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4. Analyse et discussion des résultats

4.8 Les vêtements et accessoires

Concernant les vêtements, ils apparaissent comme une source non négligeable de variabilité entre les sexes. Ce même constat s’applique aux accessoires qui complètent la tenue vestimentaire du personnage.

4.8.1 Des habits à connotation masculine ou féminine

Si les descriptions sont peu nombreuses au sein des textes, les illustrations permettent de voir le type de vêtements portés par le personnage enseignant. Rappelons qu’un « vêtement est considéré comme plus spécifique d’un sexe s’il apparait au moins chez 10% des personnages et si son taux d’apparition est au moins deux fois plus élevé chez un sexe que chez l’autre » (Ferrez, 2002, p. 20). Dans le cas de cette recherche, il apparait comme évident que les vêtements sont une source de variabilité entre les sexes.

TABLEAU 13. – APPARITION DES TYPES VESTIMENTAIRES SELON LE SEXE DE L’ENSEIGNANT-E

Caractéristique

vestimentaires Hommes Femmes

Cravate ou nœud papillon 50% -

Complet 37,5% -

Jupe - 44,4%

Chemise/Blouse 37,5% 35,6%

T-shirt 12,5% 24,4%

Robe - 20%

Pantalons 25% 24,4%

Salopette 12,5% -

Pull 12,5% 20%

Soulier à talons - 22,2%

Tablier - 13,3%

Les hommes sont représentés presque toujours habillés avec un costume foncé complété d’un nœud papillon ou d’une cravate, vêtement spécifiquement réservé aux hommes. Les femmes, quant à elles, si elles abordent parfois des vêtements considérés comme unisexes tels que le pantalon, le t-shirt ou le pull ; les jupes, les robes et les souliers à talons considérés comme typiquement féminins, sont prépondérants. Les personnages sont, par conséquent, fréquemment affectés de caractéristiques vestimentaires sexuées. Ces mêmes constats se retrouvent dans l’étude de Ferrez (2002). En effet, « plus spécifiquement chez les hommes, on trouve les pantalons, les chemises, les cravates » alors que chez « les femmes, les vêtements

spécifiques sont les jupes, les robes, les souliers à talons » (p. 22). Même constat dans l’étude menée par l’association Du côté des filles en 1997 qui révèle que ces dernières « sont habillées dans un style "féminin" (78%) ou "ultra-féminin" - nœuds, fanfreluches - (4%). 18%

seulement sont habillées "unisex" » (p. 8). Si le tablier est porté par 6,5% des femmes, cela inclut tant le tablier domestique féminin à dentelle, que « le grand tablier à encolure carrée et en tissu uni (qui) signifie souvent, lorsqu’un homme ou un animal mâle le porte, qu’il s’agit d’un artisan » (Du côté des filles, 1998, p. 4). Ici, c’est toujours l’enseignante qui le porte afin de se protéger lors des activités artistiques de peinture et donc le plus souvent à usage professionnel.

Quelques remarques s’imposent toutefois quant à la spécificité sexuée d’un vêtement. Ainsi, si la robe est de nos jours, en Occident, un vêtement presque exclusivement féminin, plusieurs cultures la considèrent comme un vêtement traditionnel masculin, notamment dans les pays islamiques. De même que la jupe, qui selon les cultures, est portée préférentiellement par les hommes (kilt) ou par les femmes. Au sein des albums étudiés, les talons sont portés uniquement par des femmes. Toutefois, il existe différents modèles de bottes et chaussures que les deux sexes peuvent habituellement porter (bottes de cowboy). Si ces trois habits apparaissent, dans cette recherche comme spécifiquement féminins, cela ne semble pas être le cas dans toutes les cultures. Alors que le complet, composé d’une veste, d’un pantalon et parfois d'un gilet, porté avec une chemise et une cravate, est un vêtement considéré comme typiquement masculin, car, historiquement, il est rare que des femmes le portent. Il en est de même pour la cravate qui reste un élément de la tenue habituelle, voire règlementaire, de certaines professions masculines. Ainsi, s’il est possible aujourd’hui que certains vêtements soient réservés aux hommes ou aux femmes, n’oublions pas qu’ils varient selon l’histoire, les religions et les cultures.

