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Manchester : histoire, démographie, phonologie

3.2.3 Vers une variété septentrionale ?

S’il apparaît clairement maintenant qu’il existe un accent jouissant d’un statut privilégié en Grande-Bretagne, nous avons aussi constaté que la RP n’exerce plus désormais l’hégémonie qui a pu être la sienne autrefois. Des accents régionaux ne constituent donc plus aujourd’hui un frein à l’ascension sociale en Grande-Bretagne, et l’équilibre des dynamiques entre variétés différentes n’est plus le même qu’il y a ne serait-ce qu’un demi-siècle. À cette situation s’ajoutent les facteurs déjà mentionnés en 2.3.3.4. Trudgill note ainsi que ce qu’il nomme les « dialectes traditionnels » (les dialectes qui se trouvaient dans les régions rurales de Grande-Bretagne, et qui étaient, jusqu’à l’avènement de la sociolinguistique urbaine, les objets d’étude de la dialecto-logie ; voir figure 3.3) tendent à disparaître, mais que ce phénomène ne semble pas aboutir à un nivellement dialectal définitif et complet à l’échelle britannique. En effet, dans le même temps, d’autres variétés, bien distinctes de la RP, du moins d’un point de vue phonologique, les ont remplacés (voir figure 3.4) :

15. /w/ a une double articulation : il s’agit d’une approximante labio-vélaire.

16. Bien que [r] représente une consonne roulée, nous suivons le principe de romanisation comme beaucoup d’auteurs et utilisons ce symbole de manière phonémique afin de désigner le phonème correspondant à la réalisation usuelle [ô].

What is happening in Britain — and probably not only in Britain — as far as regional linguistic variation is concerned is rather complicated. On the one hand, much regional variation is being lost as the large number of Traditional Dialects covering small geographical areas gradually disappear from most, though by no means all, parts of the country. These, however, are being replaced by a much smaller number of new Modern Dialect areas covering much larger areas. The dialects and accents associated with these areas are much less different from one another, and much less different from RP and Standard English, than the Traditional Dialects were. However, and this is crucial, in terms of phonology they are for the most part currently diverging, not converging (Trudgill 2001, p. 11–12).

En fait, Trudgill (ibid., p. 12), en s’interrogeant sur le phénomène de l’Estuary En-glish, se demande si celui-ci n’est pas symptomatique d’une évolution plus générale des variétés de l’anglais en Grande-Bretagne, voire dans le monde anglophone : elles convergeraient les unes vers les autres sur les plans lexical et morpho-syntaxique, alors qu’elles seraient en train de diverger sur le plan phonologique. Dans les Îles Britanniques en particulier, suite aux changements démographiques et économiques du xxe siècle, des zones d’influence linguistique seraient apparues autour de centres urbains tels que « Belfast, Dublin, Cardiff, Glasgow, Newcastle, Nottingham, Leeds, Liverpool, Manch-ester, Birmingham and Bristol ». Les variantes associées avec ces localités se seraient donc étendues à des zones géographiques plus larges que de simples aires urbaines, supplantant au passage les variantes des dialectes traditionnels. Trudgill (1999, p. 82– 84) postule que les variétés modernes associées à de telles zones sont les candidates les plus sérieuses comme produits du nivellement dialectal. Celles-ci sont représentées en figure 3.5, dont l’examen rapide révèle que les zones dialectales de l’anglais vont probablement s’élargir, tandis que le nombre de variétés distinctes va se réduire.

Certains auteurs vont même jusqu’à dire qu’il est possible de diviser l’Angleterre en deux grandes zones linguistiques, en fonction de leur rapport au nivellement dialectal. C’est notamment l’avis d’Armstrong :

(i) Dans le sud de la Grande-Bretagne, serait en expansion la variété du sud-est que l’on nomme Estuary English, littéralement ‘anglais de l’sud-estuaire’. Ce terme renvoie à une variété d’anglais populaire à l’origine, et localisée au départ à Londres et le long des rives de l’estuaire de la Tamise. Certains traits, surtout consonantiques, de l’Estuary English se répandent partout, y compris dans la partie septentrionale du pays.

