VIVRE SA SEXUALITÉ AVEC LE VIH
Dr Patrick Papazian
Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris
5 facettes* de la sexualité avec le VIH
Chemsex U=U
Sexualité senior
Migrant.e.s Femmes
* choix partiel et (presque) partial lié à ma pratique
5 facettes de la sexualité avec le VIH
Chemsex
U=U
Sexualité senior
Migrant.e.s Femmes
AFRAMED
VIH / HÉPATITES 3èmeédition
Quelles conséquences dans la vie intime ?
• 87%
connaissent la notion de TasP• Amélioration de la communication avec les partenaires dans
2/3
des cas
Quelles conséquences dans la vie intime ?
• Abandon du préservatif envisagé par
3 personnes sur 10
seulement
• Amélioration de la vie sexuelle pour
3 personnes sur 10
(6 sur 10 ne voient pas de changement)
U=U... à l’international
• 25 pays : 47 % de répondants-es en Europe, 22 % en Amérique du Nord (États-Unis et Canada), 9,6 % en Asie, 9,3 % en Amérique Latine, 7,5 % en Afrique du Sud et 5 % en Australie.
• 2/3 des répondants-es (66,5 %) ont déclaré que leur médecin leur avait expliqué la notion de Tasp.
• 12,3 % n’avaient jamais entendu parler du Tasp.
• Les hommes gays et bisexuels avaient plus tendance à aborder le Tasp (71 %) en comparaison avec les hommes hétérosexuels (58 %) et les femmes hétérosexuelles (65 %).
• Dans quatre pays d’Asie (Chine, Japon, Corée du Sud et Taiwan), seulement 51 % des répondants-es avaient discuté du Tasp avec leur médecin. Un constat similaire en Amérique Latine (Argentine, Brésil, Chili et Mexique) avec seulement 61 %.
• Les pays avec le meilleur taux de réponse positive à la question « Abordez-vous le Tasp avec votre médecin ? » étaient la Suisse (87 %), l’Autriche (84 %) et l’Australie (80 %).
Okoli C et al. Undetectable equals untransmittable (U = U): awareness and associations with health outcomes among people living with HIV in 25 countries. Sexually Transmitted Infections, online ahead of print, 30 July 2020. Calabrese SK & Mayer KH. Stigma impedes HIV prevention by stifling patient–provider communication about U = U. Journal of the International AIDS Society 23: e25559, 2020 (open access).
U=U : une « libération » ?
• Sur la question parfois délicate de parler de son statut sérologique ouvertement à son entourage, il est intéressant de noter que
20 % des personnes
qui ignoraient le Tasp étaient à l’aise pour en parler contre33 % dans le groupe des personnes qui en parlent
avec les professionnels-les de santé.
U=U : une « libération » ?
• Etude qualitative sur 34 PVVIH
• Qualité de vie sexuelle encore à améliorer : difficultés
d’annonce, peur de transmettre.
LA RÉVOLUTION U=U,
dans le milieu médical et dans la société
LA RÉVOLUTION U=U,
dans le milieu médical et dans la société
Dans les médias grand public...
2018 -
2021 -
« Stigmate » VIH évalué par la GLAAD (Gay and Lesbian Alliance Against Defamation)
• Enquête quantitative en janvier 2021 sur 2517 adultes vivant aux USA
• 53% des personnes ne sont pas à l’aise avec l’idée d’avoir un soignant vivant avec le VIH
• Seules 42% sont d’accord avec l’idée qu’une PVVIH sous
traitement efficace ne peut pas transmettre le VIH
= 5 PROBLÈMES !
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5 problèmes
• Pas de consensus sur la formulation (U=U, I=I... ? AUTRE ?)
• Message mal connu par les professionnels de santé hors VIH (quel niveau de preuve ? En suis-je convaincu ? pas certain de devoir ou pouvoir transmettre le message)
• Message mal intégré par certains patients
(reste très théorique, pas d’intégration à leur vraie vie)
• Message peu connu du grand public
• Même connu et intégré, message n’impactant pas forcément la vie sexuelle (raison versus émotions...)