4.8.2 Les lunettes, l’accessoire incontournable

Du côté des accessoires, suite à l’analyse du tableau suivant, le constat semble le même : de fortes distinctions de genres existent. Les lunettes est l’accessoire qui a le plus de succès (vingt-deux enseignant-e-s). « Les lunettes complètent la signification du porte-documents : elles sont le métier "intellectuel", le savoir et l’autorité, et prêtent au personnage intelligence ou profession » (Du côté des filles, 1998, p. 4). Il semble donc logique que les lunettes soient autant représentées dans les albums puisqu’elles associent à la figure enseignante le métier qu’elle exerce.

TABLEAU 14. – APPARITION DES TYPES D’ACCESSOIRES SELON LE SEXE DE L’ENSEIGNANT-E

Accessoires Hommes Femmes

Lunettes 62,5% 37,8%

Bijoux - 31,1%

Chapeau 12,5% 13,3%

Sac-cartable 25% 13,3%

Accessoires cheveux - 13,3%

S’il est nettement moins présent dans les images, le sac prend parfois la forme de sac-à-main, de sac-à-dos ou de cartable d’école. Dans ce dernier cas, il symbolise le travail intellectuel ou commercial et sert à faire d’une femme, une enseignante. Il semblerait toutefois que cet accessoire soit plus facilement associé au sexe masculin. De l’étude faite par l’association Du côté des filles (1998) en soumettant aux enfants deux images, l’une où un homme porte un cartable, l’autre une femme portant un cartable, il en ressort que la majorité des enfants reconnaissent des adultes qui travaillent, mais leur imaginent des professions de niveaux différents en s’appuyant sur une différence supposée dans la forme de leur cartable : « Par rapport à ce que je vois dans les livres, c’est tout le temps les papas qui sont directeurs. La maman est en train de faire la cuisine. Ou elle est secrétaire » (p. 11).

A propos des bijoux, comme le montre le tableau 8, ils restent l’apanage exclusif des personnages de sexe féminin. De même que chez Ferrez (2002), où les bijoux et accessoires pour les cheveux sont réservés uniquement aux femmes. D’ailleurs, « Les codes de leur féminité : maquillage, chevelure, habillement, ont été fabriqués […] à l’intérieur d’une culture

"fille", avec des journaux "filles", des "féminins", tout une longue histoire » littéraire qui perdure à travers les albums de jeunesse (Butler, citée par Joignot, 2006, p. 22). Il semblerait que les personnages soient perçus, par défaut, comme des hommes et que les différents artifices ornementaux viennent confirmer la présence d’une femme. D’ailleurs, face aux images non clairement sexuées, les enfants choisissent plutôt d’y associer un sexe masculin qu’un sexe féminin comme s’il était admis que le celui-ci soit prépondérant dans les albums de jeunesse. Cela est confirmé par la surreprésentation des caractéristiques pour justifier la présence d’un personnage féminin. (Ferrez, 2002).

En conclusion, les personnages enseignants, tels qu’ils sont représentés dans les albums, se rapprochent de la réalité où, grâce aux vêtements ou aux accessoires, chacun mime son genre.

Voyez ces hommes, ils déclinent le dress code des employés mâles, le costume, la cravate, les cheveux courts. Ce garçon, plus loin, porte des bijoux, les cheveux

plus longs, mais il reste habillé en homme. Il ne porte pas des hauts talons ou une perruque, comme un homme de cour au XVIII siècle. Ils sont en représentation sans le savoir, ils jouent l’homme contemporain, cela se répercute jusque dans les détails, leur parfum pour homme, la montre d’homme. Devenir un homme est une performance quotidienne répétitive. Et une femme aussi. (Butler, citée par Joignot, 2006, p. 22).

Ainsi, comme dans la vraie vie, les albums respectent les codes vestimentaires fabriqués par la culture, afin que le genre soit immédiatement reconnaissable de la part des enfants qui assimilent les codes qu’ils devront reproduire à leur tour.