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Pour une définition générale du conte

2. Types de contes et richesse des corpus

Il existe différents types de contes, c’est la raison pour laquelle le finlandais AnttiAarne a mis en place une classification des nombreux contes collectés au cours du XIX éme siècle.Stith Thompson, un américain, va compléter ce travail, et aujourd’hui la classification Aarne-Thompson23, devenue internationale, comprend

23AnttiAerne, Stith Thompson, The Types of the Folk-Tale : A Classification and Bibliography, Academia ScientiarumFennica, coll. « Folklore Fellow’s Communications, 74 », Helsinki, 1928. 279 pages.

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2340 types de contes répartie en quatre catégories : les contes d’animaux, les contes merveilleux et religieux, les contes facétieux, et les conte à formules, souvent des randonnées ou des contes en chaine. Elle a permis, également, de mettre en place de nombreux catalogues et répertoires nationaux qui s’intéresse tant aux différentes versions qu’à la préservation d’un patrimoine24.Nous n’allons pas trop nous attarder sur cette classification, cependant nous nous intéresserons à quelques types de contes, classés et catégorisés selon leurs caractéristiques spécifiques, notre but est de montrer toute la richesse et la variété de ce genre littéraire, nous citerons quelques-uns:

- Les contes fantastiques : le fantastique est un genre littéraire fondé sur une fiction, qui mêle l’intrusion du surnaturel dans un cadre réaliste. Les personnages, autant que les lecteurs potentiels, sont mis face à dessituations ambiguës qui ne leur permettent pas de trancher sur la véracité ou la possibilité des évènements étranges qui leur sont racontés.Tzvetan Todorov, théoricien de la littérature, précise la définition du fantastique avec les termes suivants :

« Celui-ci (le fantastique), exige que trois conditions soient remplies. D’abord, il faut que le texte oblige le lecteur à considérer le monde des personnages comme un monde de personnes vivantes et à hésiter entre une explication naturelle et une explication surnaturelle des évènements évoqués. Ensuite cette hésitation peut être ressentie également par un personnage ; ainsi le rôle de lecteur est pour ainsi dire confié à un personnage et dans le même temps l’hésitationse trouve représentée, elle devient un thème de l’œuvre ; dans le cas d’une lecture naïve, le lecteur réel s’identifie avec le personnage. Enfin il importe que le lecteur adopte une certaine attitude à l’égard du texte : il refusera aussi bien l’interprétation allégorique que l’interprétation poétique »25

24 - Nous pourrons citer pour la France l’ouvrage de Paul Delarue, Le Catalogue raisonné du conte populaire français, Maisonneuve et Larose, 1951.

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Todorov se base sur l’hésitation du héros ou du lecteur entre une explication naturelle ou surnaturelle des évènements, négligeant ainsi les autres éléments aussi importants comme la peur par exemple, qui est pour le lecteur, l’élément essentiel de l’instauration d’une tension insoutenable, propre au fantastique. Autrement dit, le fantastique selon Todorov, est un genre qui sèmerait le doute provoqué par une hésitation due à un être ou à une idée ; et ce doute provoquerait une réponse impossible de malaise, d’angoisse, de folie ou enfin de mort. De cette manière Todorov remet en cause la définition de Roger Caillois, qui quant à lui considère que :

« Le fantastique manifeste un scandale, une déchirure, une

irruption insolite, presque insupportable dans le monde réel 26».

Caillois définit les éléments propres du fantastique en étant un monde réel, une

déchirure, un scandale, insupportable. Pour luitoute rupture avec la logique peut être

appelée un scandale. Toutefois, Caillois extériorise le fantastique tandis que pour Todorov, le fantastique fait appel à une dimension intérieure de l’homme, son hésitation réside dans sa propre idéologie, vision et perception du monde.

Les contes fantastiques développent des faits et des évènements surnaturels, inexplicables pour un esprit rationnel. Certains des personnages ou des objets décrits n’existent pas dans la réalité obéissant à des règles qui dépassent les lois de la réalité. Le fantastique est lié à une sorte de crispation causé par la rencontre de l’impossible, de l’irréel ou de l’illogique. Le personnage ou le héros fantastique a systématiquement une réaction de rejet, de refus ou de peur. Une peur généralement ressentie par le héros ou encore d’une volonté de l’auteur visant à installer une certaine angoisse chez le lecteur, néanmoins ce n’est pas une condition sine qua non du fantastique. C’est le cas de l’histoire du crayon magique, présentée dans le manuel scolaire, un crayon qui écrivait tout seul, celle du chêne de l’ogre, où le loup pouvait parler et chanter ou encore celle de Hensel et Greitel, l’histoire de deux enfants qui ont fait la rencontre d’une sorcière qui habitait une maison en pain d’épices. C’est en réalité une succession d’évènements fantastiques et imaginaires qui se trouvent uniquement dans le conte.

26 Caillois Roger, De la féérie à la science-fiction, Préface à l’Anthologie du fantastique, Edition Gallimard, Paris, 1996, p.8.

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- Le conte merveilleux décrit en général un récit, inspiré de faits merveilleux, fantastiques et légendaires, basé sur un folklore populaire.

