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Les variations saisonnières du voisinage .1 Mauss et les variations saisonnières

Constitution et modalités du voisinage

Chapitre 6 La dimension spatio-temporelle du voisinage

6.2 La dimension temporelle du voisinage

6.2.2 Les variations saisonnières du voisinage .1 Mauss et les variations saisonnières

Mauss, dans son essai sur la morphologie sociale des eskimos376, montre comment les variations saisonnières peuvent influencer l’organisation sociale. Ainsi, l’auteur relève deux manières de se grouper. En été, l’organisation sociale eskimo est basée sur un établissement dans des tentes dispersées comprenant une seule famille, alors que l’hiver, on trouve un habitat dans des maisons resserrées les unes près des autres et comprenant plusieurs familles. Mauss montre comment cette organisation dans l’espace affecte aussi la vie religieuse et la vie juridique du groupe. En effet, l’auteur dégage une religion d’été, quasi inexistante et individuelle qu’il oppose au rythme religieux d’hiver, marqué par une omniprésence des rites et cérémonies religieuses, qui sont, cette fois, collectifs. De même, le système juridique varie suivant les saisons et se compose d’un système juridique d’été et d’un système juridique d’hiver, que cela soit au niveau de la vie domestique ainsi qu’au niveau du régime des biens, le premier étant basé sur un système patriarcal, le second sur un système communautaire. L’auteur résume l’organisation sociale eskimo en ces termes :

D’une façon générale […] les hommes ont deux manières de se grouper, et […] à ces deux formes de groupement, correspondent deux systèmes juridiques, deux morales, deux sortes d’économie domestique et de vie religieuse. A une communauté réelle d’idées et d’intérêts dans l’agglomération dense de l’hiver, à une forte unité mentale religieuse et morale, s’opposent un isolement, une poussière sociale, une extrême pauvreté morale dans l’éparpillement de l’été.377 Ainsi, si l’hiver connaît une « socialité intense », l’été est lui le siège d’une « phase de socialité languissante et déprimée378 ». L’auteur remarque que cette opposition entre vie d’hiver et vie d’été se retrouve dans de nombreuses sociétés, jusque dans les sociétés occidentales avec les départs en vacances en période estivale379. Et l’auteur de conclure : « La vie sociale ne se maintient pas au même niveau aux différents moments de l’année ; mais elle passe par des phases successives et régulières d’intensité croissante et décroissante, de repos et d’activité, de dépense et de réparation380 ».

6.2.2.2 Tradition de l’estivage en Turquie

Mauss remarque que les variations saisonnières sont plus prégnantes dans les régions tempérées où les saisons sont plus marquées. On observe ainsi en Turquie, et surtout à Adana, une forte opposition entre la vie hivernale et la vie estivale. Il faut se rappeler les origines

376 Ibid. 377 Ibid., p. 470. 378 Ibid., p. 471. 379 Ibid., p. 472-473. 380 Ibid., p. 473.

nomades des Turcs. A Adana, jusqu’à la fin du 19ème siècle381, la population se séparait en deux grands groupes : les nomades et les sédentaires382, puis, peu à peu les sédentaires sont devenus majoritaires. Cependant, la vie nomade n’a jamais totalement disparu. Ainsi, si longtemps les nomades passaient leur temps entre une vie hivernale dans la plaine pour remonter l’été avec leurs troupeaux vers les lieux d’estivage, les yayla, cette pratique perdure de nos jours où, dès que les beaux jours arrivent et que les écoles sont fermées, les gens qui le peuvent, à commencer par les retraités, les femmes au foyer avec leurs enfants, et, le week-end, les hommes et les femmes qui travaillent, se rendent dans la fraîcheur des yayla pour y passer les mois les plus chauds de l’année.

Parallèlement à cette migration pour fuir la chaleur estivale et la forte humidité de la plaine, on observe, aujourd’hui encore, une migration de travail de personnes venant de l’est de la Turquie pour travailler dans les champs en été. Ce phénomène qui n’a aucune implication sur les relations de voisinage, contrairement au phénomène de l’estivage de la population, montre cependant l’importance des saisons dans la vie sociale turque.

