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PHYSIOLOGIE A LA PATHOLOGIE

II. Vitamine D et fractures de fragilité

De nombreuses études transversales ont montré que des taux bas de 25 hydroxy vitamine D étaient associés à une baisse de DMO (densité minérale osseuse), avec ajustement sur l’âge, l’indice de masse corporelle et la prise de calcium [49]. L’administration de vitamine D diminue la perte osseuse et ce bénéfice disparaît à l’arrêt du traitement. Il est néanmoins illusoire de penser que l’on peut prévenir une perte osseuse post-ménopausique ou généré par corticoïdes par la simple administration de vitamine D [49].

C’est bien sûr l’efficacité antifracturaire de la vitamine D qui est au centre de l’intérêt et son évaluation a fait l’objet de nombreuses études dans lesquelles il est parfois difficile de distinguer l’effet du calcium de celui de la vitamine D

[49,51-52]. Ainsi, l’association quotidienne de 700 à 800 unités de vitamine D et

de 1000 mg de calcium a montré sa capacité à réduire significativement versus placebo le risque de fracture de hanche de l’ordre de 20 % et de fractures non vertébrales de l’ordre de 13 % [49]. Cette efficacité semble plus nette chez les femmes ayant une valeur initiale de 25 hydroxy vitamine D plus basse ou une hyperparathyroïdie secondaire, et dépend de la dose de vitamine D utilisée. L’effet est habituellement observé pour des posologies qui permettent d’obtenir des concentrations sériques de 25 hydroxy vitamine D supérieures à 30 ng/ml

Ainsi, dans la méta-analyse de Tang et al. [51], l’apport de 800 unités de vitamine D associées à 1200 mg de calcium réduit le risque de fracture de 24 % si l’observance est supérieure à 80 %. En revanche, l’étude RECORD « Residential Environment and CORonary heart Disease » de prévention secondaire comparant l’association calcium+800 unités de vitamine D au calcium seul, à la vitamine D seule ou à un placebo n’a mis en évidence aucun effet antifracturaire de cette combinaison, tant pour la hanche que pour l’ensemble des autres sites périphériques alors que l’observance était particulièrement faible, avec une persistance à 2 ans de 54 % seulement [52], Un taux en réalité proche de la «vraie vie». Tenant compte de tous ces biais d’analyse, Bishoff-Ferrari et al. ont récemment publié une large méta-analyse évaluant la réduction du risque de fracture en fonction de la prise réelle de vitamine D [54]. Cette étude incluait près de 31 000 patients (90 % de femmes), âgés en moyenne de 76 ans, avec 1111 fractures incidentes de hanche et 3770 fractures non vertébrales. La prise de vitamine D comparée à celle de placebo s’accompagnait d’une diminution non significative de10 % du risque de fracture de hanche et de 7 % du risque de fracture non-vertébrale. En revanche, selon une analyse en quartile de la prise réelle de vitamine D, une réduction significative du risque de fracture de 30 % pour la hanche [IC (intervalle de confiance) 95 %, 0,58-0,86] et de 14 % pour l’ensemble des fractures non-vertébrales (IC 95 %, 0,76-0,96) était observée pour le seul quartile avec la prise quotidienne la plus élevée (médiane, 800 UI/jour ; intervalle, 792 à 2000 UI/j).

Dans ce sous-groupe particulier, les résultats étaient très consistants à travers les analyses ajustées pour l’âge, le mode de vie, le taux initial de 25(OH) D ou la prise associée de calcium. Contrairement à d’autres études ne prenant

pas en compte l’observance et la prise réelle de vitamine D, ce travail regroupant les résultats de 8 essais thérapeutiques randomisés comparant l’association calcium et vitamine D à un placebo, montre que le risque de fracture n’est réduit que chez les patients prenant la dose la plus élevée de vitamine D. De surcroît, les résultats de cette analyse suggèrent que dans le quartile prenant la dose effective de vitamine D la plus élevée, un apport quotidien de calcium inférieur à 1000 mg/j, comparé à un apport supérieur ou égal à 1000 mg/j, pourrait être plus bénéfique dans la réduction du risque de fracture. Il semble donc important de tester, dans de prochains essais, l’hypothèse qu’un apport de calcium supérieur à 1000 mg/j, combiné à une dose élevée de vitamine D (> 800 UI/j) pourrait être délétère. Il faut également rappeler qu’il a été montré qu’une supplémentation en calcium sans vitamine D pouvait augmenter le risque de fracture de hanche [55]. L’intervalle et la dose administrée sont également des paramètres importants comme le souligne l’analyse de sensibilité de la méta-analyse de Bischoff-Ferrari et al [54]. Ainsi, lorsque cette méta-analyse incluait l’essai de Sanders et al [56], dans lequel une seule dose annuelle de 500 000 UI était administrée, la réduction du risque de fracture était atténuée. De la même manière, une autre étude évaluant une supplémentation annuelle de vitamine D injectable n’avait observé aucun effet sur le risque de fracture [57]. En revanche, une autre étude montrait que la prise orale de 100 000 UI tous les 4 mois était associée à une réduction de 33 % du risque de fracture de hanche et du poignet, suggérant que cette posologie pourrait être satisfaisante [58].

Les analyses de sensibilité laissent penser qu’une administration plus fréquente serait plus à même de réduire le risque de fracture de hanche et de fracture non vertébrale.

La plupart de ces données correspondent à une démarche en prévention primaire. Face à une ostéoporose avérée, la prise en charge actuelle ne se conçoit qu’en association à une correction des carences et insuffisances vitaminiques D [59]. Les protocoles des essais cliniques évaluant les traitements de l’ostéoporose sont construits sur le modèle : produit à tester plus calcium et vitamine D versus placebo plus calcium et vitamine D. Plusieurs travaux suggèrent que la supplémentation en vitamine D potentialise la réponse thérapeutique. Ainsi, Adami et al. ont rapporté les résultats d’une étude observationnelle suggérant qu’une réplétion vitaminique D était nécessaire à une efficacité optimale des médicaments antirésorbeurs [60]. De plus, dans une étude randomisée récemment publiée [61], il vient d’être démontré que si l’administration de vitamine D n’était pas un prérequis indispensable pour observer un effet antirésorbeur de l’Alendronate, chez les patients ayant un taux insuffisant de vitamine D à l’inclusion, l’administration combinée d’alendronate et de vitamine D permettait une réduction supplémentaire de 25 % du niveau de résorption osseuse mesurée par le marqueur sérique, comparé au bis-phosphonate seul.

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