Le conte merveilleux ou le conte de fées est un récit qui relate les aventures d’un personnage qui évolue dans un univers merveilleux et indéterminé. Dans ce genre littéraire interviennent des éléments surnaturels et féeriques (objets enchantés, animaux qui parlent, métamorphoses, etc.), des opérations magiques, des évènements miraculeux propres à enchanter le lecteur. Les personnages de ce monde nommés par la place sociale qu’ils tiennent (roi, servante, marchant,…), ou par un surnom les caractérisant (Blanche Neige, Barbe Bleue…) sont dotés de pouvoirs surnaturels et munies d’objets merveilleux tels qu’une baguette magique, une clé fée, un miroir magique ou encore une lampe merveilleuse. Ainsi, dans cet univers d’enchantement, tout est possible, une grenouille ou une gigantesque bête peut se transformer en un prince charmant, une citrouille peut se transformer en carrosse, une princesse peut dormir cent ans et se réveiller grâce à un baiser, nous pouvons voyager à cheval sur un rayon de lune,etc.

Le conte met souvent en scène des couples de personnages dont l'un est bon (les petits, les princes, les animaux…), l'autre est méchant (les ogres, les sorcières, les belles mères…). En règle générale, le bon finit par triompher.Le but premier du conte merveilleux est d’amuser. Les aventures invraisemblables, les personnages colorés, les lieux imaginaires, la perfection de l’amour, tout permet au lecteur de s’évader de la banalité (ou des difficultés) du quotidien .

Un schéma peut nous aider à mieux comprendre sa structure et son déroulement :

Condition (01) Aide(01)

Condition(02) Aide(02)

Con Condition(03) Aide(03) Situation initiale Un problème se pose Epreuve finale (03) Situation finale Dénouement résolution du problème

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Effectivement, un conte merveilleux commence par une situation initiale qui est déclenchée par un élément perturbateur, et se manifeste souvent par le départ du héros, qui va ensuite se retrouver dans des conditions, où il va tenter à plusieurs reprises de gagner de l’aide, qui se poursuit par une épreuve finale, cette quête permettra de rétablir la situation.

Le conte, un récit court, qui peut être sous forme de prose ou de vers, s’inspirant du merveilleux, fantastique, féerique et du mystère, laissant libre court à l’imaginaire et au rêve.

- Les contes étiologiques :

L'étiologie, un terme grec, signifiant « recherche, exposition des causes » concerne une école philosophique de l'Antiquité s'intéressant à l'étude des causes27.

Contes explicatifs, contes des origines, contes des « pourquoi », les contes étiologiques véhiculent, le plus souvent, une histoire qui donne une explication à un phénomène ou une situation dont nous ne maitrisons pas l’origine. Des récits qui racontent le pourquoi du comment des choses, du monde, soulignés généralement par le titre qui pose le problème, tels que : pourquoi la mer est salé ? Pourquoi les chats se lavent après ou avant de manger ?pourquoi les chiens n’aiment pas les chats ?Comment le soleil et la lune se sont éloignés de la terre ?

Dans Les Métamorphoses d'Ovide 28nous retrouvons des récits étiologiques qui expliquent l'origine merveilleuse de phénomènes naturels. Les Histoirescomme ça (1902), deRudyard Kipling, sont dans cette même optique. Le conte de

l’Enfantd’Eléphant explique de façon plaisante pourquoi les éléphants possèdent une

trompe en racontant comment un jeune éléphanteau s'est vu tirer sur son nez par un

27 Origine du terme étiologie, cité dans https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tiologie, site consulté le 28 février 2016.

28Les Métamorphoses d’Ovide sont un long poème épique latin composé de quinze livres dans lesquelles il a

réuni environ 250 mythes et légendes. L’œuvre décrit la naissance et l’histoire du monde gréco-romain jusqu’à l’époque de l’empereur Auguste. Elle a connu un énorme succès en racontant des histoires de transformation d’hommes, d’animaux, de plantes, etc.

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crocodile. Quand le serpent avait mille pattes et autres histoires farabuleusesd’Henriette Bichonnier donne une version humoristique de la formation

des piquants du hérisson, des cornes de la vache, etc.

Les contes étiologiques expliquent l’origine du monde, des paysages, de l’Homme, des animaux, des plantes…Pour définir ce genre de récits, Silvie Loiseau nous dira :

« (…) appelés plus familièrement les « pourquoi », les contes étiologiques portent explication de phénomène liés à la nature, sans aucune prétention de véracité les origines. »29

- Les contes philosophiques :

« Genre littéraire narratif né au XVIII eme siècle, le conte philosophique est en général un récit fictif inspiré de la forme traditionnelle du conte pour transmettre des idées et des concepts à portée philosophique 30». Genre satirique, au travers des personnages imaginaires venus d’ailleurs, son but est de peindre une critique de la société et du pouvoir, le plus souvent fustigé dans toutes ses dimensions (mœurs de vie mondaine/rurale, pouvoir politique, arts, intolérance religieuse). Ce genre est particulièrement utilisé par les philosophes des lumières, notamment par Voltaire dans Candide, ainsi que d’autres partisans de l’apologue, qui ont été de grands détracteurs de formes d’argumentations, les jugeant trop longues, ennuyeuses ; dans ce sens Voltaire déclare :

« Nous avons taché de joindre l’agréable à l’utile, n’ayant d’autre mérite et d’autre part à cet ouvrage que le choix. Les personnages de tout état trouveront de quoi s’instruire en s’amusant. »31

29 Silvie Loiseau, Les pouvoirs des contes, Edition, PUF, L’Educateur, Paris, 1992, p.96.

30 Les contes philosophiques, définition du Dictionnaire Larousse.

31 Voltaire, préface du Dictionnaire philosophique, 1765, cité dans Wiképedia.org. Conte philosophique, site consulté le 13 février 2016.

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La variété et la richesse des contes proposent des corpus à l’infini permettant ainsi à l’enseignant de puiser dans ce réservoir selon les besoins et les attentes des apprenants évitant ainsi d’installer l’ennui en classe.