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Fonctionnement et efficacité du comité d’audit : une analyse des interactions entre les participants

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Academic year: 2021

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DAUPHINE RECHERCHE EN MANAGEMENT (DRM)

FONCTIONNEMENT ET EFFICACITÉ DU COMITÉ D’AUDIT

UNE ANALYSE DES INTERACTIONS ENTRE LES PARTICIPANTS

THÈSE

pour l’obtention du titre de

DOCTEUR EN SCIENCES DE GESTION

(arrêté du 7 août 2006)

présentée et soutenue publiquement par :

Tiphaine COMPERNOLLE

Le 21 juin 2011

JURY

Directeurs de thèse : Monsieur Bernard COLASSE

Professeur émérite à l’Université Paris-Dauphine

Madame Chrystelle RICHARD

Professeur associé à l’ESSEC Business School

Rapporteurs : Madame Christine POCHET

Professeur à l’IAE de Paris

Monsieur Peter WIRTZ

Professeur à l’Université Lumière – Lyon 2

Suffragants : Monsieur Jean BEDARD

Professeur à l’Université Laval

Madame Isabelle HUAULT

Professeur à l’Université Paris-Dauphine

Monsieur Carlos RAMIREZ

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L’université n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les thèses : ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs

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Mes premiers mots s’adressent à mes directeurs de thèse. Je voudrais remercier le Professeur Bernard Colasse qui m’a permis d’obtenir les premiers financements pour mener à bien cette thèse, qui m’a fait confiance. Tout au long de ce travail, ses relectures et ses remarques toujours pertinentes ont enrichi ma réflexion et ont amélioré cette recherche. Qu’il en soit remercié. Il dit souvent n’être pas véritablement mon directeur de thèse mais je n’en suis pas si sure… Je voudrais adresser toute ma gratitude au Professeur Chrystelle Richard qui m’a guidée, conseillée et encouragée tout au long de ce parcours. C’est une personne aux formidables qualités humaines et scientifiques et elle est pour moi un modèle à suivre.

Les Professeurs Christine Pochet et Peter Wirtz ont accepté d’être les rapporteurs de ce travail. Je leur en sais profondément gré. Je remercie également les Professeurs Jean Bédard, Isabelle Huault et Carlos Ramirez pour leur participation à ce jury de thèse.

Je remercie particulièrement le Professeur Christine Pochet pour le regard qu’elle a porté sur mon travail en juillet dernier lors de la présoutenance et pour les conseils qui en ont suivi. Ma reconnaissance va également au Professeur Jean Bédard pour les réflexions toujours éclairantes qu’il a su prodiguer sur mon travail à différentes étapes.

Je remercie également les chercheurs que j’ai rencontrés ici et ailleurs et qui, au travers de leurs remarques, suggestions et interrogations sur mon travail ont su faire avancer ma réflexion. Je pense à Michael Power qui m’a accueillie à la London School of Economics, à Andréa Mennicken, mais aussi à Yves Gendron, Laura Spira, Mahbub Zaman et Fabrizio Panozzo.

Je tiens à exprimer ma gratitude aux professionnels qui m’ont reçue et répondue avec bienveillance et gentillesse. Une telle recherche n’aurait pu voir le jour sans eux.

Mon passage à l’Université Paris-Dauphine a été marquant et, somme toute, agréable. Diverses personnes y ont contribué. Je souhaite exprimer ma reconnaissance à l’ensemble des enseignants-chercheurs du Crefige pour leur sollicitude. Un grand merci à Madame Pelatan pour

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qui j’ai partagé de bons moments.

Je remercie également l’Université Laval qui m’a accueillie en son sein depuis le début de l’année tout en me permettant de finir cette thèse dans de bonnes conditions. Cela m’a donné l’occasion de découvrir de nouvelles personnes avec qui j’espère pouvoir mener de nouveaux projets de recherche.

Toute ma reconnaissance va à mes relecteurs : Jean-Pierre, Inès, Karine et Abir. Je remercie également ceux qui m’ont aidé administrativement ou proposer leur aide pour déjouer les difficultés kilométriques qui me séparent de Paris : Anne-Laure, Rouba et Valérie.

Enfin, mes dernières pensées vont vers ceux qui partagent ma vie. Je pense à Sébastien, mon conjoint, qui m’a encouragée à m’engouffrer dans l’aventure de la thèse, qui m’a soutenue et suivie dans mes projets toujours plus lointains, qui a partagé mes joies et mes peines, qui m’a entourée de son affection, qui a relu l’entièreté de cette thèse alors que je ne suis pas sure que le sujet l’inspirait vraiment. Je pense aussi à ma Clémentine qui, par sa joie de vivre, son optimisme et sa tendresse, a rendu ces années de thèse moins pénibles. Ma dernière pensée est pour le petit bout au fond de moi qui aura eu l’immense patience d’attendre que j’achève ce travail pour montrer le bout de son nez.

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REMERCIEMENTS...5

SOMMAIRE...9

TABLE DES ABBREVIATIONS...12

INTRODUCTION GENERALE...13

Partie 1 – Entre transparence et opacité : le fonctionnement et l’efficacité du comité d’audit ...23

CHAPITRE 1LE COMITE D’AUDIT, UN SURVEILLANT AU SERVICE DE LA TRANSPARENCE ET DE LA CONFIANCE...25

Section 1 L’approche normative : un comité d’audit pour surveiller, pour donner confiance et pour… imiter ...26

1. Le comité d’audit pour renforcer la confiance par la surveillance : l’exemple américain ... 27

2. Un comité d’audit par imitation ... 41

Section 2 L’approche théorique sous-jacente : la théorie de l’agence...53

1. La centralité de la théorie de l’agence pour les textes normatifs sur la gouvernance d’entreprise ... 53

2. Une surveillance pour accroître la transparence et la confiance ... 62

Section 3 Les travaux « positivistes » : démontrer l’efficacité du comité d’audit, démontrer l’utilité des textes normatifs ...70

1. Les coûts d’agence comme déterminants de la mise en place de comités d’audit (efficaces) ... 71

2. Les travaux empiriques cherchant à confirmer l’efficacité des comités d’audit ... 80

CHAPITRE 2OUVRIR LA BOITE NOIRE QU’EST LE COMITE D’AUDIT...91

Section 1 Le fonctionnement et l’efficacité du comité d’audit : des inconnues ...93

1. Au-delà des illusions et d’un « expectation gap », la question du fonctionnement en pratique du comité d’audit... 93

2. L’efficacité du comité d’audit : un concept à questionner ... 107

Section 2 L’éclairage donné par les recherches alternatives sur le fonctionnement et l’efficacité du comité d’audit...121

1. L’importance du sentiment de confort dans le fonctionnement et l’efficacité du comité d’audit ... 121

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CHAPITRE 3METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE...155

Section 1 Des éléments de réflexivité : épistémologie, démarche et « présupposés théoriques » ...156

1. Un positionnement interprétatif... 156

2. Influences théoriques : quelques métaphores ... 167

3. La démarche de recherche... 184

Section 2 Des précisions sur la collecte des données, des exemples d’analyse...199

1. La collecte des données par entretiens ... 199

2. Un travail progressif d’analyse des données ... 227

Partie 2 – Le processus du comité d’audit : des interactions au service d’un contrôle social ...249