(ii) Dans la partie septentrionale du pays, les traits des parlers locaux céderaient le pas à une variété d’anglais largement distribuée au nord ; il s’agit surtout ici de traits vocaliques. (Armstrong 2002, p. 5–6)

Comment expliquer que le nivellement dialectal ait lieu à si grande échelle ? Pour Britain (2013), si l’on souhaite véritablement comprendre les dynamiques du

ment en Grande-Bretagne, il faut repenser la notion d’espace, telle qu’elle est envisagée en sociolinguistique. En effet, de même que d’autres concepts de sociolinguistique im-portés d’autres sciences, il s’agit d’une notion qui a évolué de manière considérable depuis sa création. D’après Britain, l’espace peut être euclidien, social, ou perçu :

1 Euclidean space — the objective, geometric, socially divorced space of mathematics and physics. When we measure the land area of New Zealand or the as-the-crow-flies distance from Portland to Pittsburgh, it is Euclidean space that we are measuring.

2 Social space — the space shaped by social organisation and human agency, by the human manipulation of the landscape, by the creation of a built environment and by the relationship of these to the way the state spatially organises and controls at a political level.

3 Perceived space — how civil society perceives its immediate and not so immediate environments — important given the way people’s environmen-tal perceptions and attitudes construct and are constructed by everyday practice (Britain 2013, p. 472).

Ces trois caractéristiques se combinent dans ce que Britain (ibid., p. 472) appelle la spatialité (spatiality ). Selon lui, le rapport des êtres humains à l’espace est très souvent, dans les faits, un rapport à la spatialité. Par exemple, l’espace euclidien, ou physique, aura une influence sur les espaces social et perçu : c’est le cas de nombreux obstacles naturels (montagnes, mers, etc.) qui marquent les frontières entre différentes nations. Il défend d’ailleurs une idée similaire dans Britain 2010 : il considère que les régions, qui sont centrales à la problématique du nivellement en Grande-Bretagne, ne sont pas des ensembles existant a priori, mais qu’elles sont formées et définies par les pratiques sociales. En conséquence, il ne s’agit pas d’ensembles fixes et intemporels, mais bien d’ensembles « en devenir », dont l’existence est remise en question, ou confirmée, par les activités humaines (ibid., p. 196).

En Angleterre, Beal donne un exemple frappant qui montre comment l’espace social a une influence essentielle sur l’espace perçu, ce qui entraîne à son tour un changement en termes d’identité, ou du moins dans la manière dont les locuteurs d’une localité se définissent. Lors de la réorganisation administrative liée au Local Government Act 1972 (implémenté en 1974), les frontières entre counties ont parfois été modifiées. L’un des changements majeurs a été la création des 6 metropolitan counties (Greater Manchester, Merseyside, South Yorkshire, Tyne and Wear, West Midlands et West Yorkshire), c’est-à-dire de larges aires urbaines, créées à partir du territoire des counties existant précédemment. Dans le cas particulier choisi par Beal, l’année 1974 a marqué le basculement de la ville de Warrington du comté du Lancashire vers celui du Cheshire (Beal 2010, p. 217). Ce qui pourrait sembler une réorganisation administrative anodine a en fait eu des répercussions inattendues, notamment parce que les deux comtés, comme le souligne Beal, avaient des images bien différentes :

Lancashire is viewed as a blue-collar, industrial county best represented in the works of the artist L.S. Lowry, whereas Cheshire is viewed historically as agricultural and more recently as an affluent commuter belt for Manchester and Liverpool. Lancashire is perceived as northern, whilst Cheshire, at least to some, is considered a midland county (ibid., p. 217).

