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Côte d Ivoire : Enfants nés en dehors du mariage

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Academic year: 2022

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19 novembre 2021

Côte d’Ivoire : Enfants nés en dehors du mariage

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Ce document, rédigé conformément aux lignes directrices communes à l’Union européenne pour le traitement de l’information sur le pays d’origine, a été élaboré par la DIDR en vue de fournir des informations utiles à l’examen des demandes de protection internationale. Il ne prétend pas faire le traitement exhaustif de la problématique, ni apporter de preuves concluantes quant au fondement d’une demande de protection internationale particulière et ne doit pas être considéré comme une position officielle de l’Ofpra.

La reproduction ou diffusion du document n’est pas autorisée, à l’exception d’un usage personnel, sauf accord de l’Ofpra en vertu de l’article L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle.

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Table des matières

1. Dispositions légales ... 3

1.1. Droit international... 3

1.2. Législation nationale ... 3

1.3. Recours ... 4

2. Perception sociale et culturelle ... 4

2.1. Tabou colonial ... 4

2.2. Prescriptions religieuses ... 4

2.3. Des modèles matrimoniaux entre résistance et évolution ... 5

3. Conséquences pour l’enfant né hors mariage ... 6

Bibliographie ... 8

Résumé : Depuis 2019 sur le plan juridique, les enfants nés hors mariage ont les mêmes droits que les enfants nés dans le cadre d’un mariage. Si les modèles familiaux ayant cours dans la société ont tendance à se diversifier en Côte d’Ivoire, les enfants nés en dehors du mariage restent traditionnellement associés à la honte et peuvent être stigmatisés ou écartés de tout ou partie de leur famille en raison de leur statut. La mère peut aussi se trouver confrontée à une situation de précarité financière.

Abstract: Legally, children born out of wedlock have the same rights as children born in wedlock since 2019. While family patterns in society are becoming more diverse in Côte d'Ivoire, children born out of wedlock are still traditionally associated with shame and may be stigmatized or alienated from all or part of their families. The mother may also find herself in a situation of financial insecurity.

Nota : La traduction des sources en langues étrangères est assurée par la DIDR.

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1. Dispositions légales

1.1. Droit international

Le 4 février 1991, la Côte d’Ivoire a ratifié la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant (CIDE)1 du 20 novembre 1989, qui dispose dans son article 7 que :

« 1. L'enfant est enregistré aussitôt sa naissance et a dès celle-ci le droit à un nom, le droit d'acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux.

2. Les Etats parties veillent à mettre ces droits en œuvre conformément à leur législation nationale et aux obligations que leur imposent les instruments internationaux applicables en la matière, en particulier dans les cas où faute de cela l'enfant se trouverait apatride »2.

1.2. Législation nationale

L’article 4 de la Constitution ivoirienne du 8 novembre 2016 dispose que :

« Tous les Ivoiriens naissent et demeurent libres et égaux en droit. Nul ne peut être privilégié en raison de sa race, de son ethnie, de son clan, de sa tribu, de sa couleur de peau, de son sexe, de sa région, de son origine sociale, de sa religion ou croyance, de son opinion, de sa fortune, de sa différence de culture ou de langue, de sa situation sociale ou de son état physique ou mental »3.

Depuis la réforme de la Constitution en 2016, l’article 31 dispose désormais que la mère a désormais des droits égaux à celui du père en ce qui concerne l’autorité parentale4.

Par le passé, la loi n° 64-377 du 7 octobre 1964 sur la filiation et à la paternité, modifiée par la loi n° 83- 799 du 2 août 1983, disposait dans son article 22 que « la reconnaissance par le père, de l’enfant né de son commerce adultérin n’est valable, sauf en cas de jugement ou même de demande soit de divorce, soit de séparation de corps, que du consentement de l’épouse »5.

