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LA VILLE DE VALANGIN AU MOYEN ÂGE Les villes neuves du Pays de Neuchâtel 1

Dans le document 2 005N 142 année 1-2 (Page 36-62)

Une situation archivistique exceptionnelle

Au Moyen Age, le pouvoir des seigneurs repose sur leurs possessions foncières. La plupart du temps, ils les remettent aux mains de personnes qui les exploitent moyennant le paiement d’une redevance, le cens, récognitive du pouvoir seigneurial. Dès lors, de manière régulière – au moins une fois par siècle – les seigneuries bien gérées, c’est-à-dire conscientes du pouvoir et des droits du seigneur, font relever l’entier de ce qui est dû au seigneur.

Concrètement, les propriétaires de biens fonciers passent devant un commissaire foncier auquel ils déclarent reconnaître détenir du seigneur un champ, une vigne, un pré, une maison ou un droit réel quelconque. Ces déclarations, désignées sous le nom de « reconnaissances », sont regroupées dans un registre portant le nom d’« extente », probablement parce qu’elles décrivent les possessions seigneuriales de manière étendue, précise2.

Ce système d’enregistrement de l’impôt, basé uniquement sur l’écrit, se met en place au XIIIe siècle et sera utilisé jusqu’au début du XVIIIe siècle.

Si, sur le fond, ces documents varient peu et ont toujours comme première raison d’être l’enregistrement d’un impôt, dans leur forme, ils vont connaître une surprenante évolution.

Aux XIIIe-XIVe siècles, les extentes se présentent généralement sous la forme de rouleaux de parchemin écrits en latin puis très tôt pour notre région, en français, dans lesquels les biens fonciers sont décrits de manière succincte par l’intermédiaire d’une formule du type : Untel reconnaît détenir du seigneur tel bien pour lequel il paie un cens de x sous3. Avec le

1 Le présent article est tiré d’une recherche effectuée dans le cadre du projet FNRS no12-49389.96, à la requête du Service de la protection des monuments et des sites (SPMS), de l’Institut d’histoire de l’Université de Neuchâtel et du Service des archives de l’Etat. Les études historiques de ce projet ont été menées par Antoine Glaenzer de 1997 à 2000 et les observations archéologiques par Jacques Bujard et Bernard Boschung ; elles ont été exposées dans le rapport final : Antoine GLAENZER, Jacques BUJARD, Evolution urbaine de Valangin et du Landeron (NE) : XIVe-XVIIIesiècle : rapport final, [Neuchâtel], [2001]

(Cité : Rapport final ). Les études menées sur Boudry ne sont pas concernées par ce projet.

2 Glossaire des patois de la Suisse romande (GPSR), t. 6, p. 990 b. On trouve aussi parfois le terme d’« entente », qui semble ne pas avoir été retenu par le GPSR mais figure dans : William PIERREHUMBERT, Dictionnaire historique du parler neuchâtelois et Suisse romand (Cité : DHPNSR ), Neuchâtel, 1926, pp. 225 b et 239 b.

3 Nicolas MORARD, « Un document inédit sur la seigneurie foncière au Pays de Vaud : l’extenta nova de Palézieux (1337) », Revue historique vaudoise, 1974, pp. 27-63. Rémy SCHEURER, « Les premières reconnaissances dans les territoires de l’actuel canton de Neuchâtel », dans Dialectologie, Histoire et Folklore, Mélanges offerts à Ernest Schüle, Berne, 1983, pp. 245-260. Antoine GLAENZER, « Cens, usages et gestion foncière : l’extente de Vaumarcus de 1309 », dans In dubiis libertas. Mélanges d’histoire offerts au professeur Rémy Scheurer, Hauterive, 1999, pp. 93-120.

temps, ces textes, parce qu’ils doivent être acceptés par le seigneur et par le reconnaissant, acquièrent un statut juridique : en cas de conflit, c’est à eux que l’on a recours. Dès lors, les extentes vont connaître une véritable hypertrophie. On y fait progressivement figurer les voisins se trouvant aux quatre points cardinaux ; le mode d’acquisition des parcelles – de façon à savoir si le reconnaissant détient son bien par héritage ou par acquisition (achat, échange ou autre) – ; la reconnaissance précédente dans laquelle le bien était reconnu, par qui et dans les mains de quel ancien commissaire.

