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L'utilisation du RADAR en centre d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) pendant sept journées consécutives

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Academic year: 2021

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L’utilisation du RADAR en centre d’hébergement et de soins

de longue durée (CHSLD) pendant sept journées

consécutives

Mémoire

Isabelle Pelletier

Maîtrise en sciences infirmières

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

(2)

L’utilisation du RADAR en centre d’hébergement et de soins

de longue durée (CHSLD) pendant sept journées

consécutives

Mémoire

Isabelle Pelletier

Sous la direction de :

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iii

Résumé

La prévalence du delirium en centre d’hébergement s’élève à environ 25 %. Ce syndrome est associé à une augmentation de la mortalité et de la morbidité chez les personnes âgées, des coûts et de la charge de travail liés à leurs soins, ainsi que de la détresse des familles. Sa détection rapide et les interventions qui en découlent permettent d’en réduire les conséquences. Or, le taux de détection du delirium par les infirmières est peu élevé, variant de 26 à 83 %. Le but de cette recherche était de déterminer la validité de l’outil RADAR (pour repérage actif du delirium adapté à la routine) à détecter le delirium lorsque l’outil est utilisé pendant sept jours consécutifs en CHSLD. Pour ce faire, le RADAR a été complété par des infirmières auxiliaires lors de l’administration de la médication. Les résultats obtenus à l’aide du RADAR ont été comparés à ceux obtenus par l’étudiante chercheuse avec le CAM. Les résultats de l’estimation classique des paramètres montrent une sensibilité de 100 % et une spécificité de 72 %, alors que l’analyse bayésienne des données permet l’obtention d’une sensibilité de 68 % et d’une spécificité de 71 %. Le pourcentage d’accord interjuge varie de 94 à 97 % pour les trois éléments composant le RADAR. Cet outil de repérage représente donc une valeur ajoutée pour la pratique infirmière dans un contexte de détection du delirium.

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iv

Abstract

The prevalence of delirium in nursing homes is about 25%. Delirium is associated with increased mortality, morbidity, costs, workload and family distress. The fast delirium detection and the resulting interventions can reduce these consequences. However, the rate of delirium detection by nurses is low, ranging from 26% to 83%. The purpose of this research was to determine the validity of the RADAR (Recognizing Acute Delirium As part of your Routine) to detect delirium when used during seven consecutive days in nursing homes. To this end, it was administered by nursing assistants during the scheduled distribution of medication. The results obtained using RADAR were compared to those obtained by the student-researcher with CAM. Results from classical estimation of the parameters had a sensitivity of 100% and a specificity of 72%, while the Bayesian analysis of data resulted in a sensitivity of 68% and a specificity of 71%. The interrater agreement varied from 94% to 97% for the three RADAR items. This screening tool would therefore have added value for nursing practice in the context of delirium detection in nursing homes.

(5)

v

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Liste des tableaux ... viii

Listes des figures ... ix

Liste des abréviations ... x

Remerciements ... xi

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Présentation de la problématique... 2

1.1 Delirium en soins de longue durée ... 2

1.2 Conséquences du delirium ... 2

1.3 Rôle du personnel infirmier dans la détection du delirium ... 3

1.4 Sous-détection du delirium en soins de longue durée ... 3

1.5 Facteurs associés à la sous-détection du delirium ... 3

1.6 Solutions proposées pour contrer la sous-détection du delirium ... 4

1.7 Limites des outils de détection du delirium ... 5

1.8 L’outil RADAR ... 5

1.9 But de l’étude ... 6

Chapitre 2 : Recension des écrits ... 7

2.1 Delirium ... 7

2.1.1 Définition du delirium ... 7

2.1.2 Cadre de référence : Le modèle multifactoriel du delirium ... 8

2.2 Delirium et profession infirmière ... 10

2.2.1 Fonctions de la profession infirmière ... 10

2.2.2 Discipline infirmière ... 11

2.2.3 Champs de pratique de la profession infirmière et infirmière auxiliaire ... 12

2.3 Sous-détection du delirium ... 13

2.3.1 Ampleur de la problématique ... 13

2.3.2 Facteurs associés à la sous-détection ... 17

2.3.2.1 Facteurs associés au patient ... 17

2.3.2.2 Facteurs associés à l’infirmière ... 19

2.3.2.3 Facteurs associés à l’organisation du travail ... 21

2.4 Études antérieures visant l’amélioration de la détection du delirium ... 22

2.5 RADAR ... 24

2.6 But de l’étude ... 25

(6)

vi

3.1 Devis de recherche ... 26

3.2 Population à l’étude ... 27

3.2.1 Critères d’inclusion et d’exclusion... 27

3.2.1.1 Critères d’inclusion et d’exclusion pour les résidents... 27

3.2.1.2 Critères d’inclusion pour les infirmières et infirmières auxiliaires ... 28

3.2.2 Mode d’échantillonnage ... 28

3.2.3 Taille de l’échantillon ... 29

3.2.4 Recrutement des participants ... 30

3.2.4.1 Recrutement des participants aptes ... 30

3.2.4.2 Recrutement des participants inaptes ... 30

3.2.4.3 Recrutement des participantes-infirmières et infirmières auxiliaires ... 30

3.2.5 Instruments de mesure ... 31

3.2.5.1 Instruments de mesure complétés auprès des résidents ... 31

3.2.5.2 Instruments de mesure complétés auprès du personnel infirmier ... 34

3.3 Collecte de données ... 34

3.3.1 Collecte de données auprès des résidents ... 34

3.3.2 Collecte de données auprès du personnel infirmier ... 35

3.4 Analyse des données ... 35

3.5 Éthique de la recherche ... 36

3.5.1 Comité d’éthique de la recherche ... 36

3.5.2 Enjeux éthiques ... 36

3.5.2.1 Enjeux éthiques concernant les résidents ... 37

3.5.2.2 Enjeux éthiques concernant le personnel infirmier ... 39

Chapitre 4 : Résultats ... 40

4.1 Description de l’échantillon ... 40

4.1.1 Caractéristiques des participants-résidents ... 41

4.1.2 Caractéristiques des participantes-infirmières auxiliaires ... 43

4.2 Résultats de l’étude ... 44

4.2.1 Résultats bruts des paramètres du RADAR ... 45

4.2.2 Analyse bayésienne de la sensibilité, de la spécificité et de la prévalence ... 46

4.2.3 Fidélité interjuge du RADAR ... 48

4.2.4 Acceptabilité et faisabilité du RADAR ... 49

Chapitre 5 : Discussion ... 54

5.1 Résumé des principaux résultats obtenus ... 54

5.2 Sensibilité et spécificité de l’outil RADAR à détecter le delirium ... 54

5.3 L’harmonie interjuge ... 56

5.4 Acceptabilité et faisabilité de l’utilisation du RADAR ... 58

5.5 Comparaison des paramètres avec de nouveaux outils de détection du delirium 60 5.6 Limites et forces de l’étude ... 63

5.6.1 Limites de l’étude ... 63

(7)

vii

5.7 Retombées de l’étude ... 64

5.7.1 Retombées pour la discipline infirmière ... 65

5.7.2 Retombées pour la pratique clinique ... 65

5.7.3 Retombées pour la recherche ... 66

Conclusion ... 68

Bibliographie ... 69

Annexe 1 : Lettre présentant le projet de recherche ... 73

Annexe 2 : Formulaire de consentement à l’intention des participants résidents

... 75

Annexe 3 : Formulaire de consentement à l’intention des représentants des

participants résidents... 80

Annexe 4 : Formulaire de consentement à l’intention des participants du

personnel infirmier ... 85

Annexe 5 : RADAR ... 90

Annexe 6 : CAM ... 93

Annexe 7 : MEEM ...101

Annexe 8 : SMAF ...106

Annexe 9 : Charlson Index ...115

(8)

viii

Liste des tableaux

Tableau 1 Caractéristiques des participants-résidents (N = 45)... 42

Tableau 2 Caractéristiques des participantes-infirmières auxiliaires (N = 41) ... 43

