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1. Données générales

Définition a.

Le traumatisme crânien (TC) est une atteinte traumatique de l’extrémité encéphalique provoquée par le contact brusque entre le tissu cérébral et la boîte crânienne entraînant l’arrêt brutal de certaines fonctions cérébrales (Brin et coll., 2004).

Épidémiologie b.

En France, le traumatisme crânien est considéré comme la plus fréquente affection du système nerveux central acquis de l’adulte. Effectivement, l’incidence annuelle des TC en France est évaluée à 281 pour 100 000 habitants (soit 155 000 personnes chaque année) contre 500 pour 100 000 habitants aux Etats-Unis (Corrigan et coll., 2010) ou 91 pour 100 000 en Italie (Yates, et coll., 2006). Ces disparités d’incidences ont des causes diverses : hétérogénéité du

36 type de recueil de données, prévention sur la sécurité routière… On retrouve trois pics d’incidence liés à l’âge : enfants jeunes de moins de 5 ans, adultes jeunes âgés de 15 à 24 ans et adultes de plus de 75 ans. De plus, de manière générale, les hommes sont deux fois plus touchés que les femmes (Corrigan, et coll., 2010), sauf après 75 ans.

2. Principaux troubles pouvant influencer les capacités langagières

Troubles cognitifs a.

Différents troubles cognitifs sont rapportés dans la littérature :

- Troubles mnésiques : Les troubles mnésiques concernent la majorité des patients victimes de TC. On distingue deux types de troubles : l’amnésie post-traumatique et les déficits mnésiques séquellaires. Suite à une période de coma, la personne ayant subi un traumatisme crânien vit une période d’oubli complet de tous les événements ayant eu lieu depuis le début du coma. Cette période d’amnésie rétrograde durera jusqu’à la régression complète de la confusion. Il s’agit d’une amnésie post-traumatique (APT). Une fois la période d’APT révolue, des troubles mnésiques peuvent cependant perdurer, notamment au niveau de la mémoire épisodique (Azouvi, Belmont, 2010) Ces troubles mnésiques sont à mettre en lien avec les troubles attentionnels ainsi qu’un trouble des fonctions exécutives.

- Troubles de l’attention et ralentissement de la vitesse de traitement de l’information : Selon Azouvi (Azouvi, 2009), 30 à 50 % des traumatisés crâniens sévères se plaignent de difficultés de concentration et d’attention. Ces difficultés de concentration pourraient être dues à un déficit attentionnel. Cependant, toutes les composantes attentionnelles ne sont pas touchées de manière égale : l’attention sélective et l’attention divisée sont les plus déficitaires. Ces troubles se manifestent fréquemment au quotidien. On note, par exemple, que les personnes ayant subi un TC peuvent éprouver des difficultés à suivre une conversation entre plusieurs interlocuteurs (Lubinski et coll., 1996). Les traumatisés crâniens montrent également une plus grande lenteur dans l’exécution des tâches, que celles-ci soient simples ou complexes, automatiques ou contrôlées (Leclerq et coll., 1999). Cette lenteur serait due à une vitesse de traitement de l’information réduite qui engendrerait une chute de l’attention divisée. - Troubles des fonctions exécutives : Comme nous l’avons vu dans le paragraphe

concernant les fonctions exécutives, celles-ci sont en partie sous le contrôle des lobes frontaux (Meulemans, et coll., 2004), fréquemment lésés lors de TC. Les principaux

37 troubles des fonctions exécutives concernent l’initiative, le contrôle, l’organisation des stratégies, la sélection d’éléments pertinents, l’abstraction, la conceptualisation, l’inhibition et la flexibilité mentale. Ces perturbations engendrent donc de grandes difficultés au quotidien et ne sont pas sans conséquence dans la réinsertion professionnelle.

Modifications du comportement et de la personnalité b.

Les émotions et le comportement siègent dans des régions cérébrales telles que le lobe frontal et le système limbique, souvent lésés par des traumatismes crâniens. Il paraît donc logique de mettre en lien traumatisme crânien et troubles du comportement et de la personnalité. Cohadon (Cohadon, 2000) met même en avant que 50 % des patients traumatisés crâniens présenteraient des troubles du comportement.