6.2.2.3 Voisiner en hiver

Les relations de voisinage sont fortement dépendantes du rythme scolaire des enfants et des diverses occupations de chacun. Comme le faisait remarquer Nilüfer, « l’hiver d’ailleurs, les jours sont courts, il y a l’école, on s’occupe des enfants » (Nilüfer, 40 ans, femme au foyer). De plus, certaines personnes exercent diverses activités dans le courant de la semaine, qui rythment leurs journées et limitent leur temps disponible pour voisiner. C’est notamment le cas de Dilek, Bilge et Rukiye qui suivent pendant l’année scolaire des cours en ville. « Bilge hanim, Dilek hanim, Rukiye hanim vont toutes à leurs cours, à l’école, c’est pourquoi on ne se voit pas. Parce qu’elles sont toujours occupées. Le matin, elles vont là-bas, c’est pourquoi on ne peut pas se voir souvent, mais l’été, si on est là, on se voit » fait remarquer Ayşe qui, elle-même, a peu de temps libre car elle doit s’occuper un jour sur deux de ses petites filles.

Le mari de Pelin, agriculteur, quant à lui, ne vient à Adana que de temps en temps, quand son travail au village le lui permet. C’est pourquoi il s’y trouve plutôt en hiver, alors que les travaux agricoles sont moindres, et il y reste un mois. Toutefois, et même s’il connaît les habitants avec qui il peut converser, il ne voisine que peu et préfère fréquenter des personnes originaires de son village dans un café où ils se retrouvent habituellement.

L’hiver, les programmes de chacun sont planifiés. Sevil, par exemple, participe à des réunions familiales tous les 15 de chaque mois, où elle a alors l’occasion de rencontrer Ismail, un voisin qui est par ailleurs un lointain parent. Mais l’hiver est surtout la période par excellence de l’organisation régulière de gün. Ceux-ci se mettent en place dès le début de l’année scolaire, où il est décidé de son organisation et de qui y participera. La période scolaire correspond ainsi à la « saison du gün ».

Le voisinage d’hiver a lieu au sein des immeubles, dans les appartements, dans le salon, le petit salon (oturma odası, littéralement « la pièce pour s’asseoir »), voire même dans la cuisine, suivant le degré d’intimité entre les voisins, le salon étant réservé aux visiteurs les moins intimes ou lorsque leur nombre est trop important pour tenir dans le petit salon. Ce

381 Marqué notamment par la fıkra-ı-islahiye, la « pacification » de la région en 1865, consistant en une grande campagne de sédentarisation forcée. Cf. H. Bayard-Çan (1998), L'Estivage des citadins dans la région d'Adana

(Turquie) : l'institution de yayla revisitée, mémoire de maîtrise, Université Paris X-Nanterre, p. 43-46.

382 Cf. I. Tamdoğan-Abel (1998), Les Modalités de l'urbanité dans une ville ottomane : les habitants d'Adana au

dernier, plus petit, est en effet plus facile à chauffer (même lorsque le chauffage central existe, en général seules sont chauffées les pièces à vivre, avec un appareil de climatisation ou un chauffage d’appoint ; le salon est lui considéré comme une pièce de réception qui n’est pas utilisée quotidiennement). L’extérieur n’est, l’hiver, que lieu de passage.

On observe donc, l’hiver, des relations de voisinage organisées, qui ont lieu à l’intérieur des immeubles. Toute cette organisation de l’hiver disparaît avec l’arrivée des beaux jours.

6.2.2.4 Voisiner en été

Les variations saisonnières font que les relations de voisinage ne seront pas les mêmes l’hiver que l’été. On observe l’été deux tendances antagonistes. D’une part, il y a affaiblissement de certaines relations de voisinage, notamment les plus formelles (comme les gün qui s’arrêtent au moment des vacances scolaires d’été) en raison notamment de nombreuses allées et venues des habitants sur des lieux de villégiature, délaissant la plaine surchauffée. D’autre part, la chaleur, l’allongement du temps de l’éclairage naturel, entraînent une augmentation de la visibilité des personnes à l’extérieur et par là même une multiplication des occasions pour communiquer et se rencontrer.