En effet, on ne refait pas une extente, mais on la rénove, c’est-à-dire que le texte d’origine, du XIIIe-XIVe siècle, reste le texte de référence, les extentes suivantes servant à enregistrer les modifications qui sont intervenues depuis.

On a donc affaire à des textes qui deviennent de plus en plus volumi-neux, de plus en plus difficiles à manier aussi bien physiquement que conceptuellement, et dans lesquels il est impossible de retrouver facilement ce que l’on cherche. Sous l’impulsion des commissaires David Girard père et fils, établis à Savagnier, le pays de Neuchâtel va connaître ses premiers plans fonciers dès le début du XVIIIe siècle. Ils sont inspirés des travaux du commissaire Rebeur4, actif dans le pays de Vaud :

« C’est de cette méthode dont Leurs Excellences de Berne se servent déjà dès quelques temps et que le sieur Rebeur leur commissaire qui avoit de grands talens pour la commission a le premier introduit et pratiqué. »5

Mais Pierre-François Paris, responsable de cette charge auprès du prince-évêque de Bâle, plaide encore en faveur de l’utilisation des plans en 1763 :

«(...) quiconque sçait ce que c’est qu’une reconnoissance, sent la nécessité de lever et dresser des plans ou cartes particulières des biens qui en font l’objet, et l’on peut dire qu’une reconnoissance sans plan est un corps sans ame. »6

C’est donc pour des raisons de tradition et de conservation de preuves juridiques que les extentes des villes neuchâteloises nous sont parvenues.

Ce que l’on peut appeler la « chaîne des extentes », soit des extentes qui se suivent et se reprennent, existe pour les villes de Neuchâtel, Valangin, Boudry et Le Landeron, soit quatre des cinq villes médiévales du pays.

4 Anne RADEFF, Lausanne et ses campagnes au XVIIesiècle, Lausanne, 1980, pp. 25-52.

5 Archives de l’Etat de Neuchâtel (AEN), Reconnaissances de Valangin, no39, commissaires David Girard père & fils, fol. D vo/ E ro.

6 Archives de l’Ancien Evêché de Bâle, B 137/18, fascicule 2. Pierre-François Paris, le 4 janvier 1763.

Nous présenterons ici principalement les résultats obtenus pour Valangin, les autres villes apparaissant à titre de comparaison. Pour Valangin, cette

« chaîne » est la suivante :

Cote AEN Commissaires Dates extrêmes Langue Nbr. folio / pages

B 9 no1 Milieu du XIVes. français 2 peaux

Recettes diverses, vol. 99 – 1333-1368 français 68 f.

Valangin no1 Rolet Bachie 1402 latin 1000 p.

Valangin no2 Lucas Dumayne 1498 français 274 f.

Valangin no5 Lucas Dumayne 184 f.

Valangin no6 Lucas Dumayne 226 f.

Valangin no16 Blaise Junod 1551-1573 français 374 f.

Valangin no32 Blaise Bonhôte

et Philibert Viret 1603-1616 français 379 f.

Valangin no39 David Girard, père et fils 1695-1702 français 377 f.

Un « système » urbain ?

Parmi les cinq villes que le pays de Neuchâtel a comptées au Moyen Age, trois dépendaient des comtes de Neuchâtel : Neuchâtel, Boudry et Le Lan-deron, alors que les deux autres: La Bonneville et Valangin, appartenaient au seigneur de Valangin. Cette simple distinction permet d’emblée de voir que, pour toute foncière et rurale qu’ait été l’assise des seigneuries constitutives du pays de Neuchâtel, elles ne s’en sont pas moins appuyées sur une compo-sante urbaine éponyme dès qu’elles en ont eu la possibilité. Ce faisant, elles ont marqué à la fois leur puissance et leur intention de se développer.

