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B. La réussite aux différentes épreuves

5. Les processus exécutifs

L’épreuve de fluence a.

Avec une moyenne de 23,87 mots pour les sujets cérébrolésés âgés de 40 à 59 ans contre 30,73 pour la population témoin, cette épreuve est significativement moins bien réussie par le groupe de sujets cérébrolésés (p = 0,001). Par ailleurs, la décroissance du pourcentage de mots produits n’est pas aussi importante que dans le cas de la population témoin au fur et à mesure des intervalles :

- 27 % des mots sont produits dans l’intervalle 0-30 secondes (contre 37 % pour la population témoin)

- 27 % des mots sont produits dans l’intervalle 30-60 secondes (contre 25 % pour la population témoin)

- 22 % des mots sont produits dans l’intervalle 60-90 secondes (contre 20 % pour la population témoin)

- 24 % des mots sont produits dans l’intervalle 90-120 secondes (contre 18 % pour la population témoin).

Bien que la première minute soit effectivement plus productive que la seconde, les performances semblent assez stables sur les deux derniers intervalles.

149 Sur le plan qualitatif, les erreurs les plus fréquentes concernent des intrusions de pièces de la maison, d’éléments du jardin ou encore d’éléments architecturaux. Ceci souligne que la représentation de la « maison » n’est pas la même pour tous : certains y incluent le jardin et le garage, dépassant ainsi le terme de « maison » au profit du terme de « propriété ». Les sujets ont aussi fréquemment répété des éléments déjà donnés, ce qui pourrait être en lien avec des difficultés mnésiques ou attentionnelles. La grande majorité des sujets a fait appel aux images mentales. En effet, l’utilisation d’un thème aussi large et en lien avec le quotidien facilite l’utilisation des représentations mentales.

Ces résultats sont significativement similaires à ceux obtenus par les sujets cérébrolésés âgés de 20 à 39 ans (p = 0,528).

L’épreuve de concaténation de phrases ou création de phrases b.

Les résultats de cette épreuve ne mettent pas en évidence de différence significative entre le groupe de sujets cérébrolésés et de sujets témoins (p = 0,116). Bien que la moyenne ne soit pas excessivement élevée (13,87 sur 20), 10 % des sujets saturent l’épreuve. Les items 1, 3 et 4 sont réussis par plus de 80 % des sujets. En revanche, il n’en va pas de même pour l’item 2 qui, comme pour la population témoin, est échoué par une grande majorité des sujets (73,3 % des sujets). Ceci est expliqué par le fait que cette phrase comporte une complexité lexicale importante, deux mots sur trois ayant des homonymes (certain et voie), ainsi qu’une complexité syntaxique avec la proposition d’un verbe à l’infinitif (attendre). L’orthographe de ces mots et de leurs homonymes était souvent méconnue des sujets et leurs sens confondus. Le verbe a également très souvent été modifié et conjugué malgré la consigne imposant aux sujets de ne pas modifier l’orthographe des termes. Cette précision n’a été que rarement assimilée. De plus, pour l’item 2, les liens entre les mots et le contexte sont moins évidents à trouver. Ainsi, les erreurs les plus fréquemment rencontrées sont des erreurs de construction syntaxique, des omissions ou des transformations des mots imposés.

L’aide contextuelle prévue a rarement été apportée, les sujets n’en ayant pas l’utilité. Ce type d’aide ne s’est donc pas montré efficace.

Les fonctions exécutives au travers du récit c.

Cette épreuve évaluant les aspects exécutifs essentiels pour l’élaboration d’un récit est significativement moins réussie par les sujets cérébrolésés âgés de 40 à 59 ans que par la

150 population témoin (p = 0). En effet, cette épreuve est réussie par 70,6 % des sujets cérébrolésés et par 83,6 % des sujets de la population témoin. Les principales difficultés rencontrées par les sujets cérébrolésés portent sur l’anticipation avec notamment l’utilisation de la conclusion ainsi que sur la planification (structure du récit et cohérence). Les résultats de cette épreuve sont souvent en corrélation avec les résultats de l’évaluation cognitive de nos sujets.

Comme pour le groupe témoin, l’anticipation de la conclusion constitue le problème le plus fréquemment rencontré par les sujets cérébrolésés. En revanche, ces difficultés ne portent pas sur la position de la conclusion mais sur l’utilisation qui en a été faite par les sujets. En effet, la plupart des sujets n’ont utilisé que partiellement les informations apportées par la conclusion pour construire leur récit.

Comme nous l’avons souligné précédemment, les sujets cérébrolésés ont produit des récits significativement plus courts que ceux de la population ou du groupe de sujets cérébrolésés âgés de 20 à 39 ans. Dans la plupart des cas, cela est dû à un non-respect de la consigne temporelle. Cependant, dans certains cas (6 patients sur 30), le récit, bien que durant une minute, était composé de nombreux temps de latence. De ce fait, les récits produits sont pauvres en informations concernant le personnage principal, les personnages secondaires ainsi que les cadres temporel et géographique. Par ailleurs, les récits peuvent alors perdre en cohérence. Il pourrait donc être intéressant de proposer une comptabilisation des temps de latence.

L’épreuve d’analyse de différences d.

Les résultats de cette épreuve ne mettent pas en avant de différences significatives entre les résultats obtenus par les sujets cérébrolésés et ceux obtenus par la population témoin (p = 0,194). Les résultats sont répartis de manière très hétérogène.

Les items les moins réussis sont les items 4 (43,3 % de réussite) et 10 (25 % de réussite). En ce qui concerne l’item 10, les difficultés sont en lien avec une méconnaissance du sens des mots (voir et apercevoir) et non avec un problème de mise en rapport, de pertinence des différences. Pour l’item 4, les sujets ont éprouvé de grandes difficultés à expliciter les différences entre ces deux items, et ce malgré le recours aux gestes afin de faciliter l’expression.

Il nous semble que l’exemple donné en début d’épreuve a pu induire en erreur certains patients. En effet, l’exemple présente deux items (manteau et collier) dont la différence réside dans la catégorie sémantique (vêtement et bijou). Ceci permet donc d’introduire le premier

151 item dont la différence réside à nouveau dans la catégorie sémantique. En revanche, dès le deuxième item, certains sujets se sont retrouvés perdus et ont eu du mal à rebondir, malgré le rappel de la consigne. Il pourrait donc être intéressant de proposer un deuxième exemple, plus représentatif de ce qui est demandé dans cette épreuve.

L’épreuve d’émission d’hypothèse e.

L’analyse statistique met en avant une tendance à la significativité en ce qui concerne les différences observées entre le groupe de sujets cérébrolésés et le groupe témoin. Les taux de réussite restent cependant très élevés avec 82 % pour le groupe de sujets cérébrolésés et 90 % pour le groupe témoin. Les items 2, 3 et 5 sont particulièrement réussis avec des taux de réussite supérieurs ou égaux à 90 %. Les items 1 et 4 ne sont réussis que par 66,7 % des sujets. En ce qui concerne l’item 1, le dialogue entre les différents personnages semble avoir été mal compris. Les sujets ne sont pas parvenus à déterminer l’intentionnalité des sujets et ont donc eu de grandes difficultés à prévoir ou à expliquer les actions des personnages. Comme l’ont défini Premack et Woodruff (Premack, Woodruff, 1978), ceci témoigne de difficultés en termes de théorie de l’esprit et de pragmatique.

Ces résultats sont significativement similaires à ceux obtenus par les sujets cérébrolésés âgés de 20 à 39 ans (p = 0,292).