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Modélisation thermomécanique des disques de frein par
une approche eulérienne.
Thi Mac-Lan Nguyen-Tajan
To cite this version:
Thi Mac-Lan Nguyen-Tajan. Modélisation thermomécanique des disques de frein par une approche eulérienne.. Matériaux. Ecole Polytechnique X, 2002. Français. �pastel-00004110�
Thèse présentée pour obtenir le titre de
DOCTEUR DE L’ECOLE POLYTECHNIQUE
Spécialité : Mécanique des Solides
NGUYEN-TAJAN Thi Mac-Lan
Modélisation thermomécanique des disques de frein
par une approche eulérienne
Soutenue le 14 janvier 2002 devant le jury composé de :
MM. : P. LADEVEZE Président
G. DEGALLAIX Rapporteur
D. HIBBITT Rapporteur
M.H. MAITOURNAM Examinateur
J.J. THOMAS Examinateur
ABSTRACT
The objective of this thesis is to develop a numerical model of the thermal-mechanical behavior of an automotive brake disc, in order to assess its fatigue behavior. The approach gathers : new numerical strategies which use eulerian algorithms adapted to problems involving components subjected to a moving load ; a relevant modeling of the behavior of the material ; durability criteria adapted to the different damages undergone by the disc, taking account of the multi-axial and non-isothermal characteristics of the loadings.
A preliminary analysis of the physical phenomena occurring in the brake disc is led (high temperatures variations, severe thermal gradients in the disc, plastic deformations, friction, etc.) and their couplings (thermomechanical couplings, couplings between thermal phenomena and friction between the disc and the pads, etc. ) are analyzed. Then, a numerical modeling of the brake disc, based on realistic assumptions, can be proposed. This study can be realized thanks to the developments of new algorithms which save computational times. Their fundamental principle is to work not in the disc reference but in the loading’s one and to use eulerian coordinates in order to represent the structure movement. These algorithms are described in the thesis. At last, a strategy is proposed to analyze the brake disc durability, based on a “consistent approach” which includes the modeling of the loading, the modeling of the material behavior, an efficient numerical structural strategy and relevant fatigue criteria. The objective is to reach the same “degree of precision” in the different items in order to have a robust and useful tool for engineers in charge of the brake disc design.
RESUME
L’objectif de cette thèse est de proposer une modélisation du comportement thermomécanique des disques de frein automobiles pour la prédiction de leur tenue en fatigue. L’approche adoptée associe notamment : des stratégies numériques nouvelles qui reposent sur des algorithmes eulériens adaptés aux problèmes de pièces sous chargement mobile et répété ; une modélisation pertinente du comportement du matériau constituant les disques ; des critères de tenue adaptés aux différents endommagements subis par le disque, qui prennent notamment en compte le caractère multiaxial et anisotherme des sollicitations.
Dans un premier temps, est présentée une analyse des phénomènes physiques opérant dans un disque de frein en service (fortes amplitudes de température, gradients thermiques élevés, déformations plastiques, frottement disque /plaquette, etc. ) et de leurs couplages (couplages thermomécaniques, couplages contact disque/plaquettes et élévation de température, etc.). A partir de cette analyse, nous pouvons proposer une modélisation numérique du disque qui se fonde sur des hypothèses pertinentes. Cette modélisation utilise des algorithmes nouveaux qui permettent de diminuer considérablement les temps de calcul. Leur principe fondamental est de se placer dans un repère non plus lié à la structure mais au chargement et d’utiliser une approche eulérienne pour prendre en compte le mouvement de la structure dans ce repère. Ces algorithmes sont décrits dans cette thèse. Enfin, on propose une stratégie de dimensionnement qui repose sur une approche dite globale. Cette dernière consiste à proposer une modélisation des sollicitations, une modélisation du comportement du matériau, une stratégie de calcul de structure performant et des critères de tenue adaptés aux phénomènes d’endommagement observés. L’objectif est de donner un même « degré de
Remerciements
Je voudrais tout d’abord remercier Pierre Ladevèze, directeur du LMT de l’Ecole Normale Supérieure de Cachan, pour m’avoir fait l’honneur de présider mon jury de thèse.
J’adresse aussi mes plus vifs remerciements à David Hibbitt, fondateur et président d’HKS, éditeur du logiciel Abaqus, et à Gérard Degallaix, directeur de recherche au LML de l’Ecole Centrale de Lille, pour avoir accepté la lourde tâche d’être rapporteurs de mon travail. Leurs relectures, leurs observations et les discussions que nous avons eues ont été très enrichissantes pour moi.
Je remercie également Laurent Eléna et Frédéric Vantalon, chefs successifs du projet « Dimensionnement d’un frein dissipatif » au sein de PSA pour avoir naturellement intégré mes travaux dans le projet.
Je tiens également à remercier André Bignonnet, chef du service MATE (Mécanique Appliquée, Technologies et Ecologie) de la Direction de la Recherche et de l’Innovation Automobile de PSA Peugeot-Citroën, pour avoir initié cette thèse (avec la participation de Catherine Sanjeu que je remercie également) et pour m’avoir si chaleureusement accueillie dans son service. Je voudrais aussi le remercier pour tous les précieux conseils qu’il m’a prodigués et pour la confiance qu’il m’a témoignée au cours de ces années. Ses compétences techniques et scientifiques (je dirais même sa «philosophie de travail »), ses qualités humaines et managériales font de lui un « modèle de chef ».
Je remercie très chaleureusement Ky Dang Van, directeur de recherche au Laboratoire de Mécanique des Solides de l’Ecole Polytechnique, et directeur de cette thèse. Son expérience, ses compétences et sa notoriété dans le domaine de la mécanique et de la fatigue des structures n’ont d’égal que sa gentillesse.
Enfin, je voudrais adresser toute ma profonde gratitude envers les deux personnes qui m’ont encadrée tout au long de ces années : Jean-Jacques Thomas, chef de l’équipe Thermomécanique Sollicitation et Fiabilité du service MATE de PSA, et Habibou Maitournam, chercheur au LMS et professeur adjoint à l’Ecole Polytechnique. Leur compétence professionnelle et leurs innombrables qualités inspirent le respect et l’estime de tous. Tout simplement, MERCI. Merci pour tout ce que j’ai appris et pour votre bonne humeur, et ce malgré vos légendaires emplois-du-temps surchargés. J’espère que nous aurons encore souvent l’occasion de travailler ensemble.
Je remercie tout le service MATE de PSA grâce auquel j’ai pu travailler dans un environnement exceptionnel. Je remercie aussi tous ceux que j’ai côtoyés au LMS : Nirina, Joumana, Ingrid, Tamim, Habib, Frédéric... au bon souvenir de nos moments d’amitié. Je remercie également Benoit et Ida pour leur participation au pot (même si cela a fait venir les pompiers !). Je remercie Benjamin et Frédéric pour leurs contributions à la thèse. Leurs travaux m’ont permis de gagner un temps précieux.
Je voudrais profiter de cette page de remerciements pour exprimer toute ma gratitude envers mes parents et ma famille pour la confiance qu’ils m’ont toujours témoignée, leur éducation et leur amour qui sont un cadeau inestimable.
