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RÉGIE DES MARCHÉS AGRICOLES ET ALIMENTAIRES DU QUÉBEC

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Academic year: 2022

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Dossier : 250-05-17-01

Décision : 12166

Date : 4 avril 2022

Président : André Rivet

Régisseuses : Carole Fortin

Judith Lupien

OBJET : Demande de bene esse en exemption autorisant Les Éleveurs de porcs du Québec à effectuer certains paiements au titre de frais de vente en commun ou subsidiairement ordonner le paiement à même les contributions des producteurs de porcs

LES ÉLEVEURS DE PORCS DU QUÉBEC

Organisme demandeur Et

OLYMEL SEC

Mis en cause

DÉCISION

LE CONTEXTE

[1] La production et la mise en marché des porcs au Québec sont encadrées par le Plan conjoint des producteurs de porcs du Québec1 (le Plan conjoint), par divers règlements pris en vertu de celui-ci et par une convention de mise en marché.

[2] Les Éleveurs de porcs du Québec (les ÉPQ) appliquent le Plan conjoint. Ils représentent l’ensemble des producteurs de porcs et, à ce titre, ont négocié la Convention de mise en marché des porcs 2019-2022 (la Convention) qui fixe les conditions de mise en marché du porc produit au Québec.

1 RLRQ, c. M-35.1, r. 280.

(2)

[3] En l’absence d’une organisation accréditée pour les représenter, les acheteurs de porcs sont tous parties à la Convention et ont participé à la négociation et à l’arbitrage de certains termes de celle-ci.

[4] Olymel SEC (Olymel) est l’une des entreprises signataires de cette Convention.

[5] Du 28 avril au 31 août 2021, l’usine d’Olymel située à Vallée-Jonction est paralysée par une grève. Il s’en suit une augmentation du nombre de porcs en attente et la nécessité de rediriger vers d’autres abattoirs les porcs ne pouvant plus être abattus à Vallée-Jonction.

[6] Olymel prend en charge le détournement de ces porcs vers son abattoir de l’Ouest canadien ainsi qu’auprès d’autres abattoirs hors Québec.

[7] Comme le prévoit la Convention, Olymel réclame aux ÉPQ le partage à parts égales de la baisse de prix obtenu à la suite du détournement de porcs de même que les frais de transport supplémentaires des porcs auprès d’un autre abattoir.

[8] Les ÉPQ ne contestent pas devoir des sommes à Olymel, sous réserve d’une vérification par eux des montants réclamés.

[9] Le 13 décembre 2021, les ÉPQ s’adressent à la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec (la Régie) pour déterminer la méthode de financement de ces dépenses.

[10] Le 8 février 2022, les ÉPQ modifient leur demande afin d’ajouter d’autres dépenses liées à la disposition de porcs en surplus, en plus de celles associées à la grève à Vallée-Jonction.

Les autres dépenses ajoutées sont les suivantes :

a. l’achat auprès d’Olymel de 20 000 crochets pour permettre plus d’abattages au Québec;

b. le versement à Olymel d’une compensation de 50 $ par carcasse pour les frais additionnels qu’elle a encourus pour l’abattage de porcs au-delà de 92 500 porcs par semaine;

c. les coûts de courtage pour l’abattage de porcs trop lourds;

d. la vente à perte et aux frais des ÉPQ de 12 400 porcelets ainsi que la moitié des pertes encourues par Olymel pour la disposition de 60 000 porcelets.

[11] Les ÉPQ souhaitent, conformément à la résolution adoptée lors de l’assemblée générale spéciale (AGS) du 5 novembre 2021, répartir l’ensemble de ces coûts entre tous les producteurs et l’amortir sur une période de 12 mois compte tenu de l’importance des sommes en cause. Lors de la séance publique, l’ensemble des factures d’Olymel n’étant pas toutes reçues, la validation des sommes dues à Olymel restait à être complétée. Les ÉPQ précisent avoir convenu avec Olymel que l’ensemble des factures doit être reçu au plus tard le 28 février 2022.

(3)

[12] Olymel a reçu des ÉPQ une copie de courtoisie de la demande faisant l’objet du présent dossier. Dans une lettre datée du 14 février 2022, le mis en cause écrit que « […] puisque la quotité de la réclamation d’Olymel SEC ne serait pas discutée devant la Régie […] elle n’entendait pas présenter d’observation […] ».

QUESTIONS EN LITIGE

[13] La Régie doit déterminer si elle doit accorder une exemption permettant aux ÉPQ de répartir sur une période de 12 mois les montants dus à Olymel par le biais d’une déduction au titre de frais de mise en marché ou si ces montants doivent être acquittés par la perception d’une contribution.

