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Une méthodologie qualitative et exploratoire

Dans le cadre de cette recherche, nous avons décidé d’opter pour une méthodologie qualitative, décrite dans la première partie, puis nous expliquerons la démarche exploratoire dans laquelle elle s’inscrit.

2.1. Des études qualitatives

Notre recherche mobilise une méthodologie qualitative, qui a pour objectif l’observation d’une situation pour faire ressortir un ou des phénomènes et les analyser. Cette méthode ne se définit pas par les données, du fait qu’elles peuvent être quantifiées, mais bien par sa méthode d’analyse qui n’est pas mathématique (Strauss et Corbin, 1990). Elle couvre une série

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de techniques de collecte et d’analyse de données (Mucchielli, 2011). La recherche qualitative emprunte à l’expérience de la vie quotidienne et au sens commun qu’elle tente, par la suite, de normaliser (Douglas, 1976). La réalité humaine devient alors l’objet de la connaissance (Anadon, 2006). La méthode qualitative se veut souvent naturaliste. Elle s’applique dans l’analyse des phénomènes considérés dans leur état naturel (Nguyên-Duy et Luckerhoff, 2006). Creswell (1998 : 14) résume et décrit cette forme de recherche comme ceci : « Les

écrivains conviennent que l’on entreprend la recherche qualitative dans un cadre naturel où le chercheur est un instrument de collecte de données qui rassemble des mots ou des images, leur analyse inductive, met l’accent sur la signification de participants, et décrit un processus qui est expressif et convaincant dans le langage ».

Nous avons fait le choix de la méthodologie qualitative, car cette dernière permet d’aller au contact des acteurs et d’ensuite construire une approche théorique (Dumez, 2011). Or, pour comprendre les différentes attentes des parties prenantes de ce travail de recherche, il est plus pertinent d’aller à leur rencontre afin d’échanger autour des sujets nous intéressant. De plus, si l’on compare avec les travaux sur l’expatriation (Cerdin, 2011 et 2012 ; Barmeyer et Davoine, 2012 ; Vignal, 2015 ; Walther et al., 2017), mobilité proche de la mobilité transfrontalière qui nous intéresse, la majorité se tourne vers la méthodologie qualitative afin de récolter des données dans un contexte précis (Dumez, 2011). Or, c’est justement ce contexte et ses possibles conséquences sur notre objet d’étude qui nous semble pertinent dans cette recherche.

Notre méthodologie qualitative s’inscrit dans une démarche exploratoire avec une association de raisonnements abductif et inductif. Une démarche exploratoire peut permettre de rendre plus valide un phénomène qui a déjà été plus ou moins défini. Elle peut également souscrire à la détermination du degré de recherche adapté afin de mener une étude plus ou moins étendue. La recherche exploratoire viserait alors à combler un vide, pour reprendre les termes de Van der Maren (1995). Elle peut aussi avoir lieu en amont de recherches qui nécessitent un minimum de connaissance pour se développer. Ainsi, la démarche exploratoire sert à constituer des connaissances sur des phénomènes inconnus (Trudel et al., 2006). L’abduction est un mode d’analogie mis en évidence par le philosophe C.S. Peirce. L’abduction désigne une manière de raisonner qui permet d’appréhender un phénomène ou une observation issus de

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faits spécifiques. Elle est la prospection des causes, ou d’une hypothèse explicative et n’oppose pas induction et déduction mais les unit dans une construction de connaissance (Catellin, 2004). L’abduction repose sur l’émission d’hypothèses quant aux causes possibles d’un certain phénomène observé (Locke K., 2010). Les hypothèses, ainsi déterminées, devront ensuite être testées, à travers une sévère critique théorique et des examens empiriques (Bhaskar, 1998). L’induction, quant à elle, part du cas particulier pour arriver à une généralité (Gohau, 1992). Elle correspond à la généralisation d’une série d’observations spontanées ou provoquées. Elle permet ainsi l’élaboration d’hypothèses à partir d’un nombre plus ou moins élevé d’observations. Néanmoins, cette conjoncture est également influencée par le savoir existant. Ainsi, les données produisent les connaissances (Anadon et Guillemette, 2007). Dans la partie suivante, nous expliquerons notre choix d’étude et de terrain ainsi que la méthodologie suivie pour chacune des études envisagées.