Enfin, je remercie du fond du cœur mon époux, Serge. Son amour, son affection et son infaillible disponibilité ont été un merveilleux soutien au cours de ces années… pas toujours faciles ! Enfin, un petit clin d’œil à ma petite Mây, qui, dans le ventre de sa mère, a sagement assisté à toute la soutenance de thèse. Je leur dédie ce mémoire, ainsi qu’à tous les enfants qui suivront…
Table des mati`
eres
Introduction 1
1 Le disque de frein 7
1.1 Contexte g´en´eral . . . 7
1.2 Le syst`eme de freinage . . . 7
1.2.1 Fonction . . . 7
1.2.2 Les diff´erents types de frein `a friction . . . 8
1.2.3 Les mat´eriaux du frein `a disque . . . 12
1.3 Crit`eres d’´evaluation d’un syst`eme de freinage . . . 13
1.3.1 Efficacit´e . . . 14
1.3.2 Confort . . . 15
1.3.3 Endurance . . . 16
1.3.4 Autres crit`eres . . . 19
1.3.5 Ordre de priorit´e selon les domaines d’application . . . 20
1.4 Analyse des ph´enom`enes physiques . . . 21
1.4.1 Ph´enom`enes thermiques . . . 21
1.4.2 Ph´enom`enes m´ecaniques . . . 26
1.5 Enjeux et difficult´es de l’´etude . . . 29
1.5.1 Enjeux . . . 29
1.5.2 Multiplicit´e et couplage des ph´enom`enes . . . 29
1.5.3 Globalit´e d’une ´etude . . . 30
1.6 Les approches existantes et leurs insuffisances . . . 31
1.6.1 Difficult´es de la simulation num´erique . . . 31
1.6.2 Les hypoth`eses classiques . . . 32
1.6.3 Exemples d’´etude dans le domaine ferroviaire . . . 34
1.6.5 Analyse des r´esultats num´eriques . . . 37
1.7 Objectif et strat´egie . . . 38
2 Algorithmes adapt´es aux structures soumises `a des chargements mobiles 43 2.1 Contexte g´en´eral . . . 43
2.2 Diverses m´ethodes de r´esolution . . . 44
2.3 Principe des algorithmes d´evelopp´es . . . 45
2.4 Algorithme TRC . . . 46
2.4.1 Description du probl`eme . . . 46
2.4.2 Equations du probl`eme thermo´elastoplastique continu ´ecrites dans le rep`ere du chargement . . . 46
2.4.3 Equations discr´etis´ees du probl`eme . . . 49
2.4.4 R´esolution num´erique du probl`eme m´ecanique . . . 53
2.4.5 Sch´ema de l’algorithme T.R.C. m´ecanique pour un comportement ´elastoplastique cin´ematique lin´eaire . . . 55
2.4.6 Impl´ementation des algorithmes T.R.C. thermiques et m´ecaniques dans Abaqus . . . . 56
2.5 Algorithme stationnaire . . . 61
2.5.1 Principe de l’ algorithme . . . 61
2.5.2 Equations du probl`eme thermom´ecanique continu stationnaire ´ecrites dans le rep`ere du chargement . . . 62
2.5.3 Equations discr´etis´ees du probl`eme . . . 67
2.5.4 R´esolution num´erique du probl`eme m´ecanique . . . 70
2.5.5 Sch´ema de l’ algorithme stationnaire . . . 73
2.5.6 Impl´ementation des algorithmes stationnaires dans Abaqus . . . . . 73
2.6 Calculs de validation . . . 77
2.6.1 Validation de l’algorithme T.R.C. sur une structure 2D . . . 77
2.6.2 Validation de l’algorithme stationnaire sur une structure 2D . . . 79
2.6.3 Validation de l’algorithme stationnaire thermique . . . 85
2.7 Cas particulier des structures p´eriodiques . . . 86
2.7.1 Contexte industriel . . . 86
2.7.2 Positionnement du probl`eme . . . 86
2.7.3 Principe de l’algorithme p´eriodique . . . 87
2.7.5 Validation sur structure 2D . . . 90
3 Dimensionnement des disques de frein 95 3.1 L’approche globale de dimensionnement des disques de frein . . . 95
3.1.1 Strat´egie de mod´elisation . . . 95
3.1.2 Mod´elisation du syst`eme . . . 96
3.1.3 Mod´elisation du mat´eriau . . . 99
3.1.4 Mod´elisation de l’ endommagement . . . 107
3.2 Application num´erique . . . 121
3.2.1 Introduction . . . 121
3.2.2 Description du probl`eme . . . 121
3.2.3 Evaluation des pressions de contact . . . 129
3.2.4 Calcul thermique . . . 141
3.2.5 Calcul m´ecanique . . . 156
3.2.6 Etude de l’ endommagement . . . 172
Conclusion et perspectives 177 A Calculs de contact du disque de frein 179 A.0.7 Influence du module de Young des garnitures des plaquettes . . . . 179
A.0.8 Influence du coefficient de frottement . . . 180
B Calculs thermiques du disque de frein 181 B.0.9 Distribution du flux de chaleur en fonction du rayon . . . 181
B.0.10 Distribution du flux de chaleur en fonction de la pression et du rayon . . . 182
B.0.11 Calcul thermique du freinage `a 30 bars . . . 183
C Calculs m´ecaniques du disque de frein 185 C.0.12 Loi de comportement no1 . . . 185
C.0.13 Loi de comportement no2 . . . 186
`
a une sph`ere composite 187
Introduction
Contexte et objectif
Avec le d´eveloppement continuel des nouvelles technologies dans l’industrie du
trans-port, les v´ehicules sont toujours plus puissants et plus rapides. De ce fait, les syst`emes
de freinage doivent suivre ce mˆeme rythme de progression. Le frein, organe majeur de
s´ecurit´e, reste ainsi un composant tr`es ´etudi´e par les ing´enieurs. La concurrence
automo-bile devenant plus pressante, s’ajoutent aux soucis d’efficacit´e, de fiabilit´e et de confort,
ceux du moindre coˆut et du d´elai de fabrication. L’objectif de l’ing´enieur est donc de
trouver le meilleur compromis entre ces exigences de s´ecurit´e et ces contraintes
technico-´
economiques. Pour mieux approcher la solution ”id´eale”, il convient de mettre en œuvre
des techniques num´eriques pouvant compl´eter les ´etudes exp´erimentales, et ce, le plus tˆot
possible dans la chaˆıne de conception.
Le disque de frein automobile, comme le montre l’exp´erience, peut subir des d´
egra-dations dont l’origine r´eside dans les sollicitations coupl´ees m´ecaniques (pression des
gar-nitures sur le disque et serrage du disque sur le moyeu) et thermiques (´echauffement par
frottement). A cause de la complexit´e du syst`eme, les mod´elisations num´eriques ne sont
envisageables que si elles reposent sur des hypoth`eses simplificatrices. Ainsi, la plupart
des ´etudes ne mod´elisent pas les ph´enom`enes de contact frottant, les couplages
ther-mom´ecaniques ou le comportement an´elastique des mat´eriaux. De mˆeme, l’hypoth`ese
d’axisym´etrie est commun´ement faite et donc la rotation du disque et les ph´enom`enes
tridimensionnels sont n´eglig´es. Ces insuffisances, qui permettent de gagner du temps de
calcul, rendent la pr´ediction de la r´eponse thermom´ecanique du disque mauvaise.
L’objectif de cette th`ese est de proposer une mod´elisation du comporte-ment thermom´ecanique des disques de frein pour la pr´ediction de leur tenue en fatigue. L’approche adopt´ee associe notamment :
• des strat´egies num´eriques nouvelles, adapt´ees aux probl`emes de pi`eces
sous chargement transitoire mobile et r´ep´et´e ;
• une mod´elisation pertinente du comportement des mat´eriaux constituant
les disques ;
• une mod´elisation des diff´erents endommagements prenant en compte le
Cette proposition repose sur une ´etude pr´ealable des ph´enom`enes physiques
ren-contr´es dans le probl`eme du disque de frein : cycles thermiques `a fortes variations de
temp´erature ; apparition d’importants gradients thermiques dans le disque ; couplage
de ces ph´enom`enes avec des probl`emes de contact frottant entre le disque et les
pla-quettes de frein ; cycles m´ecaniques avec des d´eformations plastiques, etc. Une fois que
ces ph´enom`enes sont analys´es et que leurs couplages sont mieux appr´ehend´es, on peut
pro-poser une mod´elisation du syst`eme de frein qui se fonde sur des hypoth`eses pertinentes.
Cette analyse num´erique n’est rendue possible que grˆace au d´eveloppement de nouveaux
algorithmes de r´esolution qui diminuent les temps de calcul. Leur principe fondamental est
de travailler dans le rep`ere du chargement. Selon les probl`emes `a r´esoudre, trois diff´erents
algorithmes ont ´et´e d´evelopp´es : une m´ethode transitoire, une dite stationnaire passage par
passage et une derni`ere dite stationnaire directe. Un autre algorithme appel´e algorithme p´eriodique est ´egalement pr´esent´e ; il s’agit d’une adaptation de l’algorithme stationnaire
pour les structures p´eriodiques, tels les disques de frein ventil´es. Dans un premier temps,
ces algorithmes sont d´ecrits. Des exemples simples permettent de les valider et de
mon-trer leurs int´erˆets. Enfin, la strat´egie de dimensionnement repose sur une approche globale
qui int`egre les effets de structure (syst`eme disque/environnement), le comportement du
mat´eriau et les ph´enom`enes qui conduisent `a l’endommagement. Toutes ces analyses sont
men´ees conjointement, avec un mˆeme degr´e de pr´ecision. L’ossature de cette strat´egie
de mod´elisation est illustr´ee par une premi`ere ´etude de dimensionnement. Les premiers
calculs de disque sont effectu´es et corr´el´es avec des essais sur banc dynamom´etrique ; ils
montrent la pertinence des m´ethodes num´eriques mises en place. Ils permettent aussi la
d´etermination des cycles thermom´ecaniques subis par le disque au cours d’un
freinage-type ; ceux-ci sont finalement analys´es en terme d’endommagement.