ANALYSE

[14] La Régie juge qu’une exemption n’est pas nécessaire puisqu’elle estime que la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche2 (la Loi) accorde aux offices les outils permettant de traiter les dépenses de la nature de celles encourues par les ÉPQ. La Régie constate que le Règlement sur les contributions peut être modifié afin d’y ajouter une contribution pour rembourser Olymel.

[15] Au moment de la séance publique, la vérification des factures d’Olymel liées à la grève à Vallée-Jonction n’était pas complétée.

[16] Les autres dépenses ajoutées à la demande des ÉPQ concernent des dépenses extraordinaires encourues dans le cadre de la gestion des abattages en période de pandémie.

Les conséquences majeures de la pandémie sur les marchés et l’opération des chaînes d’abattage couplées aux impacts du conflit de travail survenu à Vallée-Jonction ont créé une situation que les ÉPQ qualifient de « tempête parfaite » dans la mise en marché des porcs.

[17] Au final, les ÉPQ estiment à environ 20 millions de dollars l’ensemble des dépenses qu’ils doivent financer.

[18] Les ÉPQ jugent que ces dépenses constituent des frais de mise en marché. Ils souhaitent, par équité, en répartir le remboursement entre l’ensemble des producteurs et, compte tenu de l’importance des sommes en cause, amortir ce remboursement sur une période de 12 mois.

[19] L’article 57 du Règlement sur la production et la mise en marché des porcs3 ne permettant pas un tel amortissement, les ÉPQ souhaitent voir la Régie reconnaitre que ces dépenses constituent des frais de mise en marché et obtenir d’elle une exemption afin de pouvoir amortir ce remboursement sur 12 mois.

 57. Les Éleveurs remettent au producteur le produit de la vente en commun calculé conformément à l’annexe 6, selon le poids net de la carcasse chaude et l’indice de

2 RLRQ, c. M-35.1.

3 RLRQ, c. M-35.1, r. 281.

(4)

paiement de chaque porc mis en marché par ce producteur selon la grille de classement applicable. Ce prix correspond au prix payé aux Éleveurs par tous les acheteurs au cours d’une même semaine de livraison y compris les porcs vendus en surplus, duquel sont déduits les contributions, les frais de mise en marché, les dépenses et ajustements liés à la vente en commun prévus à l’annexe 6 et les déductions pour défaut de qualité, auquel est ajoutée toute prime ainsi que toute pénalité prévue à une entente particulière concernant le producteur, et auquel sont ajoutées les compensations pour retard d’abattage et perte d’indice ainsi que les frais de transport prévus à l’article 48.

(notre soulignement)

[20] La Régie comprend que le prix ainsi que les frais décrits à l’article 57 se rapportent à la même période de temps, ce qui n’est pas le cas des dépenses concernées par la présente demande.

[21] La Régie ne met pas en doute que les mesures adoptées par les ÉPQ pour résorber les conséquences de la grève à l’usine de Vallée-Jonction couplées à celles de la pandémie ont été prises dans un contexte d’urgence. Elles apparaissent également avoir été prises dans l’intérêt de l’ensemble des producteurs. La Régie souligne à cet égard la collaboration obtenue d’Olymel et constate que les ÉPQ estimaient qu’il s’agissait de la meilleure approche leur permettant d’écouler les porcs en surplus.

[22] Avec respect, que chacune des dépenses engagées constitue ou non des frais de mise en marché n’a pas d’importance.

[23] Les ÉPQ souhaitent répartir ces dépenses à l’ensemble des producteurs et les amortir sur 12 mois. Il s’agit d’un choix légitime qui apparait raisonnable et qui rejoint le vœu des producteurs comme en témoigne la résolution adoptée par les délégués lors de l’AGS du 5 novembre 2021. Cela dit, l’obtention d’une exemption est-elle vraiment le moyen approprié pour atteindre les objectifs des ÉPQ?

[24] Le pouvoir d'exemption que possède la Régie est un pouvoir discrétionnaire à utiliser avec circonspection dans le cadre de situation exceptionnelle. Il vise à permettre d'offrir, dans des cas particuliers que la règlementation ne peut prévoir, une solution qui tout en n'étant pas conforme au règlement n'en déroge pas de l'esprit et des objectifs. C'est ce que rappelle la Régie dans sa Décision 116884 :

 [31] Ce caractère exceptionnel réfère à un contexte unique qui s’infère de circonstances particulières affectant directement ou indirectement le demandeur. L’analyse doit être faite en gardant à l’esprit l’objectif de maintenir une mise en marché efficace et ordonnée14. Il faut également tenir compte de l’objectif visé par les dispositions de la convention ou du règlement concernées par la demande d’exemption15.