Tableau 3 Données recueillies (N = 45) ... 45

Tableau 4 Valeur observées des paramètres (N = 45)... 45

Tableau 5 Données à priori du RADAR phase 2 (Voyer et al., 2015) (N = 193) ... 47

Tableau 6 Paramètres a priori du RADAR phase 2 (Voyer et al., 2015) ... 47

Tableau 7 Paramètres a posteriori ... 48

Tableau 8 Fidélité du RADAR ... 49

Tableau 9 Réponses au formulaire d’appréciation ... 50

Tableau 10 Principaux commentaires des participantes-infirmières auxiliaires portant sur les énoncés du formulaire d’appréciation ... 51

(9)

ix

Listes des figures

Figure 1 Modèle multifactoriel du delirium ... 9 Figure 2 Recrutement des participants-résidents ... 41

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x

Liste des abréviations

AVD : Activités de la vie domestique CAM : Confusion Assessment Method

CAM-ICU : Confusion Assessment Method for the Intensive Care Unit CÉR : Comité d’éthique de la recherche

CÉRUL : Comité d’éthique de la recherche de l’Université Laval CHSLD : Centre d’hébergement et de soins de longue durée CSSS : Centre de santé et de services sociaux

DOS : Delirium Observation Screening Scale DRS : Delirium Rating Scale

DSM : Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux FADM : Formulaire d’administration des médicaments

MDAS : Memorial Delirium Assessment Scale MEEM : Mini-examen de l’état mental

OIIQ : Ordre des infirmières et infirmiers du Québec RADAR : Repérage actif du delirium adapté à la routine SMAF : Système de mesure de l’autonomie fonctionnelle SSQ-delirium : Single Screening Question-delirium VPN : Valeur prédictive négative

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xi

Remerciements

Tout d’abord, merci à mon directeur de recherche, Philippe Voyer, pour son accompagnement tout au long de mes études de deuxième cycle. Merci pour les conseils, les encouragements et les nombreuses opportunités, tant académiques que professionnelles.

Aussi, merci à Pierre-Hugues Carmichael pour l’analyse statistique des données, les nombreuses explications y étant rattachées et sa grande disponibilité. Merci à Sylvie Richard, Hélène Richard et France Lafrenière pour le coaching et le partage des documents. Merci à Nancy Cyr pour l’aide dans les démarches menant à la réalisation du projet dans le milieu clinique.

Ensuite, merci à tout le personnel soignant impliqué de près ou de loin dans le projet. Votre accueil et votre participation m’ont permis de mener ce projet jusqu’au bout. Merci aussi à tous les résidents et leurs familles pour leur intérêt envers le projet et leur participation. Également, merci à mes collègues de maîtrise qui ont partagé ce parcours sinueux avec moi.

Puis, merci à ma famille et mes amis pour leur support. Ils m’ont permis de conserver une santé mentale florissante à travers ce long processus. Un merci spécial à mes parents, qui m’ont appris la persévérance, l’importance du travail bien fait et qui m’ont supportée dans tous mes projets à petite et grande échelle.

Enfin, merci à mon compagnon de vie, mon mari, mon meilleur ami. Merci de croire autant en moi et d’être toujours à mes côtés, dans les hauts et les bas de notre vie. Tu es ma force tranquille.

Petite pensée pour notre bébé, qui m’a accompagné pendant toute la rédaction de ce mémoire, par ses coups de pied dans ma bedaine, puis par ses sourires au quotidien.

(12)

1

Introduction

La sous-détection du delirium est une problématique importante dans les milieux de soins de longue durée. Il existe plusieurs outils de détection, mais peu d’entre eux sont adaptés à la réalité clinique et validés pour ce milieu.

Le but de cette recherche est de déterminer la validité de l’outil RADAR (repérage actif du delirium adapté à la routine) à détecter le delirium lorsqu’il est utilisé pendant sept jours consécutifs en centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD). Les questions de recherche portaient donc sur les aspects suivants du RADAR : la sensibilité, la spécificité, la valeur prédictive positive et négative, la fidélité interjuge, l’acceptabilité et la faisabilité de son utilisation.

Le premier chapitre de ce mémoire décrit la problématique de la sous-détection du delirium chez les aînés résidant en CHSLD.

Le deuxième résume ensuite l’état des connaissances sur le delirium, sa relation avec la discipline infirmière de même que les études antérieures ayant porté tant sur sa sous-détection que sur l’amélioration de sa détection, avant de présenter l’outil RADAR.

La méthode utilisée et les considérations éthiques propres à cette étude sont relatées dans le troisième chapitre.

Quant au quatrième, il présente les caractéristiques de l’échantillon étudié, ainsi que les résultats de l’étude et ceux obtenus en réponse aux trois questions de recherche.

Le cinquième chapitre consiste à comparer les résultats de cette recherche à ceux d’études antérieures, à les analyser et à les discuter tout en les relativisant par la prise en compte des forces et des limites de l’étude. La contribution de ces travaux à la discipline infirmière, à la pratique clinique et à la recherche y est également commentée.

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2

Chapitre 1 : Présentation de la problématique

La prévalence élevée du delirium en contexte de soins de longue durée et son faible taux de détection entraînent de graves conséquences pour l’aîné. Cette problématique, qui sera présentée dans un argumentaire visant à appuyer la pertinence de cette étude, implique l’infirmière en raison des activités réservées qui y sont liées. Elle a également mené au développement d’outils de détection, dont le RADAR.

1.1 Delirium en soins de longue durée

Dans leur étude, de Lange, Verhaak et van der Meer (2013) affirment que la prévalence du delirium en soins de longue durée varie de 1,4 à 70,3 %. Ils attribuent cette variation aux critères diagnostiques utilisés, ainsi qu’à la prévalence de la démence dans la population étudiée (de Lange et al., 2013). La démence est un facteur augmentant la prévalence et l’incidence du delirium chez l’aîné, tout comme l’âge (Steis et Fick, 2008). Selon un rapport du Ministère de la Santé et des Services sociaux [MSSS] (2003), les aînés qui résident en CHSLD sont atteints de troubles cognitifs dans 60 à 80 % des cas, et 46 % d’entre eux sont âgés de plus de 85 ans. Cette population a donc de forts risques de présenter un delirium.

1.2 Conséquences du delirium

Il est important que le delirium soit détecté le plus tôt possible chez l’aîné, puisque cette condition est réversible (McCusker et al., 2011). Sa sous-détection entraîne des conséquences tant pour l’aîné et ses proches que pour le personnel soignant et le système de santé. En effet, ce syndrome est associé à un taux plus élevé de mortalité et de morbidité, en plus d’engendrer des coûts élevés pour le système de santé (Pae, Marks, Han, Patkar et Masand, 2008). En 2013, Voyer avançait déjà que le taux de mortalité augmente de 15 à 30 % chez les aînés qui le développent. Le delirium contribue également à augmenter la charge de travail du personnel de soins et la détresse des membres de la famille (Voyer, Richard, Doucet, Cyr et Carmichael, 2011). La surveillance, par le personnel soignant, des patients l’ayant développé doit ainsi être plus fréquente (Voyer, Cole, McCusker et Belzile, 2006), particulièrement lorsque ceux-ci présentent des signes de démence, car ils sont généralement dépendants du point de vue fonctionnel et peu coopératifs (Arinzon, Peisakh, Schrire et Berner, 2011). La détection rapide et l’intervention qui en découle ont alors un impact significatif sur les conséquences du delirium.

