Énoncé
Dans ce problème, toutes les fonctions considérées sont dénies dans [0, 1] et à valeurs réelles. On considère en particulier les fonctions B
kn(dites polynomiales de Bernstein) avec n ∈ N et k ∈ J 0, n K :
∀x ∈ [0, 1], B
nk(x) = n
k
x
k(1 − x)
n−kSoit f une fonction de [0, 1] dans R. Pour tout entier n strictement positif, on dénit la fonction f
npar :
∀x ∈ [0, 1], f
n(x) =
n
X
k=0
f ( k n )B
kn(x)
I. Outils.
1. Pour n ∈ N
∗et k entier entre 1 et n , exprimer
kn nkcomme un coecient du binôme.
2. On considère trois propositions.
P
1∀ε > 0, ∃N ∈ N tel que ∀n ∈ N , ∀x ∈ [0, 1], n ≥ N ⇒ |f
n(x) − f(x)| ≤ ε P
2∀x ∈ [0, 1], (f
n( x))
n∈N→ f (x)
P
3∀ε > 0, ∀x ∈ [0, 1], ∃N ∈ N tel que ∀n ∈ N , n ≥ N ⇒ |f
n(x) − f(x)| ≤ ε On ne demande pas ici d'étudier si ces propositions sont vraies ou non mais de préciser les implications logiques entre elles.
3. Dans cette question, on suppose que f est de classe C
2. Montrer que, pour tous x et y dans [0, 1] , il existe z ∈ [0, 1] tel que
f (y) = f (x) + (y − x)f
0(x) + (y − x)
2f
00(z) 2 On pourra utiliser une fonction
t 7→ f (t) + (y − t)f
0(t) + (y − t)
2M avec un M réel bien choisi.
4. Former le tableau de variations de la fonction x 7→ x(1 − x) dans [0, 1] .
II. Propriétés.
1. Pour n ∈ N
∗, k ∈ J 1, n − 1 K et x ∈ [0, 1] exprimer
(1 − x)B
n−1k(x) + xB
k−1n−1(x) avec une fonction polynomiale de Bernstein.
2. Déterminer la fonction f
ndans les cas suivants
∀x ∈ [0, 1] : f (x) = 1, ∀x ∈ [0, 1] : f (x) = x, ∀x ∈ [0, 1] : f (x) = e
xDans le dernier cas, le résultat sera exprimé par une puissance.
3. Montrer que, pour tout entier n , tout entier k entre 0 et n et tout x ∈ [0, 1] : x(1 − x)B
nk0(x) = (k − nx)B
kn(x)
4. a. Soit g dénie sur [0, 1] par g(x) = xf (x) . Les fonctions f
net g
nsont respective- ment associées à f et g par la relation donnée au début.
Vérier que, pour tous les x ∈ (0, 1] , x(1 − x)
n f
n0(x) = g
n(x) − xf
n(x) b. Exprimer simplement f
npour f (x) = x
2.
5. Montrer que, pour tous les x ∈ (0, 1] ,
n
X
k=0
( k
n − x)
2B
kn(x) = x(1 − x) n
III. Monotonie
Pour toute fonction f dénie sur [0, 1] et tout n ∈ N, on dénit la fonction ∆
nf par :
∀t ∈ [0, 1], ∆
nf (t) =
f (t + 1
n ) − f (t) si t ≤ 1 − 1 n f (1) − f (t) si t > 1 − 1 n
1. Exprimer la dérivée de B
knen fonction d'autres polynômes de Bernstein. On distinguera
les cas k = 0 , k entre 1 et n − 1 , k = n .
2. Montrer que pour tout n naturel non nul, f
n0= n
n−1
X
k=0
(∆
nf )( k n )B
kn−13. Montrer que si f est croissante alors f
nest croissante.
IV. Approximations.
1. Dans cette question, on suppose que f est de classe C
2.
a. Justier l'existence d'un réel M
2tel que, pour tout x ∈ [0, 1] , |f
00(x)| ≤ M
2. b. Montrer que, pour tout x ∈ [0, 1] ,
|f
n(x) − f (x)| ≤ M
22
x(1 − x) n c. Montrer que la proposition P
1est vraie.