Le probl`eme du disque de frein
L’objectif de cette ´etude est d’´etudier la tenue en service du disque. L’exp´erience
montre que, soumis `a des sollicitations s´ev`eres, correspondant g´en´eralement `a des essais
sur banc, il peut fissurer en surface, en pied d’ailette, ou mˆeme rompre au niveau de la
gorge. Pour pr´edire l’apparition de ces avaries, il faut d’abord comprendre les ph´enom`enes
qui les g´en`erent. Une analyse bibliographique montre que la principale sollicitation vient
des fortes variations de temp´erature induites par le frottement des plaquettes contre le
disque. En effet, la temp´erature peut varier de 20oC `a plus de 700oC en quelques secondes
seulement. Ces brusques variations ne permettent pas `a la temp´erature de s’ homog´en´eiser.
De ce fait, le disque est le lieu de tr`es forts gradients thermiques dans l’´epaisseur des pistes
de frottement, mais aussi dans la direction circonf´erentielle. Ces derniers gradients sont
dus au fait que le flux de chaleur qui entre dans le disque est localis´e sous les plaquettes
de frein et que le disque tourne. Parfois, il apparaˆıt ce qu’on appelle des points chauds ; ce
sont des zones circulaires r´eguli`erement espac´ees sur les pistes o`u la temp´erature est
loca-lement plus ´elev´ee. Soumis `a de tels cycles thermiques, le disque subit des d´eformations
an´elastiques (plastiques voire mˆeme viscoplastiques) qui sont elles aussi inhomog`enes dans
Pour pr´edire num´eriquement les champs thermom´ecaniques qui s’´etablissent dans
le disque, il est fondamental de mettre en place une m´ethode de calcul qui prenne en
compte les couplages essentiels entre les diff´erents ph´enom`enes, le caract`ere transitoire de
l’histoire thermique du disque, le comportement an´elastique du mat´eriau, les gradients
thermom´ecaniques orthoradiaux et la rotation du disque. On se rend vite compte que la
simulation d’un freinage par une m´ethode classique par ´el´ements finis engendrerait des
temps de calcul exorbitants. Pour contourner cette difficult´e, des algorithmes adapt´es `a
des probl`emes de structures soumises `a des chargements mobiles ont ´et´e d´evelopp´es.
Algorithmes adapt´es aux structures soumises `a des chargements mobiles
Les probl`emes de structures soumises `a des chargements thermom´ecaniques mobiles
sont nombreux : rail soumis au roulement d’une roue, pneu soumis `a la pression de la route,
engrenages, disque de frein, courroie de distribution, etc. On se propose de d´evelopper des
algorithmes qui permettent d’effectuer des simulations complexes (avec prise en compte
de diverses non-lin´earit´es de comportement, de contact..., avec des mod`eles `a tr`es grand
nombre de degr´es de libert´e... ) en des temps de calcul raisonnables.
L’id´ee principale de ces algorithmes de r´esolution dits eul´eriens est de travailler non
plus dans le rep`ere de la structure mais dans un rep`ere li´e au chargement. Dans ce rep`ere,
les gradients thermom´ecaniques sont g´en´eralement importants dans des zones fixes. On
peut donc se contenter de ne mailler finement que ces zones fixes et traiter grossi`erement le
reste de la structure. Du point de vue du chargement, la structure est mobile ; l’utilisation
de coordonn´ees eul´eriennes permet alors de prendre en compte le flux de mati`ere. Enfin,
on fait l’hypoth`ese que la structure subit des petites transformations. On choisit alors
comme configuration de r´ef´erence celle qui suit le mouvement rigide de la structure. De ce
fait, les distorsions des ´el´ements du maillage sont faibles ; on ´evite les r´eactualisations de
g´eom´etrie qui sont habituellement n´ecessaires dans les probl`emes `a grands d´eplacements
et qui reposent sur des m´ethodes num´eriques d’adaptation de maillage tr`es coˆuteuses en
temps de calcul.
Trois diff´erents algorithmes ont ´et´e d´evelopp´es :
• l’algorithme TRC (Transitoire dans le Rep`ere du Chargement) qui permet de traiter
tous les probl`emes transitoires ;
• l’algorithme stationnaire passage par passage qui permet d’obtenir l’´etat de la
struc-ture apr`es chaque passage de chargement (un calcul par passage) ;
• l’algorithme stationnaire direct qui permet d’´evaluer directement la r´eponse
stabi-lis´ee de la structure lorsqu’elle est soumise `a un tr`es grand nombre de passages tous
identiques. Dans cette m´ethode, on fait l’hypoth`ese que la structure s’adapte ou
s’accommode.
Les ´equations thermom´ecaniques continues et discr´etis´ees correspondant aux trois
num´eriques et leurs impl´ementations dans le code de calcul Abaqus. Des exemples simples
de validation permettent de montrer les avantages et la pertinence des m´ethodes.
Enfin, le cas des structures dites p´eriodiques, tels les disques de frein ventil´es, est
trait´e. En effet, les algorithmes eul´eriens d´evelopp´es ne peuvent s’appliquer tels quels aux
structures inhomog`enes. Une adaptation est donc n´ecessaire. Le probl`eme stationnaire
appliqu´e aux structures p´eriodiques est d´ecrit, r´esolu et l’algorithme est illustr´e par un
exemple bidimensionnel.
Dimensionnement des disques de frein
Le dernier chapitre est consacr´e `a l’ ´etude de la tenue en service d’un disque de
frein automobile plein. Elle repose sur une approche globale de dimensionnement. Celle-ci
consiste `a ´etudier simultan´ement le syst`eme (disque, chargement et conditions aux
li-mites), le comportement du mat´eriau et les m´ecanismes d’endommagement.
Les difficult´es de l’´etude du syst`eme sont de deux types. D’abord, comme on l’a
montr´e dans les chapitres pr´ec´edents, la simulation d’un disque de frein est un probl`eme
num´erique complexe car il faut prendre en compte la rotation du disque, la pr´esence de
forts gradients thermom´ecaniques, le contact, les couplages, etc. Ensuite, il faut tenir
compte du fait que le disque voit dans sa vie une multitude de freinages tous diff´erents
les uns des autres (les clients sont diff´erents, les routes emprunt´ees sont variables, etc.).
Une approche statistique du probl`eme permettra alors de d´efinir `a partir de donn´ees
exp´erimentales un freinage-´equivalent en terme de dommage (ce travail n’est toutefois pas
abord´e dans le cadre de la th`ese). Cela signifie que, soumis `a ce cycle-´equivalent r´ep´et´e
un certain nombre de fois, le disque s’endommage de la mˆeme mani`ere que s’il avait ´et´e
soumis `a toute l’histoire r´eelle de chargement. La d´emarche consiste alors `a pr´edire la
r´eponse stabilis´ee du disque lorsqu’il subit ce cycle-´equivalent.
La mod´elisation du mat´eriau doit prendre en compte les fortes amplitudes de temp´
e-rature. Dans les gammes d’utilisation du disque, la fonte a un comportement ´elastoplastique,
voire ´elastoviscoplastique. Il faut donc disposer d’un mod`ele rh´eologique suffisamment
repr´esentatif du comportement r´eel du mat´eriau mais qui reste simple `a identifier et dont
l’impl´ementation num´erique est facile. Enfin, l’identification des param`etres du mat´eriau
doit s’effectuer sur un cycle stabilis´e de l’ ´eprouvette test´ee puisque c’est la r´eponse
stabi-lis´ee de la structure qui sera analys´ee en terme d’endommagement.
L’´etude bibliographique a permis d’identifier les diff´erents types d’endommagement
subis par le disque : la rupture du bol s’apparente `a de la fatigue oligocyclique, tandis
que les fissures sur piste proviennent vraisemblablement de m´ecanismes de fatigue
po-lycyclique. Apr`es une br`eve description des diff´erents crit`eres de fatigue et une petite
discussion, le choix s’est port´e sur un crit`ere ´energ´etique pour la fatigue `a petit nombre
ont l’avantage de pouvoir s’appliquer `a des probl`emes multiaxiaux. Le crit`ere ´energ´etique
tient compte du caract`ere anisotherme des cycles de sollicitations. Par contre, le crit`ere
de Dang Van n´ecessite une extension anisotherme, qui est propos´ee et d´ecrite.