La ville la plus ancienne, Neuchâtel, a été créée dans la seconde moitié du XIIe siècle au pied d’un château, apparu quant à lui quelques décennies avant 10117. Le développement urbain de Neuchâtel nous est connu par les études d’Alain Zosso8 ainsi que par différentes recherches archéologiques.

Ces études montrent que Neuchâtel, qui reçoit des lettres de franchises en 1214, s’est construite en plusieurs étapes. Un premier accroissement fortifié s’est constitué au XIIe siècle au pied du château, tandis que le XIIIesiècle voit se créer les nouveaux quartiers que sont la rue des Moulins et, au-delà du Seyon, le quartier des Chavannes et de la rue de l’Hôpital.

La ville de Boudry s’est développée au début du XIVe siècle au bas d’une colline portant un château élevé vers le milieu du siècle précédent9.

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7 Jacques BUJARD, Christian de REYNIER, « Aux origines de la ville de Neuchâtel : la porte du Chastel et la Maleporte », Revue historique neuchâteloise (RHN), 2003, pp. 227-254.

8 Alain ZOSSO, « La ville de Neuchâtel », dans Histoire du pays de Neuchâtel, Hauterive, 1989, t. 1, pp. 230-242.

9 Christian de REYNIER, Le château de Boudry au Moyen Age. Nouvelle analyse archéologique. Rapport dactylographié, SPMS, 2003.

Si le château est ancien, la construction de la ville correspond au besoin du comte de Neuchâtel de marquer sa présence à la limite sud de son territoire. L’influence comtale s’exerce en effet de manière efficace sur les communautés de Cortaillod et de Boudry, mais les relations avec les seigneuries de Gorgier et de Vaumarcus, d’ailleurs encore mal connues, sont plus relâchées. La construction du bourg de Boudry s’accompagne de la création d’une bourgeoisie qui est étonnamment divisée d’une part en bourgeois de Boudry dits des Vermondins et de Pontareuse, qui occupent le haut de la ville, et d’autre part en bourgeois de Boudry dits d’Areuse, qui en occupent le bas. Cette distinction, qui n’apparaît pas dans les fran-chises de la ville octroyées aux bourgeois de Boudry en 1343 par le comte Louis de Neuchâtel, est bien visible dans les extentes, de 1439 à 170710. Correspondant à une différence de statut juridique, elle est probablement à l’origine de la relative faiblesse de la bourgeoisie de cette ville.

La ville la plus récente, Le Landeron, a été érigée par le comte Louis de Neuchâtel sur un pré acheté à l’abbaye de l’Ile-saint-Jean en 1325.

Cette construction, qui marque la fin des luttes ayant opposé le comte de Neuchâtel et l’évêque de Bâle au tournant des XIIIe et XIVe siècles dans le Val-de-Ruz puis le long de la rive du lac de Bienne, est avant tout politique et économique : le comte de Neuchâtel marque la limite nord de son territoire, de la même manière qu’il l’a fait auparavant au sud avec la création de Boudry. Les franchises du Landeron datent de 135011.

La Bonneville, située à deux kilomètres au nord de Valangin, a été fondée avant 1295 par les seigneurs de Valangin, Jean et Thierry d’Aarberg, et détruite en 1301 déjà par le comte Rodolphe de Neuchâtel.

