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3.1. Historique

Le virus de la fièvre de la vallée du Rift (VFVR) a été isolé en 1930 lors d’une épizootie au Kenya qui a provoqué la mort de 3500 agneaux et 1200 brebis (Daubney et al., 1931). Pendant plusieurs années, le virus a continué à être responsable d’épizooties en Afrique de l’Est et du Sud. Ce n’est qu’en 1975, qu’une première épizootie-épidémie éclate en Afrique du Sud où l’infection humaine est associée pour la première fois à des symptômes de fièvre hémorragique et d’encéphalite (McIntosh et al., 1980).

Le VFVR atteint l’Egypte en 1977, touchant 200 000 personnes et faisant 598 décès (El-Akkad, 1978; Meegan, 1979). Depuis lors, des épidémies se sont succédées dans toute l’Afrique sub-saharienne; en Mauritanie en 1987 en provoquant 1264 cas dont 224 décès (Digoutte et al., 1989), à nouveau en Egypte en 1993 (Arthur et al., 1993) et en 1997 (Abd El-Rahim et al., 1999), au Kenya (Nord-Est) et en Somalie (Sud) en 1997-98 faisant 478 décès (Anonymous, 1998). En outre, le virus s'est étendu pour la première fois hors d'Afrique, gagnant l’Arabie Saoudite et le Yémen en 2000 (Ahmed, 2000) et faisant respectivement 884 cas humains dont 124 décès et 1087 cas humains dont 121 décès.

En 2006-2007, une vaste épidémie sévit en Afrique de l’Est: au Kenya (684 cas dont 155 décès), en Tanzanie (264 cas dont 109 décès), en Somalie (114 cas dont 51 décès) et au Soudan (601 cas dont 211 décès). En 2008, un foyer est notifié en Afrique du Sud ainsi qu’à Madagascar (17 morts et plus de 400 cas humains) (Tableau II).

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Tableau II. Principales épidemies de la fièvre de la vallée du Rift (Cêtre-Sossah & Albina, 2009)

Aujourd’hui, la fièvre de la vallée de Rift est présente en Afrique, à Madagascar et dans la péninsule arabique. Cependant, dans certains pays africains, la maladie ne s’est jamais manifestée malgré les sérologies positives détectées dans le bétail (Figure 8).

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Figure 8. Répartition de la fièvre de la vallée du Rift en Afrique, à Madagascar et dans la péninsule arabique chez l’animal et chez l’homme (Chevalier et al., 2008).

3.2. La structure et le génome

Le VFVR, un Phlebovirus de la famille des Bunyaviridae, est un virus enveloppé de 90 à 110 nm de diamètre. Le génome du VFVR est un ARN simple brin de polarité négative et tri-segmenté: Le segment L (Large) code pour la protéine L qui est une ARN polymérase ARN dépendante. Le segment M (Medium) code pour une polyprotéine qui génère les glycoprotéines Gn, Gc et NSm après clivage post- traductionnel. Le segment S est traduit de manière ambisens : dans le sens du génome, il code pour une protéine non structurale NSs, et dans le sens antigénomique, pour la protéine N (Figure 9).

Chaque ARN est associé à des protéines N et L et l’ensemble forme une ribonucléoprotéine. Les glycoprotéines Gn et Gc sont deux protéines de surface qui s’insèrent dans la membrane du virus, formant des spicules de 5 à 10 nm de longueur. Elles ont des propriétés hémagglutinantes et sont responsables de la fixation de la particule virale à la surface des cellules cibles, après reconnaissance de leurs récepteurs (encore inconnus). La protéine non structurale NSm n’est pas essentielle pour le déroulement du cycle viral (Won et al., 2006; Gerrard et al., 2007) et son rôle est encore inconnu (Bouloy & Weber, 2010) tandis que la protéine NSs

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constitue le facteur de virulence. En effet, la proteine NSs forme des filaments dans le noyau de la cellule infectée et inhibe la transcription cellulaire.

Figure 9. Schéma de la structure et du génome du virus de la fièvre de la vallée du Rift. Le

VFVR possede un génome de polarité négative ou ambisens et tri-segmenté (Segments L, M et S) (Pépin et al., 2010).

Les analyses phylogénétiques des séquences du segment M ont permis de définir trois lignées majeures: Afrique de l'Ouest, Afrique centrale-orientale et Egypte (Figure 10). Bien que la plupart des souches sont regroupées selon leur origine géographique, aucune corrélation entre le génotype viral et l'emplacement géographique n’a été observée (Bird et al., 2007).

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3.3. Le cycle de transmission

Le cycle de la fièvre de la vallée de Rift fait intervenir des moustiques du genre

Aedes et/ou Culex. Les femelles infectées du genre Aedes sont capables de

transmettre le virus à leurs descendants (transmission verticale). Les œufs sont capables de résister à la dessiccation durant de longues périodes jusqu’à la saison des pluies suivantes. A la mise en eau, les œufs infectés éclosent et donnent des adultes infectés. Lors d’un repas sanguin, la femelle transmet par piqure le virus aux animaux sauvages ou domestiques. C’est le cycle enzootique. Les animaux infectés vont servir de source de contamination pour d’autres moustiques et vont être à l’origine d’épizootie et/ou d’épidémie.