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3

1.3 Rôle du personnel infirmier dans la détection du delirium

Selon la loi 90, l’évaluation de l’état physique et mental de la personne symptomatique est une activité réservée à l’infirmière (Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, 2003). En situation de delirium, la responsabilité de cette dernière est donc importante. En CHSLD, elle est en position stratégique pour obtenir les informations nécessaires à l’évaluation de l’état mental de la personne âgée puisqu’elle est présente toute la journée auprès des résidents et qu’elle participe à la routine de soins (Voyer et al., 2012). Cette position lui permet de détecter les changements subtils qui pourraient être signe d’un delirium (Peacock, Hopton, Featherstone et Edwards, 2012). Pourtant, le taux de détection du delirium par les infirmières au chevet des résidents est peu élevé.

1.4 Sous-détection du delirium en soins de longue durée

Selon Voyer et al. (2012), 51 % des cas de delirium sont identifiés par les infirmières. Dans un groupe atteint de démence, ce taux de détection diminuerait à 13 %, indiquant un taux de sous-détection de 87 % (Voyer, Richard, Doucet, Danjou et Carmichael, 2008). Le taux de détection des symptômes du delirium, lorsque pris séparément, se situerait quant à lui entre 25 et 66,7 % (Voyer et al., 2012). On peut donc avancer l’hypothèse que des lacunes quant aux connaissances des infirmières sur le delirium en seraient la cause. Toutefois, Peacock et al. (2012) ont démontré que leurs connaissances sont suffisantes pour leur permettre de distinguer les symptômes du delirium de ceux de la démence et de la dépression. Les infirmières sont ainsi capables d’identifier les symptômes présents chez le résident, mais ne les associent pas d’emblée au delirium. Sa détection est d’une sensibilité allant de 7,3 à 15,5 %, et d’une spécificité variant de 95,2 à 100 % (Voyer, Doucet, Danjou, Cyr et Benounissa, 2007). L’infirmière identifie donc peu de cas de delirium.

1.5 Facteurs associés à la sous-détection du delirium

La sous-détection du delirium peut être attribuée à différents facteurs qui peuvent être regroupés sous trois catégories : ceux associés au patient, ceux associés au personnel infirmier et ceux associés à l’organisation du travail. Les facteurs associés au patient constituent la présentation hétérogène et fluctuante du delirium (Pae et al., 2008). Steis et Fick (2008) identifient la forme hypoactive du delirium, un âge au-delà de 80 ans, la présence de troubles

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4

visuels et la démence comme les principaux facteurs associés au patient. Selon Cole (2004), la forme hypoactive du delirium est négligée, bien qu’elle soit très fréquente dans cette population. De plus, les infirmières éprouvent plus de difficultés à identifier le delirium chez les résidents atteints de démence. À cela s’ajoute la présence de déficits cognitifs et de symptômes dépressifs (McCusker et al., 2011). Les facteurs associés à l’infirmière se résument à sa faible connaissance du delirium ainsi qu’à la non-utilisation d’instruments de détection standardisés dans la pratique quotidienne (Lemiengre et al., 2006). Les facteurs associés à l’organisation du travail sont les ressources limitées (Pae et al., 2008). On peut aussi avancer l’hypothèse que les ratios élevés de patients par infirmière en CHSLD diminuent le temps passé à leur chevet, ce qui pourrait nuire à la détection du delirium, le temps consacré au patient étant déterminant (Steis et Fick, 2008).

1.6 Solutions proposées pour contrer la sous-détection du

delirium

Selon Shaughnessy (2013), peu de mesures ont été implantées pour encourager la détection du delirium à cause du manque de compréhension du personnel infirmier quant à leur importance et à leur impact direct sur le patient. Toutefois, l’installation d’une affiche sur le delirium dans une unité de soins intensifs coronariens a permis d’augmenter le degré de conscientisation du personnel devant cette problématique, les facteurs qui l’entraînent et les actions pouvant la prévenir (Shaughnessy, 2013). Pour augmenter la détection de ce syndrome, les infirmières ont besoin de pouvoir passer plus de temps avec les patients, d’une bonne connaissance tant des patients que du delirium, d’un instrument objectif pour guider l’évaluation, de documentation et d’un leadership organisationnel qui va dans ce sens (Steis et Fick, 2008).

L’outil idéal pour la détection du delirium devrait exiger peu de temps, être facile d’utilisation et s’intégrer facilement dans la routine de soins (Voyer et al., 2012). Ainsi, plusieurs outils sont reliés au delirium, tant à sa détection qu’à la détermination de la gravité de ses symptômes. Dans l’étude publiée en 2003, Schuurmans, Deschamps, Markham, Shortridge-Baggett et Duursma (2003) identifient le Confusion Assesment Method (Wong, Holroyd-Leduc, Simel et Straus) comme étant le meilleur outil pour le diagnostic du delirium, alors que selon l’étude de Wong et al. (2010), l’échelle de confusion NEECHAM et le Delirium Observation Screening Scale (DOS) seraient les outils les plus appropriés auprès des aînés hospitalisés (Wong et al., 2010). L’instrument de mesure Nu-DESC, qui n’est pas inclus dans cette revue de la littérature, permet une détection systématique, continue et rapide du delirium. Cet instrument

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5

prend en effet moins de deux minutes à utiliser, mais n’a été développé que dans un contexte d’oncologie (Gaudreau, Gagnon, Harel, Tremblay et Roy, 2005). Selon Adamis, Sharma, Whelan et Macdonald (2010), les outils utilisables et performants dans leur forme actuelle sont le Confusion Assessment Method (Wong et al.), le Delirium Rating Scale (DRS), le Memorial Delirium Assessment Scale (MDAS) et le NEECHAM. Ces outils ne sont toutefois pas adaptés au contexte clinique en CHSLD.

1.7 Limites des outils de détection du delirium

Peu des treize outils recensés par Schuurmans et al. (2003) ont réellement été développés et testés à la suite de leur étude originale, ayant été réalisées presque exclusivement en milieu hospitalier (Schuurmans et al., 2003). Le contexte en CHSLD est fort différent étant donné le type de clientèle, la routine de soins et les ratios infirmières-résidents. Cole (2004) propose d’utiliser toutes les sources possibles de données lors de l’évaluation de l’état mental, et donc d’inclure l’équipe soignante et la famille par l’intermédiaire d’entrevues. Une formation est nécessaire avant d’utiliser le CAM, qui lui, doit être complété avec un autre test cognitif. Le DRS a été conçu pour être complété par un médecin ayant une formation dans le domaine de la psychiatrie. Le MDAS est plus utile pour mesurer la sévérité du delirium post-diagnostic, tandis que le NEECHAM mesure la présence de la « confusion » et non pas la présence du delirium (Adamis et al., 2010).

1.8

L’outil RADAR

L’outil RADAR a été développé pour répondre aux critères de l’outil idéal de détection du delirium. Il peut être utilisé par l’infirmière ou l’infirmière auxiliaire et ne prend que sept secondes à compléter (Voyer et al., 2015). Il a été testé dans les hôpitaux, mais aussi en CHSLD, où il répond aux besoins spécifiques de ces milieux. Le RADAR, qui s’adapte à la nature fluctuante des symptômes, a été développé en prenant en considération la charge de travail des infirmières et la collaboration essentielle avec les infirmières auxiliaires lors de la distribution de la médication. Cet outil a donc permis d’augmenter considérablement les taux de détection du delirium, en plus de répondre au besoin des infirmières dans leur pratique clinique. Le nombre de RADAR complétés par jour et le nombre de jours consécutifs d’utilisation ont un impact sur

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6

sa validité, selon les études antérieures sur le sujet. Ces dernières révèlent des résultats de sensibilité et de spécificité du RADAR de 58 et de 78 % respectivement lorsque le test est complété d’une à deux fois par jour, contre 73 et 67 % lorsqu’il est complété de trois à quatre fois par jour (Voyer et al., 2015). Puisque l’outil a déjà été testé durant une journée et durant deux jours consécutifs, il serait pertinent de l’utiliser sur une période plus longue, ce qui refléterait davantage la réalité pratique.