Enfin, la mise en œuvre des m´ethodes propos´ees est pr´esent´ee dans la seconde partie
de ce chapitre. La simulation d’un disque de frein plein est d´ecrite. La d´emarche de calcul
est la suivante : un premier calcul de contact permet d’estimer les distributions de pression
et de flux de chaleur impos´es au disque, localis´es sur la surface r´eelle de contact. Une
analyse thermique transitoire du disque est effectu´ee avec l’algorithme TRC. On en d´eduit
l’histoire thermique du disque. Suit alors un calcul ´elastoplastique stationnaire passage
par passage qui permet la d´etermination de la r´eponse m´ecanique de la pi`ece. Les r´esultats
sont corr´el´es avec des mesures effectu´ees sur un banc dynamom´etrique. La temp´erature
est relev´ee par un thermocouple frottant et des pyrom`etres optiques. Les d´eformations
sont mesur´ees par des rosettes embarqu´ees sur le disque. Ces simulations montrent que
les m´ethodes num´eriques eul´eriennes utilis´ees permettent de mettre en ´evidence des effets
de structure dus au chargement et aux conditions aux limites non-axisym´etriques. Les
Chapitre 1
Le disque de frein
1.1
Contexte g´
en´
eral
Grˆace aux continuels progr`es technologiques dans l’industrie du transport, les v´
e-hicules sont devenus plus puissants et plus rapides. De ce fait, les syst`emes de freinage
doivent aussi suivre cette progression pour assurer un fonctionnement ad´equat avec les
derni`eres am´eliorations. Le frein, organe de s´ecurit´e, reste ainsi un sujet d’´etude tr`es actuel
pour les ing´enieurs. L’apparition de nouveaux mat´eriaux (alliages divers, c´eramique, etc.
) et de nouveaux proc´ed´es de fabrication ou de traitement de surface (grenaillage, trempe
par induction, etc. ) g´en`ere de nouveaux types de frein et donc la n´ecessit´e de nouvelles
´
etudes. De plus, avec la concurrence industrielle toujours croissante, les probl´ematiques
changent : en plus du soucis d’efficacit´e, de fiabilit´e et de confort, s’ajoute ceux du moindre
coˆut et du d´elai de fabrication. L’objectif pour l’ing´enieur est de trouver le meilleur
compromis entre ces exigences. Il s’agit alors remplacer, du moins, compl´eter les essais
exp´erimentaux par des analyses num´eriques afin de tester plus de possibilit´es pour mieux
s’approcher du meilleur compromis, r´eduire les coˆuts en fabriquant moins de prototypes
et minimiser les dur´ees d’´etude en limitant le nombre d’essais.
1.2
Le syst`
eme de freinage
1.2.1
Fonction
On appelle frein tout syst`eme capable de ralentir ou d’arrˆeter la progression d’une
pi`ece en d´eplacement. Toute structure en mouvement poss`ede une ´energie cin´etique
pro-portionnelle `a sa masse m et `a sa vitesse v, soit Ec = 12mv2, et une ´energie potentielle
proportionnelle `a sa masse et `a son altitude z, soit Ep = mgz. Le frein est donc un syst`eme
qui doit ˆetre capable de transformer ces ´energies m´ecaniques en une autre ´energie. Le plus
souvent, cette ´energie r´ecup´er´ee est dissip´ee sous forme de chaleur soit par un syst`eme
de friction (frein `a disque, frein `a tambour...), soit par une compression de gaz (frein
transform´ee en ´energie magn´etique, comme dans le cas des freins `a courant de Foucault,
que l’on trouve dans le domaine ferroviaire. Il existe aussi d’autres syst`emes de freinage :
freins a´erodynamiques, freins rh´eostatiques... Nous ne nous int´eressons qu’aux freins `a
friction, tr`es r´epandus dans l’industrie automobile, et qui sont les seuls `a permettre `a la
fois le ralentissement et le maintien `a vitesse constante d’un v´ehicule se trouvant sur une
pente.
1.2.2
Les diff´
erents types de frein `
a friction
1.2.2.1 Frein `a sabotsLe premier frein `a friction est apparu sous forme de sabots sur les chariots tir´es par
des animaux. Pour freiner le mouvement, on pressait les sabots contre les roues du chariot.
Ce dispositif, toujours utilis´e dans l’agriculture et parfois dans le domaine ferroviaire, a
´et´e repris par l’automobile lorsque la vitesse des voitures ne d´epassait pas les 25km/h.
Les freins `a sabots ont vite ´et´e remplac´es par les freins `a tambour et les freins `a disque,
beaucoup plus efficaces.
1.2.2.2 Frein `a tambour
Le frein `a tambour est apparu dans les ann´ees 1920. Il est encore utilis´e `a nos jours, le
plus souvent, `a l’arri`ere des voitures particuli`eres de bas de gamme et de moyenne gamme.
Le frein `a tambour (fig. 1.1) est compos´e de :
• un tambour, pi`ece m´etallique li´ee `a la roue et qui lui est int´erieur ;
• des garnitures en mat´eriau composite fix´ees sur deux segments - aussi appel´es
mˆachoires - en forme de demi-cercles ;
• un piston reli´e aux deux segments.
Lors d’un freinage, le piston ´ecarte les deux segments. Ceux-ci s’arc-boutent et
pressent les garnitures contre le tambour qui tourne avec la roue. Ainsi, le mouvement de
rotation est ralenti. Le rappel des segments est assur´e par des ressorts.
1.2.2.3 Frein `a disque
Le frein `a disque est apparu dans les ann´ees 1950. Il est tr`es largement utilis´e
au-jourd’hui dans l’automobile, mais aussi dans le ferroviaire et l’a´eronautique.
Le frein `a disque (fig. 1.2) est compos´e de :
• un disque g´en´eralement en fonte li´e `a la roue par l’ interm´ediaire du moyeu et qui
• deux plaquettes de part et d’autre du disque, compos´ees chacune d’une garniture
en mat´eriau composite coll´ee ou rivet´ee sur un support m´etallique ;
• un ´etrier en acier, solidaire de l’essieu (par l’interm´ediaire du pivot par exemple), qui supporte les plaquettes ; en forme de chape, il recouvre un secteur du disque ; • un piston hydraulique dans le cas d’un ´etrier flottant ou coulissant (fig. 1.3),
ou deux pistons dans le cas d’un ´etrier fixe (fig. 1.4) pos´es contre les supports des
plaquettes.
Fig. 1.1: Le syst`eme de frein `a tambour Fig. 1.2: Le syst`eme de frein `a disque
Fig. 1.3: Le syst`eme `a ´etrier flottant Fig. 1.4: Le syst`eme `a ´etrier fixe
Lorsque le v´ehicule est en mouvement, le disque est en rotation. Dans le cas d’un
syst`eme `a ´etrier coulissant, pendant la phase de freinage, un circuit hydraulique command´e
par la p´edale de frein actionne le piston qui presse la premi`ere plaquette (plaquette
in-terne) contre le disque. Lorsque celle-ci est en contact avec le disque, l’´etrier se d´eplace
par r´eaction grˆace `a un syst`eme de coulissage et entraˆıne la seconde plaquette contre
le disque. Dans le cas de l’´etrier fixe, qui est rigidement attach´e `a l’essieu et qui
com-porte deux pistons oppos´es aliment´es par un mˆeme circuit hydraulique, les deux pistons
viennent presser les deux plaquettes sur le disque lors de la mise en pression. L’avantage
jeu (puisque chaque piston ne parcourt qu’une demi distance). En contrepartie, le risque
de mettre en ´ebullition le liquide de frein est doubl´e. Il faut donc isoler thermiquement les
pistons, ce qui provoque un coˆut suppl´ementaire. De plus, l’encombrement est bien plus
important. C’est donc l’´etrier coulissant qui est le plus usit´e. Une fois le contact entre
le disque et les plaquettes ´etabli, la pression des plaquettes, combin´ee avec la rotation,
induit un frottement qui permet le ralentissement de la rotation du disque. Des joints
d’´etanch´eit´e, qui ont une forme de l`evre ´etudi´ee, sont plac´es autour du piston et, par
leur comportement ´elastique, ram`enent ce dernier dans son logement en fin de freinage.
Ainsi, les plaquettes sont d´ecoll´ees du disque. Les supports m´etalliques transmettent la
pression hydraulique aux garnitures ; ils permettent d’obtenir une distribution de pression
relativement homog`ene sous les plaquettes. Ils permettent aussi la fixation des garnitures
et le positionnement angulaire des plaquettes dans l’´etrier.