CHAPITRE 4LES DIFFERENTES INTERACTIONS AU COURS DU PROCESSUS DU COMITE D’AUDIT ...251

Section 1 Des interactions en coulisses aux interactions théâtrales...254

1. Les interactions préparatoires aux réunions du comité d’audit ... 255

2. Au cours des réunions du comité d’audit, le temps des présentations ... 265

3. Les coulisses pour créer les impressions « justes » chez les administrateurs lors de la (re)présentation... 289

Section 2 Quand les administrateurs deviennent acteurs : le jeu des questions et réponses, le compte rendu ...306

1. La préparation et le déroulement du jeu des questions et réponses... 307

2. Les administrateurs : de spectateurs à acteurs... 328

Section 3 Les conversations en tête-à-tête avec le président du comité d’audit ...341

1. Les tête-à-tête institutionnalisés par le président du comité... 341

2. Les tête-à-tête suscités par la société ou par les commissaires aux comptes ... 350

CHAPITRE 5LE FONCTIONNEMENT DU COMITE D’AUDIT : ENTRE RISQUES ET CONFIANCE...361

Section 1 Interagir avec le comité d’audit : une source de risques ...363

1. Un risque de transparence pour le management... 363

2. Un risque de rôle pour les commissaires aux comptes... 369

3. Un risque politique pour les auditeurs internes ... 379

Section 2 Du côté des administrateurs : une double stratégie de réassurance et de mise en confiance relative ...388

1. Interagir avec précaution pour éviter d’être perçu comme un censeur... 389

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1. Le fonctionnement du comité d’audit : conséquence des motivations des acteurs, conséquence

de leurs interactions et négociations... 424

2. Une confiance négociée et renégociée dans le temps... 435

CHAPITRE 6L’EFFICACITE DU COMITE D’AUDIT : L’EXPRESSION D’UN CONTROLE SOCIAL....445

Section 1 Une visibilité, source d’autodiscipline ...447

1. Une visibilité au service de la discipline ... 447

2. Une visibilité au service de l’indépendance des commissaires aux comptes ... 460

Section 2 Une influence suggestive ...467

1. De la suggestion à l’influence : la figure de « l’autrui généralisé » ... 468

2. Les bases de la construction de cette influence suggestive ... 479

CONCLUSION GENERALE...499

BIBLIOGRAPHIE...511

ANNEXES...535

TABLE DES MATIERES...605

TABLE DES SCHEMAS...611

TABLE DES TABLEAUX...613

TABLE DES ENCADRES...614

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AICPA American Institue of Certified Public Accountants ACI Audit Committee Institute

AFEP Association Française des Entreprises Privées AMEX American stock Exchange

AMF Autorité des Marchés Financiers BRC Blue Ribbon Committee

CAC Commissaire aux Comptes

CNCC Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes CNPF Conseil National du Patronat Français

COSO Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission IAR Interpretive Accounting Research

IFA Institut Français des Administrateurs

IFACI Institut Français de l’Audit et du Contrôle Internes IFRS International Financial Reporting Standards FRC Financial Reporting Council

LSF Loi de Sécurité Financière

MEDEF Mouvement des Entreprises de France NASD National Association of Securities Dealers NYSE New York Stock Exchange

SEC Securities Exchange Commission SOX Sarbanes-Oxley Act

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Introduction générale

La gouvernance d’entreprise, depuis les années 1990, est devenue une préoccupation importante pour le monde des affaires et pour le monde académique (Gomez, 2003 ; Leblanc et Gillies, 2005 ; Drori, 2006). L’apparition de multiples codes de bonne gouvernance dans différents pays (Treadway Commission, 1987 ; Cadbury, 1992 ; Hampel, 1998 ; Viénot, 1995, 1999 ; BRC, 1999 ; Werder, 2000) et le nombre grandissant d’articles de recherche sur le sujet en attestent. Si le terme de gouvernance a aujourd’hui perdu son caractère novateur, les exigences qu’il recouvre demeurent et se sont même renforcées. La gouvernance d’entreprise est désormais une des dimensions sur lesquelles les investisseurs s’arrêtent pour évaluer les opportunités de placements. Ainsi, en 2009, la place financière de Paris a été rétrogradée de la 6ème à la 11ème place du classement mondial des centres financiers les plus attractifs produit par le World Economic Forum. La fragilité de la gouvernance des sociétés cotées françaises par rapport aux standards internationaux est une des principales raisons avancées à ce changement1.

La gouvernance d’entreprise constitue une architecture complexe impliquant de multiples mécanismes (Bessire, 2005). La pièce maîtresse de cette architecture n’est autre que le conseil d’administration, institution aussi vieille que les sociétés anonymes elles-mêmes, dont on attend depuis les années 1990 plus d’efficacité. Plusieurs recommandations ont été produites pour en améliorer le fonctionnement : la séparation de la fonction de président du conseil de celle de directeur général, l’introduction d’administrateurs indépendants en son sein, la mise en place de comités internes. Le but de ces recommandations est d’assurer un meilleur contrôle des dirigeants au profit des actionnaires. D’ailleurs, les deux comités qui ont fait l’objet d’une attention plus spécifique sont le comité d’audit et le comité des rémunérations, comités dont les attributions touchent des domaines sensibles en termes de conflits d’intérêt entre actionnaires et dirigeants (Wirtz, 2005). Ces comités revêtent une importance particulière en constituant les lieux privilégiés d’expression des administrateurs indépendants.

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Si le comité des rémunérations n’est pour l’heure pas encore obligatoire en France (un projet de loi est cependant en cours pour en imposer la mise en place aux sociétés cotées), le comité d’audit s’est par contre légalement imposé via l’ordonnance du 8 décembre 2008, transposant les modifications apportées à la 8ème directive européenne. Le comité d’audit a désormais un statut particulier dans la gouvernance d’une société cotée. Il est le deuxième organe de gouvernance, après le conseil d’administration, dont l’utilité et la désirabilité sont reconnues légalement. La mission de « suivi » que l’ordonnance du 8 décembre 2008 lui a attribuée touche des domaines assez larges et surtout sensibles : le processus d’élaboration de l’information financière, le contrôle interne, la gestion des risques et l’audit légal. De manière générale, le comité d’audit doit s’assurer de la qualité et de la transparence des états financiers et des processus qui les ont générés. Ce comité occupe, aux côtés des auditeurs légaux, un rôle de maintien de la confiance des marchés dans la qualité de l’information financière.

Il s’agit d’une lourde tâche, non dénuée de risques pour les administrateurs qui y siègent. Ils ne doivent pas faillir. Pourtant, les « affaires » ont ponctué et ponctuent encore la vie économique. Dès lors, ces administrateurs ne sont pas à l’abri de voir leur réputation ternie par un scandale financier ou par la découverte d’une fraude dans la société dans laquelle ils s’acquittent d’un tel mandat. La découverte de fraudes de grande envergure amène toujours des questions sur l’efficacité du comité d’audit et sur la qualité des administrateurs qui le composent. Tel a été le cas dans l’Affaire Enron (Frison-Roche, 2003), dans l’affaire Rhodia2, peut-être moins dans l’affaire Société Générale (Colasse, 2009). L’étendue de leur responsabilité est un point sur lequel les administrateurs de comité d’audit sont particulièrement sensibles. En témoignent les travaux de l’Institut Français des Administrateurs (IFA, 2009), de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF, 2010) ou du cercle des juristes3 qui portent spécifiquement sur le sujet. Cette montée d’inquiétude quant à la responsabilité d’un tel comité fait suite à l’ordonnance du 8

2 Un certain nombre d’accusations ont été portées dans la presse sur l’inefficacité du comité d’audit de Rhodia et, en

particulier, sur celle de son président, Thierry Breton : « Lasteyrie/Rhodia : le comité d’audit présidé par Breton a une responsabilité », Agence France Presse le 28 juin 2005 ; « L’affaire Rhodia rattrape Thierry Breton à Bercy »,

L’expansion du 27 juin 2005.