Des membres de la même famille, s’ils ne sont pas de la même génération, peuvent donc être nés dans la même ville mais deux comtés différents. En réaction à ce changement administratif, Beal (ibid., p. 218–219) rapporte que plusieurs associations continuent de clamer l’appartenance de Warrington au Lancashire, bien que la plupart des membres de la jeune génération ne ressentent pas un attachement particulier à l’ancien comté. Une autre conséquence de ce changement touche la dialectologie perceptuelle, c’est-à-dire la manière dont les dialectes sont perçus par des locuteurs naïfs. Beal (ibid., p. 219– 221) souligne qu’un grand nombre d’ouvrages de référence en dialectologie anglaise font usage des comtés traditionnels (pré-réforme de 1974), ce qui n’est pas étonnant si l’on se réfère à l’époque à laquelle ils ont été publiés. C’est par exemple le cas de Wright 1898–1905 et Orton et al. 1962–1978. Encore aujourd’hui, de nombreuses associations de sauvegarde des accents ou dialectes adoptent dans leur nom une référence aux comtés traditionnels, telles que la Northumbrian Language Society ou les Friends of the Norfolk Dialect, toutes deux fondées dans le dernier quart du xxesiècle (Beal 2010, p. 220). Néanmoins, des recherches récentes en dialectologie perceptuelle (Montgomery 2006 ; Montgomery 2012) ont montré que les jeunes locuteurs, lorsqu’on leur soumet la tâche de noter sur une carte vierge les différents accents ou dialectes qu’ils connaissent, n’utilisent pas les noms des comtés traditionnels comme étiquettes, mais s’inspirent plutôt des aires urbaines. Ainsi, dans l’une des études utilisées par Montgomery (2012), un total de 274 adolescents et jeunes adultes, issus de trois localités différentes (Carlisle, Crewe et Hull) est confronté à une carte sur laquelle ne se trouvent que quelques marqueurs indiquant des villes importantes du Royaume-Uni. Leur tâche consiste à la remplir, à partir des questions suivantes :

1. Label the well-known cities marked with a dot on the map.

2. Do you think that there is a North-South language divide in the country? If so, draw a line where you think this is.

3. Draw lines on the map where you think there are regional speech (dialect) areas.

4. Label the different areas that you have drawn on the map.

5. What do you think of the areas you’ve just drawn? How might you recognise people from these areas? Write some of these thoughts on the map if you have time (ibid., p. 645–646).

Les résultats (que nous reproduisons en table 3.4) sont éloquents : rares sont les comtés traditionnels mentionnés, et seul le Yorkshire est nommé par les trois groupes. Les réponses qui occupent le haut du tableau (Geordie, Scouse, Brummie, Manc,

Table 3.4 – Tableau regroupant les résultats de l’enquête de perception (d’après Montgomery 2012, p. 648)

Cockney ) sont des variétés associées à des aires urbaines bien connues d’Angleterre. Les résultats du travail de Montgomery poussent Beal à conclure que les aires urbaines sont devenues de véritables marqueurs d’identité linguistique pour les jeunes générations aujourd’hui :

with the exception of Yorkshire, which seems to maintain its salience and perceptual prominence, the counties (traditional or modern) of England do not serve as markers of linguistic identity for young people, being replaced by major conurbations or by larger regions such as East Anglia or the West Country (Beal 2010, p. 220–221).

Se pourrait-il néanmoins qu’il s’agisse seulement d’un changement au niveau de la perception des accents ? Un premier élément de réponse est à trouver dans les travaux de Llamas sur l’anglais de Middlesbrough (Llamas 2001 ; Llamas 2007). Il s’agit d’une ville du nord-est de l’Angleterre, située à proximité de deux autres aires urbaines plus importantes : Newcastle à environ 60 kilomètres au nord, et Hull à plus de 140 kilo-mètres au sud (Llamas 2001, p. 51–52). En outre, Llamas souligne que Middlesbrough est une localité qui a été particulièrement affectée par les réorganisations administra-tives au cours du xxe siècle. Traditionnellement, elle faisait partie du North Riding of Yorkshire, et la rivière Tees, située immédiatement au nord de la ville, marquait la frontière entre le North Riding of Yorkshire et le County of Durham (ibid., p. 53–54). Néanmoins, la création du County Borough of Teesside en 1968 changea la situation, puisque la conurbation qui occupait les deux rives de la Tees fut unifiée d’un point de vue administratif : Middlesbrough se retrouvait donc associée à des localités qui dépendaient jusqu’alors du County of Durham. La situation ne dura guère, puisqu’un

autre changement survint dès 1974, lors de l’application du Local Government Act 1972, qui vit la dissolution du County Borough of Teesside, remplacé par le County Cleveland. Une trentaine d’années plus tard, de nouvelles divisions furent créées à l’in-térieur du comté, et Middlesbrough (ainsi que Hartlepool, Stockton-on-Tees et Redcar and Cleveland) devint l’équivalent d’un comté avec l’obtention du statut de unitary authority par le Middlesbrough Borough Council en 1996 (ibid., p. 55–56). Comme le note Llamas, Middlesbrough aura connu 4 identités administratives en moins de trente ans. La situation est d’ailleurs toujours singulière aujourd’hui, puisqu’elle ajoute :

