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Digestion et métabolisme des lipides

Chapitre 2 Revue de la documentation scientifique

2.3 Digestion et métabolisme des lipides

Une fois la BH terminée dans le rumen, les AG quittent le rumen sous forme de sels de calcium (85 %), d’AGL (12 %) et d’AG estérifié (3 %; Finn et al., 1985) pour se diriger vers l’abomasum. Ils sont par la suite dissociés dans le milieu acide de l’abomasum (Sukhija et Palmquist, 1990). À la sortie de l’abomasum, 90 % des lipides entrant dans les intestins sont des AG saturés sous forme non estérifiée. Tandis que les AG inférieurs à 12 atomes de carbone peuvent être absorbés par la paroi ruminale, les AG à plus longue chaîne sont quant à eux attachés aux particules alimentaires dans une proportion de 80 à 90 % (Leat et Harrison, 1969). La proportion restante est soit sous forme de TAG, de PL et de GL qui sont hydrolysés par les enzymes pancréatiques à partir du mi-jéjunum

puisque le pH du duodénum est trop faible pour permettre aux enzymes du pancréas d’agir (Arienti et al., 1974). Cette période d’inactivité des enzymes pancréatiques a pour effet de réduire l’absorption des TAG contrairement à celle des AGL (Harrison et al., 1974). Le faible pH du digesta dans le duodénum, qui est spécifique au ruminant, a comme bénéfice de réduire la formation de sels de Ca et ainsi d’augmenter l’absorption des AG.

Avant que l’absorption puisse avoir lieu, la bile et les sécrétions pancréatiques sont ajoutées au digesta. Ces dernières ajouts sont toutes nécessaires à la solubilisation des AG puisqu’en fournissant les sels biliaires et la lécithine, les enzymes vont convertir la lécithine en lysolécithine et le bicarbonate va augmenter le pH. Les sels biliaires et la lysolécithine désorbent les AG des particules alimentaires et des bactéries (Moore et Christie, 1984). Une faible partie des AG (15 à 25 %) est absorbée dans la partie proximale du jéjunum où le pH se situe entre 2,8 et 4,2 tandis que 55 à 65 % des AG restants sont absorbés dans les parties moyenne et distale du jéjunum.

La digestibilité moyenne des AG est de 74 % avec une variation de 58-86 % (intervalle de confiance de 95 %; Lock et al., 2006), mais cette digestibilité varie selon le type d’AG. Chez les non-ruminants, la digestibilité des AG diminue avec la longueur de la chaîne carbonée et augmente avec le nombre de doubles liaisons (Lessire et al., 1992). Pour les ruminants, la digestibilité diminue avec la longueur de la chaîne carbonée. À l’inverse des non-ruminants, la digestibilité des AG chez le ruminant diminue avec le nombre de doubles liaisons avec des digestibilités de 75, 72, 80, 78 et 77 % pour les AG respectifs 16:0, 18:0, 18:1, 18:2 et 18:3 (Lock et al., 2006).

L’absorption des AG chez les ruminants et les non-ruminants est différente en plusieurs points. Premièrement, chez le ruminant, la bile est caractérisée par une forte concentration en acides biliaires avec de la taurine conjuguée, tout le contraire des humains où l’acide biliaire contient majoritairement de la glycine conjuguée (Noble, 1981). Un surplus d’acide biliaire conjugué avec de la taurine permet une meilleure solubilisation des AG en milieux acides puisqu’à un pH de 2,5, ces derniers restent solubles et conservent une partie de leur charge ionique. Les acides biliaires conjugués avec de la glycine sont, quant à eux, insolubles et possèdent peu de charges ioniques (Moore et Christie, 1984).

Une autre différence entre non-ruminants et ruminants est la source de l’agent amphiphile qui permet la formation des globules de gras. L’agent amphiphile chez les ruminants est le lysolecithine tandis que chez les non-ruminants, il s’agit des monoacylglycerols (Davis, 1990). Les agents amphiphiles servent à former la membrane de la micelle de gras et permettent la formation d’un noyau hydrophobique de plus grande taille pour loger les substances non polaires (Freeman, 1984). Puisque les longues chaînes d’AG saturées ne sont pas des agents amphiphiles, elles doivent être absolument incorporées à l’intérieur du noyau hydrophobique pour être absorbées. Dans le cas des ruminants où la majorité des lipides qui atteignent l’intestin sont non estérifiés et saturés, ces animaux se sont adaptés en produisant de la lysolecitine comme agent amphiphile pour assurer l’absorption des AG saturés.