3 Plusieurs articles de presse mentionnent la mise en en place d’un groupe de travail du cercle des juristes sur la

responsabilité des administrateurs du comité d’audit : « Le comité d’audit ne doit pas déresponsabiliser les autres administrateurs », L’AGEFI Quotidien du 26 juin 2009 ; « Comité d’audit des sociétés : des contours juridiques flous », Les Echos du 25 juin 2009.

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décembre 2008. Ce texte de loi définit les missions du comité d’audit de manière très générale, pouvant créer des attentes démesurées envers ce mécanisme par rapport à ce qu’il peut réellement accomplir.

On attend donc beaucoup de choses du comité d’audit, notamment qu’il contribue à rendre l’information financière plus transparente. Paradoxalement, si l’ordonnance définit ses domaines d’intervention et lui attribue une mission générale de « suivi », elle reste silencieuse quant aux diligences que doivent mener les administrateurs du comité d’audit pour exercer leurs missions. L’AMF (2010) s’est employée à préciser la signification du terme « suivi » utilisé par l’ordonnance. Pour elle, la mission générale du comité d’audit est une mission de « surveillance active », non continue, se déroulant plutôt de manière périodique. L’AMF reste silencieuse sur les procédures pratiques que doivent mettre en œuvre les administrateurs pour mener à bien cette mission de « surveillance active ». Si on se tourne du côté des autres textes normatifs (les codes de bonne gouvernance, les recommandations de différents horizons), ceux-ci insistent particulièrement sur le fait que les comités d’audit doivent être efficaces, que l’indépendance et la compétence financière sont des caractéristiques qui peuvent contribuer à cette efficacité. Ils précisent néanmoins très peu les diligences que les administrateurs doivent mener et nous donnent finalement assez peu d’éléments sur le mode de fonctionnement de ces comités. Ce sont alors les documents produits par les cabinets d’audit – la littérature grise – qui fournissent le plus de détail (pour exemple, PwC, 2003a ; Deloitte, 2003b). Quant aux sociétés, elles restent tout aussi floues dans la manière dont elles décrivent l’activité de leur comité d’audit dans leur rapport annuel. Voilà, pour exemple, l’extrait d’un document de référence de 2010 d’une société du CAC 40 décrivant l’activité de son comité d’audit :

« En 2010, le Comité s’est réuni à six reprises, avec un taux de présence de 100 %.

Le [date de réunion n°1], il s’est fait rendre compte des activités d’audit et de contrôle interne dans le Groupe en 2009 par le Directeur de l’audit interne, a examiné le plan d’audit annuel pour 2010 puis il a rendu compte et fait ses recommandations au Conseil d’administration. Le [date de réunion n°2], il s’est réuni avant la réunion du Conseil d’arrêté des comptes, thème auquel il a consacré l’essentiel de ses travaux et entendu les Commissaires aux comptes, au sujet de leurs rapports sur les comptes et la présentation du Directeur financier sur les risques et engagement hors-bilan. Il a, par ailleurs, examiné les prestations effectuées par X en 2009. Le [date de réunion n°3], le Comité s’est réuni pour examiner les options comptables pour les comptes semestriels et les missions d’audit interne de la Holding lui ont été présentées.

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En vue de l’arrêté des comptes semestriels par le Conseil du [date de réunion du conseil], le Comité s’est réuni l’avant-veille pour procéder à l’examen des comptes.

La réunion du [date de réunion n°5] a porté sur les conclusions de l’audit diligenté par Y révélant des fraudes et des irrégularités commises au sein de Ybis et leurs impacts comptables. Le [date de réunion n°6], il a examiné les points sur le contrôle interne et sur les mesures prises suite à la révélation de fraudes et irrégularités au sein de Ybis.

Depuis le début de l’année 2011, le Comité d’audit s’est réuni deux fois, en présence de tous ses membres.

Le [date de réunion n°1 – 2011], il s’est fait rendre compte des activités d’audit interne dans le Groupe (missions d’audit et suivi des plans d’action) en 2010 par le Directeur de l’Audit Interne, a examiné les options comptables pour les comptes annuels puis l’étendue de la mission des Commissaires aux comptes ainsi que leur indépendance et leur programme général des travaux d’audit pour, à la suite, faire ses recommandations au Conseil d’administration.

Le [date de réunion n°2 – 2011], il s’est réuni avant la réunion du Conseil d’arrêté des comptes, thème auquel il a consacré l’essentiel de ses travaux et entendu les Commissaires aux comptes, au sujet de leurs rapports sur les comptes. Il a, par ailleurs, examiné les prestations effectuées par X en 2010. Le Comité a fait part au Conseil du [date de réunion du conseil] de ses travaux et préconisations. »

Dès lors, qu’apprend-t-on dans cet extrait de rapport annuel ? On sait que les administrateurs se réunissent, qu’ils examinent, qu’on leur rend des comptes… Il s’agit de termes plutôt flous qui ne nous apprennent pas grand-chose sur la « surveillance active » que déploient réellement les administrateurs. Cette description que propose une société quelconque du CAC 40 n’explicite finalement que très peu le fonctionnement de son comité d’audit. Elle décrit les grands domaines qui ont été revus au cours des réunions, elle ne précise pas comment, en pratique, se sont déroulés les échanges entre les personnes présentes par exemple. Le compte-rendu des réunions reste confidentiel. Dès lors et paradoxalement, si les comités d’audit sont des organes producteurs de transparence, ils sont entourés d’une certaine opacité.

La description des activités du conseil d’administration ou du comité des rémunérations est aussi peu développée que celle portant sur les activités du comité d’audit. Celui-ci n’est pas une exception. Pourquoi alors s’intéresser au comité d’audit plutôt qu’au conseil d’administration ou, encore, au comité des rémunérations, organes de gouvernance dont le fonctionnement est, lui aussi, entouré d’une certaine opacité ? La raison principale est que le comité d’audit constitue un organe de gouvernance assez original. En effet, les comités de rémunération, les conseils d’administration rassemblent essentiellement des administrateurs. Dans le cas des conseils

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d’administration, il s’agit d’une rencontre entre le comité exécutif et les administrateurs indépendants. A l’inverse, le comité d’audit regroupe des acteurs aux statuts et aux professions divers qui contribuent tous, d’une manière ou d’une autre, à la gouvernance d’entreprise. Cohen et al. (2004) considèrent d’ailleurs la gouvernance d’entreprise comme une mosaïque, c'est-à-dire comme la rencontre de multiples acteurs et institutions. Le comité d’audit rassemble non seulement des administrateurs (en majorité indépendants) mais aussi des membres de la direction financière (le directeur financier, le directeur comptable, le directeur du contrôle de gestion, le responsable de la trésorerie, etc.), les commissaires aux comptes de la société, le responsable de la fonction audit interne et, parfois, le responsable juridique. Tous ces acteurs d’origines diverses se retrouvent, ensemble en un même temps et en un même lieu, pour parler d’information financière et de contrôle interne. En cela, les réunions du comité d’audit constituent des moments particuliers d’expression de la gouvernance d’une société.