Nous ne possédons que quelques rares mentions écrites au sujet de cette ville, notamment celle de sa probable destruction :

« Anno domini M° CCC° primo, L’an 1301, Rodolphe, comte et seigneur Rodulphus comes et dominus Novicastri de Neuchâtel assiégea la ville neuve du obsedit villam novam de valle Rodoli ; Val-de-Ruz ; elle fut capturée le 4 des quam capta fuit IIII° kalendas maii. »12 calendes de mai. (trad. Antoine Glaenzer)

10Respectivement : Georges-Auguste MATILE, Monuments de l’histoire de Neuchâtel (Cités : Monuments), Neuchâtel, 1844, t. 1, p. 518, no357. AEN, Reconnaissances de Boudry, no1, 1439-1456, commissaire Pierre Gruère. AEN, Reconnaissances de Boudry no 10, no 11, no 12, no 13 et no14, 1706-1707, commissaire Pierre Ducommun.

11Antoine GLAENZER, « Nugerol, l’exemple d’une ville neuve qui ne s’est pas développée (1260-1351) », Musée Neuchâtelois (MN), 1996, pp. 55-66. Le Landeron : histoires d’une ville, Hauterive, 2001, annexe no2, pp. 291-298.

12Rémy SCHEURER, « Le combat ou la bataille de Coffrane dans l’historiographie neuchâteloise », MN, 1997, pp. 195-206. Bibliothèque publique et universitaire de la ville de Neuchâtel, Armoire de fer, A no27 (anciennement : no4820), fol. 2 vo: mention de la bataille de Coffrane (texte édité par Rémy SCHEURER, art. cit., p. 195) et fol. 3 vo: destruction de la ville neuve.

En 1499, soit environ deux cents ans après la destruction, on utilise encore les ruines de l’ancienne ville comme point de repère pour situer des champs :

« (...) devant la Bonne Ville, environ demye bonne pose de terre (...) (...) une pose de terre sise devant la Bonne Ville (...). »13

Les origines de Valangin restent mal connues, faute de textes ; tout au plus la mention au milieu du XIIesiècle d’un seigneur Renaud de Valangin et de son fils Guillaume, dont les possessions s’étendent jusqu’au Locle, rend-elle vraisemblable l’existence d’une maison-forte à cette époque déjà14. Les circonstances de l’apparition de la ville elle-même ne sont pas précisées : la première mention de la ville remonte au règne de Gérard d’Aarberg (1330-1339), mais le château est, quant à lui, signalé en 1295 déjà, lorsque les seigneurs de Valangin résignent leur forteresse de Valangin, le Val-de-Ruz, la Bonneville et Bussy pour trois ans à l’évêque de Bâle15. La ville de Valangin n’existait donc très vraisemblablement pas encore à la fin du XIIIe siècle ; elle a probablement été fondée entre la destruction de La Bonneville en 1301 et les années 1330, sans doute pour remplacer cette première fondation urbaine (fig. 1 et 2).

On est probablement là dans un cas de figure similaire à celui de la construction du Landeron. Si la ville est neuve, elle est construite par des habitants qui sont déjà sur place. En échange d’un statut juridique de bourgeois, dont le texte apparaît généralement une fois que la ville est construite – à Valangin, les franchises datent de 1352 –, les habitants s’engagent à construire une ville à un emplacement désigné par le seigneur.

En ce qui concerne Le Landeron, ce sont les habitants installés sur les coteaux, au Mornet ou dans le quartier justement appelé «Vyle », qui s’installent dans la création voulue par le comte de Neuchâtel. La Bonneville une fois détruite, rien n’empêche le seigneur de Valangin de réorganiser l’habitat qui le concerne directement et de faire édifier un bourg au pied de son château ; le site urbain actuel, vu sa régularité, est en effet manifestement le fruit d’une fondation planifiée et non d’un développement spontané.

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13 AEN, Reconnaissances de Valangin, no3, commissaire Lucas Dumayne. Les reconnaissants sont respectivement : Pernet et Aymonet Vuarnier, de Fontaines, 8 janvier 1499, fol. 42 voet Jehan Ladvoyer, de Fontaines, 12 décembre 1499, fol. 1 vo.

