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CHAPITRE I : LE SYSTEME CARDIORESPIRATOIRE

B) Troubles dépressifs

1) Généralités

La prévalence de l’épisode dépressif caractérisé au cours des douze derniers mois telle que mesurée dans le cadre du Baromètre Santé de l’INPES s’élevait en France, au début des

années 2000, à 7,5 % parmi les 15-85 ans (Chan Chee et al. 2011). Cette prévalence est

environ deux fois plus importante chez les femmes que chez les hommes. Elle est de 6,4 % parmi les 15-19 ans, 10,1 % parmi les 20-34 ans, 9,0 % parmi les 35-54 ans et 4,4 % entre 55

et 85 ans. La dépression est une maladie complexe aux symptômes multiples, qui peut par

exemple être induite par un dysfonctionnement du rythme circadien (Duffy et al. 2015) ou à la suite de certaines pathologies comme des fibromyalgies (Chang et al. 2015). Le diagnostic d’une dépression est établi uniquement sur la base des échanges verbaux intervenant entre le patient et son psychiatre, aucun marqueur biologique fiable et spécifique (autre que celui de stress) de la pathologie dépressive n’étant actuellement disponible.

Selon le DSM-5, les troubles dépressifs peuvent se présenter sous trois formes :

1°) Le trouble dépressif majeur, qui se caractérise par un ou plusieurs épisodes dépressifs majeurs. Selon les critères établis par le DSM-5, un épisode dépressif majeur est diagnostiqué

lorsque le sujet présente pendant une période d’au moins deux semaines une humeur dépressive quasi quotidienne et/ou une perte d’intérêt ou de plaisir (anhédonie) dans les activités quotidiennes. Il est avéré si, durant cette période, apparaissent au moins quatre des symptômes suivants :

- Modification significative du poids (> 5 % en un mois) ou de l’appétit - Perturbation quotidienne du sommeil (insomnie ou hypersomnie) - Agitation ou un ralentissement psychomoteur quasi-quotidien - Fatigue ou perte d’énergie quasi quotidienne

- Sentiments d’inutilité ou de culpabilité excessifs ou inappropriés quasi quotidiens - Diminution de la capacité à penser, à se concentrer, à décider quasi quotidienne - Pensées récurrentes de mort, de suicide, de tentative de suicide

2°) Le trouble dysthymique qui se réfère à un état dépressif plus léger, c'est-à-dire défini par la présence d’une humeur dépressive la plupart du temps pendant au moins deux ans, associée à des symptômes dépressifs qui ne remplissent pas les critères de l’épisode dépressif majeur. 3°) Les troubles dépressifs non-spécifiés qui désignent les troubles dont les symptômes dépressifs ne répondent pas aux critères de trouble dépressif majeur.

Ces symptômes ne sont pas imputables aux effets directs d’une substance (drogue ou médicament) ou à une affection médicale générale. Ils ne sont par ailleurs pas en relation avec un deuil, sauf s’ils persistent plus de deux mois après la perte d’un être cher et sont associés à un sentiment morbide de dévalorisation, à des pensées suicidaires, à des symptômes psychotiques ou à un ralentissement psychomoteur.

D’autres complications peuvent être observées lors d’un épisode dépressif mais non répertoriées dans le DSM-5, notamment au niveau somatique avec des altérations du comportement sexuel (baisse de libido, impuissance, frigidité), des troubles digestifs (diarrhée ou constipation, gastralgie) ou encore des troubles cardio-vasculaires (palpitations, bouffées vasomotrices, hypertension, tachycardie). De plus, cet épisode est associé à des difficultés cognitives incluant des déficits de concentration, d’attention et de mémoire (Pittenger and Duman 2007; Zakzanis, Leach, and Kaplan 1998). Les patients dépressifs ont la particularité d’avoir une hypoactivité de l’hippocampe accompagnée d’une diminution du volume de cette structure (Videbech and Ravnkilde 2004; McKinnon et al. 2009).

2) Pharmacothérapie

Plusieurs traitements sont à l’heure actuelle utilisés. La plupart d’entre eux vise le système monoaminergique. Les premiers traitements ont été élaborés dans les années 50 suite à des découvertes fortuites. L’imipramine constitue le premier antidépresseur tricyclique synthétisé qui agit, entre autres, en inhibant la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline. Bien que leurs cibles soient différentes, le mécanisme d’action de ces deux molécules vise à accroître la quantité des monoamines dans la fente synaptique (Leonard 1997; Svensson 2000), menant à la formulation de l’hypothèse monoaminergique dans la dépression. Selon cette hypothèse, la dépression résulterait d’une réduction de la disponibilité en monoamines (5-HT, noradrénaline et dopamine). Ainsi, de nombreux médicaments se sont développés à partir de cette hypothèse et constituent les traitements antidépresseurs majeurs prescrits aujourd’hui. Cependant, leur efficacité est souvent limitée car environ 30 % des patients ne répondent pas à ce type de traitement (Fava 2003). D’autre part, leur administration induit des effets secondaires indésirables importants (Nestler et al. 2002).