(références omises)

4 Les Élevages Madystar SENC et Les Producteurs de lait du Québec, 2019 QCRMAAQ 146 (Décision 11688).

(5)

[25] Ce pouvoir d'exemption ne peut être utilisé comme un raccourci pour remplacer le recours aux dispositions prévues à la Loi. Un principe reconnu dit que le législateur ne parle pas pour ne rien dire. Il nous faut en conclure que si un pouvoir est spécifiquement énoncé dans la Loi, cette avenue doit être retenue par un office pour instaurer l'outil dont il a besoin. C'est ce que dit la Régie dans sa Décision 117475 :

 [23] Comme l’écrit la Cour suprême dans Subilomar Properties c. Cloverdale5 : C’est évidemment un truisme qu’aucune législation, loi ou règlement, ne doit être interprétée de manière que certaines parties en soient considérées comme simplement superflues ou dénuées de sens […].

 [24] Si un article de la Loi prévoit nommément le pouvoir que veut se donner l’Alliance, celle-ci doit se soumettre aux formalités à respecter pour la création d’un fonds visant à garantir le paiement lorsqu’un acheteur est en défaut de paiement ou, même, pour faire une avance de paiement. Cette interprétation de la Loi est conforme aux dispositions de la Loi d’interprétation6 :

 41.1 Les dispositions d’une loi s’interprètent les unes par les autres en donnant à chacune le sens qui résulte de l’ensemble et qui lui donne effet.

 [25] Cette interprétation permet également d’assurer la cohérence et l’harmonie entre les divers pouvoirs réglementaires que peuvent exercer les offices en vertu de la Loi.

(références omises)

[26] Les ÉPQ, à titre d’office responsable de l’application d’un plan conjoint, disposent de larges pouvoirs en vertu de la Loi. Ils possèdent notamment celui de percevoir des contributions pour payer les dépenses découlant de l’application du Plan conjoint, des règlements pris dans le cadre de ce plan ainsi que de l’application de la Convention.

[27] Dans le présent cas, l’article 123 de la Loi répond à la situation décrite par les ÉPQ et aux objectifs qu’ils poursuivent :

 123. Les producteurs réunis en assemblée générale convoquée à cette fin peuvent prendre des règlements pour :

1° modifier le montant de la contribution prévue au plan;

2° classer les producteurs en groupes et déterminer pour chaque groupe le niveau de contribution exigible de chaque producteur en faisant partie pour l’application du plan, des règlements et de la présente loi;

3° imposer une contribution spéciale pour payer les frais d’application d’une disposition d’un plan, d’un règlement ou de la présente loi;

4° imposer une contribution spéciale pour faire face aux pertes résultant de la mise en marché du produit visé par le plan, qu’il soit ou non produit par le producteur tenu au paiement de la contribution;

5° imposer une contribution spéciale pour permettre l’égalisation ou le rajustement entre producteurs des sommes d’argent que rapporte la vente du produit visé par le plan pendant toute période que l’office peut déterminer;

5 Alliance des propriétaires forestiers des Laurentides et de l’Outaouais, 2020 QCRMAAQ 8 (Décision 11747).

(6)

6° imposer une contribution spéciale pour permettre à l’office de payer sa quote-part du fonctionnement et des activités d’une chambre de coordination et de développement;

7° imposer, à l’ensemble des producteurs ou à ceux qui satisfont à certains critères, une contribution spéciale pour l’application d’un règlement pris en vertu de l’article 100.1 et pour respecter les obligations contractées à l’égard du fonds spécial établi pour l’application de ce règlement.

[28] Que les sommes réclamées par Olymel, lorsqu’elles seront acceptées par les ÉPQ, soient perçues par une déduction au titre de frais de mise en marché ou par la voie d’une déduction au titre d’une contribution, au final l’effet sera le même.

[29] Les ÉPQ peuvent ainsi soumettre à la Régie une demande visant à prévoir une contribution leur permettant de rembourser les sommes dues à Olymel conformément aux dispositions de l’article 9 du Règlement sur les contributions des producteurs de porcs6 :

 9. Les contributions perçues sont utilisées pour l’administration et l’application du Plan et des règlements.

POUR CES MOTIFS, LA RÉGIE DES MARCHÉS AGRICOLES ET ALIMENTAIRES DU QUÉBEC :

REJETTE la demande d’exemption des Éleveurs de porcs du Québec;

ACCUEILLE la demande subsidiaire des Éleveurs de porcs du Québec;

ORDONNE aux Éleveurs de porcs du Québec, conformément aux dispositions du Règlement sur les contributions des producteurs de porcs, de rembourser les sommes payables à Olymel SEC à partir des contributions.

(s) André Rivet (s) Carole Fortin

(s) Judith Lupien

Me Louis Coallier, Dufresne Hébert Comeau inc.

Pour Les Éleveurs de porcs du Québec

Me Mathieu Leblanc-Gagnon, Fasken Martineau DuMoulin SENCRL Pour Olymel SEC

Séance publique tenue par moyen technologique Zoom le 15 février 2022 et diffusée en direct sur YouTube.

6 RLRQ, c. M-35.1, r.273.

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