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L’utilisation des plantes fourragères

Chapitre 2 Revue de la documentation scientifique

2.4 Facteur influençant la concentration en acide α-linolénique du lait

2.4.2 Nutrition

2.4.2.2 L’utilisation des plantes fourragères

Lors d’une méta-analyse, Khiaosa-Ard et al. (2015) ont évalué l’effet de la source d’AAL (concentré, pâturage ou ensilage) sur la concentration de cet AG dans le lait des vaches. Dans la Figure 2-4, il est possible de constater que la meilleure façon d’enrichir le lait en AAL est d’envoyer les vaches au pâturage, puis de leur servir une ration constituée de fourrages conservés et, finalement, leur servir une ration constituée de concentrés lorsque la concentration en AAL de la ration est inférieure à 0,75 % sur une base de matière sèche (MS). Lorsque la concentration en AAL est supérieure à 0,75 %, ce sont les rations constituées à partir de fourrages conservés et servi à l’intérieur qui permettent d’obtenir la concentration en AAL dans le lait la plus élevée. Ferlay et al. (2006) ont évalué différents types de rations de base sur le profil en AG du lait de vaches Tarentaises et Montbéliardes (Figure 2-5). Il est possible de constater que les fourrages de montagnes permettent

Figure 2-4 Concentration d’acide α-linolénique, en g/ 100 g d’acide gras, dans le lait en fonction de la concentration d’acide α-linolénique (% MS) dans la ration. Ration composée principalement de pâturage (•), de fourrage servi à l’intérieur (Δ) et de concentré servi à l’intérieur (0). La Figure 2-4 présente la moyenne ajustée et la pente de régression pour chaque type de ration

[pâturage (—), fourrage servi à l’intérieur (· · ·) et ration riche en concentré

servi à l’intérieur (– –)]. Adaptée de Khiaosa-Ard et al. (2015) avec la

permission de Elsevier.

L’utilisation de fourrage est un moyen efficace pour augmenter la concentration en AAL du lait, mais plusieurs facteurs peuvent influencer la concentration en AAL des fourrages (Boufaïed et al., 2003), ce qui affectera du même coup celle du lait. Les prochains paragraphes aborderont les facteurs influençant la concentration en AAL des fourrages.

Figure 2-5 Concentration en 18:3 c9c12c15 du gras du lait de vache Tarentaises et Montbéliardes, en fonction de la ration de base, à partir des données de Ferlay et al. (2006). b a c c d 0 0.5 1 1.5

Concentré Ensilage maïs Ensilage

raygrass

Foin raygrass Foin

montagne C o nc ent ra ti o n e n 18: 3 c9 c12 c15 g /100 g A G

2.4.2.2.1Concentration en acide α-linolénique dans les plantes fourragères

Lors d’une récente méta-analyse sur la composition en AG des plantes fourragères, Glasser et al. (2013) ont déterminé les facteurs affectant leur teneur en AAL. Lorsque différentes graminées sont comparées, la concentration en AAL est plus élevée pour le ray-

grass (Lolium perenne; 61,0 ± 7,32 g/100 AG) tandis que la fléole des prés (Phleum pratense L.) possède la valeur la plus faible (49,9 ± 3,94 g/100 g AG). La fétuque (Festuca sp.) et le dactyle (Dactylis glomerata) ont des valeurs intermédiaires. Pour ce qui est des

légumineuses, le trèfle blanc (Trifolium repens) possède la plus forte concentration en AAL (58,0 ± 5,51 g/100 AG) alors que la luzerne (Medicago sativa) possède la plus faible concentration (41,7 ± 5,81 g/100 d’AG) et que le trèfle rouge (Trifolium pratense L.; TR) présente une concentration de 49,0 ± 9,11 g/100 d’AG. Tant pour les valeurs des graminées que pour celles des légumineuses présentées précédemment, les teneurs sont celles de fourrages frais puisque les concentrations en AAL sont supérieures pour ces fourrages (suivis des ensilages et du foin). La diminution en AAL durant le séchage des plantes fourragères serait due à la lipolyse, l’oxydation des AGPI et la perte de feuillage (Molloy et al., 1974; Dewhurst et al., 2006).

