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Les premières analyses de réseaux de voisinage

Outils théoriques et méthodologiques

Chapitre 2 Le voisinage en tant que réseau

2.2 A la base de l’analyse de réseaux

2.4.2 Les premières analyses de réseaux de voisinage

Si le réseau social d’un individu ne se restreint plus au voisinage, comme cela était le cas dans les communautés villageoises, le voisinage peut cependant être un pan important du réseau social d’un individu et certains auteurs se sont attachés à analyser les réseaux sociaux dans le voisinage.

167 Ibid., p. 56.

168 Au niveau des approches anthropologiques concernant les relations de voisinage, on pourra se reporter à mon mémoire de DEA, H. Bayard-Çan (2000), Un Aspect des relations de voisinage dans un quartier d'Adana

(Turquie) : l'assistance aux grands événements de la vie, Institut National des Langues Orientales, p. 12-42 (cf

Annexe 1).

169 G. Bridge (2002), op. cit..

170 Voir aussi à ce sujet B. Wellman (1979), « Networks, Neighborhoods, and Communities: Approaches to the Study of the Community Question », Urban Affairs Quarterly, vol. 14, n° 3, p. 363-390.

2.4.2.1 Barnes, un précurseur

Barnes172, nous l’avons vu précédemment, est considéré comme le premier à avoir énoncé les grands principes de l’analyse de réseaux sociaux. Dans son étude fondatrice, il aborde aussi les réseaux de voisinage. Ceux-ci font partie des trois domaines au sein desquels les habitants de l’île norvégienne de Bremnes entretiennent des relations sociales. Ces trois domaines sont : un domaine basé sur une délimitation géographique, au sein de la plus petite unité duquel vont avoir lieu les relations sociales ; un domaine fluctuant généré par le système industriel ; un domaine sans délimitation géographique qui correspond aux relations d’amitiés et de connaissance, dont une grande partie a lieu avec des membres de la parenté. Le réseau de voisinage a pour particularité d’être relativement stable, avec des membres changeant peu. Par ailleurs, les relations sociales entre voisins relèvent d’activités diverses, allant de l’agriculture de subsistance aux soins aux enfants, en passant par la religion.173 Cependant, Barnes, traite surtout des réseaux de parents, amis et connaissances en laissant de côté les autres domaines de la société pour s’intéresser plus particulièrement aux phénomènes de statut et de classe sociaux.

2.4.2.2 Comment mesurer la taille d’un réseau de voisinage : l’étude de Sudman

Sudman174, en 1988, s’est intéressé à la taille des réseaux sociaux, et, dans le but de comparer différentes méthodes de mesures, après avoir mesuré les réseaux de travail, de sociabilité et de coappartenance à la paroisse, s’est penché sur les réseaux de parenté et de voisinage. Son but était notamment de comparer les différents générateurs de noms. D’une part, pour une partie des enquêtés, il a fait appel à la méthode de reconnaissance (recognition procedure), qui consiste à donner les noms des différents voisins aux répondants avant de leur poser des questions à leur sujet, d’autre part, c’était aux voisins de déterminer eux-mêmes quels étaient leurs voisins (recall procedure). Le chercheur cherchait en outre à comparer les résultats donnés par ces méthodes avec ceux donnés lorsque les enquêtés fournissaient eux-mêmes une estimation de la taille de leur réseau (numerical estimates).

Pour cela, il a effectué des enquêtes auprès de sept échantillons de logements dans deux villes différentes : deux immeubles, de 47 et 11 appartements, deux échantillons d’un côté d’une rue longeant un pâté de maison, de 15 et 13 ménages, deux échantillons de deux côtés d’une rue longeant un pâté de maison, de 21 et 18 ménages, et les quatre côtés d’un pâté de maisons comprenant 56 ménages175. Des questions étaient posées à un membre de chaque ménage concernant les autres habitants de l’échantillon, à commencer par les personnes habitant à côté de chez eux. Différentes informations ont ensuite été demandées aux enquêtés :

- Le nombre d’enfants de moins de 6 ans et entre 6 et 18 ans dans leur ménage et la taille de leur ménage ;

- Le nombre d’enfants de moins de 6 ans et entre 6 et 18 ans dans les ménages des voisins et la taille de leurs ménages ;

172 J. A. Barnes (1954), op. cit..

173 Id., p. 42.

174 S. Sudman (1988), « Experiments in Measuring Neighbor and Relative Social Networks », Social Network, n° 10, p. 93-108.

- Le nombre total de ménages, d’enfants de moins de 6 ans et d’enfants entre 6 et 18 ans et le nombre total d’habitants dans l’immeuble, dans la rue ou dans le pâté de maisons ;

- La fréquence des contacts avec chaque ménage voisin au cours du mois passé ;

- Le nombre de personnes de leur ménage présentant un handicap empêchant une activité normale ;

- Le nombre de personnes dans chaque ménage voisin présentant un handicap176.

Par ailleurs, l’enquête a permis de constater que dans les immeubles étudiés personne ne connaissait ses voisins et de conclure que, bien qu’il faille se méfier de la généralisation de ces résultats qui ne portent que sur deux immeubles, « il apparaît certainement que quiconque voudrait mener des recherches sur le voisinage aurait de sérieux problèmes dans les grands immeubles »177 et recommande d’effectuer de telles études sur des immeubles plus petits où présentant des lieux où les résidents ont l’occasion de se rencontrer.

Par ailleurs, l’auteur conclut que les personnes ont tendance à mieux connaître leurs proches voisins que ceux qui sont plus éloignés géographiquement178. De plus, il observe plus de relations entre voisins qui habitent dans une même rue face à face qu’entre voisins qui se tournent le dos ou habitent dans une autre rue du même pâté de maisons179.

Cette étude montre que la validité des méthodes employées dépend des types de logement : si l’estimation numérique correspond aux résultats de la reconnaissance dans les maisons individuelles au sein d’une même rue, celle-ci est légèrement surestimée lorsqu’il s’agit de pâté de maisons entier ou d’immeubles180. De même, si la méthode du rappel (recall) donne des résultats équivalents à celle de la reconnaissance (recognition) dans les maisons individuelles situées dans une même rue, ceux-ci sont bien inférieurs lorsqu’il s’agit d’unités plus grandes (le pâté de maison) et très faibles en ce qui concerne les immeubles.

Bien qu’ayant effectué des enquêtes auprès de tous les habitants dans différents lieux de peuplement, Sudman s’en tient à l’étude des réseaux personnels de chacun. Il faut de plus remarquer qu’une étude portant sur la structure du réseau complet par ce mode d’enquête aurait été difficile compte tenu du nombre élevé de personnes n’ayant pas participé à l’enquête, qui s’élevait à 67 % de la population, ce qui est, d’après Sudman, un taux courant pour de telles enquêtes dans des zones urbaines181.

176 Id.. 177 Ibid., p. 97. 178 Ibid., p. 99. 179 Ibid., p. 100. 180 Ibid., p. 107. 181 Ibid., p. 96.

2.4.3 Analyses contemporaines de réseaux de voisinage, diverses