2. Dans cette question, la fonction f est supposée seulement continue.
Pour tout α > 0 et x ∈ [0, 1] , on dénit les ensembles K
α(x) et K
α0(x) par : K
α(x) =
k ∈ J 0, n K tq k n − x
≥ α
K
α0(x) = J 0, n K \ K
α(x)
a. Montrer que, pour tout x ∈ [0, 1] ,
X
k∈Kα(x)
B
kn(x) ≤ 1 4nα
2b. On note M
0= max
[0,1]|f | . Montrer que pour tout x ∈ [0, 1] ,
|f
n(x) − f (x)| ≤ M
02nα
2+ X
k∈Kα0(x)
f( k
n ) − f (x)
B
kn(x)
En déduire que la proposition P
3est vraie.
Corrigé I. Outils.
1. Un coecient du binôme est un quotient de deux produits chacun étant constitué d'un même nombre de facteurs consécutifs :
k n
n k
= k n
n(n − 1)...
k(k − 1)... = (n − 1)(n − 2)...
(k − 1)(k − 2)... = n − 1
k − 1
2. Les propriétés P
2et P
3sont logiquement équivalentes car P
3formule la dénition de la convergence des suites (f
n(x))
n∈Npour chaque x .
La proposition P
1implique les deux autres car elle signie que pour chaque ε , il existe un α valable pour tous les x . Dans les autres propositions, cet α peut dépendre de x , les propositions ne sont pas équivalentes.
3. Remarquons que si x = y n'importe quel z dans [0, 1] convient. Supposons donc x 6= y et notons ϕ la fonction suggérée par l'énoncé.
ϕ(t) = f (t) + (y − t)f
0(t) + (y − t)
2M
Elle dépend de y , on aurait pu le marquer en la notant ϕ
y. Elle a les mêmes propriétés de régularité que f
0c'est à dire C
1[0, 1] . On peut donc lui appliquer le théorème de Rolle entre x et y si on choisit un M tel que ϕ(x) = ϕ(y) .
Cette contrainte se traduit par une équation très simple d'inconnue M : f (y) = f (x) + (y − x)f
0(x) + (y − x)
2M
qui admet une solution car y 6= x . Il n'est pas utile de l'exprimer.
Pour ce M là, il existe z strictement entre x et y (donc dans [0, 1] ) tel que ϕ
0(z) = 0 . Or
ϕ
0(t) = f
0(t) − f
0(t) + (y − t)f
00(t) − 2(y − t)M = (y − t)(f
00(t) − 2M ) De z 6= y , on tire f
00(z) = 2M . En réinjectant dans la relation ϕ(x) = ϕ(y) , on obtient
f (y) = f (x) + (y − x)f
0(x) + (y − x)
2f
00(z) 2
4. La fonction x 7→ x(1 − x) est croissante de 0 à
12, décroissante de
12à 1 . On en tire en particulier :
∀x ∈ [0, 1], 0 ≤ x(1 − x) ≤ 1 4
II. Propriétés.
1. On perçoit l'analogie avec la relation fondamentale entre les coecients du binôme : (1 − t)B
kn−1(t) + tB
k−1n−1=
n − 1 k
t
k(1 − t)
n−k+ n − 1
k − 1
t
k(1 − t)
n−1−(k−1)avec n − 1 − (k − 1) = n − k
=
n − 1 k
+
n − 1 k − 1
t
k(1 − t)
n−k= B
kn2. Dans les trois cas, le calcul repose sur la formule du binôme.
Cas f (x) = 1 . On applique directement la formule du binôme : f
n(x) =
n
X
k=0
n k
x
k(1 − x)
n−k= (1 − x + x)
n= 1
Cas f (x) = x . On remarque d'abord que le terme associé à k = 0 est nul. Puis on applique la relation obtenue en I1.
f
n(x) =
n
X
k=0
k n
n k
x
k(1 − x)
n−k=
n
X
k=1
n − 1 k − 1
x
k(1 − x)
n−k= x
n
X
k=1
n − 1 k − 1
x
k−1(1 − x)
n−1−(k−1)= x(1 − x + 1)
n−1= x
en tenant compte du décalage d'indice et de la formule du binôme.