En été, la saison des gün se termine (« la saison est terminée » comme le faisait remarquer Ayla en parlant du gün organisé dans l’immeuble alors que je l’interrogeais au mois de juin). Ces relations de voisinage programmées à intervalle régulier sont remplacées par des relations plus informelles entre les personnes qui ne sont pas parties en vacances. Tout le monde présent est alors plus disponible, n’étant plus tenu par les horaires scolaires des enfants ni par d’autres activités.

En raison de la forte chaleur qui règne à Adana, l’été est le temps des vacances et de l’estivage. Les beaux jours durent de mi-mai (il peut commencer à faire très chaud dès le mois d’avril) à la fin octobre et, une fois l’école terminée, on observe réellement une fuite des habitants pour échapper à la chaleur comme le faisait remarquer Murat : « et puis, bien sûr, est-ce que vous y avez fait attention, quand vient l’été, pendant deux trois mois, il y a une fuite vers les yayla [lieux d’estivage en altitude] ou vers la mer. »D’ailleurs, tout le monde (tant les personnes venant d’autres provinces que celles originaires d’Adana) plaint celui qui est obligé de passer tout l’été à devoir supporter la chaleur d’Adana. Les mois de juillet et août voient donc une forte diminution de la population en ville. Ce sont notamment les femmes et les enfants qui se rendent sur les lieux d’estivage durant tout l’été, les hommes les rejoignant le temps du week-end et lorsqu’ils prennent quelques jours de vacances.

Les départs estivaux entraînent alors un roulement des voisins présents dans la résidence. Seuls les migrants, de retour de pays d’Europe le temps des vacances d’été, effectuent le trajet inverse et vont à Adana. Ils sont cependant nombreux à ne pas rester tout leur mois de vacances à Adana et à se rendre aussi en altitude ou en bord de mer. Mais c’est aussi pourquoi les autres habitants ne les connaissent pas forcément, à moins que ceux-ci fréquentent les espaces ouverts de la résidence.

Cem : Levent, quand il vient, nous nous voyons mais pas extrêmement. Enfin, nous le connaissons, nous nous saluons, nous discutons le soir. Il passe une partie de l’été à Adana. Il ne va pas hors d’Adana, même en pleine chaleur estivale il reste ici.

Moi : Comment l’avez-vous connu ?

bloc A. Alors je le salue. Avec la venue de l’été, ils s’assoient en bas, il sortent des tables. Peut-être que vous n’avez pas eu l’occasion de le remarquer, l’été en bas... nous sommes toujours en bas. Mais jusqu’à une certaine heure, entre six et huit heures environ. C’est de cette façon que j’ai fait connaissance avec Levent bey.

(Cem, 40 ans, commerçant).

Le voisinage d’été se passe en effet en grande partie à l’extérieur, se donnant ainsi à voir et permettant à d’autres voisins et voisines d’y participer. La cour en bas de l’immeuble joue un rôle prédominant dans les relations. En effet, dès que les beaux jours arrivent, dans la soirée afin d’éviter les trop grosses chaleurs, certaines voisines s’y installent pour surveiller leurs enfants qui jouent dehors. D’autant plus que quelques bancs y sont disposés et que Muhsin, un des concierges dont la loge donne sur la cour, prépare du thé qu’il offre aux résidents qui s’arrêtent. Et ce ne sont pas que les mères de famille qui s’y retrouvent. Halime, par exemple, retraitée, aime aussi s’y arrêter et discuter. C’est d’ailleurs une de ses relations de voisinage privilégiées, pour elle qui, bien qu’aimant discuter et ne manque pas d’échanger quelques mots avec les voisins qu’elle rencontre, n’échange cependant pas beaucoup de visites. « Cette vieille femme, par exemple, elle descend, et ici personne ne ressent le besoin d’aller chez personne » (Nilüfer, 40 ans, femme au foyer). Cem et Nilüfer sont eux aussi des habitués de ces rencontres estivales en bas des immeubles.

