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Méthodes d’analyse de la VFC (i) Domaine fréquentiel

CHAPITRE I : LE SYSTEME CARDIORESPIRATOIRE

D) Variabilité de la fréquence cardiaque

2) Méthodes d’analyse de la VFC (i) Domaine fréquentiel

L’analyse fréquentielle permet de décomposer le signal de la VFC en domaine de fréquence à partir d’une transformée de Fourier. L’analyse par transformée de Fourier est une méthode objective qui n’implique aucune perte d’information (Aubert et al. 2003), car il existe une relation directe entre le signal de départ et le spectre de fréquence obtenu après la transformation mathématique. La transformation de Fourier consiste à décomposer une fonction selon ses spectres de fréquences. Cette analyse spectrale permet de déceler les différentes fréquences d’oscillation d’un rythme, représentées sous la forme d’une densité spectrale en fonction de la fréquence. La puissance spectrale dans une bande de fréquence donnée peut être quantifiée en intégrant l’aire sous la courbe. Sa représentation graphique, présente en abscisse une échelle de fréquence, et en ordonnée, un nombre proportionnel à l'amplitude de l'oscillation (ms2/Hz) (Figure 8). A partir de ce spectre de fréquence, trois bandes de fréquences sont communément définies : VLF (very low frequency), LF (low frequency) et HF (high frequency). Chez l’homme, VLF est compris entre 0 et 0.04 Hz, LF entre 0.04-0.15 Hz et HF entre 0.15-0.4 Hz (Aubert et al. 2003).

Figure 8: Spectre de densité obtenu à partir de l’intervalle RR d’un ECG

Les fluctuations de la bande VLF ont une origine probablement multifactorielle (thermorégulation, système rénine angiotensine, système sympathique).

Les fluctuations de la bande LF pourraient être en relation avec les ondes de Mayer, mais l’interprétation en est controversée. L’onde de Mayer est de nature vasomotrice, donc sympathique, et certains auteurs relient donc ces oscillations à l’activité sympathique uniquement (Pagani et al. 1986). Néanmoins, pour certains auteurs, elles représenteraient un amalgame d’activités sympathique et parasympathique contrôlant le nœud sinusal (Pomeranz et al. 1985; Persson et al. 1992; Houle and Billman 1999). En effet, les oscillations présentes dans la bande LF sont partiellement abolies par l'atropine et les bêtabloquants. Il apparait toutefois que la bande LF apparaisse augmentée par divers évènements extérieurs comme le stress (mental ou physique) ou les états positionnels (debout/couché), et seraient notamment la conséquence d’une hyperactivité sympathique induite en partie par la réduction du baroréflexe (Robbe et al. 1987) .

Les fluctuations de la bande HF sont sous influence de la respiration (et sont décrites comme l’arythmie sinusale respiratoire ou ASR) et traduisent les variations du tonus vagal exercé sur le nœud sinusal en réponse à la stimulation lors de l'inspiration des récepteurs intrapulmonaires sensibles à l'étirement (réflexe de Bainbridge, voir chapitre I, paragraphe III)). Ces oscillations sont abolies par l'atropine. Ainsi, HF est considéré comme étant le reflet de l’activité parasympathique sur le cœur (Montano et al. 2009) par l’intermédiaire du nerf vague (Porges 1995).

Le rapport LF/HF est quant à lui un indice très utilisé pour évaluer la balance sympatho-vagale. Comme décrit ci-dessus, LF est sous influence mixte sympathique et parasympathique et HF uniquement parasympathique, donc le ratio LF/HF est souvent décrit comme un bon indice de l’activité sympathique. Mais les conclusions amenées par l’analyse de ce paramètre doivent être prises avec prudence, et doivent être corrélées avec l’analyse des bandes LF et HF elles-mêmes (Shaffer et al. 2014). En effet le ratio dépend bien sûr de chaque bande, et une augmentation du ratio qui ne dépendrait que de la baisse de HF, par exemple, n’indiquerait pas une augmentation de l’activité sympathique mais une réduction du tonus vagal uniquement.