L’article 29 de la même loi prévoit que « les enfants nés hors mariage dont la filiation est légalement établie ont les mêmes droits que les enfants légitimes »6. De plus, l’article 22 de la loi n° 64-379 du 7 octobre 1964 relative aux successions prévoit que « les enfants ou leurs descendants succèdent à leurs père et mère, aïeuls ou autres ascendants, sans distinction de sexe ni de progéniture et encore qu’ils soient issus de différents mariages ou nés hors mariage »7. Cette disposition a été reconduite dans l’article 28 de la loi n° 2019-573 du 26 juin 2019 relative à la succession8.

Cependant, le Conseil des ministres adopte le 27 mars 2019 différents projets de lois portant sur les successions, la minorité, le mariage, et la filiation dans le cadre d’une réforme globale du système juridique. Ces projets visent à mettre l’ancien cadre juridique « en conformité avec les nouvelles évolutions de la société ». En ce qui concerne l’enfant mineur, il s’agit de lui apporter « une protection plus accrue qui priorise son intérêt en matière de filiation »9.

Depuis lors, la loi n° 2019-571 du 26 juin 2019 relative à la filiation n’impose plus le consentement préalable de l’épouse légale du père pour la reconnaissance de l’enfant né d’une autre union. En

1 Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme (HCDH) des Nations Unies, s.d., url

2 Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme (HCDH) des Nations Unies, Convention relative aux droits de l’enfant, adoptée et ouverte à la signature, ratification et adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 44/25 du 20 novembre 1989, 20/11/1989, url

3 République de Côte d’Ivoire, Loi n° 2016-886 portant Constitution de la République de Côte d’Ivoire, Journal Officiel, 09/11/2016, p. 130, url

4 DIAHA-YAO Perle Audrey, 03/2021, p. 16, url

5 Agence Ivoirienne de Presse (AIP), 07/05/2019, url

6 République de Côte d’Ivoire, Loi n° n° 64-377 du 7 octobre 1964, relative à la paternité et à la filiation, modifiée par la loi n° 83- 799 du 2 août 1983, 02/08/1983, url

7 Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture (OAA) des Nations Unies, s.d., url

8 République de Côte d’Ivoire, Loi ° 2019-573 du 26 juin 2019 relative à la succession, Journal Officiel, 16/07/2019, url

9 Gouvernement de Côte d’Ivoire, 27/03/2019, url

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revanche, le père doit informer son épouse de son intention de reconnaitre l’enfant né en dehors de son mariage10.

En outre, les termes d’« enfant adultérin » ou d’« enfant incestueux » sont supprimés de la loi en raison de leur caractère discriminant11.

1.3. Recours

En 2015, c’est-à-dire avant la réforme du système juridique de 2019, un magistrat au tribunal de première instance du Plateau (Abidjan) expliquait au journal L’Inter que, si la mère de l’enfant né hors union n’obtenait pas le consentement de l’épouse légale pour la reconnaissance de filiation, elle pouvait néanmoins « saisir les tribunaux pour obtenir une pension alimentaire pour l'enfant. Mais jamais, elle ne pourra obtenir que l'enfant porte le nom du père sans que l'épouse ne soit consentante »12.

De plus, « lorsqu'il s'agit d'un homme qui n'est pas marié et qui refuse de reconnaître son enfant, la partenaire de ce dernier ouvre une procédure ordinaire. Le tribunal tient une audience et, s'il y a lieu de condamner le père à payer une pension alimentaire, on le fait et le juge fait exécuter la décision, que ce soit le père ou la mère, car ce sont les deux qui contribuent à l'entretien de l'enfant »13.

Depuis 2019, la législation « supprime les dispositions fixant le délai d’un an reconnu à l’enfant à compter de sa majorité, pour exercer l’action en recherche de paternité (article 26 alinéa 5 de la loi actuelle). Désormais, l’enfant né hors mariage peut agir à tout moment, sous réserve du délai de prescription de droit commun qui est de trente ans (article 226 du Code civil), pour obtenir l’établissement de sa filiation paternelle »14.