Il existe deux types de disque : les disques pleins et les disques ventil´es. Les disques
pleins, de g´eom´etrie simple et donc de fabrication simple, sont g´en´eralement plac´es sur
l’essieu arri`ere de la voiture. Ils se composent tout simplement d’une couronne pleine
reli´ee `a un ”bol” qui est fix´e sur le moyeu de la voiture (fig. 1.5). Les disques ventil´es,
de g´eom´etrie plus complexe, sont apparus plus tardivement. Ils se trouvent la plupart du
temps sur le train avant. Toutefois, ils sont de plus en plus `a l’arri`ere et `a l’avant des
voi-tures de haut de gamme. Compos´es de deux couronnes - appel´ees flasques - s´epar´ees par
des ailettes (fig. 1.6), ils refroidissent mieux que les disques pleins grˆace `a la ventilation
entre les ailettes qui, en plus, favorisent le transfert thermique par convection en
aug-mentant les surfaces d’´echange. Le disque ventil´e comporte plus de mati`ere que le disque
plein ; sa capacit´e d’absorption calorifique est donc meilleure. Le nombre, la taille et la
forme (ailettes radiales, incurv´ees, pions circulaires...) des ailettes sont variables (fig. 1.7).
Fig. 1.5: Exemple de disque plein Fig. 1.6: Exemple de disque ventil´e
Si pendant les d´ebuts de l’automobile, le frein `a tambour ´etait tr`es utilis´e, c’´etait
pour son effet autoamplificateur du couple de freinage qui permettait de limiter l’effort de commande. De plus, sa fabrication est comparativement simple. Par contre, comme il
ne baigne pas dans l’air, sa capacit´e d’ ´echange thermique est faible compar´ee `a celle du
frein `a disque. De ce fait, mˆeme s’il est un peu moins coˆuteux que le frein `a disque, ce
dernier tend `a le remplacer progressivement dans l’automobile. Dans l’a´eronautique o`u
Fig. 1.7: Diff´erentes g´eom´etries d’ailettes
Une extension vers le frein multidisque qui, dans un encombrement tr`es semblable,
per-met d’augmenter les surfaces d’´echange et la capacit´e calorifique globale, est actuellement
utilis´ee pour le freinage des avions gros porteurs (fig. 1.8). Dans le secteur automobile,
o`u les ´energies `a dissiper deviennent petit `a petit plus importantes, on voit apparaˆıtre
des ´etudes sur le frein `a disque dit de ”full-contact”. Il s’agit d’un syst`eme classique de
frein `a disque, pour lequel les plaquettes de friction recouvrent le disque sur toute sa
circonf´erence. Le but est d’augmenter la surface de contact pour rendre le frottement plus
efficace mais la dissipation de chaleur est bien entendu plus difficile. Cette solution reste
actuellement `a l’ ´etude et n’a `a ce jour aucune application concr`ete.
Le syst`eme le plus r´epandu reste le frein `a disque, plein ou ventil´e. Le disque sera la
structure ´etudi´ee dans cette ´etude. Sachant que les ventes mondiales du groupe PSA sont
de l’ordre de 3 millions de voitures par an, si l’on consid`ere que chaque v´ehicule comporte
en moyenne deux disques de frein, cela signifie que l’on fabrique 6 millions de pi`eces par
an. Le prix de la fonte est proche de 20 francs par kilogramme. Un disque p`ese environ
5 kg. Il y a donc en jeu 600 millions de francs par an. Si l’on consid`ere le march´e mondial,
on fabrique environ 50 millions de v´ehicules par an. Il s’agit alors d’une somme de 10
milliards de francs.
1.2.3
Les mat´
eriaux du frein `
a disque
Les mat´eriaux des composants du syst`eme de freinage sont choisis selon les crit`eres
suivants : la fonction de la pi`ece, le coˆut de la mati`ere premi`ere et sa facilit´e de fabrication,
la masse.
1.2.3.1 Le disque
Afin d’assurer un bon comportement thermique et m´ecanique, le mat´eriau id´eal pour
le disque de frein doit pouvoir emmagasiner beaucoup de chaleur et supporter un effort
m´ecanique important, sur une large gamme de temp´erature de fonctionnement (dans
l’au-tomobile, les temp´eratures d’utilisation varient entre 0oC et 800oC ; dans l’aviation les
temp´eratures peuvent atteindre les 3000oC). De plus, il doit ˆetre bon march´e et ˆetre de
fabrication relativement facile.
Ainsi, s’il existe des mat´eriaux `a meilleur comportement thermom´ecanique, la fonte
grise `a graphite lamellaire est la plus commun´ement utilis´ee dans l’industrie automobile.
En effet, la fonte est peu ch`ere, se fabrique ais´ement et peut ˆetre coul´ee facilement. Elle
pr´esente ´egalement une bonne conductivit´e, une assez bonne r´esistance m´ecanique, et
une faible usure. Les proportions de carbone et les ajouts de diff´erents types d’´el´ements
d’addidtion (phosphore, potassium, silicium, mangan`ese, cuivre, soufre, nickel, chrome,
molybd`ene, aluminium, autres ´el´ements d’alliages et des impuret´es diverses) permettent
de faire varier l´eg`erement les propri´et´es thermom´ecaniques de la fonte qui reste ainsi en
perp´etuelle ´evolution [13][47][51]. On rappelle que plus la teneur en carbone est ´elev´ee,
plus la r´esistance m´ecanique de la fonte est mauvaise. Par contre, la conductivit´e
aug-mente, ce qui diminue les contraintes thermiques.
Dans le secteur ferroviaire, on utilise aussi de la fonte grise, mais on trouve de plus en
plus, pour les trains `a grande vitesse, des aciers alli´es au chrome, au molybd`ene et au
vana-dium, tremp´es et revenus. Ces aciers ont des limites d’´elasticit´e ´elev´ees (Re > 1000 M P a
`
a 20oC et Re > 800 M P a `a 450oC [86]). Ce type de nuance est ´egalement utilis´e pour la
fabrication des aubes de turbines des centrales nucl´eaires.
Pour des soucis de r´eduction de poids, des alliages d’aluminium ont ´et´e ´etudi´es.
Cependant, lorsque les temp´eratures sont tr`es ´elev´ees, le comportement m´ecanique des
alliages d’aluminium est mauvais. Finalement, c’est un mat´eriau peu utilis´e pour une
ap-plication au freinage.
Pour des secteurs industriels moins sensibles aux coˆuts mais sensibles aux
perfor-mances comme l’aviation ou la voiture de comp´etition, o`u les probl`emes de coˆuts sont
moindres et les dur´ees d’utilisation plus courtes, d’autres solutions ont ´emerg´e, plus
on´ereuses que la fonte, mais pr´esentant un meilleur comportement thermique. On peut
car-bon´e fibreux et d’une matrice de carbone, ils pr´esentent une capacit´e thermique massique ´
elev´ee et une dilatation faible. Sont apparus ´egalement les disques en c´eramique, qui ont
des capacit´es thermiques ´elev´ees, une bonne r´esistance m´ecanique `a haute temp´erature,
des usures faibles. Leur utilisation reste cependant limit´ee en raison de leur fragilit´e et
de leur faible t´enacit´e. Des conceptions avec des revˆetements c´eramiques semblent plus
r´ealistes. Depuis peu, il existe ´egalement des disques composites `a matrice m´etallique qui
restent pour le moment au stade de prototypes.
1.2.3.2 Les garnitures
Pour les garnitures, on cherche un mat´eriau qui g´en`ere un bon coefficient de
frotte-ment (le plus ´elev´e possible et le plus constant possible, quelles que soient les variations de
temp´erature, de pression ou de vitesse). Il faut cependant souligner que le comportement
de friction d´epend aussi du mat´eriau qui compose l’autre structure frottante, `a savoir le
disque, des conditions d’appui de la plaquette, etc. On veut aussi limiter les probl`emes
d’usure, de corrosion et de bruit (qui est un probl`eme classique de pi`eces frottantes sur
des solides en mouvement). Bien sˆur, il y a aussi des contraintes de coˆut.
Les garnitures sont faites de mat´eriaux dits de friction. Ceux-ci sont compos´es
d’abrasifs et de lubrifiants, d’´elastom`eres, de poudre de m´etaux et autrefois, d’amiante.
Leur composition est souvent mal connue, restant confidentielle chez les ´equipementiers.
1.2.3.3 Les supports
Les supports sont fabriqu´es avec un acier doux. Leur rˆole est de r´epartir l’effort
exerc´e par le piston hydraulique sur la totalit´e de la surface des garnitures, dans le but
d’obtenir une surface de contact disque/plaquette la plus large et la plus homog`ene
pos-sible. Cela constitue un des crit`eres de bon fonctionnement du frein.