D’un point de vue académique, la gouvernance d’entreprise telle qu’elle se pratique a encore peu fait l’objet de recherches. C’est d’ailleurs ce que souligne Gendron (2009) qui appelle de nouvelles études sur la « gouvernance en action ». Les travaux ne sont pas nombreux à s’être intéressés, même indirectement, au fonctionnement réel des comités d’audit (Spira, 1998, 1999a, 1999b, 2002, 2003, 2006 ; Gendron et al., 2004 ; Gendron et Bédard, 2006 ; Turley et Zaman, 2007 ; Beasley et al., 2009 ; Sarens et al., 2009). Ces recherches se sont principalement concentrées sur la question, non moins intéressante, de l’efficacité. Une étude particulièrement dédiée au fonctionnement du comité d’audit pourrait tout à fait se justifier et permettre, secondairement, de questionner la notion d’efficacité quelque peu différemment.

Si le comité d’audit constitue un moment particulier de la gouvernance d’une entreprise, il constitue également, comme son nom l’indique, un mécanisme d’audit. Il est « étiqueté » (Power, 2005) comme tel. Son implantation en Grande Bretagne (comme en France) relève du phénomène de l’« explosion de l’audit », c'est-à-dire de l’explosion d’une idée, comme le constate Power (1994). Cette idée a aussi pénétré la gouvernance des entreprises. En conséquence, étudier et comprendre le fonctionnement du comité d’audit contribue à étudier, à la fois, la « gouvernance en action » et l’« audit en action » dans une de ses nouvelles formes et, ainsi, de répondre à l’appel de Hopwood (1997). En cela, nous suivons la tradition de recherche

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initiée par ce dernier qui vise à étudier le phénomène comptable comme un fait social (Chapman et al., 2009 ; Ramirez, 2009).

Dans cette recherche, nous cherchons donc à répondre à une question centrale : comment fonctionnent en pratique un comité d’audit ? Nous nous intéressons également, en deuxième intention, à la question de l’efficacité : dans quelle mesure un comité d’audit est-il efficace ? En effet, le fonctionnement d’un comité d’audit conditionne un tant soit peu son efficacité (DeZoort et al., 2002 ; Bédard et Gendron, 2010) ou, du moins, la perception que peuvent en avoir les acteurs qui vivent le comité d’audit. Pour répondre à ces questions, plusieurs choix ont été faits : le premier concerne le contexte, le deuxième l’angle d’approche et le troisième la méthode employée.

En ce qui concerne le contexte de la recherche, nous nous sommes intéressées aux sociétés du CAC 40. Ce contexte est spécifique. Les sociétés qui appartiennent à cet indice sont soumises à une grande publicité comparativement aux autres sociétés cotées françaises. Cette situation les amène à être particulièrement attentives aux standards internationaux, y compris en termes de gouvernance. Ce sont par ailleurs, en France, les premières entreprises qui ont adopté un comité d’audit après la parution du premier rapport Viénot en 1995. Dès lors, la « pratique » du comité d’audit y est relativement « rodée » pour s’être quelque peu « cristallisée » et, dans le même temps, suffisamment récente pour que les acteurs puissent mesurer l’apport d’un tel comité. En bref, nous étudions une période de changement dans la gouvernance des entreprises françaises et une conséquence de la « société de l’audit » (Power, 2005). Ce contexte sied donc particulièrement bien à une recherche s’insérant dans les champs, à la fois, de la « gouvernance en action » et de l’« audit en action ».

Comme nous l’avons souligné un peu plus haut, étudier le fonctionnement d’un comité d’audit revient à étudier un groupe qui rassemble des professionnels venus d’horizons et de mondes différents. Cela implique qu’un comité d’audit, en termes de fonctionnement mais aussi d’efficacité, rencontre des problématiques qui lui sont propres. Ce constat d’hétérogénéité des acteurs nous a conduites à approcher le fonctionnement du comité d’audit à travers les interactions qu’entretiennent ces professionnels. En effet, leurs interactions sont d’une nature particulière, ils n’ont pas l’habitude d’évoluer ensemble, ils appartiennent à des mondes

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différents. Nous montrons alors que ces interactions sont porteuses d’incertitudes et de risques pour les acteurs impliqués. Ils mettent en jeu leur réputation. Elles peuvent également constituer la base d’une construction d’un sentiment de confiance entre ces acteurs. Risques et confiance sont des thématiques centrales pour comprendre le fonctionnement et l’efficacité du comité d’audit et les enjeux qui se cachent derrière ce moment particulier de gouvernance.

D’un point de vue méthodologique, nos choix ont été guidés par le caractère exploratoire de notre questionnement de recherche et par des questions d’accessibilité au terrain. La démarche est inductive et vise à comprendre une réalité socialement construite. Notre compréhension du fonctionnement et de l’efficacité du comité d’audit s’appuie sur la compréhension qu’en ont les professionnels. Nous avons pu recueillir et analysé les impressions de 59 professionnels investis dans le processus du comité d’audit de 32 sociétés du CAC 404. A ce jour et à notre connaissance, aucune étude de cette envergure n’a encore porté sur le « comité d’audit en action ». Cette étude permet d’arriver à des résultats originaux mais retrouvent également des éléments soulevés dans des recherches antérieures.

La gestion des impressions (Goffman, 1973a) apparaît comme un phénomène central dans le fonctionnement d’un comité d’audit. Si lors des présentations proposées aux administrateurs, seuls les acteurs amenés à rendre des comptes au comité sont en situation de représentation, les administrateurs sont dans cette même situation lorsqu’ils posent des questions. Cette gestion réciproque des impressions fait l’objet d’une forte préparation qui se déroule en coulisses. Les commissaires aux comptes occupent un rôle particulier au cours des réunions du comité d’audit : s’ils sont partenaires de la représentation produite par le management de la société, ils sont également garants de la transparence de celle-ci.

Le risque de perdre la face lors des réunions est une des motivations centrales du comportement de gestion des impressions des acteurs. Ils n’appréhendent pas ce risque de la même façon selon leur positionnement et leur statut. Les commissaires aux comptes le perçoivent comme un « risque de rôle », un risque de remise en cause de leur identité et de leur intégrité. Les membres de la direction financière le perçoivent, au-delà du « simple » risque de perdre la face

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Certaines personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenues, notamment les administrateurs et les commissaires aux comptes, ont une expérience des comités d’audit qui dépasse largement les 32 sociétés du CAC 40 que nous mentionnons ici.

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devant le comité d’audit, comme un risque de perdre la face devant le conseil d’administration, du fait de la transparence du comité vers le conseil, un « risque de transparence ». Les auditeurs internes le perçoivent comme un « risque politique », le risque de devoir choisir entre perdre la face vis-à-vis du comité d’audit ou vis-à-vis de la direction générale.

Quant aux administrateurs, ils perçoivent un « risque d’opacité », c'est-à-dire le risque que leurs impressions soient gérées de manière cynique. Pour gérer ce risque, ils ont une double stratégie de comportement : une stratégie de réassurance (de confort) et une stratégie de mise en confiance de leurs interlocuteurs pour atténuer le risque de perdre la face perçu par ces derniers. Le président du comité d’audit est un acteur central dans la gestion de ce risque d’opacité. Il joue un rôle tout particulier lors des réunions officielles mais également en dehors de celles-ci, lors de « conversations en tête-à-tête ». Dans le cadre de ces interactions, le risque de perdre la face est moins fort, la parole plus libre.