1.9

But de l’étude

Le but de cette recherche est donc de déterminer la validité de l’outil RADAR à détecter le delirium lorsqu’il est utilisé pendant sept jours consécutifs en CHSLD.

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7

Chapitre 2 : Recension des écrits

Ce chapitre se divise en six sections : le delirium, les relations du personnel infirmier avec ce syndrome, sa sous-détection, les études portant sur les façons d’en améliorer la détection par l’utilisation de divers outils et celles portant sur le RADAR et, enfin, les questions auxquelles cette recherche veut répondre.

2.1 Delirium

Dans cette première section, le delirium sera défini et son modèle multifactoriel, qui servira de cadre de référence, sera présenté.

2.1.1 Définition du delirium

Le delirium est un trouble mental dont l’apparition est brusque, et la nature fluctuante. Il est caractérisé par des perturbations de la conscience, de l’attention, de l’orientation, de la mémoire, de la pensée, de la perception et du comportement (Cole, 2004).

Pour être en mesure de diagnostiquer le delirium, certains critères ont été établis. Selon une revue de la littérature réalisée par Inouye, Westendorp et Saczynski (2013), le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux : DSM-5 (American Psychiatric Association, 2013) est l’une des références standards pour les critères diagnostiques du delirium. Les cinq critères présentés dans le DSM-5 sont :

a) un trouble de l’attention et de l’état de conscience ;

b) une apparition soudaine de changements en ce qui touche l’attention et l’état de conscience, et la fluctuation des symptômes ;

c) une perturbation supplémentaire de la cognition ;

d) l’absence d’explication pour les critères a et c provenant d’un autre problème neurocognitif ou d’un état de sous stimulation, comme le coma ;

e) le delirium est la conséquence physiologique directe d’une autre condition médicale, d’une intoxication, d’un sevrage ou d’une toxine, ou encore, est d’étiologies multiples.

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8

Un cadre de référence permet ainsi de mieux comprendre ce qui amène la personne à développer un delirium.

2.1.2 Cadre de référence : Le modèle multifactoriel du delirium

Selon le modèle multifactoriel, le delirium est le résultat de l’interaction entre les facteurs prédisposants, aussi appelés « vulnérabilité de la personne », et les facteurs précipitants, ou « nocivité de l’environnement », que vit la personne (Inouye et Charpentier, 1996). Les facteurs prédisposants et précipitants ont des contributions indépendantes et substantielles au modèle multifactoriel. Plus la vulnérabilité de la personne est grande, moins son milieu environnant doit lui être nocif, car cela pourrait mener à un delirium. En fonction du nombre de facteurs présents, les personnes sont donc classées dans trois catégories de risque, soit léger, intermédiaire et haut risque de développer un delirium.

Selon l’adaptation du modèle multifactoriel (Figure 1) présentée dans Voyer (2013), les facteurs prédisposants sont placés sur une échelle allant de vulnérabilité élevée à faible, où se trouvent, dans cet ordre, la maladie d’Alzheimer, la dépression majeure, la déshydratation, la présence de comorbidité, l’autonomie et l’excellence du soutien social. Quant aux facteurs précipitants, ils sont disposés sur une échelle allant de milieu nocif à non nocif, où se trouvent, dans cet ordre, la chirurgie majeure, l’hospitalisation, l’immobilité, la prise de médicaments psychotropes, la sous-stimulation et les stimulations physique et cognitive adaptées (Voyer, 2013).

(20)

9

Source : Voyer (2013, p.157), adapté de Inouye et Carpentier (1996)

Voyer, Richard, Doucet, Cyr et Carmichael (2010) se sont intéressés au modèle multifactoriel en contexte de soins de longue durée auprès d’une population québécoise atteinte de démence. Les résultats ont démontré une augmentation de la prévalence du delirium en fonction du risque associé au nombre de facteurs prédisposants ou précipitants. Toutefois, seuls les facteurs prédisposants étaient statistiquement significatifs lorsque les deux types de facteurs étaient inclus dans le même modèle. Il est possible de supposer que les premiers ont un rôle plus important que les seconds dans le développement du delirium chez la population âgée atteinte de démence.

Selon leur étude publiée en 2009, Voyer, Richard, Doucet et Carmichael ont observé une prévalence moyenne de 70,3 % du delirium auprès des résidents en CHSLD atteints de démence en utilisant le CAM. Dans une étude réalisée auprès de cette même population, les niveaux de risque faible, moyen et élevé étaient respectivement associés à une prévalence de 32 %, 78,4 % et 98,1 % pour les facteurs prédisposants (Voyer et al., 2010). Pour les facteurs

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précipitants, la prévalence était de 37,9 %, 67,2 % et 86,8 % en fonction du niveau de risque (Voyer et al., 2010).

Il est du devoir de l’infirmière de s’intéresser au delirium puisque la détection de cette pathologie, qui touche les aînés en CHSLD, est liée à la profession infirmière, tant sur le plan clinique que théorique.

2.2 Delirium et profession infirmière

Il existe de nombreuses relations entre le delirium et la profession infirmière, tant en raison des fonctions de ces professionnelles de la santé et de la discipline infirmière que de leur champ de pratique et leurs activités réservées.

2.2.1 Fonctions de la profession infirmière

Selon Dallaire et Dallaire (2008), les cinq grandes fonctions de l’infirmière sont les soins, l’éducation, la coordination, la collaboration et la supervision. Ces auteurs définissent d’ailleurs la fonction comme étant « un ensemble d’activités déterminées, de caractère professionnel, liées à un individu et afférentes à un emploi » (p. 267). La fonction des soins est un rôle dit fondamental de l’infirmière (Dallaire et Dallaire, 2008). Les soins et la collaboration sont associés à l’activité réservée qu’est l’évaluation physique et mentale de la personne présentant des symptômes. En effet, sa collaboration avec le médecin est essentielle à la prise en charge du patient atteint de delirium. L’infirmière dépiste le delirium lors de soins directs auprès de la personne avant de communiquer le résultat de son évaluation au médecin. Inouye, Foreman, Mion, Katz et Cooney Jr (2001) soulignent d’ailleurs que comme les médecins ne passent que peu de temps auprès des patients, ils s’appuient fortement sur les observations infirmières pour détecter des changements de l’état mental, dont ceux occasionnés par le delirium. En plus de ces fonctions, le rôle du personnel infirmier est aussi encadré par la discipline infirmière et son champ d’exercice.

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2.2.2 Discipline infirmière

Selon Pepin, Kérouac et Ducharme (2010), la discipline infirmière est une discipline professionnelle. « Les disciplines professionnelles développent des connaissances qui servent à définir et à guider les activités dans leurs différents champs que sont la pratique, la recherche, la gestion, la formation et le politique » (p. 3). La présente étude s’intéresse à la validité d’un outil de détection du delirium pouvant être utilisé en milieu clinique par les infirmières. C’est donc au champ pratique de cette discipline que se rattache ce sujet d’étude. La recherche « permet plus précisément d’explorer, de décrire, d’expliquer et de prédire des phénomènes qui présentent un intérêt pour la discipline, et elle a pour finalité la santé, en améliorant la qualité, l’efficacité et l’efficience des soins infirmiers » (p.109). Comme mentionné au chapitre 1, peu d’outils de détection du delirium sont adaptés à la pratique infirmière en CHSLD étant donné les ratios infirmière-résidents, le type de clientèle et la routine de soins dans ce milieu clinique. La validation d’un outil de mesure adapté aux besoins des infirmières dans ce milieu répond donc à la finalité de la recherche telle que proposée par Pepin et al. (2010). En effet, l’utilisation d’un outil adéquat permettra d’améliorer la qualité, l’efficacité et l’efficience du dépistage du delirium et, par le fait même, du soin qui en découlera.