Cas f (x) = e
x. f
n(x) =
n
X
k=0
e
knn
k
x
k(1 − x)
n−k=
n
X
k=0
n k
(e
1nx)
k(1 − x)
n−k=
e
n1x + 1 − x
n3. On veut montrer ici que x(1 − x)B
kn0(x) = (k − nx)B
nk(x) . Si k = 0 .
x(1 − x)B
0n0(x) = −nx(1 − x)(1 − x)
n+1= −nx(1 − x)
n= (k − nx)B
0n(x) Si k = n .
x(1 − x)B
nn0(x) = nx(1 − x)x
n−1= n(1 − x)x
n= (k − nx)B
nn(x)
Si 1 ≤ k ≤ n − 1 .
x(1 − x)B
nk0(x) = x(1 − x) n
k
kx
k−1(1 − x)
n−k− (n − k)x
k(1 − x)
n−k−1= (k(1 − x) − (n − k)x) n
k
x
k(1 − x)
n−k= (k − nx)B
kn(x)
4. a. De la dénition de la fonction g , on déduit g(
nk) =
nkf (
kn) . On peut alors exprimer g
n(x) − xf
n(x) comme une somme, factoriser partiellement et utiliser le résultat de la question précédente
g
n(x) − xf
n(x) =
n
X
k=0
k n − x
f ( k
n )B
kn(x) = 1 n
n
X
k=0
f ( k
n ) (k − nx) B
kn(x)
= 1 n
n
X
k=0
f ( k
n )x(1 − x)B
nn0(x) = x(1 − x) n
n
X
k=0
f ( k n )B
nn(x)
!
0= x(1 − x) n f
n0(x)
b. Si f (x) = x pour tous les x alors g(x) = x
2et f
n(x) = x . La formule précédente donne donc
x(1 − x)
n = −x
2+ g
n(x) On en déduit que si f (x) = x
2pour tous les x alors
f
n(x) = x(1 − x) n + x
25. Examinons les trois sommes obtenues à partir du développement ( k
n − x)
2= ( k n )
2− 2 k
n x + x
2Elles correspondent à des calculs déjà eectués
n
X
k=0
( k n )
2n k
x
k(1 − x)
n−k= x(1 − x) n + x
2n
X
k=0
(−2x)( k n )
n k
x
k(1 − x)
n−k= −2x
2n
X
k=0
x
2n
k
x
k(1 − x)
n−k= x
2On en déduit
n
X
k=0
( k n − x)
2n k
x
k(1 − x)
n−k= x(1 − x) n
III. Monotonie.
1. Si k = 0 , B
0n(t) = (1 − t)
ndonc B
0n0= −nB
0n−1. Si k = n , B
nn(t) = t
ndonc B
n0n= nB
n−1n−1.
Si 1 ≤ k ≤ n − 1 , on utilise encore la relation obtenue en I1. en particulier associée à la symétrie des coecients
(n − k) n
k
= (n − k) n
n − k
= n
n − 1 n − k − 1
= n n − 1
k
Il vient : B
kn0(t) =
n k
kt
k−1(1 − t)
n−k− n
k
(n − k)t
k(1 − t)
n−k−1= n
n − 1 k − 1
t
k−1(1 − t)
n−k− n − 1
k
t
k(1 − t)
n−k−1Comme n − k = (n − 1) − (k − 1) et n − k − 1 = (n − 1) − k , on obtient B
kn0= n B
k−1n−1− B
n−1k2. En utilisant les relations trouvées à la question précédente, il vient
1
n f
n0(x) =
n
X
k=1
f ( k
n )B
n−1k−1−
n−1
X
k=0
f ( k
n )B
n−1k=
n−1
X
k=0
f ( k + 1
n )B
kn−1−
n−1
X
k=0
f ( k n )B
kn−1=
n−1
X
k=0
f ( k
n + 1
n ) − f ( k n )
B
kn−1=
n−1
X
k=0
(∆
nf )( k n )B
n−1k3. Si on suppose f croissante, alors ∆
nf est à valeurs positives d'après sa dénition même.
Comme les fonctions de Bernstein sont à valeurs positives, la formule de la question
précédente montre que f
n0est à valeurs positives donc f
nest croissante.