Le stade de développement et la période de l’année affectent le profil en AG des plantes fourragère. La Figure 2-6 illustre la concentration en AAL selon la saison de croissance pour l’hémisphère nord et les climats tempérés. On retrouve une diminution de la concentration en AAL de début mai à début juillet avant qu’elle ne remonte en septembre, ce qui correspond aux phases de recroissance des plantes. De plus, lors de l’analyse de l’effet de l’intervalle entre les coupes de ray-grass, la concentration en AAL diminue avec la durée des intervalles. Le changement de concentration en AAL durant le stade végétatif serait dû à la diminution de la proportion de feuilles qui sont riches en AAL (Buccioni et al., 2012).

Figure 2-6 Relations entre la concentration 18:3 c9c12c15 dans les fourrages et la période de l’année, adaptée de Glasser et al. (2013) avec la permission de Elsevier.

La concentration en AAL des plantes fourragères est directement reliée à la quantité d’organes végétatifs qui sont à la fois riches en AGPI et en protéines (Boufaïed et al., 2003). Il a été démontré, dans la méta-analyse de Glasser et al. (2013), que la concentration en AAL augmente de façon quadratique lorsque la concentration en protéine brute (PB) passe de 8 à 20 % MS, et ce, selon l’équation suivante :

18:3 c9c12c15 (g/100 g d’AG total) = 41,46 + 2,23 PB – 0,050 PB2

(n = 82; RMSE = 3,26)

Quant à la fertilisation azotée, elle a un effet positif sur la concentration en AAL : 18:3 c9c12c15 (g/100 g d’AG total) = 58,53 + 0,033 unité d’N appliquée

(n = 34; RMSE = 1,54)

L’ensilage de maïs est majoritairement une source d’AL étant donné la concentration élevée de cet AG dans l’épi. Sa concentration en AAL est quant à elle reliée à la concentration en MS de l’ensilage selon le modèle suivant :

18:3 c9c12c15 (g/100 g d’AG total) = 15,6 – 0,0285 MS (g/kg poids humide)

2.4.2.2.2 Composés botaniques réduisant la biohydrogénation

La concentration initiale d’AAL dans les fourrages n’est pas l’unique facteur déterminant l’efficacité du transfert de l’AAL dans le lait. Les plantes fourragères peuvent contenir des composés botaniques qui affectent la fermentation de l’ensilage, la lipolyse et la BH dans le rumen. Les tannins sont un groupe hétérogène de polyphénols solubles dans l’eau qu’il est possible de retrouver dans les arbres, les buissons, les légumineuses, les graminées et les céréales (Patra et Saxena, 2009). Les tannins sont divisés en deux familles, soit les tannins hydrolysables (p. ex. ceux de l’ail, Allium sativum) et les tannins condensés (p. ex. ceux du lotier cornulier, Lotus corniculatus L.). L’inclusion de tannins dans la ration des ruminants a pour effets d’inhiber la croissance bactérienne responsable de la protéolyse (Burggraaf et al., 2008) et de la dernière étape de la BH, ce qui engendrerait une accumulation d’AVT (Khiaosa-Ard et al., 2009). La saponine, un autre composé qui peut être retrouvé dans la luzerne, a aussi montré des effets sur le microbiome du rumen (Patra et Saxena, 2009), mais sans affecter le profil en AG du lait (Benchaar et Chouinard, 2009).

La polyphénol oxydase (PPO) est un autre composé botanique. Cette enzyme se retrouve dans le TR et son activité a pour conséquence de modifier la valeur nutritive de ce fourrage pour les ruminants (Jones et al., 1995). D’un point de vue biologique pour la plante, la PPO sert de moyen de défense contre les agresseurs ou les lésions (Thipyapong et Steffens, 1997). Un des mécanismes protection proposé est une réduction de la valeur nutritive des plantes par la création de lien covalent avec les protéines (Felton et al. 1989) ce qui réduirait la disgestibilité des protéines pour les insectes herbivores. Par son activité, cette enzyme est responsable du développement de la couleur brunâtre des végétaux lorsqu’ils sont endommagés (Yoruk et Marshall, 2003). La PPO agit comme catalyseur dans une réaction chimique qui transforme les diphénols en quinones (Yoruk et Marshall, 2003). Par la suite, les quinones produites se lient aux protéines pour réduire leur dégradabilité ruminale (Jones et al., 1995). Les quinones permettraient ainsi d’encapsuler les AGPI dans une matrice de protéines devenues moins dégradables, ce qui aurait pour effet de protéger ces AG contre la BH par les micro-organismes du rumen (Van Ranst et al., 2011).

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