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Chapitre 5 : Discussion

5.3 L’harmonie interjuge

La fidélité interjuge de l’outil dans cette étude varie de 94 à 97 % en fonction des trois éléments composant le RADAR. Selon l’étude de Voyer et al. (2015), la fidélité du RADAR variait de 82 à 98 %. Le plus grand écart se trouve au niveau de l’élément « Les mouvements du patient étaient-ils au ralenti? », où le pourcentage d’accord diffère de 12 % entre les deux études. L’étude de Bilodeau (2016) obtient des résultats similaires. En effet, la fidélité interjuge variait de 94 à 99 %.

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La fidélité interjuge la plus basse est pour l’élément « Les mouvements du patient étaient-ils au ralenti? » dans les trois études comparées. Il se pourrait que le ralentissement des mouvements du patient soit plus difficile à juger pour l’observateur lors de l’administration de la médication. Il se pourrait aussi que le ralentissement soit un concept dont les critères sont moins clairs que ceux définissant la difficulté à suivre les consignes ou la somnolence, dans ce contexte. Les éléments de précision liés à cet élément de la grille RADAR sont les suivants : « Bougeait-il lentement? Était-il ralenti dans sa façon de s’asseoir, de marcher, de prendre ses médicaments? » Il pourrait être intéressant d’ajouter un élément de comparaison dans les énoncés afin de mieux cibler ce qui est recherché, par exemple en comparant la rapidité des mouvements du patient à celle d’un aîné croisé à l’épicerie.

Une autre étude s’est intéressée à l’utilisation du RADAR par les infirmières aux États- Unis (Lewallen, 2015). La fidélité interjuge a été mesurée en comparant les résultats obtenus par les infirmières des unités à ceux d’une infirmière en pratique gériatrique avancée après deux mois d’utilisation de l’outil RADAR. Le coefficient Kappa obtenu était alors de 0,63. Il indique un niveau d’accord substantiel selon les six niveaux présentés par Landis et Koch (1977). Ce résultat est comparable à ceux des études réalisées au Québec. En effet, dans la présente étude, les coefficients Kappa des différents éléments du RADAR varient de 0,43 à 0,69. Dans l’étude de Voyer et al. (2015), ils variaient de 0,34 à 0,79. Dans l’étude de Bilodeau (2016), le coefficient Kappa était de 0,92, mais il n’a été calculé que pour le troisième élément du RADAR, soit le ralentissement. C’est le seul élément pour lequel l’étudiante chercheuse a obtenu des résultats positifs lors de l’interjuge. Pour les quatre études comparées, le coefficient Kappa varie de 0,43 à 0,92. Cela indique un niveau d’accord allant de modéré à presque parfait (Landis et Koch, 1977).

L’étude de Lewallen (2015) a ceci de particulier qu’elle a utilisé la version anglaise du RADAR dans un contexte culturel différent, soit les États-Unis. Les trois autres études ont été réalisées au Québec en français, soit dans le contexte culturel et la langue d’origine de l’outil. On peut ainsi poser l’hypothèse que les éléments qui composent l’outil sont assez simples pour être compris par différents membres de l’équipe de soins (infirmières, infirmières auxiliaires, préposés aux bénéficiaires), que la traduction des éléments affecte peu leur compréhension et que les concepts présents dans le RADAR sont compris dans la culture américaine.

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La variation du coefficient Kappa pourrait s’expliquer, une fois de plus, par l’utilisation du RADAR par différentes catégories de personnel soignant (infirmières, infirmières auxiliaires, préposés aux bénéficiaires) qui n’ont pas les mêmes connaissances cliniques. De plus, la personne réalisant les interjuges n’avait pas le même rôle dans les quatre études comparées (infirmière en pratique avancée gériatrique, étudiante chercheuse travaillant aussi dans le milieu comme infirmière, professionnel de recherche). Il se peut aussi que la formation donnée, qui diffère d’une étude à l’autre, influence la valeur du coefficient Kappa obtenu. Dans cette étude, une formation en groupe ou individuelle d’une durée de 45 minutes a été donnée aux participantes et incluait le visionnement de la vidéo développée par Voyer et al. (2015). Dans l’étude de Bilodeau (2016), les préposés aux bénéficiaires ont aussi reçu une formation en groupe ou individuelle, de 30 minutes cette fois, incluant la même présentation vidéo. Dans l’étude de Voyer et al. (2015), la formation des infirmières était composée d’une présentation de 15 minutes, incluant quatre vidéos montrant des patients simulés, suivie de deux séances de coaching individuel. Dans l’étude de Lewallen (2015), une formation d’une durée d’une heure, incluant la vidéo développée par Voyer et al. (2015), était donnée à toutes les infirmières participantes. La durée de la formation et l’ajout de séances de coaching ne semblent pas influencer la fidélité interjuge du RADAR. En effet, les différences observées au niveau du pourcentage de fidélité interjuge et de la valeur du coefficient Kappa ne suivent pas la durée de la formation. Les résultats d’harmonie interjuge sont comparables entre les études de Voyer et al. (2015) et de Lewallen (2015), alors que leur formation théorique varie de 15 à 60 minutes. Comme la complexité des éléments et la durée de la formation limitaient l’utilisation de certains outils dans la détection du delirium, le RADAR semble être mieux adapté à la réalité clinique sur ces deux points. En effet, la vidéo de formation standardisée ne dure que 15 minutes et les éléments étaient facilement compris par le personnel soignant.

Les principaux résultats sont donc comparables à ceux des études antérieures réalisées au Québec et aux États-Unis, où le RADAR était complété autant par des infirmières, des infirmières auxiliaires, que par des préposés aux bénéficiaires.