2. Perception sociale et culturelle

2.1. Tabou colonial

Le tabou entourant les enfants nés hors mariage existait déjà à l’époque coloniale. Sous l’administration de l’Afrique Occidentale Française (AOF), plusieurs milliers d’enfants métis, nés de relations (souvent non-consenties) entre des colons Français et des Africaines, ont été arrachés à leurs mères et placés à l’écart de la société dans des orphelinats. En Côte d’Ivoire, ces enfants qui suscitaient la honte étaient appelés « bâtards de la République ». Ils étaient cachés dans des édifices à l’image de l’ancien palais du gouverneur de Bingerville, surnommés le « Foyer des métis ». Aujourd’hui, certains orphelins réclament encore la vérité à l’Etat français sur leur filiation15.

2.2. Prescriptions religieuses

Traditionnellement, l’acte sexuel en dehors des liens du mariage est considéré comme un acte honteux ou immoral, une « incitation à la débauche », qui n’est pas conforme au principe de chasteté des religions monothéistes16.

Même si les relations sexuelles hors mariage sont proscrites, certains cadres religieux estiment aujourd’hui que les enfants nés hors mariage doivent pouvoir jouir des mêmes droits que les enfants nés dans le mariage. Ces positions paraissent plus conformes aux évolutions du droit ivoirien sur les droits de l’enfant né hors mariage. Par exemple, dans un entretien en 2020 au site d’information Pepesoupe.com, l’imam Ahmad Traoré, prêchant à Abidjan, estime que les enfants nés hors mariage, qui sont d’abord des « créatures de Dieu », ne sont pas responsables des conditions dans lesquels ils

10 AIP, 07/05/2019, url

11 Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme de Côte d’Ivoire, publication du 03/05/2019, Facebook, url

12 L’Inter, 16/09/2015, url

13 L’Inter, 16/09/2015, url

14 Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme de Côte d’Ivoire, publication du 03/05/2019, Facebook, url

15 France 24, 10/07/2020, url

16 BITOTA MUAMBA Joséphine, 10/2003, p. 250 et p. 279, url

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5 ont été conçus. « Si nous ne pouvons pas garder les enfants hors mariage, plutôt que de les tuer ou de les jeter dans des caniveaux ou des poubelles, il est mieux de les confier à des pouponnières », préconise-t-il17.

Dans un autre entretien accordé au même média, l’imam Inza Fofana, prêchant également à Abidjan, estime aussi que les enfants nés dans une union considérée comme illégale par l’islam doivent pouvoir bénéficier des mêmes avantages (droits, baptême) que ceux nés dans le mariage18.

Ce dernier souligne néanmoins que les idéologies islamiques divergent sur la question de la filiation paternelle de l’enfant né hors mariage, certaines estimant par exemple qu’il ne devrait pas porter le nom de son père biologique19.

2.3. Des modèles matrimoniaux entre résistance et évolution

Dès 1964, la Côte d’Ivoire s’est dotée de différentes lois portant sur la famille et son organisation, sur le modèle nucléaire de la famille occidentale. La polygamie et la dot ont été abolies. Le mariage civil, c’est-à-dire reconnu par l’Etat, et la communauté des biens ont été instaurés20.

Néanmoins, ces réformes juridiques, qui ont été mal diffusées auprès du grand public, se sont heurtées à une résistance des modèles matrimoniaux traditionnels. Dans l’ensemble, le mariage traditionnel et la polygamie ont perduré après l’adoption de ces lois. En 1997, l’historienne Chantal Vléï-Yoroba relève à cet égard : « Alors que l'on pouvait penser que l'urbanisation croissante et l'action du législateur seraient autant de facteurs de régression de la polygamie, on constate que celle-ci se maintient aussi bien dans les villes que dans les campagnes » 21.

Plusieurs sources soulignent néanmoins une évolution des modèles matrimoniaux en Côte d’Ivoire. En 2003, un rapport de la Caisse française d’allocations familiales (CAF), qui s’appuie sur d’autres études de référence, indique que l’augmentation de la part des familles monoparentales dans la société ivoirienne. Les liens du mariage seraient moins solides dans les foyers avec des revenus moins élevés et stables22.