2.3.2 Transport

Comme chez les humains, le transport des lipides chez les bovins laitiers à partir des intestins ou du foie se fait sous forme de lipoprotéines. Cependant, les lipoprotéines jouent un différent rôle dans l’utilisation et la disponibilité des lipides chez les ruminants. Comme résumé par Bauchart (1993), les lipoprotéines ont un rôle majeur dans la distribution des lipides entre les muscles, le foie, la glande mammaire et les tissus adipeux. Les lipoprotéines sont subdivisées selon leur densité. Ainsi, on retrouve, de la plus faible à la plus grande densité, les chylomicrons, les lipoprotéines de très basse densité (LTBD), les lipoprotéines de densité intermédiaire (LDI) et les lipoprotéines de haute densité (LHD).

Au contraire de ce qu’il est possible de constater chez l’humain, le transport des lipides via le canal lymphatique se fait à la fois sous forme de chylomicrons et de LTBD. Chez l’humain, le transport se fait uniquement par les chylomicrons. La répartition des chylomicrons et des LTBD dans la lymphe varie selon le degré d’insaturation des AG absorbés et est indépendante de la maturité de l’animal. Lors d’une expérimentation avec une brebis possédant un cathéter connecté dans le canal thoracique, il a été possible d’observer, dans des conditions normales d’alimentation, que 72,6 % des lipides lymphatique étaient sous forme de LTBD et 27,4 % sous forme de chylomicron. Par contre, après la perfusion d’huile de maïs, durant 24 h dans le canal duodénal (2 g/h), 38,5 % des lipides lymphatiques étaient sous forme de LTBD et 61,5 % sous forme de chylomicron

(Harrison et al., 1974). Cette production de LTBD par les intestins fait en sorte que la production par le foie est inférieure aux niveaux observés chez les humains (Bauchart, 1993). Selon Chilliard et al. (1992), une ration riche en gras a pour effet de prioriser le transport des LTBD par la veine par rapport au transport par le système lymphatique.

Les LHD possèdent un rôle important dans le transport des lipides chez les ruminants, car les elles représentent plus de 80 % des lipoprotéines (Jonas, 1972). Chez les humains, les LDI sont majoritaires avec une proportion supérieure à 55 %. Comme pour les humains, les LHD chez les ruminants servent au transport du cholestérol dans le sang vers le foie pour être réincorporés dans les LTBD. L’importance des LHD est encore plus marquée chez les ruminants puisque ces derniers ont un faible transfert de l’esters de cholestérol (EC) dans le plasma (Haa et Barter, 1982) et une faible activité des lipases hépatiques (Etienne et al., 1981), ce qui rend les LHD essentielles pour le transport des EC (chez les humains, les EC sont transportés via les LBD).

2.3.3 Métabolisme hépatique des acides gras

Bien que la BH soit la cause principale de la faible concentration en AGPI dans le

lait, elle n’est pas la seule. Le métabolisme hépatique des AG ω-3 est un second obstacle au

transfert de ces AG de la ration aux sécrétions lactées. Stamey Lanier et al. (2013) ont réalisé des perfusions par voie intraveineuse d’une émulsion de TAG riches en AAL à des vaches en lactation. Cette approche expérimentale a été élaborée pour favoriser un transfert efficace des lipides perfusés vers le lait, car la glande mammaire des bovins prélève majoritairement les AG sous forme de TAG et peu sous forme de PL. Or, dans cette

expérience de Stamey Lanier et al. (2013), la perfusion d’AAL sous forme de TAG a

conduit à une augmentation de la concentration de cet AG dans les PL plasmatiques chez la vache, suggérant ainsi une réestérification par le foie. L’efficacité du transfert des AAL perfusés vers les sécrétions lactées, dans ces conditions, a été d’environ 38 %.

2.4 Facteur influençant la concentration en acide α-linolénique du lait

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