Une autre possibilité serait que le virus soit conservé au sein d’un réservoir naturel. Certains rongeurs ont été proposés comme réservoir possible en Afrique du Sud (Pretorius et al., 1997). Le VFVR a été également isolé d’animaux sauvages et de moustiques en forêt tropicale suggérant un cycle selvatique (Sall, 1999).

Le virus est également transmis par aérosols à partir de liquides biologiques ou de tissus d’animaux contaminés. C’est dans cette situation que l’homme se contamine en plus d’une transmission par des moustiques. Cependant, l’homme reste généralement considéré comme un “cul-de-sac épidémiologique”, car la transmission interhumaine n’a jamais pu être observée (Figure 11).

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Figure 11. Cycle biologique du virus de la fièvre de la vallée du Rift. Le maintien du virus se fait

dans des œufs d’Aedes et/ou dans des rongeurs ou des ruminants sauvages qui seraient le réservoir animal. Suite à de fortes pluies, la pullulation des moustiques infectés entrainerait la contamination des animaux d’élevage, c’est l’épizootie. Si cette derniere s’intensifie et se déplace en zone urbaine

par le déplacement du bétail contaminé, l’homme peut alors être touché, c’est l’épidémie.

3.4. Le cycle de réplication virale

Comme tous les virus à ARN négatif, le génome est transcrit et répliqué seulement quand les proteines N et L lui sont associées sous forme de ribonucleoproteines (RNPs). Les RNPs se présentent sous forme circulaire et possedent une structure pseudo-hélicoidale. A la différence des ARN génomiques et anti-génomiques, les ARNm viraux possèdent à leur extremité 5’ une sequence additionnelle d’ARN coiffée et methylée d’origine cellulaire aquise par capture de coiffe (cap-snatching).

Comme tous les Bunyavirus, le cycle a lieu dans le cytoplasme. Le virus bourgeonne au niveau des membranes de l’appareil de Golgi. Le site de bourgeonnement semble être determiné par les glycoprotéines Gn et Gc qui possèdent des signaux d’adressage aux membranes golgiennes (Gerrard & Nichol, 2002).

Les glycoproteines de l’enveloppe semblent médier l’entrée du virus dans les cellules à travers des récepteurs qui pour la plupart des Bunyavirus, restent à identifier

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(Bouloy & Weber, 2010).Cependant, une étude récente a montré que DC-SIGN sert de récepteur pour les Phlebovirus (Lozach et al., 2011).

3.4. Pathogénèse et vaccin

Le virus se réplique au niveau du foie, la rate et souvent le cerveau. Suite à une période d’incubation de 3 à 7 jours, l’homme développe une forme bénigne pseudo- grippale avec une hyperthermie, des céphalées, des myalgies et des nausées. Une proportion de personnes infectées de 3% à 20% développe des complications: une atteinte oculaire, une méningo-encéphalite ou une hépatite associée à un syndrome hémorragique. Les lésions rétiniennes peuvent provoquer une baisse définitive de l’acuité visuelle voire la cécité. La méningo-encéphalite peut entraîner des lésions nerveuses irréversibles (Alrajhi et al., 2004). Ces deux formes sont rarement mortelles. A l’inverse, la fièvre hémorragique est fatale dans la moitié des cas et apparait 3 à 6 jours après le début de la maladie (Peters & Meegan, 1981).

Chez les animaux, la sensibilité à l’infection varie selon l’âge et l’espèce (Tableau III). L’infection est rarement mortelle pour les adultes, mais provoque des avortements chez les femelles en gestation et une mortalité importante chez les jeunes animaux (Easterday, 1965; Shimshony & Barzilai, 1983).

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Tableau III. Sensibilité des animaux au virus de la fièvre de la vallée du Rift (Lefèvre, 1989)

Hautement sensibles Sensibles Modérément sensibles Faiblement sensibles (infection inapparente) Résistants Agneaux Chevreaux Chiots Chatons Souris Hamsters Veaux Moutons Bovins Chèvres Buffles Chameaux Chevaux Porcs Chiens Chats Cobayes Lapins Oiseaux Reptiles Amphibiens

Il n’existe aucun traitement spécifique pour la FVR. Chez l’homme, un traitement symptomatique est mis en place dans les cas sévères afin d’améliorer l’état général du patient. L’usage d’interférons (α et β) ou de ribavirine est discutable.

Les vaccins existants sont divisés en deux groupes: les souches vivantes et les souches inactivées. La souche neurotrope Smithburn (Smithburn, 1949) est une souche atténuée qui induit une immunité de longue durée après une seule inoculation mais provoque des avortements et/ou des malformations fœtales. Dans cette catégorie, on cite deux autres candidats, la souche MP12 (obtenue à partir de la souche ZH548 après 12 passages en présence de l’agent mutagène 5 fluoro- uracyl (Caplen et al., 1985) et la souche Clone 13 (souche naturellement atténuée). Un autre vaccin R566, est obtenu par réassortiments entre les deux souches Clone13 et MP12. Les vaccins inactivés ont l’avantage de ne pas présenter d’effets néfastes mais l’immunité induite est de courte durée et nécessite des rappels annuels. La souche virale est généralement inactivée à l’aide de dérivé de formol comme la souche RVFV TSI-GSD-200 (Ikegami & Makino, 2009; Pépin et al., 2010; Boshra et al., 2011).

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