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Récit de consultation
Anne, 27 ans
Infirmière, hétérosexuelle, Vit avec le VIH depuis 3 ans,
« Je peux venir vous voir tous les 3 mois pour que vous me le répétiez ? ça me fait du bien »
5 facettes de la sexualité avec le VIH
Chemsex
U=U
Sexualité senior
Migrant.e.s Femmes
Quelles données objectives chez les HSH ?
Prévalence 3 à 29% sur 8 études
(non-injectables), 1 à 50% sur 9 études (injectables)
Âge médian 32-42 ans mais disparités +++
Chemsex plus fréquent chez PVVIH dans
11 études mais difficile de conclure pour le slam (drogues injectables)
Quels effets attendus sur la sexualité ?
NON, ISOLEMENT
Quelle motivation ?
PERFORMANCE ?
Récit de consultation
Mathieu, 29 ans
Graphiste, HSH, séronégatif sous PrEP
« J’ai essayé la G et la 3 MMC ces dernières semaines,
vous en pensez quoi ? »
5 facettes de la sexualité avec le VIH
Chemsex U=U
Sexualité senior
Migrant.e.s Femmes
La parole est aux patient(e)s...
67 ans Docteur... 67 ANS ! Je pensais mourir à 35 et j’en ai 67. Je suis un vieux pédé séropo de 67 ans et vous croyez que je peux encore plaire ? Nous sommes un couple libre.
Mais les jeunes sont tellement coincés aujourd’hui.
J’ai tellement peur pour l’avenir. Ma dernière relation sexuelle remonte à 2003.
Date de découverte de ma séropositivité. Mais tout va bien, je me suis habituée à la solitude.
Les drogues m’aident à avoir plus de désir.
De toute façon ça ne marche plus. Faut que je me résigne : c’est plus pour moi.
Je me dégoûte, je dégoûte les autres, j’ai envie de me cacher dans un petit coin et de ne plus voir personne.
Je ne veux l’annoncer à personne.
Une enquête en EHPAD...
• Questionnaire adressé à 100 EHPAD de la région PACA (Bouches-du-Rhône, Hautes-Alpes et Var) tirés au sort
sur 327 au total
• 2 types de questionnaires :
médecin coordonnateur + soignants (Cadres/IDEC + 3 IDE ou AS)
• Appel téléphonique préalable
Naudet D et al. European Geriatric Medicine 2017. 28
Résultats de l’enquête
MEDECINS IDE, AS, CADRES/IDEC
QUESTIONNAIRE Réponse : OUI Réponse : OUI
Avez-vous ou avez-vous eu des résidents VIH positifsdans l’EPHAD dans laquelle vous exercez
actuellement ? 4 (8,2%) NA
Avez-vous eu des demandes de placements pour ce type de patients ? 6 (12,2%) NA
Avez-vous refusé l’admission de résidents VIH positifs? 1 (2%) NA
Etes-vous favorable à l’admission de résidents VIH positifs (virus du SIDA) dans
l’établissementdans lequel vous travaillez ? NA 162 (80,6%)
Motifs du refus ou de réserves pour l’admission de résidents VIH positifs 1 (2%) 66 (32,8%)
- Age trop jeune du patient (< 65 ans) NA 12 (18,2%)
- Peur de contamination des autres résidents NA 20 (30,3%)
- Peur de contamination du personnel soignant NA 32 (48,5%)
- Charge en soins trop lourde NA 18 (27,3%)
- Coût des traitements NA 13 (20,2%)
- Absence de formation sur cette pathologie NA 33 (50%)
Naudet D et al. European Geriatric Medicine 2017.
Femmes seniors
50 femmes afro/latino-américaines 50-69 ans vivant avec le VIH
• + de plaisir !
• Libération (ménopause)
• Les problèmes viennent des partenaires
• Composer avec un corps moins jeune
• Sexe « non-protégé »
• Une « vieille dame n’a pas de sexualité, encore moins le VIH »
Récit de consultation
Hervé, 70 ans
Vit avec le VIH depuis 22 ans
« Vous écris d’un baraku comme disent les djeuns.
Qui ne me regardent pas mais j’ai repéré un vieux au fond.
