en place du recul s’accompagne d’importantes interrogations sur les modalités de sa mise en œuvre et de la conviction qu’il est nécessaire de faire en amont de la sensibilisation et de la concertation.

À ce sujet, 29% d’entre eux pensent que la fréquence accrue des tempêtes contribuera à sensibiliser les populations aux politiques de recul.

Tableau 10 : Comparaison des perceptions entre les usagers et les acteurs concernant l’impor- tance du risque et les méthodes de protection

Perception importance du risque Préférence de méthode de protection

Total Usagers Acteurs Total Usagers Acteurs

N % N % N % N %

Agir dans

les 10 ans 499 57% 23 64% Méthodes douce

(rechargement) 336 38% 8 23%

Agir après

10 ans 236 27% 7 20% Méthodes dures

(brise-lames, épis) 353 40% 6 16%

Risque

non prouvé 146 17% 6 16% Recul

(et laisser faire)l 192 22% 22 61%

Total 881 100% 36 100% Total 881 100% 36 100%

Source : Enquêtes MISEEVA 2009 et 2010.

Les cases colorées soulignent des fréquences s’écartant sensiblement de la moyenne.

En ce qui concerne les logiques de protection, nous observons des différences unique- ment pour les équipements collectifs : alors que les acteurs produisent, comme pour les autres enjeux, un raisonnement en termes de coût-avantage, les usagers choisissent plus souvent la protection à tout prix (tableau 11). Et quand ce n’est pas le cas, leurs raisons renvoient moins au coût (7 %) qu’au sentiment que c’est inévitable à long terme et donc inefficace (93 %).

Tableau 11 : Comparaison des perceptions entre les usagers et les acteurs concernant les équipements collectifs

Total Usagers Acteurs

N % N %

Protection quel qu’en soit le coût 537 61% 10 28%

Uniquement si coût raisonnable 241 27% 21 58%

Ne pas protéger 103 12% 5 14%

Total 881 100% 36 100%

Source : Enquêtes MISEEVA 2009 et 2010.

Les cases colorées soulignent des fréquences s’écartant sensiblement de la moyenne.

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5. Discussion des résultats en appui aux politiques d’adaptation

Rappelons que les politiques de gestion du trait de côte, conformément aux politiques environnementales et de gestion de l’inondation (Pottier, 2000 ; 2001), ont évolué, passant de politiques de gestion des effets locaux (approche structurelle par des ouvrages lourds de défense puis de rechargement en sable) à des politiques de gestion des causes, par la réduction de la vulnérabilité notamment au travers du recul des enjeux et de la restaura- tion des mécanismes naturels. En effet si les acteurs parties prenantes, pour moitié ges- tionnaires, sont très largement en faveur du recul, leurs réponses aux questions ouvertes témoignent de leur embarras, voire de leur perplexité, quant aux modalités pratiques de mise en œuvre et de programmation de ces mesures, à l’acceptabilité sociale très pro- blématique. L’étude de quelques cas emblématiques de recul16 (EID, 2010) montre que cette acceptation est plus facile quand les populations sont sensibilisées au danger, que la structure porteuse de l’opération leur paraît légitime, qu’il existe des actions de commu- nication et que le processus est concerté. Ainsi, les besoins d’information préalable sont importants notamment quant aux perceptions de l’aléa, à l’attachement des populations et des usagers à leur habitation et aux enjeux ainsi qu’à leurs préférences concernant les mesures de gestion. La mise en évidence, dans nos enquêtes, de représentations et préférences différenciées témoigne de niveaux d’acceptabilité des risques et de capacités d’adaptation variés et suggère des mesures différenciées. Cette diversité constatée des opinions doit être prise en compte dans la mise en œuvre de processus de concertation, notamment pour la définition des panels de participants, déterminante pour la légitimé et la réussite de ces démarches. Rappelons que les PPR submersion, les plans climats locaux et les mesures d’adaptation impliquent des approches concertées et intégrées par rapport aux projets de territoires à diverses échelles. La conception des politiques de communica- tion et de sensibilisation sera facilitée par notre identification des types de publics à cibler prioritairement et de la nature des contraintes et défiances existantes. Pour ce faire, nous pouvons ici suggérer quelques pistes d’interprétation de ces différences de perception et de projection temporelle pour les populations que l’enquête a permis de qualifier comme étant plutôt sceptiques vis-à-vis de la réalité du risque et notamment opposées au recul.

5.1. Plus de septiques chez les retraités et les résidents secondaires

La non-adhésion aux mesures de recul des résidents secondaires et des « retraités », puisque ces deux groupes se recouvrent en grande partie, peut s’expliquer par le fait qu’ils sont plus nombreux à penser que le risque n’est pas fondé, et donc à ne pas se représenter l’ampleur des transformations qui peuvent intervenir.

Le positionnement particulier des résidents secondaires par rapport aux risques de submer- sion peut s’expliquer par plusieurs de leurs caractéristiques. D’abord, ils sont peu présents aux périodes de fortes tempêtes (automne et hiver), et ne sont donc que 29 % à se souvenir d’une submersion importante, contre 42 % pour les résidents principaux. Leur biais d’optimisme (Peretti-Watel, 2003 ; Weinstein, 1984) serait donc lié à un défaut de connaissance. Ensuite, bien que les résidents principaux et secondaires interrogés soient souvent localisés dans une

16 Graveyron, Criel-sur-Mer, Ault, Bas-Champs de Cayeux, Baie des Veys et Freiston en Angleterre

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