Dans un article paru en 2014, la démographe Annabel Desgrees du Lou mentionne aussi un « profond bouleversement du système matrimonial » que connait les sociétés africaines depuis plusieurs décennies, avec une diversification des unions possibles :

« Parallèlement à cette transition, le paysage conjugal en Afrique est marqué par la diversité et la complexité des types d’unions possibles : ménages polygames ou monogames, unions officialisées par un mariage ou informelles. Les mariages peuvent être de divers types : civils, coutumiers, religieux. Le mariage est ainsi un processus qui s’étale sur plusieurs années : d’abord coutumier, en plusieurs étapes, puis religieux, puis légal, etc. La polygamie est officiellement en recul car de plus en plus de pays l’ont déclarée illégale, mais se maintient dans les faits. Elle réapparaît aussi sous de nouvelles formes : maîtresses entretenues, « deuxième bureau ». Les femmes composent entre les contraintes sociales et leur désir d’autonomie : elles inventent de nouvelles formes d’union où elles sont en couple officialisé, avec enfants, sans pour autant habiter avec leur conjoint ; ou encore elles utilisent le système polygamique à leur bénéfice : dans un pays comme le Sénégal où il n’est pas envisageable qu’une femme vive hors mariage, certaines peuvent accepter d’être troisième ou quatrième épouse pour obéir à cette injonction tout en minimisant les contraintes conjugales, moins fortes lorsqu’elles sont réparties entre les épouses »23.

17 Pepesoupe.com, « Les enfants hors-mariage : des créatures d’Allah », 04/11/2020, url

18 Pepesoupe.com, « Que dit l’islam sur les enfants hors mariage », 04/11/2020, url

19 Pepesoupe.com, « Que dit l’islam sur les enfants hors mariage », 04/11/2020, url

20 VLÉÏ-YOROBA Chantal, 1997, url

21 VLÉÏ-YOROBA Chantal, 1997, url

22 SECHET Raymonde, DAVID Olivier, EYDOUX Laurence, OUALLET Anne, 03/2003, p. 26, url

23 DESGREES DU LOU Annabel, p. 21-31, url

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Bien que la polygamie et l’adultère soient interdits par la loi en Côte d’Ivoire, il est très fréquent que les hommes mariés aient un autre ou plusieurs « bureaux », c’est-à-dire des relations extra-maritales24.

S’agissant des grossesses qui surviennent dans le cadre de relations extra-conjugales, la démographe Annabel Desgrees du Lou estime qu’« en Côte d’Ivoire, sexualité et procréation hors mariage sont bien acceptés, donc une femme enceinte n’a pas forcément besoin de conjoint officiel »25.

Néanmoins, les femmes célibataires, avec ou sans enfant, peuvent être la cible de stéréotypes dépréciatifs. Une représentante de l’Association des femmes juristes de Côte d’Ivoire explique, dans une communication adressée à la Direction des recherches de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR) parue en 2016, qu’en ce qui concerne « les coutumes, les habitudes et la famille, « l’idée d’une femme vivant seule, « n’est pas la bienvenue » dans les villes d’Abidjan et de Bouaké. Néanmoins, « les femmes seules peuvent aisément se déplacer, déménager et se réinstaller à Abidjan ou [à] Bouaké sans craindre pour leur sécurité personnelle »26.

Au cours d’un colloque organisé en mai 2019 à Abidjan sur le statut des femmes célibataires par l’Institut théologique de la compagnie de Jésus (ITCJ) et le Centre de recherche de d’action pour la paix (CERAP), une cheffe d’entreprise fait part des difficultés qui affecte aussi les femmes célibataires ayant des enfants. « Quand une femme célibataire a des enfants, c’est encore plus difficile pour elle parce qu’il lui faut penser à l’avenir de ses enfants, à leur insertion dans le tissu social » 27.

En janvier 2015, un article paru sur le site du journal Le Monde met en exergue la pression sociale dont les femmes célibataires font l’objet en Côte d’Ivoire, par opposition aux femmes mariées. « Les femmes célibataires subissent une énorme pression sociale au quotidien. Même si elles ont une bonne situation professionnelle, elles sont constamment humiliées, dépréciées, et font l’objet de rumeurs malveillantes : exclues des prises de décision, ou écoutées après les femmes mariées. Quand elles font des dons à la communauté, on leur rappelle que la somme aurait été plus élevée si elles avaient eu un homme à leurs côtés », explique Constance Toma’m Yaï, ancienne ministre de la Famille et de la Promotion de la femme 28.