A la rencontre de ces comportements, se construisent les interactions du processus du comité d’audit et, à plus long terme, les relations entre les participants. Des relations de confiance peuvent se développer. Cette confiance est le produit de négociations implicites entre les administrateurs et leurs interlocuteurs : les administrateurs agissent avec tact et s’efforcent de montrer l’attention particulière qu’ils accordent à la « face » de leurs interlocuteurs, ces derniers acceptent alors d’interagir avec eux de manière transparente. Cet accord tacite de confiance mutuelle est fragile, dépendant des personnes en présence.

L’efficacité du comité d’audit est une conséquence directe des risques et du sentiment de confiance ressentis par les acteurs qui rendent des comptes au comité d’audit. Cette efficacité se matérialise par un contrôle social réflexif sur ces acteurs : ils s’autocritiquent. Les risques ressentis, c'est-à-dire la possibilité d’être jugé et montré du doigt, les amènent vers l’autodiscipline. La confiance envers les administrateurs les amène à écouter et suivre les suggestions de ces derniers, demeurant cependant les seuls décisionnaires. Les administrateurs peuvent avoir une influence suggestive.

En définitive, le fonctionnement et l’efficacité du comité d’audit sont appréhendés comme le fruit des négociations implicites entre les participants au processus du comité d’audit au cours

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de leurs interactions, entre confiance et risques, entre transparence et opacité, entre tact et pouvoir.

Pour rendre pleinement compte de notre étude, nous la positionnons tant dans la littérature sur notre domaine de recherche que dans les différentes traditions épistémologiques et méthodologiques (partie 1). Deux approches du comité d’audit sont possibles. La première, classique, appréhende le comité d’audit de l’extérieur. Le comité d’audit constitue un organe efficace de surveillance qui accroît la transparence de l’information comptable à l’égard des marchés financiers pour en entretenir la confiance (chapitre 1). Après avoir fait le constat que le comité d’audit constitue une boîte noire, la deuxième approche, dans laquelle se situe notre étude, cherche à en comprendre le contenu (chapitre 2). Cela nous amène à adopter une démarche inductive et compréhensive du fonctionnement et de l’efficacité du comité d’audit (chapitre 3). Une fois précisés notre positionnement et notre méthode, nous présentons les résultats de nos analyses (partie 2). Une première compréhension du fonctionnement du comité d’audit est proposée autour de la description des différents types d’interactions – préparation, représentation, conversation – qui forment le processus du comité d’audit (chapitre 4). Passant des interactions aux motivations des acteurs – les risques et la recherche de confiance –, une deuxième compréhension du fonctionnement du comité d’audit se dessine comme le fruit de négociations implicites entre les participants au processus (chapitre 5). Au-delà du fonctionnement du comité d’audit, risques et confiance sont les bases sur lesquelles se construit un contrôle social réflexif qu’exerce le comité d’audit, expression de son efficacité (chapitre 6). Le schéma suivant permet de synthétiser l’articulation générale de la thèse :

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Schéma n°1 Articulation générale de la thèse

Chapitre 2

Chapitre 1

Chapitre 4

Chapitre 6

Chapitre 5

Chapitre 3

Le comité d’audit : un « surveillant » au service de la transparence et de la confiance Approche « orthodoxe, externe » du

comité d’audit tenue par les textes normatifs, la théorie de l’agence,

les travaux « positivistes »

Ouvrir la boîte noire qu’est le comité d’audit

Approche alternative du comité d’audit

Un processus opaque, l’efficacité appréhendée comme une notion

relative

Approche par les interactions

Méthodologie de la recherche Positionnement interprétatif Démarche : du terrain à la théorie

Enquête par entretiens et analyse de contenu

Les différentes interactions au cours du processus du comité

d’audit

Interactions en coulisses Détection de signes d’alarme

Conversations en tête-à-tête Interactions théâtrales Jeu des questions et réponses

Compte-rendu

Le fonctionnement du comité d’audit : entre risques et confiance

Motivations : Risques de perdre la face et risque d’opacité Comportements : Gestion des

impressions, double stratégie de réassurance et de mise en confiance

Conséquences : Confiance négociée dans le temps

L’efficacité du comité d’audit : l’expression d’un contrôle social

Autodiscipline induite par la visibilité/observation, liée à l’intensité du risque de perdre la face

Influence suggestive, influence indirecte dépendante du niveau de confiance P A R T IE 1 : E n tr e tr a n sp a re n ce e t o p a ci P A R T IE 2 : D es i n te ra c ti o n s p o u r u n c o n tr ô le s o ci a l

(23)

Partie 1

E

NTRE TRANSPARENCE ET OPACITE

:

LE

FONCTIONNEMENT ET L

EFFICACITE DU COMITE D

AUDIT

Cette première partie se construit autour de trois chapitres. Le premier chapitre, qu’on peut qualifier d’introductif, nous permet de présenter l’institution du comité d’audit, organe de gouvernance existant à l’heure actuelle dans toutes les entreprises cotées françaises. Pour cela, il expose l’approche que nous avons qualifiée d’« orthodoxe » du comité d’audit : un comité dont le rôle est de surveiller efficacement pour accroître la transparence et, in fine, donner confiance au grand public. Le comité d’audit est alors appréhendé comme un mécanisme d’agence.

Cette approche orthodoxe des comités d’audit s’apparente surtout à une approche externe. En effet, nous savons peu de choses sur ces organes de gouvernance : les comités d’audit demeurent des boîtes noires hermétiquement closes (Spira, 1999a, 2002, 2006). Le deuxième chapitre nous permet de préciser notre questionnement de recherche qui s’éloigne de l’approche orthodoxe pour s’intéresser au contenu de ces boîtes noires. Nous y précisons notre objet de recherche – les interactions entre les participants au processus du comité d’audit – et notre objectif de recherche – la construction de l’efficacité du comité d’audit.

Ce type de questionnement appelle une méthodologie particulière. Nous en rendons compte dans le troisième chapitre. C’est ce chapitre qui permet d’ailleurs de mettre en lumière le design et la cohérence de la recherche, précisant l’articulation qui existe entre la problématique, la littérature, les données, l’analyse menée et les résultats (Royer et Zarlowski, 2007).

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Chapitre 1 Le comité d’audit, un surveillant au

service de la transparence et de la confiance

Les marchés financiers ont besoin de confiance, confiance régulièrement mise à mal par des scandales financiers et les fraudes. Le comité d’audit a été et est toujours perçu comme un organe de gouvernance capable d’entretenir la confiance des marchés financiers. Cette idée, nous semble-t-il, est à la fois soutenue par les textes normatifs sur les comités d’audit, par la position de la théorie d’agence, et par les travaux « positivistes » attachés à montrer l’efficacité de ces comités d’audit.

Au cours de la première section de ce chapitre, nous montrons d’ailleurs que les textes normatifs consacrent cette idée, établissant le comité d’audit en surveillant indépendant, compétent et efficace des processus d’élaboration de l’information financière et d’audit, de la gestion des risques. Ce corpus normatif s’est d’abord développé aux Etats-Unis. Ils ont été ensuite, directement ou indirectement, imités par d’autres pays dont la France. La deuxième section nous permet de souligner la parenté de pensée existant entre les textes normatifs et la théorie de l’agence. En effet, c’est bien un rôle de surveillance que la théorie d’agence attribue aux comités d’audit, surveillance indépendante garantissant la transparence des informations transmises aux marchés financiers, maintenant la confiance sur ces derniers. Quant à la plupart des travaux de recherche sur les comités d’audit adoptant une posture « positiviste », ils se sont employés à démontrer que les comités d’audit sont effectivement des surveillants efficaces, l’indépendance et la compétence constituant des facteurs explicatifs.