Pour Donaldson et Crowley (1978), les sciences infirmières « étudient l’intégralité ou la santé des êtres humains en reconnaissant qu’ils sont en interaction continuelle avec leur environnement » (traduction libre, p. 119, citée dans Pepin et al., 2010, p. 6). Ces auteurs mettent donc en relation les concepts de santé, de personne et d’environnement. Pepin et al. (2010) ajoutent le concept du soin à l’énoncé du centre d’intérêt de la discipline infirmière. Leur énoncé du métaparadigme infirmier est le suivant : « la discipline infirmière s’intéresse au soin, dans ses diverses expressions, auprès des personnes, des familles, des communautés et des populations qui, en interaction continue avec leur environnement, vivent des expériences de santé » (Pepin et al., 2010, p. 15).

Dans l’étude présentée ici, le concept de personne est associé à la personne âgée dans un environnement spécifique, soit en CHSLD. Pour pouvoir donner des soins optimaux en contexte de delirium, l’infirmière doit être capable de le détecter rapidement. La détection a pour but de diminuer les conséquences du delirium et de sa sous-détection chez l’aîné et, ainsi, lui permettre de retrouver un meilleur état de santé le plus rapidement possible. Cette étude

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s’intéresse donc aux concepts du métaparadigme infirmier, en plus d’être rattachée à l’une des activités réservées à l’infirmière.

2.2.3 Champs de pratique de la profession infirmière et infirmière auxiliaire

L’article 36 de la Loi sur les infirmières et les infirmiers stipule qu’« évaluer la condition physique et mentale d’une personne symptomatique » est une activité réservée à la profession infirmière. Selon l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), cela signifie « poser un jugement clinique sur la condition physique et mentale d’une personne et en communiquer les conclusions » (http://www.oiiq.org/pratique-infirmiere/activite-reservees/evaluer-la-condition-physique-et-mentale). Le dépistage du delirium, qui requiert une évaluation de la condition de la personne, fait donc partie des responsabilités de l’infirmière. La finalité de l’évaluation réalisée est de « distinguer l’anormalité de la normalité, de détecter des complications, de déceler des problèmes de santé, de déterminer le degré de gravité ou d’urgence de la situation de santé de la personne et d’établir les priorités et les conditions d’intervention »

(http://www.oiiq.org/pratique-infirmiere/activite-reservees/evaluer-la-condition-physique-et-mentale). L’infirmière doit donc être capable de distinguer les manifestations du delirium de celles de la démence et de la dépression, entre lesquelles il y a des manifestations communes (Registered Nurses’ Association of Ontario, 2016).

L’infirmière auxiliaire peut, selon l’article 37 du Code des professions, « contribuer à l’évaluation de l’état de santé d’une personne et à la réalisation du plan de soins, prodiguer des soins et des traitements infirmiers et médicaux dans le but de maintenir la santé, de la rétablir et de prévenir la maladie et fournir des soins palliatifs ». Puisque l’infirmière auxiliaire peut contribuer à cette évaluation, elle peut participer activement au dépistage des personnes présentant des signes ou des symptômes de delirium dans le but de cibler les personnes nécessitant une évaluation par l’infirmière. À la suite de cette évaluation, le patient sera référé à un autre professionnel de la santé, au besoin. Puisque le delirium est considéré comme une urgence médicale, le médecin doit en être informé dans les plus brefs délais (Voyer, 2013). Malgré les nombreuses relations qui existent entre la profession infirmière et le delirium, ce dernier n’est que peu détecté au quotidien par les infirmières.

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2.3 Sous-détection du delirium

Dans cette troisième section, l’ampleur de la problématique de sous-détection du delirium et les facteurs qui lui sont associés seront présentés.

2.3.1 Ampleur de la problématique

Steis et Fick (2008) ont réalisé une revue systématique portant sur la détection du delirium par les infirmières. Les dix articles sélectionnés ont été publiés avant 2007. Dans les études ayant utilisé une mesure directe qui comparait les évaluations cliniques avec des définitions étalons, le taux de détection variait de 26 à 83 %. Dans sept des dix études, l’évaluation et la documentation fournies par des infirmières étaient insuffisantes pour rapporter adéquatement l’état cognitif des patients.

Lemiengre et al. (2006) ont réalisé une étude descriptive prospective sur des unités de soins gériatriques aigus en Belgique auprès de 258 participants de 70 ans et plus, dont 31 avaient reçu un diagnostic de démence. Les critères d’exclusion étaient l’incapacité à communiquer verbalement, la présence d’une condition terminale et la réadmission pendant la durée de l’étude. Les chercheurs ont comparé les taux de détection du delirium par les infirmières du milieu à ceux d’infirmières de recherche formées, en plus de comparer deux méthodes de notation du CAM, soit la méthode spécifique et la méthode sensible. La méthode spécifique permet de détecter le delirium définitif, alors que la méthode sensible détecte le delirium probable. Dans le cadre de l’étude, les infirmières de recherche utilisaient le Mini-examen de l’état mental (MEEM) et le CAM pour le détecter, alors que les infirmières du milieu utilisaient uniquement le CAM. Ces dernières ont assisté à une session d’information d’une heure sur le projet de recherche et l’outil de détection avant le début de l’étude. Les outils de détection étaient complétés aux jours un, trois et cinq après l’admission du participant sur l’unité.

La prévalence du delirium dans cet échantillon était de 14 %. La méthode de notation sensible avait une sensibilité de 66,7 % et une spécificité de 90,8 %. La méthode de notation spécifique avait quant à elle une sensibilité de 23,8 % et une spécificité de 97,7 %. Pour les infirmières du milieu, les symptômes les plus difficiles à reconnaître étaient l’apparition soudaine des symptômes et leur fluctuation, ainsi que l’altération de l’état de conscience, avec une

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sensibilité de moins de 45 % pour chacun d’eux. Les infirmières étaient donc capables d’identifier les participants ne présentant pas de delirium dans plus de 90 % des cas, mais éprouvaient de la difficulté à identifier ceux qui présentaient un delirium. Selon les auteurs, la sous-détection peut être associée à un manque de connaissances du delirium et de sa détection, ainsi qu’à l’absence d’utilisation systématique d’un instrument de détection dans la pratique quotidienne. Une des limites de l’étude est l’utilisation d’un échantillon composé exclusivement d’une population gériatrique hospitalisée, ce qui limite la généralisation des résultats à d’autres types de milieux cliniques, comme les CHSLD. De plus, l’exclusion des participants incapables de s’exprimer verbalement a pu limiter la participation des personnes présentant une démence avancée. Enfin, la capacité des infirmières à utiliser adéquatement le CAM n’a pas été évaluée.

Inouye et al. (2001) ont obtenu des résultats semblables à ceux de Lemiengre et al. (2006) dans une étude prospective réalisée auprès de 797 patients de 70 ans et plus. Les participants étaient des patients admis dans des unités de médecine ou de chirurgie d’un hôpital des États-Unis entre 1989 et 1991. Les résultats obtenus par les infirmières à l’aide du CAM étaient comparés à ceux obtenus par des chercheurs lors d’une évaluation cognitive formelle incluant le MEEM, pour un total de 2 721 observations pairées. Les observations étaient réalisées quotidiennement par les chercheurs et par les infirmières pendant leur quart de travail.

Ces dernières ont identifié le delirium dans 19,3 % des observations et pour 30,5 % des patients présentant un delirium selon les chercheurs. La sensibilité de leurs observations varie de 13,7 à 30,5 %, alors que la spécificité varie de 90,8 à 99,4 %. Les trois caractéristiques clés du delirium, soit l’inattention, la désorganisation de la pensée et l’altération de l’état de conscience, étaient détectées avec une sensibilité variant de 15 à 26 %. Cette étude montre la validité et la fidélité du CAM lorsqu’il est utilisé par des infirmières qui n’ont pas reçu de formation sur ce syndrome et qui l’utilisent lors des soins usuels. Les forces de l’étude étaient la qualité et la constance des mesures standards utilisées pour détecter le delirium, la taille de l’échantillon et le nombre élevé d’observations qui ont pu être comparées. Une des principales limites de l’étude consistait cependant au taux élevé de roulement de personnel infirmier dans les unités, ce qui restreint la généralisation des résultats aux unités où le taux de roulement est élevé et où l’expertise infirmière est faible.