Dans ce même article, l’imam Abdallah Djiguiba Cissé29 explique pour sa part qu’ en Côte d’Ivoire, on

« attribue sa valeur à une femme par rapport à sa capacité à se marier ». Il raconte que des musulmanes célibataires ayant un désir d’enfant lui « demandent de les aider à trouver un mari pour apporter un cadre moral à une grossesse, parce qu’elles savent qu’elles seront la risée de tous si elles font un enfant seules »30.

Par ailleurs, l’avortement est illégal en Côte d’Ivoire. Il est puni d’une peine de six mois à trois ans d’emprisonnement (sauf en cas de viol ou d’inceste). Malgré le tabou autour du l’avortement, plusieurs centaines de milliers d’Ivoiriennes y ont chaque année recours à dans la clandestinité et au péril de leur vie31.

3. Conséquences pour l’enfant né hors mariage

Dans une déclaration adressée en mai 2019 au Comité des Droits de l’Enfant sur la mise en œuvre de la CIDE, c’est-à-dire avant l’adoption de la réforme judiciaire, un conseiller technique auprès du Ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant note, « les enfants adultérins font quand-même l'objet d'une discrimination sur la filiation dans la mesure où ils ne peuvent être reconnus qu'avec le consentement de l'épouse légale. Nonobstant, dans la pratique judiciaire, on note des avancées, dans

24 VIDAL Claudine, p. 161-178, url

25 DESGREES DU LOU Annabel, 2014/2 (février), p. 21-31, url

26 Commission de l'Immigration et du Statut de Réfugié (CISR) du Canada, 02/05/2016, url

27 La Croix Africa, 06/05/2019, url

28 Le Monde, 23/01/2015, url

29 NDLR : Abdallah Djiguiba Cissé est imam et recteur de la grande mosquée du Plateau, l’une des plus grandes mosquées d’Abidjan. Il dirige aussi la radio Al Bayane, l’une des radios les plus écoutées du pays. Il est enfin le fondateur de la Fondation Djigui la Grande Espérance, qui milite contre la pratique des mutilations génitales féminines dans le pays.

30 Le Monde, 23/01/2015, url

31 Radio France Internationale (RFI), 24/05/2021, url

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7 la mesure où l’épouse légale a deux ans pour dénoncer l’acte de reconnaissance, à la suite desquels sa déclaration ne sera plus nécessaire pour la validité dudit acte »32.

En 2020, le Haut-Commissariat pour les Réfugiés (HCR) des Nations Unies souligne que « les enfants, dont la naissance n’a pas été reconnue par le père, peuvent être plus exposés à un risque d’apatridie.

En effet, en milieu rural comme en milieu urbain, les mères et proches parents ne sont pas toujours au courant qu’elles ont le droit de déclarer l’enfant à l’état-civil. « Très souvent, le risque d’apatridie survient parce que la mère n’a pas été déclarée à l’état civil et ne dispose par ailleurs d’aucun document »33.

Les mères d’enfant nés hors mariage peuvent être mal vue par la société, mais aussi être confrontées à des difficultés financières, qui peuvent avoir des répercussions sur le bien-être de l’enfant.

Dans une autre communication adressée en 2016 à la CISR, une représentante du Centre féminin pour la démocratie et les droits humains en Côte d'Ivoire (CEFCI), organisation qui milite contre les inégalités entre les hommes et les femmes, souligne que l’obstacle pour une femme vivant seule est avant tout financier. « Dans la coutume et dans les habitudes en Côte d'Ivoire, il n'y a pas d'obstacle en tant que tel. L'obstacle est plutôt si elles ont les moyens financiers pour se prendre en charge ». Néanmoins, cet obstacle sera plus important si elles vivent au village, le poids de la tradition étant plus important en milieu rural34.