Ces développements nous permettent de souligner la proximité de ces trois approches – normative, théorique et « positiviste » – qui considèrent l’indépendance et la compétence (ou l’expertise financière) comme les vertus principales pouvant amener les comités d’audit vers une surveillance efficace, amenant la transparence et la confiance.

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Schéma n°2 Articulation du premier chapitre

Section 1 L’approche normative : un comité d’audit

pour surveiller, pour donner confiance et pour… imiter

Le comité d’audit a été créé aux Etats-Unis pour maintenir la confiance des marchés malgré l’existence de scandales financiers. Crise de confiance après crise de confiance, les normes sur les comités d’audit se sont développées pour rendre ces derniers plus indépendants, plus efficaces dans leur surveillance, plus compétents. L’idée du comité d’audit et les normes qui y sont associées se sont exportées dans d’autres pays, parce qu’elles constituaient une solution prête à l’emploi pour d’autres pays (isomorphisme mimétique), parce que ces normes de bonne gouvernance ont fini par être considérées comme des standards incontournables (isomorphisme normatif), parce qu’elles ont été imposées par l’Union européenne (isomorphisme coercitif).

Avoir un comité d’audit indépendant, compétent, chargé d’une mission de surveillance active (AMF, 2010) est désormais également la norme en France pour les sociétés cotées.

Le comité d’audit = un surveillant efficace, indépendant et compétent pour entretenir la confiance des marchés financiers

Corpus normatif développé aux Etats-Unis, repris par la France

Démontrer la surveillance efficace produite par les comités d’audit indépendants et compétents

Section 1

L’approche normative

Section 3

Les études « positivistes »

Section 2

L’approche par la théorie de l’agence Cercle vertueux de la gouvernance

Surveillance indépendante, efficace Transparence

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1. Le comité d’audit pour renforcer la confiance par la surveillance : l’exemple

américain

L’institution du comité d’audit a été créée et développée pour résoudre les problèmes récurrents de perte de confiance des marchés financiers, provoqués par des scandales et des fraudes. Chaque nouveau texte en matière de comité d’audit constitue un moyen pour tenter de résoudre une crise de confiance. C’est parce que le comité d’audit est présenté par ces textes normatifs comme un surveillant toujours plus efficace de la qualité des informations financières, du contrôle interne et de l’audit qu’il permet de restaurer cette confiance. Cette efficacité semble surtout reposer sur l’indépendance et la compétence des membres de ce comité.

Nous nous appuyons ici sur l’exemple américain pour étayer nos propos, puisque c’est là que s’est développé le corpus normatif portant sur les comités d’audit.

1.1. Une solution pour pallier à la perte de confiance générée par les scandales

financiers et les fraudes

1940 : l’affaire McKesson & Robbins et la naissance du comité d’audit

La pratique du comité d’audit – un groupe d’administrateurs investi dans le contrôle des comptes – est ancienne aux Etats-Unis puisqu’elle remonte à la première moitié du XIXème siècle (Flesher et al., 2005 ; Spira, 2006). Puis, pogressivement, les auditeurs professionnels se sont substitués aux administrateurs dans le contrôle des comptes, avec le développement de la profession comptable (Flesher et al., 1996), avec la complexité grandissante de la comptabilité des sociétés cotées et celle des règles fiscales (Zeff, 2003). Une perte de confiance quant à l’indépendance de l’audit mené par les administrateurs serait néanmoins la raison principale de leur disparition (Spira, 2006), rendant obligatoire le recours à un auditeur externe pour les sociétés cotées (Zeff, 2003).

Si c’est une perte de confiance qui a conduit le comité d’audit, au sens ancien du terme, à disparaître au profit des auditeurs externes, c’est paradoxalement une perte de confiance dans l’indépendance de ces derniers qui a conduit à la réapparition du comité d’audit, au sens moderne cette fois. C’est la Securities Exchange Commission (SEC) et le NYSE qui recommandent les premiers, en 1940, la mise en place d’un comité composé d’administrateurs externes, chargé de nommer l’auditeur de la société afin de préserver son indépendance à l’égard de la direction

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(Birkett, 1986). La promotion d’un tel comité par la SEC (Accounting Release No. 19) avait pour but de rassurer les marchés financiers suite à l’affaire McKesson & Robbins à la fin des années 1930. Rassurer et donner confiance est la raison première de la renaissance des comités d’audit, confiance rendue possible par l’indépendance d’un tel comité.

Plus largement, Birkett (1986) montre que les recommandations portant sur le comité d’audit se sont développées par à-coups. Chaque nouvelle vague de recommandations, suivie par une vague de mise en place de comités d’audit dans les entreprises, fait suite à des scandales financiers. Dès lors, selon elle, promouvoir le comité d’audit constitue une solution pour résorber les crises de confiance. La pratique du comité d’audit est née et s’est développée parce qu’elle a été considérée, et est toujours considérée, comme un moyen de rassurer le public. C’est ce que nous allons montrer dans les développements qui suivent.

Les années 1970 : une vague de scandales financiers, une vague de recommandations De 1940 à 1970, le comité d’audit fait peu parler de lui : aucune nouvelle recommandation n’apparaît. Par contre, les années 1970 constituent, selon Braiotta (1999), une période de perte de confiance dans la qualité de l’information comptable, suite à la découverte de financements politiques frauduleux par des entreprises, à la découverte de mouvements financiers illégaux vers l’étranger dans le sillage de l’affaire du Watergate, à la faillite controversée des caisses d’épargne américaines. Eichenseher et Schields (1985, p. 15-16) soulignent de la même façon le caractère agité de cette période, énumérant un certain nombre de cas de fraudes au cours de ces années.

En conséquence, plusieurs organismes et institutions s’intéressent au comité d’audit. C’est le cas de la SEC en 1972 (Accounting Series Release No. 123) recommandant à nouveau la mise en place du comité d’audit, puis en 1974 (Accounting Series Release No. 165) instaurant l’obligation pour les entreprises cotées de mentionner dans leur rapport annuel l’existence d’un comité d’audit. En 1976, c’est le tour du congrès américain d’étudier la possibilité d’instaurer l’obligation de mettre en place un comité d’audit, éventualité qui restera sans suite. En 1977, le congrès américain adopte néanmoins le Foreign Corrupt Act qui impose aux entreprises de tenir des comptes et d’avoir un système de contrôle interne. Certains voient alors dans le comité d’audit une manière de respecter cette nouvelle loi (Birkett, 1986). Le NYSE semble partager cet avis puisqu’il rend la mise en place des comités d’audit obligatoire en 1978. L’AICPA (American Institue of Certified Public Accountants) étudie également l’intérêt de rendre obligatoire le

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comité d’audit (Special Committee on Audit Committees) en 1978, la conclusion sera identique à celle du congrès même si l’AICPA demande à ses membres d’en promouvoir la mise en place.

Les années 1970, théâtre de scandales financiers, correspondent également à une période de renforcement du corpus normatif sur les comités d’audit en matière d’indépendance, pour entretenir la confiance du grand public. Ces années correspondent également à une période intense de création de comités d’audit dans les sociétés cotées (Harrison, 1987).