Dès 1995, Bergego et Azouvi (Bergego, Azouvi, 1995), relèvent la présence de troubles comportementaux et émotionnels chez les personnes ayant subi un traumatisme crânien : « irritabilité, intolérance à la frustration, labilité de l’humeur, régression affective et comportementale, émoussement affectif, perte d’initiative et d’intérêt, trouble de l’appréciation de soi, dépression… ». L’origine de ces troubles peut être organique et/ou psychogène. Il existe deux types de troubles : des troubles sur le versant de l’inhibition et des troubles sur le versant de la désinhibition. Chez les patients inhibés, on relève généralement un manque d’initiative, une aboulie, une apathie, une aspontanéité et parfois un apragmatisme. Tandis que chez les patients désinhibés, on note une impulsivité, une distractibilité et une intolérance à la frustration et à la contrariété.

Dépression c.

La dépression est un des troubles de l’humeur les plus fréquemment rencontrés chez un sujet ayant souffert d’un traumatisme crânien. La dépression serait fortement associée à la perception et à la conscience des séquelles présentes après un traumatisme crânien (Wilz, 2007). De plus, Levin (Levin et coll., 2001) a souligné que la dépression aurait des répercussions sur la cognition dans le cas d’un traumatisme crânien.

Troubles du langage et du langage élaboré d.

Après un TC, seuls 5 à 11 % des patients présentent une aphasie (Mazaux et coll., 1997). Ces aphasies, le plus souvent de type anomique ou sensoriel (Heilman et coll., 1971), sont causées

38 par des contusions localisées engendrant des lésions focales des aires du langage de l’hémisphère gauche.

En phase d’éveil, une période de mutisme peut parfois être observée chez les patients traumatisés crâniens. Ce mutisme peut être accompagné ou non d’un trouble de l’incitation verbale. On peut également retrouver des atteintes qualitatives de l’expression plus ou moins importantes se traduisant, par exemple, par une logorrhée ou une jargonaphasie.

Sortis de la phase d’éveil, la plupart du temps, les patients traumatisés crâniens présentent peu ou pas de troubles significatifs de type aphasique. Pourtant, en situation écologique, les patients traumatisés crâniens peuvent présenter des troubles globaux de la communication, trop fins pour être décelables à l’aide de batteries aphasiologiques classiques. Ces troubles, affectant la cohérence du récit, laissent à l’interlocuteur une impression de bizarrerie (Basso, 1995). Nous pouvons les classer dans les troubles pragmatiques du langage. Ces troubles sont très invalidants au quotidien et ont de grandes conséquences sur les relations familiales, sociales et professionnelles. Ces troubles seraient liés à des troubles des fonctions exécutives (Cohadon et coll. 2008).

Les troubles rencontrés par les patients traumatisés crâniens peuvent être les suivants :

- Troubles du discours : Le discours est caractérisé par un manque d’informativité (Plantier 1996) comprenant de nombreuses lapalissades, des lieux communs et des formules toutes faites. Le discours peut également être marqué par une tendance à la digression ainsi que des difficultés prosodiques. Sont également observées des difficultés d’organisation du discours (Chaume, Violland, 2001).

- Troubles du comportement au sein de la communication : On note un non-respect des tours de parole et des remarques socialement inadaptées. On peut également observer des difficultés au niveau du comportement non verbal au travers des gestes, des mimiques et du regard (Soriat-Barrière et coll., 2011).

- Troubles de la communication : Ils peuvent se manifester par des tours de parole non respectés, une mauvaise interprétation des signes verbaux et non-verbaux, un excès de familiarité et des problèmes de distance à l’autre (Gratier, Morel, 2008)

- Troubles de la fluence verbale : On retrouve fréquemment une plainte évoquant un manque du mot (Soriat-Barrière et coll., 2011).

- Troubles de la pragmatique du discours et troubles de la formulation : Ces troubles sont caractérisés par des difficultés à comprendre l’humour (Bibby, Mc Donald, 2005), l’ironie, l’implicite et les métaphores ainsi que des difficultés d’organisation logique du

39 discours (Gratier, Morel, 2008). Ceci peut être en lien avec un défaut de flexibilité d’interprétation ainsi qu’un défaut des mécanismes de déduction.