2.2. Une démarche exploratoire en trois parties

Notre recherche se tourne vers une démarche exploratoire en trois parties. Pour chacune de ces parties, une étude spécifique, sur un terrain donné, a été menée. Notre démarche est exploratoire puisque chacune de nos études se veut analytique et tend à apporter des variables, qui permettront de répondre à notre problématique générale. Nous avons fait le choix de ce type de démarche, puisque nous n’avions que peu d’éléments sur lesquels nous baser en amont de nos différentes études. Ainsi, adopter une telle démarche pour l’ensemble de la recherche a permis de produire des connaissances sur un objet de recherche encore peu étudié jusqu’alors : la gestion des carrières dans un contexte transfrontalier et trinational. Notre recherche s’appuie sur des études qualitatives. Ainsi, pour toutes, des entretiens semi- directifs ont été menés. Ce dernier tend à rassembler des données via des techniques de conversation qui permettent d’interroger les participants en face à face (ou à distance). L’entretien est alors structuré à l’aide d’un guide d’entretien, qui comprend les questions ouvertes ou une liste de thématiques à évoquer au cours de la discussion (Kohn et Christiaens, 2014).L’utilisation d’un tel procédé dans le contexte de notre recherche est justifiée puisque l’objectif est d’identifier les points de vue, les attitudes ou encore l’expérience des participants. Pour des raisons également pratiques, cette technique peut également être envisagée, car elle permet d’interroger des participants, qui ne peuvent potentiellement pas

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se déplacer par manque de temps ou de moyen (Kohn et Christiaens, 2014). Ainsi, les entretiens semi-directifs permettent aux participants de s’exprimer ouvertement, tout en laissant la certitude au chercheur d’aborder les différentes thématiques souhaitées.

Ces guides d’entretien ont chacun été élaborés selon une structure adaptée aux terrains de recherche et aux objectifs qui leur sont liés. Pour tous, une session sociographique a suivi les entretiens afin de récolter les données socio-professionnelles des participants. La durée moyenne des entretiens a été de 45 minutes et ils se sont déroulés à la fois en face à face et par téléphone. La plupart ont eu lieu en français, même si certains se sont faits en allemand. Ils ont ensuite été analysés soit par le biais d’une double analyse (horizontale et verticale) soit par le biais du logiciel NVivo.

2.2.1. Première partie : les attentes des travailleurs transfrontaliers français qui souhaitent faire carrière en Suisse

Dans cette première partie, nous nous sommes intéressés aux attentes des travailleurs transfrontaliers français à travers leurs trajectoires de carrière en Suisse. Pour trouver les participants de cette étude, nous nous sommes tournés vers 45 frontaliers français, qui, quotidiennement, traversaient la frontière franco-suisse pour se rendre sur leur lieu de travail. Tous travaillent dans la région bâloise de la Suisse alémanique. Notre échantillon est varié, puisqu’il est composé d’ouvriers (13), de professions intermédiaires (16) et d’employés (16). Nous avons une représentation de 16 femmes pour 29 hommes. Cette diversité et ce qu’elle apporte à cette recherche est rendue compte dans le chapitre 3, qui détaille cette première étude.

2.2.2.

Deuxième partie : les attentes des organisations suisses qui emploient des

travailleurs transfrontaliers français quant à la gestion de la carrière de ces derniers

Dans cette deuxième partie, nous nous sommes concentrés sur les attentes des organisations suisses à travers leur gestion des carrières des travailleurs transfrontaliers français. Ainsi, nos participants, au nombre de 20 (6 femmes et 14 hommes), étaient tous issus d’organisations nationales et internationales basées en Suisse alémanique. Ces participants ont des profils diversifiés (directeur général, manager, chasseur de têtes, responsable des ressources

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humaines). À travers ces différents profils, nous désirons exprimer les différentes gestions des carrières des travailleurs transfrontaliers par les organisations suisses. Ces différentes gestions sont décrites et expliquées dans le chapitre 4, qui retrace en détail cette deuxième partie.

2.2.3. Troisième partie : les attentes du marché de l’emploi transfrontalier quant aux compétences pour faire carrière

Dans cette troisième et dernière partie, nous nous sommes focalisés sur les compétences, puisque la carrière se base sur les compétences. Ainsi nous nous sommes centrés sur les compétences attendues sur le marché de l’emploi, dont les compétences interculturelles pour faire le lien avec le contexte transfrontalier. Nous avons élargi notre recherche à l’Allemagne, et donc à notre région transfrontalière du Rhin supérieur, à travers cette troisième étude. Nous souhaitons ajouter la dimension territoire aux attentes des différentes parties prenantes d’un contrat psychologique. Les 47 participants (26 femmes et 21 hommes) de cette étude sont des étudiants (13), des employés (14), des employeurs (13) et des institutions (8). Tous sont en lien avec le Rhin supérieur et le domaine de la gestion. Cette étude et ses résultats sont présentés dans le chapitre 5 de cette recherche.

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Dans l’encadré suivant, nous avons synthétisé la méthodologie de la recherche :

Notre recherche s’inscrit dans le courant du contrat psychologique, qui nous permet de concilier les attentes, à la fois, des travailleurs transfrontaliers français et celles des organisations suisses les employant. Ce courant nous donne également l’occasion d’ajouter le marché du travail transfrontalier comme élément externe à prendre en compte. Nous allons exposer notre choix dans la partie qui suit.

3. Le courant du contrat psychologique comme fil conducteur de cette