En l’absence de soutien de la part du père, les difficultés financières rencontrées par la mère peuvent avoir des conséquences sur le bien-être de l’enfant. Dans un entretien accordé en octobre 2021 à la DIDR, Odile Parel, fondatrice de l’ONG Loucha qui milite contre les pratiques des mutilations sexuelles féminines dans la région de Man, évoque le cas d’une administrée de l’ONG.

R., 20 ans, commerçante, d’ethnie yacouba, originaire de la ville de Logoualé (région de Man) est mère d’un bébé de six mois, issu d’une union hors mariage. Son père a déclaré la naissance de l’enfant et reconnu sa paternité à l’état civil. En revanche, son épouse légitime et sa famille, attachés à la religion catholique, refusent d’accueillir l’enfant dans leur foyer. Le père, en difficulté financière en raison d’un accident, ne répond plus aux demandes de pension alimentaire formulées par la mère, malgré le plaidoyer de l’association dans ce sens. La mère doit assumer la charge de son bébé par ses propres moyens. Si elle bénéficie du soutien de sa mère et de sa famille, qui ont accepté l’enfant comme le leur, R. rencontre néanmoins des difficultés pour financer les soins médicaux de son enfant. Compte-tenu des évolutions juridiques, l’enfant de R. devrait néanmoins pouvoir bénéficier à l’avenir d’une part dans l’héritage paternel35.

Dans ce même entretien accordé à la DIDR, Odile Parel souligne que R., 20 ans est aussi née hors mariage de l’union de sa mère veuve, H., et d’un homme marié. A l’inverse, le père de R. n’a jamais accepté de reconnaitre son enfant, bien que sa mère lui a transmis son patronyme. Elle n’a jamais obtenu de pension alimentaire ou d’héritage, contrairement à l’épouse légitime et à ses enfants. Ses tentatives de médiation auprès du chef de canton, à l’époque où la Côte d’Ivoire traversait un conflit civil, sont restés lettre morte36.

« En général, explique Odile Parel, fondatrice de l’ONG Loucha, dans la mesure où ses enfants sont nés hors mariage, les hommes n’informent pas la femme dans le foyer, l’épouse [légitime] ». Par conséquent, « les dépenses, les charges de ces enfants retombent sur la maman et la famille maternelle ». Les enfants nés hors mariage sont aussi « mis à l’écart de la famille surtout lorsqu’il y a des biens ». Dans le cas où R. avait obtenu une situation financière favorable, les membres de sa famille paternelle « se seraient probablement manifesté pour exprimer leur fierté à l’égard de l’enfant. Mais lorsqu’ils [les enfants nés hors mariage] n’ont rien à apporter, ils sont non seulement la honte de la famille mais sont aussi rejetés, écartés de la famille »37.

32 République de Côte d’Ivoire, 05/2019, url

33 Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR) des Nations Unies, 07/01/2020, p. 28-29, url

34 CISR, 02/05/2016, url

35 PAREL Odile, ONG Loucha, « Demande d’informations sur les enfants nés en dehors du mariage en Côte d’Ivoire », 20/10/2021 au 17/11/2021, [courriels adressés à la DIDR]

36 PAREL Odile, ONG Loucha, « Demande d’informations sur les enfants nés en dehors du mariage en Côte d’Ivoire », 20/10/2021 au 17/11/2021, [courriels adressés à la DIDR]

37 PAREL Odile, ONG Loucha, « Demande d’informations sur les enfants nés en dehors du mariage en Côte d’Ivoire », 20/10/2021 au 17/11/2021, [courriels adressés à la DIDR]

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Bibliographie

Sites web consultés entre septembre et novembre 2021.