Les Inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO)

Il existe deux isophormes de monoamine oxydase (MAO), la MAO de type A (MAOA), préférentiellement exprimée dans les neurones catécholaminergiques et la MAO de type B (MAOB) synthétisée de manière majoritaire dans les neurones sérotoninergiques et dans les astrocytes. Elles dégradent par oxydation la sérotonine, la dopamine, la noradrénaline, et l’adrénaline (Youdim et al. 2006). Les inhibiteurs de ces enzymes (IMAO) conduisent donc à une augmentation de monoamines dans la fente synaptique. Les IMAO utilisés comme antidépresseurs regroupent des composés tels que l’iproniazide, la moclobémide ou encore la phénelzine, qui sont essentiellement des IMAOA ou des IMAO non sélectifs.

Les antidépresseurs tricycliques

Les antidépresseurs tricycliques sont des inhibiteurs non sélectifs de la recapture de la 5-HT, de la noradrénaline et de la dopamine. Tout comme les IMAO, ils augmentent donc dans la fente synaptique les concentrations de ces trois neurotransmetteurs. Ces molécules regroupent notamment l’imipramine, l’amitriptyline et la désipramine. (Frazer and Benmansour 2002; Gelenberg and Chesen 2000; Sechter 1995). Afin de palier les effets indésirables des IMAO au niveau des systèmes cardiovasculaire et endocrinien ainsi que des troubles sexuels (Sechter 1995), et d’améliorer l’efficacité des traitements antidépresseurs, de nouvelles classes de molécules plus sélectives ont été développées.

Les inhibiteurs sélectifs de recapture de la 5-HT (ISRS)

Des traitements plus spécifiques du système sérotoninergique ont été élaborés à la fin des années 1980 dont les plus prescrits sont la fluoxétine, dont le nom commercial est le Prozac®, et le citalopram. Leur sélectivité permet de réduire les effets secondaires des traitements précédents notamment sur le plan cardiovasculaire. Ils sont également prescrits dans le traitement des troubles obsessionnels compulsifs et des troubles de l’alimentation. En dehors du syndrome de sevrage lié à l’arrêt du traitement, le principal effet secondaire est le syndrome sérotoninergique caractérisé par divers symptômes neuropsychiques, neurovégétatifs et musculaires tels qu’une agitation, des myoclonies, une hyperréflexie, une forte sudation, des frissons, des tremblements, une diarrhée, une incoordination ou une hyperthermie (Sproule et al. 1997 ; Mégarbane and Delahaye, 2003).

Les inhibiteurs sélectifs de recapture noradrenaline (IRN) ou de la recapture associée de la 5-HT et de la noradrénaline (IRSN)

Les IRN, comme la réboxétine, bloque de manière sélective la recapture de la noradrénaline (Brunello et al. 2002). Les IRSN bloquent la recapture à la fois de la 5-HT et de la noradrénaline. Parmi ces molécules, on distingue le venlafaxine, le milnacipran ou la duloxétine (Zerjav, Tse, and Scott 2009).

Antidépresseurs atypiques

Une autre classe d’antidépresseur, dite « atypique », a été développée plus récemment. Ces composés agissent indirectement sur la disponibilité en monoamines en empêchant leur recapture pré-synaptique et donc entraînant une augmentation synaptique de ces derniers. Parmi eux, on peut notamment citer les antagonistes d’autorécepteurs adrénergiques tels que la miansérine (Millan 2006). D’autres molécules ont un spectre d’action plus vaste, comme la mirtazapine qui possède le même mécanisme d’action que la miansérine, auquel s’ajoute un effet sur la voie sérotoninergique, en bloquant aussi les récepteurs sérotoninergiques 5-HT2A, 5-HT2C, 5-HT3 (Croom et al. 2009; Leinonen et al. 1999). De même, plusieurs molécules, comme la néfazodone ou l’étopéridone, sont à la fois des antagonistes des récepteurs 5-HT2A

ou alpha1 adrénergiques ainsi que des inhibiteurs de la recapture de la 5-HT, de la noradrénaline ou de la dopamine. L’agomélatine, dont le nom commercial est le Valdoxan®, constitue une nouvelle alternative récemment étudiée dans le traitement de la dépression (AFSSAPS, 2010). Ce composé est à la fois un agoniste des récepteurs de la mélatonine (MT1 et MT2) et un antagoniste des récepteurs sérotoninergiques 5-HT2C. Ainsi, il normalise les rythmes circadiens et améliore la qualité du sommeil, en synchronisant le cycle

veille/sommeil, (Dugovic et al. 1989; Srinivasan et al. 2012). Il a par ailleurs une affinité négligeable vis-à-vis des autres récepteurs ou transporteurs, limitant ses effets secondaires (Srinivasan et al. 2012).