Despite lying on the south bank of the River Tees and therefore having an association with Yorkshire for ‘cultural and ceremonial purposes’ (Moorsom 1996: 22), in economic terms Middlesbrough is the centre of the sub-region of the Tees Valley, which is part of the larger region of the North East. This region can be seen to include the conurbations along the Rivers Tyne, Tees and Wear (where 70% of the population live) and communities in Durham and rural Northumberland. Middlesbrough’s position in the North East is made manifest by its inclusion in the first Regional Economic Strategy ‘One North-East’ which is a ‘blueprint for a better regional future in the next millennium’ (1999: 4) (ibid., p. 56).

Pour son enquête de terrain, Llamas a enregistré 32 locuteurs issus de la classe ouvrière de Middlesbrough, et se revendiquant comme tels (Llamas 2007, p. 585). Lors des entretiens, les enquêtés devaient aussi remplir un questionnaire appelé Identifica-tion QuesIdentifica-tionnaire comportant des quesIdentifica-tions sur l’attitude des locuteurs envers leur accent et leur région (voir table 3.5 pour quelques exemples de questions posées par Llamas). Les trois variables sélectionnées pour l’étude étaient (p), (t) et (k), car elles possèdent toutes plusieurs variantes dont la répartition est intéressante d’un point de vue sociolinguistique : « All three plosives, (p), (t) and (k), can be realized with fully released variants, glottalled variants, [P], or glottalized forms (also referred to as glot-tal reinforcement) (usually transcribed as a double articulation, [Pp], [> Pt], [> Pk] or [> pP],> [tP], [> kP]) » (ibid., p. 586). Llamas souligne en effet que les variantes glottalisées de> (p), (t) et (k) en position médiane de mot sont souvent associées à l’anglais du nord-est de l’Angleterre, puisque de telles prononciations ont été observées à Newcastle et à Durham. En revanche, ces variantes sont absentes des variétés du Yorkshire (ibid., p. 586–587). Par ailleurs, la variante [P] (le coup de glotte) pour /t/ est généralement considérée comme une variante présente à l’échelle nationale dans les variétés des aires urbaines17.

Après analyse, Llamas constate, chez les jeunes locuteurs, la présence de variantes glottalisées pour les trois variables étudiées. Elle note également une diminution de

17. Comme d’autres auteurs, Llamas opère une distinction entre glottalization d’une part (c’est-à-dire le renforcement des plosives par une consonne glottale) et glottaling d’autre part (la réalisation d’une plosive par un coup de glotte).

Table 3.5 – Exemples de questions posées dans le Identification Questionnaire (d’après Llamas 2007, p. 587)

Figure 3.6 – Définition de l’accent en fonction de l’âge (d’après Llamas 2007, p. 596)

l’utilisation des variantes standard et/ou associées avec le Yorkshire (soit [p], [t] et [k]). Ces résultats sembleraient indiquer une convergence vers les variétés du nord-est, puisque l’usage des variantes de cette zone linguistique est en augmentation chez les jeunes locuteurs de Middlesbrough. Pourtant, une autre variante est la plus répandue pour (t) : c’est le coup de glotte, variante qui n’est pas associée avec le nord-est (Llamas 2007, p. 593–596). Llamas se tourne alors vers son questionnaire, afin d’explorer plus en détail le lien entre identité et variantes utilisées. Elle se penche notamment sur la manière dont les locuteurs ont défini leur propre accent (les résultats sont reproduits en figure 3.6). Seule la génération la plus âgée (O) utilise le terme Yorkshire pour décrire son accent, et la réponse qui remporte la majorité des voix pour les enquêtés les plus jeunes (Y) est Middlesbrough. Comme le souligne Llamas (ibid., p. 596), il est intéressant de noter que le changement d’appellation de l’accent en fonction des générations (Yorkshire, puis Teesside pour finir par Middlesbrough) semble suivre les tribulations administratives de la région. Parmi les deux générations les plus âgées (O et M), 14 locuteurs sur 16 se disent capables d’identifier un accent de Middlesbrough, quand les locuteurs les plus jeunes ne sont que 10 sur 16, alors même qu’onze d’entre eux ont identifié leur propre accent comme étant caractéristique de Middlesbrough. Llamas (ibid., p. 597) prend notamment le cas de deux jeunes locutrices qui justifient leur réponse négative par une incapacité à distinguer leur propre accent du Geordie. Par ailleurs, Llamas rapporte qu’à la question 5 de son Identification Questionnaire (« Would you consider Teesside to be in a larger “north-eastern” part of the country or a larger “Yorkshire” part of the country? Why? »), l’intégralité des enquêtés ont répondu qu’il faisait partie d’une région nord-est.

