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Utilisation des méthodes « omics » pour déterminer le besoin en protéines et AAI

1. Chapitre I Introduction bibliographique

1.2. Méthodes de détermination du besoin en protéines et acides aminés

1.2.5. Utilisation des méthodes « omics » pour déterminer le besoin en protéines et AAI

être améliorées afin de préciser la valeur du besoin et pouvoir déterminer des recommandations nutri- tionnelles. Les protocoles expérimentaux mis en place jusqu’à présent sont lourds, invasifs et les valeurs de besoins obtenues restent imprécises. Il est donc nécessaire de développer des approches plus précises et moins invasives. La FAO a établi différentes caractéristiques pour la mise au point de nouvelles mé- thodes permettant de préciser la valeur du besoin en AAI [28]. Ces méthodes doivent être directement applicables à l’homme, à différents stades de la vie, et dans différentes conditions physiopathologiques. Leur coût doit être raisonnable, et elles doivent être le moins invasives possibles. Une des nouvelles approches qui a ainsi été proposé par la FAO, et l’utilisation des « omics » [28].

Les technologies dîtes « omics » sont des études à haut débit permettant de générer de grandes quantités de données à différents niveaux biologiques. Elles comprennent la génomique, la transcriptomique, la protéomique, la métabolomique ou encore la lipidomique. Ces approches permettent d’obtenir de nom- breuses informations sur la réponse cellulaire et/ou tissulaire. Elles peuvent en particulier être utiles pour mettre en évidence et identifier de nouveaux biomarqueurs, molécules dont la présence ou la concentra- tion dans le sang ou les urines pourrait signaler un événement ou un statut physiologique particulier, tel qu’une déficience ou un excès en AA [137]. Nous nous intéresserons plus particulièrement à la métabo- lomique pour la suite de cette partie.

1.2.5.1. La métabolomique

La métabolomique est une technique d’analyse physicochimique qui permet de mesurer des métabolites endogènes (lipides, sucres, nucléotides, acides aminés d’une taille inférieure à 3000 Da) de différentes voies biochimiques, et ainsi observer s’il y a une modification de ces biomarqueurs lors de certaines conditions physiologiques ou physiopathologiques. Contrairement au génome, qui est fixé, le métabo- lome est variable. Il associe une composante génétique et environnementale (prise de médicaments, contaminants, activité du microbiote, alimentation) et peut ainsi être modifié au fil du temps (Figure

14).

Les méthodes utilisées pour les analyses de métabolomiques sont la spectrométrie de masse (MS), et la Résonnance Magnétique Nucléaire (RMN) [138] :

- La Résonnance Magnétique Nucléaire : l’analyse par RMN est une méthode quantitative et qualita- tive donnant une information sur la structure des métabolites. C’est une analyse rapide, de l’ordre de la minute, facile à mettre en œuvre car la préparation des échantillons est très succincte [139]. Cependant, sa sensibilité est inférieure à celle de la spectrométrie de masse [140]. Elle permet de détecter seulement des métabolites très concentrés.

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Figure 14. Les « Omics » [138]

Elles comprennent la génomique, la transcriptomique, la protéomique, la métabolomique ou en- core la lipidomique. Elles comprennent la génomique, la transcriptomique, la protéomique, la métabolomique ou encore la lipidomique. La métabolomique est une technique d’analyse physi- cochimique qui permet de mesurer des métabolites endogènes (lipides, sucres, nucléotides, acides aminés d’une taille inférieure à 3000 Da).

- La spectrométrie de masse : elle détecte des fragments de métabolites selon leur rapport m/z, avec une sensibilité élevée [140]. La spectrométrie de masse est souvent couplée à la chromatographie, soit la chromatographie en phase gazeuse (GC-MS), soit la chromatographie en phase liquide (LC-MS) [139]. La technique de GC-MS nécessite une étape supplémentaire dans le prétraitement des échantil- lons pour les transformer en composés volatils, étape qui n’est pas possible sur des composés thermola- biles, qui devront donc être analysés par LC-MS.

Une fois les spectres obtenus grâce à la RMN ou la spectrométrie de masse, la seconde étape est celle du prétraitement des données [139]. Premièrement, le bruit de fond spectral est soustrait des données. Les signaux sont extraits et transformés sous forme de matrice. Chaque variable sera alors associée à un rapport m/z, à un temps de rétention et à une intensité [141].

La dernière étape est l’étape de discrimination des différentes variables grâce à des analyses statistiques multivariées [139,142]. L’analyse en composante principale, ou ACP, est régulièrement utilisée. Elle fait partie des analyses statistiques descriptives. Elle est sans a priori sur l’appartenance d’un échantillon à un groupe. Elle permet de visualiser la répartition des échantillons et de trouver des « clusters », et de dissocier ainsi différents groupes [141]. Une méthode qualitative peut également être utilisée pour dis- criminer des molécules, la méthode ICDA (Independent Component-Discriminant Analysis). C’est une méthode qui dérive de l’ICA (Independent Components Analysis) faisant partie des méthodes dites de « séparation aveugle de sources », car elle vise à extraire les signaux sources sous-jacents de la matrice ainsi que leurs proportions dans les mélanges. L’ICDA permet de prendre en compte l’information sur le modèle d’échantillon afin de renforcer la discrimination [143].