Cem : Alors maintenant, les gens qui restent là l’été, en général il doit y avoir environ, disons, trois, cinq familles, même pas, toutes les personnes qui se trouvent là descendent. Que cela soit Safiye, pendant que les enfants jouent en bas, elles sont deux trois amies à s’asseoir.

Nilüfer : Oui.

Cem : En même temps, vers la fin de l’été par exemple, quand il fait bon. Nilüfer : Oui, nous descendons quand il fait beau.

Cem : Quand il fait beau, en bas et les femmes se retrouvent, et les enfants jouent, c’est spécial [değişik].

[…]

Nilüfer : Avec Gülşen, on se voit ses jours de repos. Quand on se rencontre en bas nous nous asseyons sur un banc et nous discutons. C’est comme ça.

Moi : Sur quel banc ?

Nilüfer : En bas il y a des bancs au niveau de la loge de notre gardien.

Cem : L’été, en général, enfin, pas en général, presque chaque jour, les femmes… Nilüfer : Quand les écoles sont fermées…

Cem : Vers six heures et demie, sept heures, ou plutôt six heures, les enfants jouent et les femmes s’assoient.

Nilüfer : Nous descendons notre café, notre thé, et on les boit là.

Cem : Là, il y a Muhsin, le concierge Muhsin, du bloc C, pardon, du bloc D, on s’assoit là. Moi : Il n’y a que des femmes de cet immeuble ?

Nilüfer : De cet immeuble, des autres immeubles aussi, mais en général c’est de notre immeuble.

[…]

Nilüfer : Les concierges sont très gentils, on les voit surtout l’été, quand on s’assoit en bas. Parfois sa mère [de Muhsin] vient.

Moi, à Cem : Et vous aussi vous vous asseyez là ? Cem : Bien sûr, bien sûr.

Nilüfer : Bien sûr. Ils boivent du thé.

Cem : Quand il fait beau, vers le soir en général, parce qu’il y a un endroit pour s’asseoir, nos femmes, nos enfants, l’un vient, nous nous asseyons, il offre du thé tout le temps. Voilà. Moi : En général, il y a combien de personnes qui s’assoient comme ça ?

y a sept huit personnes.

Nilüfer : Et puis il y a des chaises.

Cem : Il y a des chaises, et puis c’est à l’ombre. En général ça va commencer dans une dizaine de jours. Et fin juin on ne trouve presque personne parce que les gens vont et viennent, ils vont à la montagne, il vont en bord de mer, ils vont au village. C’est pourquoi entre la première semaine du mois de juin et la dernière semaine il y a du monde.

(Nilüfer, 40 ans, femme au foyer ; Cem, 40 ans, commerçant).

On voit donc que la sociabilité de voisinage des soirées estivales est intense en bas des immeubles. C’est aussi le moyen de rencontrer les personnes des autres immeubles. Ainsi Ayla connaît Safiye avec qui elle n’échange que de rares visites, cependant, elles trouvent souvent l’occasion de discuter dans la cour : « en bas, on va dans le jardin là où est Muhsin, au pied des plantes. Quand il fait chaud, je descends, on infuse du thé, elle vient aussi avec les autres voisines et là nous avons l’occasion de discuter ». De même, Nalan, de l’immeuble B, connaît bien Muhsin, qui n’est pourtant pas le concierge de son immeuble : « Je le connais, on s’y assoit [devant sa loge] beaucoup, surtout l’été, et on boit son thé ». Ces rencontres en bas de l’immeuble ont lieu surtout entre les habitants de l’immeuble B et ceux de l’immeuble C, au pied duquel elles ont lieu. Il faut remarquer, dans ce phénomène, outre le rôle du concierge, celui des commerçants qui sont le point de rencontre entre les habitants du quartier l’été. Ceux-ci se retrouvent alors avec les commerçants devant leurs boutiques.

Fille : En fait, on peut dire que dans cet immeuble les relations sont ainsi : plutôt que d’aller chez les autres tous les soirs ou à telle fréquence, plutôt que de se rendre visite, le dialogue est bien meilleur en bas.

[...]