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Les études de Lemiengre et al. (2006) et de Inouye et al. (2001) ont été réalisées dans des milieux où les infirmières n’avaient pas reçu de formation optimale pour l’utilisation du CAM. L’étude descriptive prospective de Rice et al. (2011), comparant le taux de détection du delirium obtenu par des infirmières à celui des chercheurs, se distingue des deux premières puisqu’elle s’est déroulée dans un milieu où le CAM était déjà utilisé. Elle a été réalisée auprès de 170 patients âgés de 65 ans et plus dans six unités de médecine de chirurgie aux États-Unis. Les patients atteints de démence étaient inclus, dans la mesure où ils pouvaient participer à une entrevue, lire et écrire. Les chercheurs réalisaient d’abord une évaluation de référence du participant, puis une entrevue comportant le MEEM et le CAM. Ils posaient également deux questions à l’infirmière responsable du participant au quotidien jusqu’au congé de l’hôpital de ce dernier ou jusqu’à l’apparition d’un delirium. L’infirmière ne complétait que le CAM. L’outil était implanté dans le milieu comme faisant partie de l’évaluation de l’état mental depuis 2005 et les infirmières avaient déjà complété une formation au sujet du delirium.

Douze delirium définitifs ont été détectés dans l’échantillon et 83 % d’entre eux étaient de forme hypoactive. La détection du delirium par les infirmières en utilisant le CAM avait une sensibilité de 25 % et une spécificité de 99,6 %. Pour le personnel obtenant les meilleurs résultats, l’apparition soudaine des symptômes, leur fluctuation et l’inattention étaient identifiées avec difficulté. Les forces de l’étude, selon les auteurs, étaient l’utilisation d’un devis prospectif qui permettait une évaluation fréquente de l’état cognitif des participants, l’expérience des chercheurs dans le domaine et l’utilisation d’outils de mesure fiables et validés. Une des principales limites était le critère d’inclusion qui requérait la capacité d’écrire, ce qui excluait certains participants atteints de démence. De plus, l’utilisation de la documentation du CAM par les infirmières comme indicateur de leur capacité à détecter le delirium ne permet pas de valider leur capacité à en détecter les manifestations.

Étant donnée la forte prévalence de la démence en CHSLD, il est aussi important de s’intéresser à l’ampleur de la problématique de sous-détection auprès de cette population précise. Voyer et al. (2008) ont réalisé une étude sur la détection du delirium par les infirmières en CHSLD au Québec auprès de cette population. Cette étude prospective comportait deux mesures, réalisées à sept jours d’intervalle. Les critères d’inclusion étaient : avoir reçu un diagnostic de démence et être âgé de 65 ans et plus, pour un échantillon final composé de 156 participants. La présence d’antécédents psychiatriques constituait un critère d’exclusion. Le

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taux de détection par les infirmières était comparé à celui d’un assistant de recherche ayant reçu quinze heures de formation sur le delirium et la démence, en plus d’avoir été supervisé lors de la collecte des données auprès de quinze participants. Un assistant de recherche était responsable des mesures du delirium et de la démence. Un second assistant de recherche, qui ignorait la présence de delirium ou non, réalisait des entrevues auprès des infirmières pour collecter les informations suivantes : leur évaluation du delirium, leurs caractéristiques de base, les données démographiques et l’état de santé du participant. L’infirmière n’utilisait pas d’outil précis pour détecter la présence de delirium, alors que l’assistant de recherche utilisait le CAM et le Minimum Data Set-2. Au total, 302 observations pairées ont été réalisées.

Au premier temps de mesure, la prévalence du delirium s’établissait à 71,5 %. La détection avait une sensibilité de 13 % et une spécificité de 93 %. Au deuxième temps de mesure, cette prévalence était de 70,9 %. Les infirmières ont détecté le delirium avec une sensibilité de 18,7 % et une spécificité de 86,4 %. Les symptômes les plus difficilement reconnaissables se résument aux périodes d’altération de la perception, aux périodes de léthargie et aux périodes d’agitation, avec une sensibilité variant de 28,4 % à 42,9 %. Les symptômes les plus facilement identifiables étaient le discours désorganisé, la distraction facile et la variation des fonctions mentales sur une période de 24 heures, avec une sensibilité variant de 45,8 à 62,4 %. Les forces de cette étude : la formation de l’assistant de recherche sur le delirium et la démence, l’utilisation d’un outil de détection ayant de bonnes propriétés psychométriques (Wong et al., 2010), la mesure du delirium sur une période de sept heures consécutives, la collecte d’information par deux assistants de recherche ne connaissant pas les résultats de l’autre, et la présence de deux mesures à sept jours d’intervalle. Parmi les limites de l’étude, le possible manque de puissance statistique dû à la prévalence du delirium dans l’échantillon a pu limiter les facteurs associés à la sous-détection de manière statistiquement significative. De plus, l’utilisation d’un échantillon de convenance aurait pu biaiser les résultats, mais une analyse statistique a démontré que l’échantillon se comportait comme un échantillon à assignation aléatoire. Enfin, les résultats obtenus auprès d’un échantillon composé exclusivement de participants atteints de démence ne sont pas généralisables à la population des aînés vivant en CHSLD, puisque la prévalence de la démence dans ce milieu n’atteint pas les 100 %.

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Voyer et al. (2012) ont donc utilisé un échantillon plus représentatif de cette population dans leur étude observationnelle prospective à mesures répétées en CHSLD, au Québec. Les mesures étaient réalisées sur une période de six mois. L’étude portait sur la capacité des infirmières à reconnaître le delirium et ses symptômes, mais aussi sur les facteurs associés à sa sous-détection. L’échantillon était composé de 202 participants de 65 ans et plus, résidant dans sept CHSLD du Québec. Deux cohortes ont été créées : une comportant les participants sans démence sévère, et l’autre incluant les participants avec démence sévère. En entrevues, les infirmières étaient questionnées sur la présence des symptômes du delirium. Par la suite, l’assistant-chercheur appliquait l’algorithme du CAM pour établir la présence du delirium.

Son taux de détection se situait à 51 %, et diminuait à 40 % en présence de démence. La détection des symptômes du delirium, lorsque pris séparément, variait de 25 à 66,7 %. La principale limite de l’étude consiste en la complétion du CAM et du MEEM abrégé par une seule observation de l’assistant-chercheur, ce qui diminue les chances de détecter la fluctuation des symptômes.

Le problème de sous-détection du delirium est présent dans différents pays et dans différents milieux cliniques. Selon les études présentées, le taux de sous-détection varie de 13 à 66,7 %, ce qui est inférieur à celui présenté par Steis et Fick (2008) dans leur revue de la littérature. Certains facteurs semblent être associés à la sous-détection du delirium.

2.3.2 Facteurs associés à la sous-détection

Les facteurs associés à la sous-détection du delirium peuvent être séparés en trois catégories, soit les facteurs associés au patient, ceux associés à l’infirmière et ceux associés à l’organisation du travail.

2.3.2.1 Facteurs associés au patient

Selon l’étude d’Inouye et al. (2001) décrite précédemment, le risque de sous-détection est augmenté de 20 fois en présence de trois ou quatre facteurs parmi les suivants associés au patient : la forme hypoactive du delirium, un âge de 80 ans et plus, la présence de troubles de la

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vision et la démence. Voyer et al. (2008) ont, quant à eux, associé un âge plus élevé, soit 85 ans et plus, à la sous-détection du delirium. En effet, ce seul facteur augmenterait de quatre fois le risque de détection. En l’absence de ces quatre facteurs, le risque de sous-détection n’est que de 2 % (Inouye et al., 2001). Il augmente en fonction du nombre de facteurs, soit à 6 % pour un seul, à 15 % pour deux et finalement à 44 % pour trois et quatre facteurs. La forme hypoactive, comme seul facteur, augmenterait de sept fois le risque de non-détection du delirium (Inouye et al., 2001).