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D’autres méthodes, faisant parties des analyses statistiques explicatives, peuvent être utilisées. Notam- ment, la régression PLS (Partial Least Square ou Projection to Latent Structures), l’analyse discrimi- nante PLS (PLS-DA) et l’OPLS (Orthogonal Projection to Latent Structures) [141]. Ce sont des mé- thodes de régression qui tentent d’expliquer des variables (Y) par des variables (X). Ces modèles per- mettent de lier plusieurs variables entre elles. L’objectif est de calculer des variables latentes qui maxi- misent la variance extrait des deux matrices, et la corrélation entre les deux matrices.

1.2.5.2. Métabolomique et besoin nutritionnel

La majorité des études de nutrition repose sur des mesures de besoins nutritionnels moyens définis pour une population. Cependant, des facteurs environnementaux et génétiques induisent des différences inte- rindividuelles avec des besoins métaboliques propres à chacun. Les recommandations seraient d’autant plus efficaces si elles étaient appliquées individuellement. L’utilisation du profil métabolomique peut aider à déterminer les variations interindividuelles et ainsi émettre des recommandations plus ciblées [137], et notamment pour des populations spécifiques [144].

Les profils de métabolome dans les fluides biologiques ont déjà été utilisés avec succès comme biomar- queurs précoces de variations de processus et de dysfonctions métaboliques. L’étude de Fedry et al. a montré un lien entre un profil spécifique en biomarqueurs dans les urines et des dysfonctionnements métaboliques. Des souris dites résistantes à l’obésité, ont montré un taux d’acylglycine et de leucine particulièrement élevé dans les urines, par rapport aux souris sensibles à la prise de poids, avant l’expo- sition à un régime gras et cette différence se maintien lorsque les souris sont soumises à un régime riche en lipides [145].

La métabolomique a également été appliquée à la détermination du besoin en choline [146]. La choline est un nutriment essentiel pour lequel un adequate intake a été fixé par l’institut américain de médecine en 1998 à 550 mg/j pour les hommes, 425 mg/j pour les femmes adultes avec 450 mg/j durant la gestation et 550mg/j durant la lactation [147]. Les apports alimentaires en choline permettent la synthèse de phos- phatidylcholine, qui fait intervenir la phosphatidyléthanolamine-N-méthyltransférase (PEMT), enzyme qui est induite par les œstrogènes. Chez les femmes ménopausées, la concentration en œstrogènes étant faible, le faible apport en choline provoque des risques de dysfonctions et particulièrement des risques de stéatose hépatique. Afin de préciser la valeur du besoin en choline, les métabolites plasmatiques ont été analysés par métabolomique, chez des sujets soumis à une déplétion (<50 mg de choline/70kg/j) puis à une réplétion en choline (550-850 mg/70kg/j). Ces études ont permis d’identifier des biomarqueurs plasmatiques sensibles (choline, betaine, phosphatidylcholine, sphingomyeline, dimethylglycine, methylglycine, homocystéines et méthionine) pour la détection du besoin en choline. Cette approche a également été utilisée pour la détermination du besoin en choline chez des sujets présentant un poly- morphisme du gène codant la PEMT rs12325817le [148,149] et chez les femmes enceintes et allaitantes [150]. Ces travaux ont été pris en compte pour l’établissement de recommandations d’apport en choline

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par l’European Food Safety Authority (EFSA) en 2014 variant de 269 à 444 mg/j [151]. Ces recomman- dations sont de 480 mg durant la gestation et 520 mg durant la lactation et entre 269 à 450 mg chez les personnes âgés.

Certains métabolites plasmatiques ont également été mis en évidence en réponse à des régimes riches en leucine d’une part [152,153], et en méthionine d’autre part [154]. Une déficience peut également être signifiée par un métabolome spécifique. Wu et son équipe [155] a montré qu’une malnutrition protéino- energétique pouvait induire des modifications du profil métabolique dans les urines chez des rats. Après analyse par GC-MS et LC-MS, différentes voies métaboliques ont été affectées en réponse à une mal- nutrition protéique et énergétique. Ils ont observé une augmentation du niveau de créatine, thréitol, acide pyroglutamique et acide kynurénique, et une diminution du niveau d’acide succinique, d’acide cis-aco- nitique, d’acide citrique, d’acide isocitrique, d’acide thréonique, de triméthylglycine, d’acide N-méthyl- nicotinique ainsi que d’acide urique. L’altération de ces métabolites est associée à une modification du métabolisme énergétique, protéique, et lipidique en réponse à la malnutrition protéino-energétique. Le changement de concentration des AA plasmatiques après l’ingestion d’un repas à différents niveaux protéiques est connu. Une diminution mais également une augmentation de certains AA plasmatiques a été mise en évidence en lien avec une augmentation de l’apport protéique [156]. Le niveau d’AA plas- matiques ne reflète pas seulement l’apport net en AA alimentaires, mais la concentration finale de chaque AA est déterminée par différents facteurs incluant le catabolisme et le taux de transport entre les diffé- rents organes. Des études sur des animaux nourris avec différents régimes ont montré que l’apport ali- mentaire, et protéique, modulait les orientations et l’intensité des voies métaboliques [157–161] qui devrait donc être reflété par une concentration différente en métabolites plasmatiques ou urinaires. Ces différentes études montrent que l’analyse de biomarqueurs pourrait être appliquée à la détermination du besoin en AA, mais également à mieux comprendre le métabolisme des AA et leur implication dans diverses voies biologiques [162].

1.3. Impact de la déficience en protéines et acides aminés indispen-