Fille : Par exemple, chaque soir, plutôt que se rendre ici ou là, des visites le soir ou des visites où on échange les nouvelles quotidiennes… Si vous voyiez tout le monde ensemble en bas, vous comprendriez mieux la chaleur des relations. Maintenant, en bas le dialogue est bien meilleur, parce quand tout le monde se voit ensemble, on discute très chaleureusement. Sibel : Quand elle parle d’en bas, c’est-à-dire les commerçants.

Fille : C’est le point de rencontre commun de tous les habitants de ces immeubles, cet espace en bas, chez les commerçants. [...]

Ramazan : Toutes les femmes des commerçants travaillent. [rires] Sibel : Maris et femmes travaillent tous.

Moi : Ca se passe surtout le soir comme ça ?

Ramazan : En bas ? Toute la journée. Quand il fait chaud, on s’assoit en bas. Moi : L’été...

Ramazan : L’été, bien sûr. L’hiver aussi nous retournons en bas quand nous descendons, mais alors nous nous asseyons à l’intérieur.

(Ramazan, 59 ans, retraité ; Sibel, 50 ans, retraitée ; leur fille, une vingtaine d’années, enseignante).

Certaines, même, pour prendre le frais l’été, se retrouvent sur la terrasse de l’immeuble, sur le toit : « - L’été, par exemple, avant elles ne s’asseyaient pas à l’intérieur. Par exemple, Safiye hanim ouvrait la porte, y apportait des chaises, et elles discutaient là-haut. - Sur la terrasse. » (Cem, 40 ans, commerçant ; Nilüfer, 40 ans, femme au foyer).

Avec l’arrivée de la chaleur apparaît aussi une ouverture de l’espace domestique sur l’extérieur. En effet, pour permettre à l’air de circuler, on trouve à Adana, chose qui ne se voit pas dans les autres villes de Turquie, un volet en fer devant la porte, permettant ainsi d’ouvrir cette dernière. Si le volet permet de cacher l’intimité, il isole moins des bruits qu’une porte en

bois et l’on entend ce qui se passe à l’intérieur, permettant de voir si la voisine est là, ou d’entendre quand quelqu’un passe dans l’escalier, ce qui donne l’occasion de l’interpeller pour discuter ou boire un café. De plus, l’escalier n’ayant pas de fenêtres et les habitants ayant ouvert leurs portes, il règne dans la cage d’escalier une certaine fraîcheur donnée par le vent qui y circule. C’est pourquoi il arrive que certains y installent des chaises pour y discuter... ce qui n’est pas sans rappeler les groupes de voisines dans les villages ou devant des maisons basses d’Adana, qui se retrouvent en bas de leur palier pour s’asseoir et discuter, parfois en effectuant leurs tâches ménagères comme d’éplucher des légumes.

Aux relations de voisinage d’hiver confinées dans les appartements s’oppose donc un voisinage d’été, extérieur. En été, les espaces ouverts et centraux jouent donc un rôle important pour la sociabilité383.

De la même façon, dans d’autres immeubles d’Adana, on se retrouve dans le jardin de l’immeuble, sous la pergola :

Les hommes ne se voient pas de la même façon que les femmes, pas à cette fréquence. Mais plutôt, les mois d’été, il y a une pergola dehors, on peut les voir souvent assis là. Les hommes rentrent le soir, après leur travail. Parfois leur femme n’est même pas là pour les accueillir. Les femmes sont de leur côté, les hommes du leur, ils sont habitués à ça.

(Abdullah, 32 ans, enseignant).

Cette intensité des relations de voisinage à l’extérieur durant la période estivale est encore plus présente dans les quartiers de maisons individuelles ou immeubles à peu d’étages (dans les kenar mahalle) comme en témoignent Hilal ou Dilek :

Hilal : Avant, tu sais comment c’était ? Tu es allée dans les vieux quartiers d’Adana, où il n’y a pas d’immeubles mais des maisons à un ou deux étages.

Erkan : Des maisons individuelles [müstakil].

Hilal : Dans ce type de quartier en général les gens se rassemblent le soir, dehors, dans le quartier. Et puis comme il fait chaud à Adana, surtout l’été, ils descendent dehors. Tout le