Le support est la pi`ece interm´ediaire entre les garnitures et le piston. Elle transmet
donc la chaleur des garnitures (qui peut ˆetre ´elev´ee) vers le liquide dans le piston. Afin
d’´eviter ce ph´enom`ene, dont on parlera dans la partie (1.3), on utilise parfois des
sous-couches qui servent d’isolant thermique. Ces sous-sous-couches permettent aussi d’absorber
une partie des bruits et des vibrations engendr´es par le syst`eme de frein `a disque.
1.3
Crit`
eres d’´
evaluation d’un syst`
eme de freinage
Le frein `a disque doit r´epondre `a diff´erents types d’exigence, dont les principaux
1.3.1
Efficacit´
e
L’efficacit´e du frein se mesure par son aptitude `a arrˆeter un v´ehicule en mouvement,
sur une distance minimale, quelles que soient les conditions ext´erieures. L’effort qui sert
`
a ralentir la rotation du disque doit donc ˆetre le plus ´elev´e possible. En d’autres termes,
il faut optimiser l’effort tangentiel issu du frottement des plaquettes sur le disque. Ainsi,
plusieurs param`etres interviennent : la pression de contact, la surface de frottement
et le coefficient de frottement. Plus ces valeurs sont ´elev´ees, plus la distante d’arrˆet
du v´ehicule est faible.
La pression de contact disque/garnitures d´epend essentiellement de la
pres-sion hydraulique dans le piston. Celle-ci varie entre 0 bar et 80 bars pour une voiture
particuli`ere. La pression de contact d´epend aussi de l’´etat de surface des deux pi`eces
frottantes, de l’usure, des rigidit´es des mat´eriaux, des dilatations thermiques, etc. Des
ob-servations exp´erimentales faites par Kennedy [49] ont montr´e que la pression de contact
varie continuellement au cours d’un freinage, et ce, mˆeme si la pression hydraulique reste
constante. Un autre ph´enom`ene peut se produire `a haute temp´erature : lors de freinages
longs (type descente de montagne), la temp´erature peut atteindre des valeurs ´elev´ees et
rester `a ce niveau suffisamment longtemps pour que la chaleur soit transmise au piston
puis au liquide de frein. Celui-ci peut entrer en ´ebullition (c’est ce qu’on appelle le vapor
lock). On assiste alors `a un ph´enom`ene de vaporisation : la phase gazeuse r´esultante ´etant
compressible, cela entraˆıne une course de p´edale plus longue, `a un tel point que l’on peut
ne plus arriver `a comprimer le piston.
Le coefficient de frottement, not´e µ, doit aussi rester le plus stable possible, afin
d’assurer un freinage constant, quelles que soient les conditions de freinage. Or, une fois
les mat´eriaux choisis, µ va d´ependre de la pression de contact, de la vitesse de rotation
mais aussi de l’hygrom´etrie et de la temp´erature de fonctionnement. En effet, la valeur
de µ baisse par temps de pluie. De mˆeme, quand la temp´erature atteint 400oC environ,
µ chute brutalement. C’est ce qu’on appelle le fading.
Kennedy et Ling [49] pour l’a´eronautique puis Day [83] pour l’automobile ont mis
en ´evidence que la surface r´eelle de contact peut ˆetre tr`es diff´erente de la surface
po-tentielle de contact (surface totale des garnitures) avec des variations permanentes dues au couplage entre les dilatations themiques, les pressions de contact et l’usure. Ces
inves-tigations ont ´et´e men´ees pour des g´eom´etries simples de type annulaire avec l’hypoth`ese
de mat´eriaux `a comportement ´elastique lin´eaire.
Les valeurs maximales de temp´erature de fonctionnement vont donc ˆetre un crit`ere
majeur pour l’efficacit´e de freinage. Elles sont engendr´ees par des freinages `a grande
vi-tesse, `a forte pression, `a longue dur´ee, etc. Le choix des mat´eriaux est aussi essentiel pour
1.3.2
Confort
Les probl`emes de confort rencontr´es avec le frein `a disque r´esident dans l’apparition
de bruits et de vibrations dans certaines configurations de freinage.
Th´eoriquement, les vibrations et les bruits sont reli´es puisque le bruit est toujours
engendr´e par des vibrations. Cependant, on appelle commun´ement vibrations les
vibra-tions qui sont ressenties autrement que par les bruits. Dans le probl`eme du frein, il s’agit
principalement des vibrations de la p´edale de frein et du volant. Elles sont essentiellement
dues aux chocs entre le disque et les plaquettes et sont donc li´ees `a la vitesse de rotation
de la roue. Les fr´equences de ces vibrations varient de quelques hertz `a quelques centaines
de hertz.
Les vibrations sont class´ees en deux cat´egories, selon leur mode de g´en´eration :
• le cold-judder, qui intervient `a basse temp´erature ;
• le hot-judder qui apparaˆıt seulement `a hautes temp´eratures et qui est reli´e `a la
pr´esence de points chauds ; ces derniers seront d´ecrits ult´erieurement.
Le cold-judder est g´en´er´e par un d´efaut de variations d’´epaisseur du disque (DTV
-Disc Thickness Variations). Celles-ci peuvent ˆetre d’origine ou engendr´ees par des d´efauts
d’assemblage, des jeux trop importants, etc. qui induisent un voile du disque. Ce
gondo-lement engendre des irr´egularit´e d’usure du disque.
Le hot-judder est reli´e `a l’apparition de points chauds (qui seront d´ecrits dans la
partie (1.4.1) et dont l’origine est encore mal connue). Il apparaˆıt pour des freinages `a
vitesse ´elev´ee mais `a pression relativement faible.
Les bruits sont g´en´er´es par les instabilit´es du frottement des plaquettes contre le
disque. Le frottement est donc ce qu’on appelle l’excitation du bruit. Le r´esonnateur (la
pi`ece vibrante) est le plus souvent le disque, mais il peut arriver que ce soit la plaquette
ou l’´etrier ou encore une autre pi`ece de l’assemblage.
On classe les bruits rattach´es au disque par intervalle de fr´equence :
• le stick-slip qui est un bruit `a basse fr´equence ( f < 200 Hz) ;
• le squeal qui est un bruit `a plus haute fr´equence (500 Hz < f < 3000 Hz) ;
• le crissement (ou squeak) qui est ´egalement un bruit `a haute fr´equence (2000 Hz < f < 5000 Hz) mais qui fait intervenir `a la fois le disque et les plaquettes. Le
crissement peut parfois d´epasser les 120 dB.
On peut aussi citer le mart`element qui est un bruit g´en´er´e par les vibrations de
frottement disque/plaquettes. Il est per¸cu dans l’habitacle par un bourdonnement sourd.
Il est g´en´er´e par des freinages `a faible d´ec´el´eration et `a grande vitesse (V > 120km/h) [44].
Les principaux param`etres du bruit sont : les caract´eristiques frictionnelles du couple
disque/plaquettes, la g´eom´etrie des structures et les liaisons entre les pi`eces. Le bruit fait
l’objet de tr`es nombreuses ´etudes ; on peut par exemple citer celle de Drobecq [35] qui
propose une mod´elisation de syst`eme de freinage ferroviaire pour l’´etude de crissement de
frein ou encore celle de F. Moirot dans le domaine automobile [66].
1.3.3
Endurance
Un autre crit`ere d’´evaluation d’un frein `a disque est son endurance. Plus pr´ecis´ement,
il s’agit de garantir dans la dur´ee l’ensemble des fonctions du syst`eme, ´eviter toute avarie
dangeureuse et d´efinir un seuil d’usure `a partir duquel les pi`eces doivent ˆetre chang´ees.
Pour dimensionner un disque de frein, il faut alors connaˆıtre les avaries susceptibles
d’ap-paraˆıtre. Les observations exp´erimentales permettent d’´etablir la liste des
endommage-ments suivants (certains peuvent se manifester sur un v´ehicule en client`ele, d’autres ne
surviennent que lors d’essais sur banc) :
• du fa¨ıen¸cage sur les pistes de frottement (fig. 1.9) ;
• des fissures radiales sur les pistes de frottement (fig. 1.10) ; • des fissures au pied des ailettes (fig. 1.11) ;
• une fissure circulaire (fig. 1.13),(fig. 1.14) au niveau de la gorge qui peut aboutir `a la rupture du disque (fig. 1.12) ;
• de l’usure (fig. 1.15),(fig. 1.16).
Le fa¨ıen¸cage est un r´eseau de micro-fissures surfaciques. Il est typique de la fatigue
thermique, c’est-`a-dire de la fatigue due `a des sollicitations thermiques.