14 Georges-Auguste MATILE, Monuments, t. 1, p. 12, n° 16, acte en allemand, vers 1150.

15 Georges-Auguste MATILE, Monuments, t. 1, p. 252, no276, le 12 décembre 1295. Jean-Claude REBETEZ, « 1296 : La bataille de Coffrane. Une date clé dans l’histoire des relations entre les comtes de Neuchâtel, les seigneurs de Valangin et les évêques de Bâle », MN, 1996, pp. 131-143.

Dans le premier quart du XIVe siècle, le « système urbain » du pays de Neuchâtel est clair. Le comte de Neuchâtel est posté au nord, au sud et à l’ouest de son territoire avec trois villes. Parallèlement, il a créé trois bour-geoisies qui ne se gêneront pas de le contester, tant s’en faut, mais qui n’en sont pas moins le reflet de son pouvoir. Sa capitale, par l’intermédiaire de l’étroit goulet des gorges du Seyon, fait directement face à celle du seigneur de Valangin. Ce dernier est à la tête d’une seigneurie qui ne dispose que d’une bourgeoisie, et dont le retard dans le développement urbain ne sera rattrapé qu’avec le XIXe siècle.

Les apports de l’archéologie

L’archéologie a permis ces dernières années de préciser les étapes et les modalités architecturales et urbanistiques du développement de Neuchâtel, de Boudry et surtout du Landeron.

A Neuchâtel, il apparaît que les maisons étaient adossées, à certains endroits tout au moins, à l’enceinte entourant le bourg (quartier des actuelles rues du Château et du Pommier), alors que dans la ville basse, qui s’est développée avant 1214 le long du Seyon, les maisons, contiguës

Fig. 1. Vue aérienne du bourg de Valangin (Archives SPMS).

et perpendiculaires à la rue des Moulins, suivent un urbanisme « en lanière ». Le même type de parcellaire se retrouve à la rue des Chavannes et à la rue de l'Hôpital, apparues dans le courant du XIIIe siècle.

Boudry est une ville-rue, d’environ 300 m de longueur par 50 m de largeur, entourée d’une enceinte formée des façades arrière des maisons.

Comme l’ont montré les investigations archéologiques réalisées lors de l’aménagement du théâtre de la Passade en 1998 (rue Louis-Favre no 20), les maisons étaient contiguës et assez courtes : celle qui nous occupe n’avait qu’une longueur de 7,50 m. Construite en pierre, elle avait une cave ou une boutique au rez-de-chaussée, alors qu’un escalier extérieur donnait accès au logement à l’étage. La simultanéité de la construction de l’enceinte et de la maison permet de la dater des origines de la ville, soit du début du XIVe siècle. Cette maison a ensuite été allongée au détriment de la rue, dans le courant du même siècle vraisemblablement. Les traces de beaucoup de ces maisons primitives sont encore décelables sur le plan cadastral actuel, avec des façades qui n’étaient pas toutes alignées. Là aussi, le plan cadastral indique, par les ruptures d’alignement des murs mitoyens, que le même agrandissement a été effectué dans les autres maisons, des deux côtés de la rue.

Au Landeron, une évolution similaire a été relevée : après l’établissement dès 1329 d’une digue de bois et de terre sur le pourtour du terrain de la future ville – d’environ 180 m par 80 m – pour protéger la construction de l’eau, l’enceinte et les maisons ont été élevées simultanément. Mesurant de 2,35 m à 6,75 m de largeur pour une longueur de 8 m à 15 m, ces maisons avaient, tout au moins du côté ouest de la ville, une cave au

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Fig. 2. Valangin vers 1630. Vue cavalière dans un registre du notaire Josué Perret-Gentil, détail (AEN).

rez-de-chaussée et un logement à l’étage, accessible par un escalier extérieur.

Dès 1350, le comte Louis de Neuchâtel ayant renoncé à bâtir toute nou-velle construction au centre de la ville, il put être procédé à l’allongement systématique des maisons du pourtour, comme à Boudry16.

