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Partie II : étude des phénomènes couplés chimie/transport dans une fissure

1. Etat de l’art

1.2. Le transport dans une fissure

Il existe deux mécanismes physiques de transport effectifs dans une fissure simple (Bodin et al., 2003a pour une revue) :

- l’advection correspondant aux mouvements du soluté suivant une vitesse de fluide moyenne,

- la diffusion résultant de l’agitation moléculaire. Un déséquilibre de concentration dans un fluide au repos induit un mouvement brownien des particules jusqu’à l’atteinte de l’équilibre.

Dans une description 2D simplifiée du transport, l’intégration transverse va donner lieu à la dispersion hydrodynamique. Cette dernière est liée aux hétérogénéités des vitesses locales du fluide, à toutes les échelles. Les deux mécanismes énoncés précédemment jouent conjointement pour contribuer à ce phénomène.

Dans une cellule Hele-Shaw classique (enceinte de deux plaques parallèles où l’écoulement de Poiseuille est valide), l’annulation de la vitesse au niveau des parois (variation de la vitesse dans le plan normal aux parois) induit une dispersion. Taylor (1953) et Aris (1956) sont les premiers à étudier ce phénomène, qui est appelé dispersion de Taylor. Ils démontrent que cette dispersion est très importante à de forts nombres de Péclet (voir paragraphe § 1.2.3). Dans une fissure dont les surfaces sont parallèles et lisses, la dispersion de Taylor et la diffusion moléculaire longitudinale sont les seuls mécanismes effectifs de dispersion.

La prise en compte de la variation de l’ouverture dans une cellule de type Hele-Shaw met en évidence trois types de régimes : diffusif, géométrique et de Taylor. Le régime géométrique, correspondant à une relation linéaire entre le cœfficient de dispersion et la vitesse convective, est associé aux perturbations initiées par la rugosité de la surface des parois (variation spatiale de la vitesse dans la direction parallèle aux parois). L’étude expérimentale de Ippolito et al. (1994) démontre que les régimes de dispersion géométrique et de Taylor se superposent. La rugosité de surface introduit un désordre (en 2D) dans le plan parallèle aux surfaces des fissures mais elle n’induit pas de migration du traceur dans le plan perpendiculaire aux surfaces. Ce régime de dispersion se révèle être le plus significatif pour de nombreuses applications pratiques et en particulier pour l’écoulement dans une fissure.

Plusieurs régimes de dépendance de la dispersion avec l’intensité de la convection ou le nombre de Péclet ont été constatés (voir paragraphe § 1.2.3). Chaque régime de dépendance est relatif à un régime de dispersion.

La théorie classique de la dispersion est fondée sur le modèle Fickien. Elle prévoit une dispersion locale indépendante du trajet parcouru ou du temps. Or, cette caractéristique n’est pas souvent vérifiée dans le cas d’un milieu fissuré. Même à l’échelle d’une fissure, le coefficient de dispersion peut augmenter avec la distance de migration, au-delà des limites fixées par la théorie. Ce régime est qualifié de dispersion anormale. Roux et al. (1998) et Plouraboué et al. (1998) ont étudié numériquement la dispersion dans des fissures, dont les surfaces présentent un caractère self-affine. Leurs travaux semblent indiquer qu’il existe un lien entre la dispersion anormale et la formation de chemins préférentiels d’écoulement.

1.2.2. Mise en équation du transport

Les différents mécanismes présentés précédemment sont à l’origine de flux de matière. L’équation de conservation de la masse du soluté transcrit l’influence de ces derniers sur les profils de concentration, via l’équation suivante :

0 ) J J ( t c disp adv i       Eq. II - 9

avec ci correspondant à la concentration en une espèce chimique i (mol.m-3) et Jadv , Jdisp

représentant respectivement les flux advectif et dispersif (mol.m-3s-1).

Les flux se définissent également par rapport à la concentration en soluté dans la solution : - le flux advectif est donné par : Jadv u.ci ; u est la vitesse moyenne d’écoulement du

fluide (m.s-1),

- le flux dispersif est donné par :

J

disp

-Dc

i ; D est le coefficient de dispersion (m2.s-1). Ce coefficient est en fait un tenseur, présentant des composantes longitudinale DL (dans le sens de l’écoulement) et transverse DT (perpendiculairement au sens de

l’écoulement).

L’équation Eq. II – 9 s’exprime donc sous la forme simplifiée de l’équation d’advection dispersion bien connue :

i 2 i i c D c u. t c       Eq. II - 10

Les équations II - 9 et II - 10 ne sont valables que dans le cas d’un transport non réactif d’un élément chimique ou une espèce chimique, celle-ci faisant intervenir la spéciation de l’élément. Une récente revue est proposée par Bodin et al. (2003b) sur le formalisme mathématique à adopter pour décrire le transport de soluté dans une fissure.

1.2.3. Le nombre de Péclet : caractérisation du transport

Le nombre de Péclet caractérise le transport du soluté en comparant les mécanismes convectif et diffusif : m C m D L U c D c u     Pe Avec :

- U : une vitesse représentative de l’écoulement (m.s-1). - Lc : une longueur caractéristique (m).

- c : la concentration du soluté (mol.m-3) - Dm : la diffusion moléculaire (m2.s-1)

Le nombre de Péclet détermine si le transport des solutés est assuré essentiellement par la diffusion (Pe <<1) ou par l’advection (Pe >> 1).

La dimension caractéristique considérée pour une fissure est généralement définie comme l’ouverture moyenne a (Mourzenko et al., 1995b ; Detwiler et al., 2000), ce qui conduit à la relation suivante :

m

D U

a Pe 

Des études expérimentales (Ippolito et al., 1994 ; Detwiler et al., 2000) et théorique (Roux et al., 1998) mettent en évidence l’existence de trois régimes distincts de dispersion, caractéristiques de dépendances spécifiques du coefficient longitudinal de dispersion en fonction du nombre de Péclet (Pe), donc également de la vitesse convective. Pour de faibles valeurs de Pe (Pe << 1), la diffusion moléculaire prédomine et DL Pe0 (donc indépendante de la vitesse u); pour des valeurs intermédiaires de Pe, la dispersion géométrique prédomine et

Pe

DL  (proportionnel à la vitesse); et pour de grandes valeurs de Pe, la dispersion de

Taylor prédomine et DL Pe2 (quadratique en vitesse).