Les fissures radiales, qui peuvent apparaˆıtre sur les pistes de frottement du disque,
sont d’une longueur proche de 4 `a 5 cm. Leur nombre varie entre 1 et 3. Le principe de
leur ´emergence est connu. Les ´el´evations de temp´erature tendent `a faire dilater le disque.
Celui-ci peut s’allonger dans le sens radial mais pas dans le sens orthoradial, ce qui g´en`ere
des contraintes de compression dans le sens orthoradial et mˆeme de la plastification dans
les zones chaudes. Des zones chaudes peuvent aussi parfois apparaˆıtre sous forme de tˆaches
rondes r´eguli`erement espac´ees sur les pistes (c’est ce qu’on appelle les points chauds qui
seront d´ecrits ult´erieurement). Ces zones chaudes sont entour´ees de zones plus froides, ce
qui cr´ee aussi des contraintes de compression et des d´eformations plastiques. Le
refroi-dissement du disque g´en`ere alors des contraintes de traction dans les zones plastifi´ees.
radiale du disque. C’est de la fatigue thermique.
Les fissures en pied d’ailettes proviennent aussi des gradients thermiques dans l’´
e-paisseur du disque mais la zone concern´ee subit aussi un chargement m´ecanique. Les
pressions des plaquettes sur le disque proviennent d’une pression hydraulique qui d´epasse
rarement les 80 bars dans l’automobile. Elles engendrent des contraintes de pression de
l’ordre de quelques newtons par millim`etre carr´e, ce qui est tr`es faible. Cependant, lorsque
le disque est ventil´e, la force de contact ne s’applique que sur la section r´eduite des
ai-lettes. Les contraintes sont donc multipli´ees par un facteur proche de 10, ce qui les rend
non n´egligeables, surtout lorsque les temp´eratures de fonctionnement sont ´elev´ees. En
effet, pour la fonte GL, la limite d’´elasticit´e, les limites d’endurance, etc. s’effondrent `a
partir d’une temp´erature voisine de 450oC. Cette pression en pied d’ailettes induit donc
des contraintes suppl´ementaires, qui peuvent ˆetre suffisantes pour initier des fissures.
La r´egion de la gorge du bol est aussi tr`es s´ev`erement sollicit´ee. En effet, le disque
tend `a se mettre en cˆone `a cause des dilatations des pistes chaudes, mais ce d´eplacement
est retenu par la pr´esence du bol qui est moins chaud et par celle de l’´etrier. De ce fait, de
grandes concentrations de contraintes naissent dans cette zone. Lors d’essais tr`es s´ev`eres
sur banc dynamom´etrique, on peut parfois voir apparaˆıtre une fissure circonf´erentielle
(du cˆot´e externe et/ou du cˆot´e interne du disque) qui se propage et provoque la rupture
brutale du bol.
Enfin, le disque s’use par frottement contre les plaquettes. En r´ealit´e, celles-ci sont
fabriqu´ees dans l’optique de s’user davantage que le disque (fig. 1.18). Le frottement des
deux pi`eces engendre des probl`emes de d´epˆot (fig. 1.17) et d’arrachement de mati`ere qui
modifient la nature du contact. De nombreuses ´etudes portent sur ces probl`emes d’usure.
Les travaux de Degallaix [23] par exemple abordent le sujet en introduisant la notion de
troisi`eme corps. En g´en´eral, l’usure du disque reste faible par rapport `a celle des
pla-quettes ; mais lorsque le couple disque/garnitures est mal choisi, l’usure du disque peut
devenir cons´equente. Or, si l’´epaisseur des pistes de frottement devient trop faible, il
n’y a plus assez de mati`ere pour assurer l’absorption de chaleur. Il faut alors changer
pr´ematur´ement le disque.
Finalement, pour ´eviter ou diminuer ces avaries, il faut dimensionner le disque (et
les composantes externes) de fa¸con `a :
• diminuer la temp´erature maximale atteinte par le disque pour assurer un
compor-tement m´ecanique correct du mat´eriau ;
• diminuer les gradients thermiques pour diminuer les contraintes thermiques ; • ´eviter toute usure excessive.
en travaillant sur les param`etres suivants :
• les g´eom´etries ;
• l’absorption, la diffusion et la dissipation de la chaleur.
Fig. 1.9: Fa¨ıen¸cage sur les pistes de frot-tement
Fig. 1.10: Fissure radiale sur les pistes de frottement
Fig. 1.13: Section de disque fissur´e Fig. 1.14: Fissure dans la gorge
Fig. 1.15: Usure des pistes Fig. 1.16: Usure non-uniforme
1.3.4
Autres crit`
eres
D’autres crit`eres entrent en ligne de compte lors de la conception d’un frein : son
coˆut (mati`ere premi`ere, facilit´e de fabrication, etc.), son encombrement (on veut le r´eduire
au minimum), son poids (plus un v´ehicule est l´eger, plus la vitesse maximale est ´elev´ee,
et plus la consommation de carburant par kilom`etre est faible)...
Fig. 1.17: D´epˆots de mati`ere sur les
1.3.5
Ordre de priorit´
e selon les domaines d’application
Bien ´evidemment, les priorit´es des crit`eres d’´evaluation d’un frein varient selon les
domaines d’application.
Dans l’a´eronautique, l’utilisation des freins reste ponctuelle et limit´ee aux
atterris-sages. Les ´energies mises en jeu sont extrˆemement ´elev´ees. En effet, pour une masse de
M = 200 tonnes, une distance d’arrˆet de d = 1300 m, l’ ´energie absorb´ee par un frein est
de E = 150 M J , correspondant `a une puissance de P = 7 M W . Il faut donc un frein `a
forte inertie thermique. Les temp´eratures peuvent tout de mˆeme atteindre les 3000oC, ce
qui implique des contraintes sur le choix des mat´eriaux. Les probl`emes d’efficacit´e sont
bien plus importants que ceux de tenue en service, ou encore de coˆuts. On note aussi que
les freinages sont bien d´efinis.
Dans le secteur ferroviaire, les ´energies sont importantes, la vitesse est ´elev´ee, mais
la pression est faible. Les temps de freinage sont longs de sorte que les ph´enom`enes
ther-miques ont le temps de se stabiliser (souvent sous forme de points chauds).
Dans le secteur automobile qui nous int´eresse, les ´energies, si elles sont de plus en
plus ´elev´ees, restent tout de mˆeme bien inf´erieures `a celles rencontr´ees dans les deux autres
secteurs. Par contre, les pressions sont relativement ´elev´ees, ce qui induit d’importants
gradients angulaires qui sont une source de difficult´e d’analyse. Une autre difficult´e r´eside
dans le fait que les freinages subis par un disque en service sont mal d´efinis et leur ordre
est al´eatoire, d´ependant entre autres choses, du conducteur. Bien sˆur, les priorit´es pour
les concepteurs sont d’abord l’efficacit´e du freinage et ensuite l’endurance du syst`eme et
le coˆut. Le confort prend une importance croissante. Le poids du syst`eme de freinage doit
rester raisonnable. L’encombrement est une contrainte. Notre ´etude portera sur le
1.4
Analyse des ph´
enom`
enes physiques
Finalement, on retient que les ph´enom`enes causant les avaries d´ecrites pr´ec´edemment
sont de deux types : thermiques (temp´eratures ´elev´ees, cycles thermiques de grande
am-plitude et gradients thermiques) et m´ecaniques (d´eformations du disque induites par les
pressions, les dilatations et les serrages m´ecaniques).
1.4.1
Ph´
enom`
enes thermiques
Les ph´enom`enes thermiques jouent un rˆole fondamental dans le probl`eme du disque.