Ainsi, jusque dans les années 80, de nombreuses institutions promeuvent la mise en place des comités d’audit sans, si ce n’est le NYSE, projeter de lui conférer un caractère d’obligation. Il faut cependant noter qu’aucune de ces institutions ne précise réellement les missions d’un tel comité, hormis un but général de restauration de la confiance du public. Birkett (1986) y voit plus le signe d’une volonté de renforcer l’image de la gouvernance des entreprises auprès du grand public qu’une volonté de renforcer la qualité de la gouvernance elle-même :

« Une étude historique du développement des comités d’audit montre que toutes les parties intéressées attendent de ces comités qu’ils renforcent l’image de l’entreprise auprès du grand public. » (Birkett, 1986, p. 123)5.

Jusqu’ici, la simple préconisation de mettre en place un comité d’audit indépendant semble suffire à redonner confiance aux marchés financiers.

De la fin des années 1980 aux années 1990 : la montée de la « gouvernance » contre la fraude et le développement des codes

La décennie 1990 est marquée par la montée en puissance des questions de « gouvernance d’entreprise » (Leblanc et Gillies, 1995 ; Drori, 2006), illustrée par l’avènement du terme même de « gouvernance » (Drori, 2006). L’invention de la notion de gouvernance et l’importance prise par ce concept dans les années 1990 semblent répondre à une nécessité de décrire un projet global de réforme dont l’objet est de lutter contre les faits de corruption stigmatisés à l’époque. Le terme même de « gouvernance » est empreint d’une volonté de changement, un changement dans l’art de manager :

« Ainsi, même avant les affaires de fraudes d’entreprises rendues publiques aux Etats-Unis et en Europe, la corruption apparaît comme une préoccupation

5 “However, a historical review of the development of audit committees shows that all interested segments expect the

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mondiale, tout comme son réfrènement est perçu comme un sujet de politique sociale d’envergure mondiale. […] Et, avec l’extension de ces préoccupations, le terme “gouvernance” a été inventé pour cerner le mouvement général de réforme de management. »6 (Drori, 2006, p. 91)

Cette atmosphère de changement et cette volonté d’amélioration se matérialisent dans le monde des affaires par la production de nouveaux textes normatifs en matière de gouvernance d’entreprise. Pour ces textes, l’existence d’un comité d’audit ne suffit pas, celui-ci doit aussi être efficace. L’efficacité constitue la nouvelle caractéristique des comités d’audit pour être capables de restaurer cette confiance qui fait défaut. Ces textes apparaissent dès la fin des années 1980 aux Etats-Unis, notamment avec les recommandations de la Treadway Commission (1987) qui cherchent explicitement à rendre les comités d’audit plus efficaces pour limiter la fraude et maintenir la confiance. En 1992, le COSO (Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission) propose un manuel sur le contrôle interne dont le comité d’audit est une pierre angulaire. En 1994, le American Law Institute produit ses « Principles of Corporate Governance : Analysis and Recommandations ». En 1995, le Public Oversight Board (groupe de l’AICPA) propose ses recommandations en matière de gouvernance7. A la fin de la décennie 1990, dans la même mouvance, une autre commission est chargée de produire des recommandations pour améliorer l’efficacité des comités d’audit : il s’agit du Blue Ribbon Committee (BRC), officiellement établi par le NYSE et la National Association of Securities Dealers (NASD), qui produira en 1999 le « Report and Recommandations of the Blue Ribbon Committee on Improving the Effectiveness of Corporate Audit Committees ».8

Pour ne prendre que l’exemple du BRC, il semble évident que cette commission a explicitement pour but de restaurer la confiance des marchés financiers, en produisant des recommandations pour rendre les comités d’audit enfin efficaces. C’est du moins ce qui ressort des propos du président de la SEC, Arthur Levitt, qui présente cette initiative en septembre 1998 :

6 “Thus, even before the much-publicized cases of corporate misconduct in the United States and Europe, corruption

emerges as a worldwide concern, as did its curbing as a social policy subject to globalization. […] And, with the extension of these related concerns, the term ‘governance’ was coined to capture the overall movement for management reform.”

7 On peut se référer à la bibliographie du Blue Ribbon Committee (1999) pour avoir une idée du nombre de

recommandations touchant aux comités d’audit écrites aux Etats-Unis durant la décennie 1990.

8 C’est également à cette période qu’est écrit le code Cadbury (1992), le code Hampel (1998) en Grande Bretagne.

(31)

« Renforcer le processus du comité d’audit

Et, finalement, des comités d’audit qualifiés, engagés, indépendants et inflexibles représentent les gardiens de l’intérêt public les plus dignes de confiance. Malheureusement, les histoires de comités d’audit dont les membres connaissent insuffisamment les principes comptables de base ou n’osent pas véritablement poser de questions incisives abondent. En effet, j’ai entendu parler d’un comité d’audit qui se réunit seulement deux fois par an, avant la réunion normale du conseil, durant 15 minutes, et dont le déroulement se limite à une présentation sommaire.

Si on comparait cette situation avec un comité d’audit qui se réunit douze fois par an, avant chaque réunion du conseil, dont chaque membre a une formation financière, dont aucun membre n’a de liens personnels avec le président de la société, qui a son propre conseiller, où sont posées les questions dérangeantes au management et aux auditeurs externes et où, finalement, l’intérêt de l’investisseur est recherché.

La SEC se tient prête à prendre les mesures nécessaires si l’intérêt de ce dernier n’est pas protégé. Mais une réponse du secteur privé qui renforcerait le pouvoir des comités d’audit et qui éviterait une intervention du secteur public semble être un choix plus sage. J’ai le plaisir de vous annoncer que la communauté financière a accepté ce défi.

Pour contribuer à cet effort collectif contre la gestion des résultats, le New York Stock Exchange et la National Association of Securities Dealers ont accepté de sponsoriser un panel de spécialistes dont John Whitehead, ancien adjoint du secrétaire d’Etat et senior partner à la retraite de chez Goldman et Sachs, et Ira Millstein, juriste et illustre expert en gouvernance d’entreprise seront à la tête. Dans les prochains 90 jours, cette illustre commission développera un ensemble significatif de recommandations dont le but est de donner plus de pouvoir aux comités d’audit, de manière à ce qu’ils fonctionnent comme les ultimes gardiens des intérêts des investisseurs et de la responsabilité d’entreprise. Ils vont examiner les solutions possibles pour avoir les bonnes personnes faisant les bonnes choses et posant les bonnes questions. » (Extrait du discours d’Arthur Levitt, président de la SEC, du 28 septembre 1998 au N.Y.U. Center for Law and Business, intitulé « The ‘Numbers Game’ »9.

9 “Strengthening the Audit Committee Process

And, finally, qualified, committed, independent and tough-minded audit committees represent the most reliable guardians of the public interest. Sadly, stories abound of audit committees whose members lack expertise in the basic principles of financial reporting as well as the mandate to ask probing questions. In fact, I've heard of one audit committee that convenes only twice a year before the regular board meeting for 15 minutes and whose duties are limited to a perfunctory presentation.

Compare that situation with the audit committee which meets twelve times a year before each board meeting; where every member has a financial background; where there are no personal ties to the chairman or the company; where they have their own advisers; where they ask tough questions of management and outside auditors; and where, ultimately, the investor interest is being served.

(32)

Inspirer confiance semble être la principale tâche attribuée aux comités d’audit par les textes normatifs en matière de gouvernance d’entreprise. En appliquant les recommandations proposées, les comités d’audit seraient efficaces et dignes de confiance. Néanmoins, cela n’empêche pas l’arrivée de nouveaux scandales.