Malgré ces résultats, nombre de jeunes locuteurs (13 sur 16) indiquent néanmoins qu’ils n’apprécient pas que leur accent soit confondu avec le Geordie. Cette défiance envers Newcastle est pour Llamas symbole d’une rivalité entre les deux villes pour les locuteurs les plus jeunes, et les réponses pour ce qui est du derby de football reflètent cette situation : 26 enquêtés mentionnent Newcastle ou Sunderland, et seuls 6 répondent Leeds (qui se situe dans le West Yorkshire), et cette dernière réponse est

généralement accompagnée de remarques spécifiant qu’il s’agit d’un derby de moindre envergure, ou que l’époque de ce derby est révolue (Llamas 2001, p. 213–214).

Tous ces résultats poussent Llamas à conclure qu’il y a une certaine convergence vers les variétés du nord-est pour les variables (p) et (k). Néanmoins, il ne s’agirait pas d’une convergence vers la variété de Newcastle, puisque, d’une part, celle-ci est évaluée négativement par les sujets de l’enquête, et, d’autre part, la variante la plus répandue pour (t) est une variante qui n’est pas associée avec le Geordie. Cette situation est due, selon Llamas, à l’avènement de Middlesbrough en tant qu’aire urbaine, ce qui en fait une localité dont les locuteurs les plus jeunes peuvent se réclamer, sans devoir faire référence aux villes plus importantes aux alentours, ni au comté traditionnel dont dépendait autrefois Middlesbrough :

These convergent and divergent trends uncovered in the voiceless stops in MbE are concurrent with an increased confidence expressed by young speakers in the status of Middlesbrough both in terms of its accent and in terms of it as a “place.” For the young speakers, Middlesbrough is not part of a larger Yorkshire region, as it is for the old speakers, nor is it a place without an identity, as it is for the middle speakers. Rather, for the young speakers of the sample the identity of the urban center is simply Middlesbrough (Llamas 2007, p. 601–602).

Il est d’ailleurs pertinent de se pencher sur certaines études récentes sur Newcastle (Watt 1998 ; Watt 2002). Comme le souligne l’auteur, le Tyneside est généralement décrit comme une région coupée du reste du pays de par son isolement géographique. Elle a souvent l’image d’une zone homogène d’un point de vue ethnique, puisque Newcastle a accueilli peu de migrants originaires d’ailleurs que des Îles Britanniques, comparativement à d’autres villes de taille équivalente : Watt, citant Barke (1992), rapporte qu’en 1971, les nouveaux venus originaires du Commonwealth ne représentait que 1,3 % de la population alors que les mêmes chiffres pour Birmingham et Bradford s’élevaient respectivement à 6,7 % et 7,1 % (Watt 2002, p. 50). Néanmoins, plusieurs auteurs ont souligné l’importance de l’immigration à Newcastle, et le rôle des indus-tries dans la région, notamment au cours du xixe siècle : en 1851, plus de la moitié de la population de Newcastle était née ailleurs (ibid., p. 50), et la ville possédait la quatrième communauté irlandaise la plus importante d’Angleterre (ibid., p. 52). De plus, la proximité géographique avec l’Écosse a eu une influence non négligeable sur la population. Ces facteurs dressent donc un portrait bien différent de la vision tra-ditionnelle de Newscastle, qui est loin d’être une zone homogène d’un point de vue linguistique et démographique (ibid., p. 53).