En effet, pour une voiture particuli`ere de masse M = 1500 kg que l’on freine `a partir
d’une vitesse initiale de V = 150 km/h jusqu’`a l’ arrˆet, la puissance ´energ´etique absorb´ee
par le disque est d’environ 240 kW . Cette ´energie doit ˆetre absorb´ee par le frein en `a
peine quelques secondes. Toute la chaleur transmise au disque conduit alors `a de tr`es
fortes ´el´evations de temp´erature : celle-ci atteint r´eguli`erement des valeurs proches
de 500oC, et dans des cas de freinage tr`es s´ev`ere, elle peut localement atteindre 700 ou
800oC. Dans ces domaines, le comportement m´ecanique de la fonte change. Il devient
vis-queux, les limites d’´elasticit´e s’effondrent, ainsi que les limites d’endurance. Les points de
transformation de phase peuvent mˆeme ˆetre localement d´epass´es. Peuvent aussi survenir
des probl`emes de vapor-lock : lorsque la temp´erature devient trop ´elev´ee sur les pistes de
frottement, la chaleur peut se transmettre au liquide de frein qui se vaporise en partie. Il y
a aussi les probl`emes de ”fading”, c’est-`a-dire de perte d’efficacit´e due `a la chute du
coeffi-cient de frottement avec la temp´erature. Ces observations montrent qu’il est essentiel que
le disque puisse absorber beaucoup de chaleur et sache l’´evacuer rapidement afin d’´eviter
des fortes ´el´evations de temp´erature. Ainsi, la capacit´e de refroidissement du disque est
un crit`ere fondamental pour son bon fonctionnement et son endurance. C’est ce qui a
motiv´e la fabrication des disques ventil´es, ainsi que l’utilisation de plus en plus r´epandue
d’´ecopes plac´ees devant les freins qui permettent d’apporter continuellement un flux d’air
frais. A cˆot´e de ces solutions techniques qui permettent de diminuer la temp´erature dans
le disque, certains probl`emes persistent comme celui du couple r´esiduel. En effet, le rappel
des plaquettes est parfois mal assur´e par les ressorts de sorte qu’elles restent en contact
frottant perp´etuel avec le disque. Non seulement, elles s’usent plus vite et g´en`erent du
bruit basse-fr´equence, mais aussi, elles maintiennent le disque `a une temp´erature plus
´
elev´ee que l’ambiante.
Mais le plus endommageant, ce sont les gradients thermiques qui apparaissent
dans le disque lors d’un freinage. En effet, le disque tend `a se dilater dans les zones
chaudes, mais il est finalement ”maintenu” par les zones froides. Cela donne lieu `a des
contraintes de compression avec plastification. Lors du refroidissement, il y a apparition
de contraintes r´esiduelles de traction. Le disque subit donc des cycles de contraintes
trac-tion/compression qui s’apparentent `a des cycles de fatigue thermique.
• les gradients dans l’´epaisseur des pistes ;
• les gradients surfaciques (radiaux et surtout orthoradiaux) ; • les gradients dans la gorge du disque.
L’origine des gradients dans l’´epaisseur des pistes est ais´ement expliqu´ee : le disque
est chauff´e en surface mais comme la plupart des freinages ne durent que quelques
se-condes, la chaleur n’a pas le temps de p´en´etrer dans l’´epaiseur du disque. Les temp´eratures
de surface peuvent atteindre 500oC en 4 ou 5 secondes, tandis que le centre des pistes
n’at-teint qu’une valeur de 100 ou 200oC. La temp´erature finit par s’homog´en´eiser avant que
de nouveaux gradients apparaissent : pendant le refroidissement, seule la surface refroidit
par convection. Elle devient alors plus froide que le cœur. Ces diff´erences de temp´erature
selon la profondeur provoquent des contraintes circonf´erentielles de traction ou de
com-pression.
Les gradients dans la gorge du bol s’expliquent de la mˆeme mani`ere. En d´ebut de
frei-nage, la temp´erature du bol est `a 20oC tandis que celle des pistes est de quelques centaines
de degr´es. De plus, dans le but d’´eviter que la temp´erature du moyeu ne soit trop ´elev´ee
(ce qui engendrerait des ´el´evations de temp´erature du pneu, tr`es critique pour son
compor-tement), la gorge est usin´ee de mani`ere `a ne pas transmettre trop de chaleur au bol. Avec
cet usinage, la temp´erature du bol baisse effectivement, mais les gradients thermiques
aug-mentent cons´equemment dans cette zone. Ceux-ci engendrent des contraintes thermiques
qui expliquent les ruptures de bol observ´ees lors d’essais exp´erimentaux s´ev`eres.
Les gradients surfaciques (radiaux et orthoradiaux) sur les pistes de frottement du
disque ont fait l’objet d’innombrables ´etudes. On peut par exemple citer les travaux de
D’Cruz et Jimbo qui les ont observ´es [33][47]. Ces gradients sont en g´en´eral ´elev´es et
variables au cours du temps (pendant un freinage) et ils sont `a l’origine de nombreux
probl`emes (fissures radiales et fa¨ıen¸cage, vibrations, bruits).
Les gradients radiaux (c’est-`a-dire les diff´erences de temp´eratures observ´ees sur un
rayon de la piste de frottement) peuvent d’abord ˆetre expliqu´es par le fait que le flux de
chaleur φ qui entre dans le disque est issu du frottement. Il est donc de la forme :
φ = µV P (1.1)
o`u µ est le coefficient de frottement, V la vitesse du disque (si on n´eglige la vitesse relative
d’un point mat´eriel par rapport au disque) et P la pression. Comme on a :
V = rω (1.2)
o`u ω est la vitesse de rotation du disque, le flux d´epend directement du rayon. On peut
donc s’attendre `a ce que la temp´erature soit aussi d´ependante du rayon. Les gradients
thermiques radiaux proviennent aussi des non-uniformit´es de la pression de contact entre
le disque et les plaquettes. Comme nous le verrons ult´erieurement, les pressions de contact
frottement µ est une fonction de plusieurs param`etres, dont la vitesse et la pression. Il
est donc aussi variable avec le rayon. Les gradients thermiques radiaux sont donc tr`es
bien expliqu´es ; beaucoup d’´etudes ont ´et´e men´ees dans le but de les ´evaluer mais les
difficult´es demeurent puisque le ph´enom`ene d´epend de plusieurs param`etres difficiles `a
pr´edire (surtout les variations de contact). Parfois, les gradients thermiques se pr´esentent
sous forme de ”bandes chaudes”. On les appelle aussi les ”cercles de feu” (fig. 1.19). Il
y en a g´en´eralement un ou deux par piste de frottement. Ils sont issus des variations de
port´ee de contact garnitures/disque [79][48].
Les gradients thermiques orthoradiaux ont deux origines diff´erentes. Ils ont ´et´e
ob-serv´es par Eisengraber [38] ou encore Bailey [5] mais ont ´et´e relativement peu ´etudi´es, ou
en tout cas, jamais pr´edits quantitativement. En effet, par leur caract`ere orthoradial, ils ne
peuvent ˆetre d´etermin´es que par des analyses tridimensionnelles, trop complexes et lourdes
`
a mettre en œuvre num´eriquement par des m´ethodes classiques. Le d´eveloppement
d’al-gorithmes eul´eriens pr´esent´es dans le chapitre (2) permet alors d’aboutir `a des pr´edictions
quantitatives de ces gradients.
La premi`ere cause de ces gradients r´eside dans le fait que le disque n’est chauff´e que
par intermittence. Quand un ´el´ement de surface du disque passe sous les plaquettes, ou
plus pr´ecis´ement dans la zone de contact effective, qui est diff´erente de la surface totale
des plaquettes, il re¸coit le flux de chaleur issu du frottement. Quand il s’en ´eloigne, il se
retrouve `a l’air libre et peut donc refroidir par convection. Ainsi, la piste de frottement
est plus chaude en sortie de plaquette et plus froide en entr´ee. Cela induit des gradients
thermiques orthoradiaux. Pour des freinages dits d’arrˆet (freinages pour lesquels la vitesse
du disque d´ecroˆıt d’une valeur initiale jusqu’`a 0 km/h), les gradients sont de l’ordre de
50oC. Cette valeur varie l´eg`erement au cours du temps et d´epend de plusieurs param`etres
dont la vitesse de rotation. Plus la vitesse est ´elev´ee, et plus le gradient est faible, puisque
le temps pass´e loin des plaquettes est court. Dans les freinages `a vitesse constante
(suffi-samment ´elev´ee), le gradient est plutˆot faible.
La deuxi`eme cause provient de ce qui est commun´ement appel´e ”points chauds” (ou
encore ”hot spots”). Ce sont des zones rondes de taille variable, o`u la temp´erature est
plus ´elev´ee qu’ailleurs et qui n’apparaissent que dans certaines configurations de freinage.
Ces zones chaudes sont r´eguli`erement espac´ees sur les pistes de frottement mais leur
position et leur intensit´e varient au cours du temps. Elles ont ´et´e observ´es dans le domaine
a´eronautique en 1975 par Santini et Kennedy [79] puis dans le domaine ferroviaire par
Wentenkamp [87] et Dow [34]. Une premi`ere description de ces hot spots observ´es dans
l’automobile a ´et´e faite par Anderson et al.. Il propose une classification des points chauds
en quatre cat´egories selon leur taille, leur temp´erature et leur cause [3]. Les diff´erents types
sont :
• les asp´erit´es ou les rugosit´es (”asperity”) ;
• les TEI (”Thermo Elastic Instabilities”) et leur forme att´enu´ee : les bandes chaudes ( ”focal”) ;