Faute de fouilles archéologiques, l’aspect de La Bonneville est, quant à lui, mal connu. Néanmoins des levées de terrain permettent de reconnaître un double fossé entourant une ville de plan rectangulaire, d’environ 175 m par 75 m17: en plan, La Bonneville équivalait au Landeron.

Le bourg de Valangin, XIVe-XVIe siècles Le bourg : son influence et son évolution

Pour monotones et succincts qu’ils soient, les textes rédigés par les commissaires des XVe-XVIe siècles permettent d’envisager l’habitat et la représentation qu’on en avait aux différentes époques.

a) Rolet Bachie : 1400-1405

Le premier état des lieux est fait par Rolet Bachie, un notaire originaire d’Ependes, qui travaillera pour le seigneur de Valangin pendant le premier quart du XVe siècle18. Il rédige en latin avec une terminologie très précise et rigoureuse : sa langue fait un lien direct entre les maisons et le statut institutionnel de leurs propriétaires. Ainsi, dans la formule qui introduit la reconnaissance d’une maison, il n’utilise le mot domus seul que pour désigner les maisons de Valangin. Pour les autres localités du Val-de-Ruz, il utilise soit casale, soit casale et domus. De même, le statut de bourgeois du bourg est rendu par les termes de burgensis de Vaulengin alors que celui de bourgeois de communance correspond à la formule de burgensis domini.

On a alors affaire à une terminologie de type institutionnel, révélatrice du lien encore étroit existant entre la maison du bourg et le bourgeois. Ainsi, Johannes de Bussy et son neveu Perrodus perdent leur statut de bourgeois s’ils quittent le bourg pour redevenir taillables19. Le retour à la condition

16Jacques BUJARD, Bernard BOSCHUNG, « Urbanisme et fortifications », dans Le Landeron : histoires d’une ville, Hauterive, 2001, pp. 29-42.

17Alphonse de MANDROT, « Les ruines de La Bonneville », MN, 1865, pp. 5-9. Bernard BOSCHUNG,

« Le canton de Neuchâtel », dans Stadt- und Landmauern, Zurich, 1995, pp. 187-188. Hervé MIÉVILLE,

« Une trouvaille monétaire à La Bonneville », MN, 1995, pp. 137-158 (avec relevés du site).

18AEN, Reconnaissances de Valangin, no 1, commissaire Rolet Bachie, p. 1. AEN, archives anciennes, H 18 no29, fol. 59 ro-65 ro.

19« (...) burgenses de Vaulengin tamdiu morabuntur in dicto burgo de Vaulengin et non alius q... [lacune] si exirent burgum et moram contrahentur extra burgum essent talliabiles (...) », AEN, Reconnaissances de Valangin, no1, commissaire Rolet Bachie, p. 11.

de taillable concerne la majorité de ces dispositions. En revanche, si Perrinus Mimyn quitte le bourg, il acquerra le statut d’homme command20. Ces conditions particulières ne sont spécifiques ni aux reconnaissants de Valangin ni au statut de bourgeois. Janninus Paradix, de Boudevilliers, a le statut d’homme command. S’il quitte le village, il sera soumis au statut de taillable21. Nous n’avons rencontré aucune de ces conditions restrictives chez les bourgeois possédant une maison dans le bourg de Valangin et reconnaissant leurs biens dans une autre localité. Ce sont autant

de taillable concerne la majorité de ces dispositions. En revanche, si Perrinus Mimyn quitte le bourg, il acquerra le statut d’homme command20. Ces conditions particulières ne sont spécifiques ni aux reconnaissants de Valangin ni au statut de bourgeois. Janninus Paradix, de Boudevilliers, a le statut d’homme command. S’il quitte le village, il sera soumis au statut de taillable21. Nous n’avons rencontré aucune de ces conditions restrictives chez les bourgeois possédant une maison dans le bourg de Valangin et reconnaissant leurs biens dans une autre localité. Ce sont autant

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