Ou alors c’est un miroir. Je fonce.
Souhaitez-moi bonne chance.
SMS
5 facettes de la sexualité avec le VIH
Chemsex U=U
Sexualité senior
Migrant.e.s
Femmes
Récit de consultation
Originaire de Côte d’Ivoire
Arrivée en France fin juin 2018
Parcours migratoire : Mali puis a pris l’avion avec les papiers d’une autre personne
• Aidée « par une dame » (?)
• Commerçante de nourriture dans son pays
• Mari décédé, 3 enfants (2006, 2010, 2014)
• Raisons de la migration :
o Éviter un mariage forcé avec le frère du mari décédé (lévirat)
o Bénéficier d’une meilleure prise en charge de sa santé, aider ses enfants restés au pays.
Sexologie : ses premières phrases...
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« Je n’ai pas mal, c’est que je ne veux pas ».
« J’ai peur de lui transmettre le VIH et d’être en prison ».
« De toute manière je ne peux rien ressentir, j’ai été opérée ».
Quelle intervention
« sexologique » ?
43
44
Viols
Vivre VIH
3 mots clés
Vivre : intervention sociale
• Définition de la santé sexuelle de l’OMS : impose des conditions de vie
« décentes »
• Intervention auprès de l’OFII
• Réattribution de l’Allocation de Demandeurs d’Asiles
• Explications sur l’état de santé de la patiente : au-delà du VIH, traumatismes psychologiques multiples liés à la sexualité (viols)
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Sexologie
• Mariage forcé et violences conjugales de son mari âgé de « plus de 60 ans »
• Viols à répétition pendant le parcours migratoire (« 3 hommes qui l’ont violée » au Mali)
• Peur d’être violée par l’homme qui l’héberge
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Enquête française ANRS-PARCOURS
(1)• Enquête transversale biographique (2012-2013)
• 3 échantillons représentatifs (VIH, VHB, Médecine Générale)
• Patients originaires d’Afrique subsaharienne
• Âgés de 18 à 59 ans
• Vivant en Ile-de-France
• Recrutés en soins (services VIH, services VHB, centre de médecine générale)
• Effectifs : échantillon VIH n=926, échantillon VHB n=779, échantillon Médecine Générale n = 763
(groupe de référence)
• Questionnaire individuel (CAPI*)
• Grille biographique de trajectoires
• Résidentielle, professionnelle, conjugale, familiale, de santé...
• Questionnaire médical renseigné par le médecin référent
1. Desgrées du Loû A. Lert F. Parcours. Parcours de vie et de santé des Africains immigrés en France, éd. La Découverte, Paris, 2017. 47
*Computer Assisted Personal Interviewing (entretien assisté par ordinateur)
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Viols
• En retard à la dernière consultation car... était en gynécologie... qui a confirmé... ce qu’elle soupçonnait ➔ grossesse de 6 semaines
• Viol par son logeur. Ne veut surtout pas donner une suite judiciaire (« il pourrait apprendre que je suis séropositive »)
• S’interroge sur les possibilités d’IVG, n’a pas osé en parler au gynécologue
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VIH
• Double-causalité :
• Au-delà de la cause « biologique » (transmission par le défunt mari)
• Besoin de comprendre « pourquoi moi ? », « pourquoi maintenant ? »
• Intervention de forces invisibles : ancêtres, esprits, Dieu...
• La maladie a toujours un sens (quelle que soit la culture ?)
« Ma mère était maudite dans la communauté »
(Cf Professeur Olivier BOUCHAUD « Médecine des voyages et tropicale », Abrégé Masson)
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5 facettes de la sexualité avec le VIH
Chemsex U=U
Sexualité senior
Femmes
Migrant.e.s
• Femmes : 2X plus d’arrêt de la sexualité que les hommes (42% vs 23%)
• Facteurs prédisposant : âge, fardeau social du VIH
• Facteur « protecteur » : en parler régulièrement avec un partenaire.
Effets d’une intervention brève (« GPS »)
Réduction de 43% de comportements sexuels à
risque à 3 mois
Moins de sexe « compulsif »