L’affaire Enron puis le Sarbanes-Oxley Act (SOX) pour rétablir la confiance

Moins de deux ans après le BRC, l’affaire Enron éclate, suivie d’un certain nombre d’autres scandales financiers (Worldcom, Parmalat, etc.), aux Etats-Unis et, plus largement, dans le monde, ébranlant la confiance des marchés financiers et du grand public dans la qualité de la gouvernance des entreprises et dans les comités d’audit. Ces entreprises semblaient toutes avoir mis en place les meilleures pratiques en matière de gouvernance, elles avaient mis en place un comité d’audit respectant les recommandations en vigueur. Enron était même considérée comme un modèle en termes de gouvernance et de transparence. L’effondrement de ces entreprises constitue une preuve flagrante de l’inefficacité des mécanismes de gouvernance.

Le congrès américain se lance alors dans une politique de restauration de la confiance des marchés financiers qui aboutira à la SOX en 2002. Pour cela, il lance une enquête et auditionne les hauts responsables et les auditeurs de l’entreprise Enron pour mettre en lumière les dysfonctionnements. Le rapport du congrès américain, diffusé auprès du grand public (Frison-Roche, 2003), montre et démontre en quoi la société ne respectait qu’en apparence les prescriptions de bonne gouvernance. Ce rapport contribue à montrer qu’Enron constitue un mauvais élève qui a mal appliqué les règles existantes. Ce rapport cherche surtout à démontrer que les règles de bonne gouvernance ou relatives à l’efficacité des comités d’audit, sont de bonnes règles. C’est leur non respect qui est problématique. On retrouve le phénomène décrit par Power (2005) quant à la pratique de l’audit financier : l’idée de l’audit n’est jamais remise en cause, seule une mauvaise pratique de l’audit peut l’être.

The SEC stands ready to take appropriate action if that interest is not protected. But, a private sector response that empowers audit committees and obviates the need for public sector dictates seems the wisest choice. I am pleased to announce that the financial community has agreed to accept this challenge.

As part eight of this comprehensive effort to address earnings management, the New York Stock Exchange and the National Association of Securities Dealers have agreed to sponsor a "blue-ribbon" panel to be headed by John Whitehead, former Deputy Secretary of State and retired senior partner of Goldman, Sachs, and Ira Millstein, a lawyer and noted corporate governance expert. Within the next 90 days, this distinguished group will develop a series of far-ranging recommendations intended to empower audit committees and function as the ultimate guardian of investor interests and corporate accountability. They are going to examine how we can get the right people to do the right things and ask the right questions.”

(33)

Pour rétablir la confiance, en plus de dissoudre le cabinet Arthur Andersen, la SOX est promulguée en 2002, reconnaissant l’utilité du comité d’audit au niveau fédéral. Ce texte de loi permet d’élever l’importance accordée à ce mécanisme de gouvernance. Dans l’année qui suit la promulgation de cette loi, une multitude de textes proposés par les cabinets d’audit reprennent les « nouvelles » mesures concernant les comités d’audit, renforçant le poids de la SOX (PwC, 2003a ; Deloitte, 2003a ; Deloitte, 2003b ; pour ne citer que quelques exemples). Dès lors, la SOX, ainsi que la multitude des recommandations qui accompagnent cette loi, ont ensemble contribué à restaurer la confiance dans les comités d’audit, en en donnant une image rassurante qui dépasse l’image de la pratique suspecte.

Il apparaît que chaque nouveau texte normatif portant sur les comités d’audit aux Etats-Unis constitue une réponse à l’existence de scandales financiers ou de fraudes mettant à mal la confiance des marchés financiers. Le comité d’audit est perçu comme une institution productrice de confiance.

1.2. Un comité d’audit qui surveille : Une confiance soutenue par l’efficacité,

l’expertise financière et l’indépendance

A chaque période de regain d’intérêt normatif pour les comités d’audit (liées à la méfiance du grand public) apparaissent de nouvelles contraintes pour ces comités et ce, pour demeurer une source de confiance.

Des recommandations en termes d’indépendance pour restaurer la confiance

Mettre en place un comité d’audit est recommandé par la SEC en 1940, parce qu’elle considère qu’un tel comité ne peut être composé que d’administrateurs externes, c'est-à-dire d’administrateurs qui n’appartiennent pas au management de l’entreprise. La SEC y voit une garantie pour qu’un tel comité puisse maintenir l’indépendance des auditeurs externes, à travers la nomination de ces derniers. La contrainte d’externalité s’applique ainsi au comité d’audit dès son apparition.

Pourtant, à la période suivante (les années 1970), l’exigence d’externalité n’est plus suffisante. Ainsi, en 1978, le NYSE remplace la règle en matière « d’externalité » en une règle plus stricte : la règle d’indépendance. Pour pouvoir se faire coter sur la place de New York, une entreprise doit avoir :

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« Un comité d’audit uniquement composé d’administrateurs indépendants du management et libres de toute relation qui, selon l’opinion du conseil d’administration, pourrait nuire à l’exercice du jugement indépendant que doit avoir un membre de comité d’audit. Les administrateurs affiliés à l’entreprise, cadres ou employés par elle, ou une de ses filiales, ne semblent pas pouvoir siéger en comité d’audit. » (New York Stock Exchange Listed Company Manual, section 3, Corporate Responsibility - Audit Committee, repris par la Treadway Commission, 1987, p 180.)10

Ne plus être membre du management de la société ne constitue plus une contrainte suffisante. Il faut désormais être dans une situation d’absence totale de conflits d’intérêts. C’est le conseil d’administration qui reste néanmoins juge de l’indépendance de ses membres. C’est donc lui qui détermine, in fine, la politique de l’entreprise en matière d’indépendance, qui peut être stricte ou laxiste.

Cela a d’ailleurs, semble-t-il, conduit à certaines dérives (Vicknair et al., 1993). Ces auteurs montrent que certains administrateurs, contrairement à ce qui pouvait être affiché par les entreprises, n’étaient indépendants que par déclaration et étaient, de fait, rattachés de façon plus ou moins directe au management de l’entreprise. Ce sont les administrateurs « gris » dont Vicknair et al. (1993) évaluent la portion dans les comités d’audit à un tiers environ. Néanmoins, l’indépendance restera une des caractéristiques centrales des comités d’audit.

Le comité d’audit érigé en surveillant efficace pour restaurer la confiance

La montée des questions de gouvernance d’entreprise (fin années 1980/années 1990) constitue une période où les contraintes pesant sur les comités d’audit se sont fortement rigidifiées. Deux textes de recommandations ont été particulièrement importants aux Etats-Unis : ceux de la Treadway commission (1987) et ceux du BRC (1999).

C’est en 1987 qu’est publié le Report of the National Commission on Fraudulent Financial Reporting, produit par la Treadway Commission. Ce texte normatif marque profondément la pratique des comités d’audit en renforçant drastiquement les contraintes et, surtout, en émettant l’idée que la mise en place d’un comité d’audit ne suffit pas, il faut aussi qu’il soit efficace pour

10 “An Audit Committee comprised solely of directors independent of management and free from any relationship

that, in the opinion of its Board of Directors, would interfere with the exercise of independent judgment as a committee member. Directors who are affiliates of the company or officers or employees of the company or its subsidiaries would not be qualified for Audit Committee membership.”

Figure

Tableau n°1  Synthèse des résultats quant aux déterminants de l’existence des comités  d’audit     Pincus et al
Tableau n°2  Le pouvoir explicatif des déterminants économiques quant à l’activité des  comités d’audit
Tableau n°3  Synthèse des résultats quant aux déterminants de la composition des comités  d’audit
Tableau n°4   Statuts de, et modes d’accès à la réalité
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