Le delirium peut se présenter sous trois formes : hypoactive, hyperactive et mixte (Canadian Coalition for Seniors’ Mental Health, 2006). La forme hyperactive comprend de l’agitation, de l’agressivité, des symptômes psychotiques, comme des idées délirantes ou des hallucinations, et un état d’alerte permanent. La forme hypoactive comprend un état apathique, de la somnolence, un manque d’entrain, une stimulation difficile, de la lenteur et de la confusion(Canadian Coalition for Seniors’ Mental Health, 2006).

La forme hypoactive du delirium est aussi un facteur qui semble influencer le taux de détection de ce syndrome dans l’étude de Flagg, Cox, McDowell, Mwose et Buelow (2010). Ces auteurs ont réalisé une étude transversale descriptive dans le but de décrire la capacité des infirmières à détecter le delirium. L’étude a été réalisée dans des unités de médecine-chirurgie et de soins intensifs aux États-Unis. L’échantillon était composé de 61 infirmières qui ont rempli un questionnaire composé de trois sous-sections. Les questions portaient sur leurs connaissances des conséquences du delirium, leurs connaissances générales de cette problématique de santé, et leur niveau de confiance quant à sa détection. La plupart des participantes (90 %) étaient capables d’identifier les symptômes du delirium hyperactif, alors que seulement 77 % d’entre elles identifiaient les symptômes du delirium hypoactif. Le taux de détection du delirium hypoactif est donc inférieur à celui du delirium hyperactif. Une des limites de l’étude est que la validité et la fidélité du nouveau questionnaire, créé et utilisé dans le cadre de l’étude, restent à être démontrées par la réplication des résultats.

Voyer et al. (2012) ont réalisé une étude portant sur le taux de détection du delirium par les infirmières en contexte québécois et en soins de longue durée. Le symptôme obtenant le plus faible taux de détection (28 %) est la fluctuation des symptômes sur une période de 24 heures. Pourtant, ce symptôme permet de distinguer le delirium de la démence, dont l’évolution

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est lente (Canadian Coalition for Seniors’ Mental Health, 2006). La présentation hétérogène du delirium et la fluctuation des symptômes sont aussi identifiées par Pae et al. (2008) comme facteurs liés à la sous-détection du delirium. Selon Steis et Fick (2008), la nature fluctuante du delirium requiert que l’évaluation cognitive de la personne fasse partie de la routine de soins et que la communication entre les infirmières soit optimale pour assurer un suivi adéquat entre les différents quarts de travail. En effet, puisque la fluctuation des symptômes a lieu sur une période de 24 heures, le résultat de l’évaluation doit être transmis à toutes les infirmières responsables du patient pendant cette période. L’absence de symptômes dépressifs est aussi associée à la sous-détection du delirium, ceux-ci entraînant une augmentation de la surveillance de l’état cognitif par l’infirmière (Voyer et al., 2012).

Rice et al. (2011) ont identifié quatre facteurs qui sont des prédicteurs indépendants de la sous-détection du delirium. Il s’agit de l’âge avancé du patient, de la durée du séjour augmentée, de la présence de démence et de la forme hypoactive du delirium. Trois de ces facteurs sont communs à ceux identifiés par Inouye et al. (2001), alors que celui qui diffère est la durée de séjour augmentée (Rice et al., 2011). En plus de ces facteurs, tous associés au patient, plusieurs autres associés à la sous-détection sont liés à l’infirmière.

2.3.2.2 Facteurs associés à l’infirmière

Selon Steis et Fick (2008), la connaissance du delirium par les infirmières doit précéder sa détection. Voyer et al. (2012) ont d’ailleurs démontré que les infirmières arrivent à identifier les symptômes du delirium de 25 à 66,7 % du temps, alors que le taux de détection global du delirium est de 51 %. L’hypothèse qu’elles manquent de connaissances peut donc être avancée, car ce facteur nuit à l’association entre la présence des symptômes et le delirium. L’étude de Voyer et al. (2008) appuie aussi cette hypothèse. Alors que la détection du delirium avait une sensibilité de 13 %, la sensibilité de la détection de ses symptômes variait de 32,4 à 58,1 %. Les infirmières ont donc plus de facilité à identifier les symptômes que le delirium lui-même.

Dans une étude descriptive réalisée au Québec auprès d’un échantillon composé de 87 d’infirmières affectées au soutien à domicile, Malenfant et Voyer (2012) se sont intéressés à leur niveau de connaissance du delirium. Leur but était de déterminer si leurs connaissances étaient suffisantes pour détecter ce syndrome. Les auteurs ont utilisé un questionnaire

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comportant des vignettes cliniques. Le questionnaire était séparé en trois parties : cinq questions théoriques sur le delirium chez les aînés ; cinq vignettes cliniques portant sur le delirium, la dépression et la démence chez les aînés ; puis, des questions d’ordre sociodémographique. Les critères diagnostiques du delirium, ses principaux signes et symptômes ainsi que les outils de détection semblaient peu connus des infirmières. Le taux de détection du delirium était de 54,4 % dans les vignettes cliniques, mais l’utilisation de ce type de support pour la détection a pu influencer à la hausse le taux obtenu. En effet, la nature fluctuante du delirium peut être plus facile à identifier à l’intérieur d’une vignette clinique que dans le milieu clinique.

La méconnaissance des critères diagnostiques du delirium, de ses principaux signes et symptômes et des outils de détection est reprise par d’autres auteurs. Selon Flagg et al. (2010), les infirmières manquent de sensibilisation quant à l’importance d’évaluer un patient afin de détecter un delirium lorsque ce dernier est orienté, ce qui démontre une méconnaissance des manifestations de cette pathologie. De plus, 26 des 41 infirmières interrogées n’évaluaient pas leurs patients de façon routinière pour détecter le delirium. Enfin, les changements aigus causés par le delirium sont parfois interprétés à tort comme une tentative d’obtenir de l’attention, une manifestation du vieillissement normal ou une partie intégrante de la démence, ce qui peut aussi être lié à un manque de connaissances des éléments clés du delirium (Peacock et al., 2012).

Agar et al. (2012) se sont aussi intéressés aux connaissances des infirmières au sujet du delirium. Dans une étude qualitative réalisée en Australie, aucune des 40 infirmières interrogées n’a fait référence aux critères diagnostiques du delirium ou à l’ensemble des critères du DSM-IV. De plus, peu d’entre elles ont mentionné le début rapide des symptômes et l’altération de l’état cognitif habituel. Ce faisant, la distinction avec les critères de la démence n’était pas présente. Malgré cela, les infirmières se sentaient en confiance face à la gestion du delirium, en grande partie à cause de leur expérience clinique. Cette idée de confiance est reprise dans une étude descriptive transversale réalisée par Flagg et al. (2010) sur des unités de médecine-chirurgie et de soins intensifs aux États-Unis. L’échantillon était composé de 61 infirmières, qui complétaient un questionnaire comportant des vrais ou faux et des échelles de type Lickert. Selon cette étude, 79 % d’entre elles pensent que le delirium est un problème commun chez leurs patients. Les infirmières questionnées présentent un niveau modéré de confiance quant à leur habileté à identifier, à gérer et à expliquer le delirium. La gestion de ce syndrome est un sujet abordé par

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Teodorczuk, Reynish et Milisen (2012). Selon ces auteurs, l’ignorance des bénéfices découlant du traitement du delirium est aussi un facteur associé à la sous-détection.