Textes juridiques

République de Côte d’Ivoire, Loi n° 2019-574 du 26 juin 2019 portant Code pénal, Journal Officiel, 10/07/2019,

http://www.famille.gouv.ci/public/documents/doc_drcc/loi_2019-574_portant_code_p%C3%A9nal.pdf

République de Côte d’Ivoire, Loi ° 2019-573 du 26 juin 2019 relative à la succession, Journal Officiel, 16/07/2019,

http://www.famille.gouv.ci/public/documents/doc_drcc/loi_2019-573_sur_la_succession.pdf

République de Côte d’Ivoire, Loi n° n° 64-377 du 7 octobre 1964, relative à la paternité et à la filiation, modifiée par la loi n° 83-799 du 2 août 1983, 02/08/1983,

http://editions-alexandrie.com/subscription/texte/12236-loi-n---64-377-du-7-octobre-1964--relative-a-la- paternite-et-a-la-filiation--modifiee-par-la-loi-n---83-799-du-2-aout-1983

Organisations intergouvernementales

Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme (HCDH) des Nations Unies, Convention relative aux droits de l’enfant, adoptée et ouverte à la signature, ratification et adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 44/25 du 20 novembre 1989, 20/11/1989,

https://www.ohchr.org/fr/professionalinterest/pages/crc.aspx

Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme (HCDH) des Nations Unies, Les organes des traités des droits de l’homme, Statut des ratifications pour la Côte d’Ivoire, s.d.,

https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/TreatyBodyExternal/Treaty.aspx?CountryID=42&Lang=FR

Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture (OAA) des Nations Unies, Base de données Genre et le Droit à la Terre, Côte d’Ivoire, Cadre juridique national, Mécanismes juridiques d’héritage et de succession, s.d.,

https://www.fao.org/gender-landrights-database/country-

profiles/listcountries/nationallegalframework/inheritancelegalmechanisms/fr/?country_iso3=CIV

Institutions nationales

Commission de l'Immigration et du Statut de Réfugié (CISR) du Canada, « Côte d'Ivoire : information sur la situation des femmes éduquées qui vivent seules, qu'elles soient célibataires ou divorcées, particulièrement à Abidjan et à Bouaké; information indiquant si elles peuvent obtenir un emploi et un logement; services de soutien qui leur sont offerts (2014-avril 2016) », 02/05/2016,

https://www.refworld.org/docid/585a82f04.html

Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme de Côte d’Ivoire, publication du 03/05/2019, Facebook, https://m.facebook.com/MinistereJusticeCI/photos/a.486171061737769/839827209705484/?type=3&s ource=57

République de Côte d’Ivoire, « Déclaration liminaire de la Côte d’Ivoire lors de la présentation de son rapport de mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant (Genève, 20-21 mai 2019) », 05/2019,

https://tbinternet.ohchr.org/Treaties/CRC/Shared Documents/CIV/INT_CRC_STA_CIV_34960_F.docx

Gouvernement de Côte d’Ivoire, « Justice : Le gouvernement engage des réformes pour renforcer les droits des personnes et de la famille », 27/03/2019,

https://www.gouv.ci/_actualite-article.php?recordID=9862&d=1

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9 République de Côte d’Ivoire, Loi n° 2016-886 portant Constitution de la République de Côte d’Ivoire, Journal Officiel, 09/11/2016, http://www.caidp.ci/uploads/52782e1004ad2bbfd4d17dbf1c33384f.pdf

Think tanks, universités et centres de recherches

DIAHA-YAO Perle Audrey, « Rapport sur le droit de la nationalité : Côte d’Ivoire », European University Institute, Robert Schuman Centre for Advances Studies, Global Citizenship Observatory, 03/2021, https://cadmus.eui.eu/bitstream/handle/1814/70656/RSCAS_GLOBALCIT_CR_2021_9.pdf?sequence

=3

DESGREES DU LOU Annabel, « Conjugalité en Afrique. Au-delà de la sexualité, les leçons d'une épidémie », Études, 2014/2 (février), https://www.cairn.info/revue-etudes-2014-2-page-21.htm

VIDAL Claudine, « La maîtresse, un enjeu symbolique des années soixante-dix », dans Sociologie des passions. (Côte-d'Ivoire, Rwanda), sous la direction de Vidal Claudine. Paris, Karthala, « Les Afriques », 1991, https://www.cairn.info/sociologie-des-passions--9782865373109-page-161.htm

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Références

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