(ii) Domaine Temporel

L'analyse dans le domaine temporel repose sur des paramètres statistiques assez simples mais ne renseigne pas sur la chronologie de ces valeurs ni sur leur nature périodique ou aléatoire. Les variables dérivées directement de la mesure des intervalles RR :

- NN (normal to normal) : intervalle entre 2 battements cardiaques

- SDNN : déviation standard de l’intervalle RR sur toute la période d’enregistrement, standard deviation of all NN intervals) qui renseigne sur la variabilité globale. Elle corrèle avec la VFC totale.

Les variables dérivées de la différence entre les intervalles R-R :

- NN50 : nombre d’intervalles RR successifs différant de plus de 50 ms

- SDSD : déviation standard de la différence entre les intervalles RR successifs

- pNN50 : NN50 divisé par le nombre total d’intervalles, exprimant la variabilité de haute fréquence principalement d’origine parasympathique, modulée par la respiration - RMSSD : moyenne quadratique des intervalles R-R successifs, exprimant la variabilité

de haute fréquence d’origine parasympathique mais ne serait pas le reflet de l’influence respiratoire (Shaffer et al. 2014). Cette mesure est préférable à pNN50 et à NN50 d’après la Task Force (Task Force, 1996). Elle corrèle avec HF (Shaffer et al. 2014).

Comme il y a une corrélation entre SDNN et RMSSD, ces deux indices sont les mesures recommandées par la Task Force pour étudier la VFC. Ces deux indices temporels sont donc les plus utilisés dans les études portant sur la réponse cardiaque à la stimulation du système nerveux autonome.

(iii)Analyse géométrique

Des transformations mathématiques peuvent également être réalisées afin d’étudier les intervalles R-R sur 24h. C’est une approche alternative qui est basée sur l'analyse géométrique en créant l’indice triangulaire de la VFC (indice de St George) (Task Force, 1996 ; Malik and Camm 1990). Les intervalles NN sont comptabilisés par des histogrammes dont la base fait 7,8 ms. Un triangle est adapté à chaque histogramme par la méthode des moindres carrés. Deux mesures sont alors effectuées : la largeur du triangle en millisecondes, et l’indice triangulaire de la VFC qui est défini par le ratio du nombre total d’intervalles sur le nombre d’intervalles compté dans la tranche modale. Cet indice est fortement corrélé avec l'indice SDNN. Cette technique a l'avantage d'être moins sensible aux complexes ectopiques et aux erreurs de détection et donc de réduire la nécessité d'une édition précise (la classification des différents complexes QRS) de l'ECG ambulatoire.

(iv) Analyse non-linaire : Poincaré

La méthode consiste en l’application de techniques mathématiques complexes dérivées de la théorie du chaos. Cette théorie est habituellement employée pour analyser des phénomènes physiologiques très irréguliers mais qui ne sont pas aléatoires (Task Force, 1996). La construction des diagrammes de Poincaré représente une méthode simple consistant à tracer les points correspondant à chaque espace R-R d’un enregistrement Holter ECG de 24h, en fonction de son intervalle précédent sur un graphique. Ainsi, l’acquisition d’une figure, comparée à une comète ayant une grosse extrémité supérieure et une extrémité inférieure plus allongée peut être établie. A partir de ce graphe, SD1,2 peut être calculé selon l’équation suivante ; SD1,2 = SD1/SD2 (Figure 9, SD1 est le petit axe et SD2 le grand axe de l’éclipse). SD1 est l’indice de variabilité à court terme, reflet de l’activité parasympathique sur le nœud sinusal. SD2 est l’indice de variabilité à long terme et reflète à la fois l’activité sympathique et parasympathique sur le nœud sinusal. On peut également obtenir les indices SD1nu et SD2nu, qui correspondent aux indices SD1 et SD2 en unité normalisée, car ils prennent en compte l’évolution de la FC de repos (Tulppo et al. 1998).

Figure 9: Analyse de la variabilité de la fréquence cardiaque par la méthode de Poincaré

La VFC apporterait des indices fiables dans plusieurs champs du domaine médical tels que les réponses physiologiques liées aux émotions ou au stress. La VFC serait un bon prédicteur de risque cardio-vasculaire et de mortalité.