La revue de la littérature réalisée par Steis et Fick (2008) leur a permis d’identifier plusieurs barrières qui empêchent les infirmières de détecter le delirium dans leur pratique clinique. Parmi ces facteurs, certains sont associés à l’infirmière, comme la connaissance des éléments clés du delirium et l’utilisation d’un instrument adéquat pour guider son évaluation et sa documentation sur le delirium. En effet, l’évaluation de l’état mental de routine et la communication entre les infirmières sont essentielles à la détection rapide du delirium, étant donnée sa nature fluctuante (Steis et Fick, 2008). De plus, Inouye et al. (2001) associent la faible reconnaissance de la désorientation et de la perte de mémoire à un manque d’évaluation de ces deux aspects associés au delirium de la part des infirmières. Flagg et al. (2010) ont aussi identifié un manque de connaissances sur les outils de détection du delirium. L’évaluation par les infirmières était réalisée de différentes façons : évaluation de l’orientation, observation du comportement, conversation avec le patient, évaluation de la vigilance, examen des pupilles et échelle de Glasgow.

Certains des facteurs associés à la sous-détection du delirium relèvent ainsi de l’infirmière, mais d’autres découlent de l’organisation du travail.

2.3.2.3 Facteurs associés à l’organisation du travail

Steis et Fick (2008) ont identifié certains facteurs associés à l’organisation du travail. Ces facteurs sont le temps passé auprès du patient et la présence de leadership organisationnel. Ces auteurs avancent aussi l’hypothèse que les ratios infirmière-patients, le leadership, la culture du milieu de soins et le degré de collaboration interprofessionnelle influencent la détection du delirium par les infirmières. Selon Pae et al. (2008), les ressources disponibles limitées ont aussi une influence sur la sous-détection du delirium. Les faibles priorités stratégiques et financières accordées au delirium et le fait qu’il ne soit associé à aucune spécialité médicale constituent aussi des facteurs organisationnels identifiés, lors de deux ateliers réalisés avec des experts, comme pouvant nuire à la détection de cette problématique de santé (Teodorczuk et al., 2012).

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En somme, des chercheurs qui souhaiteraient améliorer la détection du delirium devraient tenter de pallier ces nombreux facteurs associés en s’intéressant aux trois différentes catégories identifiées.

2.4

Études antérieures visant l’amélioration de la détection du

delirium

Selon une revue de la littérature réalisée par Inouye et al. (2013), le CAM est l’outil de détection le plus utilisé pour identifier le delirium. Plus de 4 000 études publiées l’ont utilisé, avec une sensibilité de 94 %, une spécificité de 89 % et un haut rapport interjuge. L’outil a été développé dans le but d’améliorer la détection du delirium (Inouye et al., 1990). Il était originalement destiné aux cliniciens sans spécialisation en psychiatrie. Le CAM est composé d’un instrument de détection et d’un algorithme permettant l’identification du delirium, tous deux basés sur les critères diagnostiques du DSM-IIIR. L’instrument évalue la présence de neuf symptômes du delirium, soit l’apparition subite des symptômes, l’inattention, la désorganisation de la pensée, l’altération du niveau de conscience, la désorientation, le ralentissement ou l’accélération sur le plan psychomoteur, les troubles de la mémoire, la perturbation de la perception et la perturbation du cycle éveil-sommeil. L’algorithme est composé de quatre symptômes, soit l’apparition subite et la fluctuation des symptômes, l’inattention, la désorganisation de la pensée et l’altération du niveau de conscience. Le CAM doit être utilisé conjointement avec un test cognitif et requiert une formation pour un usage optimal (Inouye et al., 2013). Selon Inouye et al. (1990), il faut en moyenne 20 minutes pour effectuer conjointement le CAM et un test cognitif tandis que le CAM seul s’effectue en cinq minutes.

Le CAM est l’outil le mieux soutenu par la littérature scientifique (Wong et al., 2010). Il est toutefois long et compliqué à compléter pendant la routine de soins (Yang et al., 2013). En effet, le ratio absolu infirmière-résidents dans les CHSLD du Québec est de 1 : 20 (Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, 2014). Cela signifierait donc que pour évaluer quotidiennement la présence de delirium chez les résidents sous sa responsabilité, l’infirmière devrait consacrer au minimum 1 h 40 à l’administration du CAM, ou 6 h 40 à l’administration du CAM conjointement à un test cognitif. De plus, selon une revue de la littérature réalisée par Wei, Fearing, Sternberg et Inouye (2008), la sensibilité réelle du CAM variait de 46 à 100 %. Les facteurs associés à une faible sensibilité étaient l’utilisation du CAM par des infirmières ou des assistants de recherche lors d’une brève évaluation cognitive, sans formation préalable et

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auprès d’une population ayant une forte prévalence de démence. La spécificité réelle du CAM variait quant à elle de 63 à 100 % (Wei et al., 2008). Les facteurs associés à une faible spécificité consistaient en une forte prévalence de la démence, de la dépression et de la psychose dans l’échantillon. Puisque les résidents des CHSLD du Québec sont atteints de troubles cognitifs dans 60 à 80 % des cas, la sensibilité et la spécificité du CAM ne semblent pas optimales auprès de cette population (Ministère de la Santé et des Services sociaux [MSSS], 2003).

Après avoir passé en revue les outils disponibles pour détecter le delirium, Schuurmans et al. (2003) ont identifié le CAM comme étant le meilleur outil pour le diagnostic du delirium. Ils ont toutefois recommandé le Neecham et le DOS pour le dépistage du delirium auprès des aînés hospitalisés. Le Neecham serait également un outil facile à utiliser à l’intérieur de la routine de soins (Hall, Meagher et MacLullich, 2012). Toutefois, puisqu’il prend un peu moins de dix minutes à compléter, il n’est pas adapté à la charge de travail de l’infirmière en CHSLD, comme cela a été démontré précédemment avec le CAM. Le DOS, quant à lui, prend moins de cinq minutes à compléter, ce qui est tout de même trop élevé pour le dépistage en CHSLD. Gemert et Schuurmans (2007) ont comparé l’outil Neecham au DOS dans une étude réalisée auprès de 87 patients d’unités de médecine et de chirurgie. Les infirmières complétaient les deux outils et leur diagnostic était confirmé par un gériatre à l’aide des critères diagnostiques du DSM-IV. Le taux de détection par les infirmières était de 10,3 %. Le temps moyen pour compléter le Neecham était de huit minutes, alors que le temps moyen pour le DOS était de cinq minutes. Le DOS devait être complété trois fois par jour, alors que le Neecham ne l’était qu’une fois par jour pour obtenir un diagnostic. Les infirmières ont trouvé le DOS plus facile d’utilisation et plus pertinent à leur pratique que le Neecham. La sensibilité et la spécificité du DOS étaient respectivement de 89 et de 88 %. La sensibilité du Neecham variait de 86 à 100 %, alors que sa spécificité variait de 86 à 90 %. La principale limite de l’étude réside dans la petite taille de l’échantillon, qui diminue la possibilité d’en généraliser les résultats. Sa plus grande force est sa réalisation en contexte clinique réel, ce qui permet de démontrer l’utilisation de ces outils par des infirmières durant leur routine de soins. Les outils disponibles ne sont néanmoins pas adaptés au contexte particulier de la pratique infirmière en CHSLD, en grande partie en raison du temps requis pour les utiliser, ce qui en limite l’utilisation sur une base quotidienne. Cela justifie l’utilisation et l’examen d’un nouvel outil de dépistage du delirium comme le RADAR.

Figure

Tableau 1 Caractéristiques des participants-résidents (N = 45)
Tableau 2 Caractéristiques des participantes-infirmières auxiliaires (N = 41)
Tableau 4 Valeur observées des paramètres (N = 45)
Tableau 6 Paramètres a priori du RADAR phase 2 (Voyer et al., 2015)
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gestionnaires), ces tensions semblent présentes de manière relativement constante d’un centre d’hébergement à l’autre. Quatre regroupements principaux de tensions entre le

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