IV. Approximations.
1. a. Comme la fonction est de classe C
2, sa dérivée seconde est continue. Elle est donc bornée. Le fait que ses bornes sont atteintes n'est pas utile ici.
b. Considérons un x ∈ [0, 1] et utilisons la question I.3. avec y =
nkpour chaque k . Il existe donc des z
ktels que
f( k
n ) = f(x) + ( k
n − x)f
0(x) + ( k
n − x)
2f
00(z
k) 2
En multipliant par les fonctions de Bernstein et en sommant, on obtient f
n(x) = f (x)
n
X
k=0
B
kn(x)
| {z }
=1
+ f
0(x)
n
X
k=0
k n B
nk(x)
| {z }
=x
− xf
0(x)
n
X
k=0
B
kn(x)
| {z }
=1
+
n
X
k=0
( k
n − x)
2f
00(z
k)
2 B
kn(x) = f (x) + 1 2
n
X
k=0
( k
n − x)
2f
00(z
k)B
kn(x) d'après les questions précédentes. On peut aussi écrire f (x) comme une somme :
f (x) = f (x)
n
X
k=0
B
nk(x) =
n
X
k=0
f (x)B
kn(x)
Les fonctions de Bernstein étant à valeurs positives dans [0, 1] , on peut majorer la diérence :
|f (x) − f
n(x)| ≤
n
X
k=0
|f (x) − f
n(x)| B
nk(x) = 1 2
n
X
k=0
( k
n − x)
2|f
00(z
k)|B
kn(x)
≤ M
22
n
X
k=0
( k
n − x)
2B
kn(x) ≤ M
22
x(1 − x) n
c. Une étude rapide de fonction (maximum en
12) montre que 0 ≤ x(1 −x) ≤
14pour tous les x de [0, 1] . On en tire donc :
∀x ∈ [0, 1], |f (x) − f
n(x)| ≤ M
28n
La suite des
M8n2tend vers 0 et le N associé à un ε par la dénition de la convergence de la suite sera valable pour tous les x de la condition P
1.
2. a. Dans cette question, le point important est simplement que les valeurs de B
knsont toujours positives. Une somme qui porte sur les k de K
α(x) est plus petite qu'une somme obtenue en ajoutant des termes positifs pour les autres k .
On considère la somme de la question II5. Par dénition de K
α(x) et d'après la remarque précédente,
α
2X
k∈Kα(x)
B
nk(x) ≤ X
k∈Kα(x)
( k
n − x)
2B
kn(x) ≤
n
X
k=1
( k
n − x)
2B
kn(x) = x(1 − x) n
Comme x(1 − x) ≤
14, on en déduit l'inégalité demandée
X
k∈Kα(x)
B
kn(x) ≤ 1 4nα
2b. On a déjà vu que l'on peut écrire f (x) comme une somme
f (x) =
n
X
k=0
f (x)B
kn(x)
On factorise partiellement la diérence et on sépare les k avant de majorer
|f (x) − f
n(x)| =
n
X
k=0
(f (x) − f
n(x)) B
kn(x)
≤
n
X
k=0
|f (x) − f
n(x)| B
kn(x)
≤ X
k∈Kα(x)
|f (x) − f
n(x)| B
nk(x) + X
k∈K0α(x)
|f (x) − f
n(x)| B
kn(x)
Pour les k ∈ K
α(x) , majorons par |f (x) − f
n(x)| ≤ 2M
0et ne faisons rien pour les autres. On en déduit :
|f (x) − f
n(x)| ≤ 2M
0X
k∈Kα(x)
B
nk(x) + X
k∈K0α(x)
|f (x) − f
n(x)| B
kn(x)
≤ M
02nα
2+ X
k∈K0α(x)
|f (x) − f
n(x)| B
kn(x)
en utilisant l'inégalité de la question précédente.
Pour tout x ∈ [0, 1] et tout ε > 0 , comme f est continue en x , il existe un α > 0 (qui dépend de x à priori) tel que |f(y) − f (x)| ≤
2εpour y ∈ [0, 1] vériant |x − y| ≤ α . Ceci se produit pour les
knlorsque k ∈ K
α0(x) . On en tire
X
k∈K0α(x)
|f (x) − f
n(x)| B
kn(x) ≤ ε 2
X
k∈Kα0(x)
B
nk(x) ≤ ε 2
1
X
k=0
B
kn(x) = ε 2
Pour ce α là, on peut donc écrire que pour tout n ,
|f (x) − f
n(x)| ≤ M
02nα
2+ ε
2 Comme la suite
2nαM02n∈N∗